C. LES DÉPENSES RELATIVES AU DÉVELOPPEMENT DE LA VIE SOCIALE

L'agrégat " développement de la vie sociale " forme un ensemble assez hétérogène qui regroupe des dépenses de nature diverses.

Il comprend notamment l'action en faveur des droits des femmes (72 millions de francs en 1998), les subventions aux établissements de formation des professions sociales (537,2 millions de francs en 1998), les bourses aux étudiants en travail social (324 millions de francs en 1998) et les crédits destinés aux objecteurs de conscience (118 millions de francs en 1998).

Cette année, votre rapporteur a souhaité mettre l'accent en particulier sur deux catégories des dépenses visées dans cet agrégat qui sont intéressantes du point de vue du souci d'une bonne gestion.

1. La dérive préoccupante de la dotation relative aux tutelles et curatelles d'Etat

Une dérive préoccupante s'instaure sur la dotation relative aux tutelles et curatelles d'Etat ( chapitre 46-23, article 60 ) qui passe de 435,5 à 515 millions de francs en 1998, soit une mesure nouvelle d'ajustement de 80 millions de francs environ, ce qui représente une hausse de 18 %.

La loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs a institué trois régimes de protection des majeurs incapables qui se sont substitués aux régimes antérieurs tels que l'interdiction judiciaire ou le conseil judiciaire.

Il s'agit des régimes :

- de la sauvegarde de justice , régime de protection provisoire, destiné à prendre en urgence les mesures de sûreté indispensable ;

- de la tutelle , système de représentation dans lequel le majeur est frappé d'incapacité totale pour agir tant sur le plan patrimonial que dans le domaine de la vie civile ;

- de la curatelle , régime plus simple de protection, où le juge des tutelles peut limiter l'incapacité à certains actes et autoriser le majeur à en accomplir d'autres.

Deux systèmes de tutelle coexistent dans notre droit :

- la tutelle familiale qui fait reposer la charge tutélaire sur la famille, parents, enfants, collatéraux ;

- la tutelle publique qui consiste à confier à un organisme public ou privé ou à une personne physique la charge de la tutelle, sous le contrôle de l'Etat. La tutelle de l'Etat, la curatelle d'Etat et la tutelle en gérance appartiennent à cette catégorie.

Le décret n° 85-193 du 7 février 1985 a instauré une rémunération du tuteur ou du curateur d'Etat reposant à titre principal sur les ressources du majeur protégé et complétée sous certaines conditions par une rémunération financée par le budget de l'Etat.

L'arrêté du 15 janvier 1990 pris pour l'application de cette disposition prévoit des taux de participation progressifs applicables sur trois tranches de revenu au-dessous d'un rapport fixé par rapport au montant brut du SMIC majoré de 75 %, soit 11.661 francs. Au-dessus de ce montant, l'Etat n'assure aucun financement, mais le juge des tutelles peut autoriser des prélèvements supplémentaires si l'importance des biens à gérer le justifie.

Les conditions du transfert à l'Etat de la tutelle sont ainsi, en principe, très strictes : le vide de la famille restreinte et de la famille étendue doit être constaté (majeurs protégés n'ayant plus de famille ou membres de la famille demandant à être dispensés des charges tutélaires en raison d'un des motifs énumérés à l'article 428 du code civil : âge, maladie, éloignement, occupations professionnelles ou familiales exceptionnellement absorbantes, ...).

En réalité, on constate, depuis une dizaine d'années, une tendance de certains juges des tutelles à écarter la famille même dans des cas où les membres de celle-ci ne font pas preuve d'indifférence à l'égard de la protection de la personne .

Ainsi, le nombre brut de création de nouvelles mesures a été de 17.191 en 1996, soit 25,5 % d'augmentation du nombre de mesures en un an.

La Cour de cassation a ainsi été conduite à censurer certaines décisions de justice qui n'avaient pas tenu compte de la volonté de la famille d'assurer la charge de la tutelle ni constaté l'impossibilité de réunir un conseil de famille.

Les crédits prévus en loi de finances initiale pour 1998 s'élèveront à 515 millions de francs, ce qui devrait permettre d'assurer le financement des 87.400 mesures existantes et celui de nouvelles mesures que créeront les juges au cours de l'année 1998.

Votre commission s'est inquiétée de la forte progression non maîtrisée des dépenses de tutelle et de curatelle.

Si devait être créé de manière quasi systématique le principe d'une aide financière au conseil patrimonial et social auprès des personnes âgées à domicile, il s'agirait à l'évidence d'une question de société, qui ne saurait être décidée sous la seule impulsion des instances judiciaires et devrait relever d'un examen par le Parlement.

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