B. LES NOUVEAUX PROFESSIONNELS DE L'ARME AÉRIENNE
En 2002, l'armée de l'air devra avoir recruté plus de 10 000 jeunes professionnels destinés à remplacer les appelés. La professionnalisation a donc engendré un nouveau profil de carrière militaire courte, celle des militaires techniciens de l'air (MTA).
1. Quelle modalité de substitution aux appelés ?
Pour compenser la diminution progressive des appelés,
l'armée de l'air doit être à même de les remplacer
dans les diverses tâches de soutien qu'ils avaient à
exécuter. Le fait de bénéficier pour au moins 4 ans
-durée du premier contrat- de personnels stables permet de donner une
formation adaptée au métier choisi, et également de faire
mieux qu'un remplacement nombre pour nombre, au demeurant irréalisable,
entre un appelé et un militaire technicien de l'air.
L'extrême dissémination des appelés dans toutes les bases
aériennes et dans toutes les unités de chaque base rend la
transition assez complexe à mettre en oeuvre. C'est à chaque fois
le fonctionnement des structures de chaque base qu'il convient de revoir. Pour
préparer au mieux cette phase délicate, 3 bases aériennes
ont été mises d'emblée en situation de
professionnalisation totale. Chacune de ces bases avait une
spécialité particulière : Colmar, qui met en oeuvre des
escadrons de combat, Ambérieu, spécialisé dans le support
technico-opérationnel, enfin la base école de Cognac.
Le tableau ci-après précise les modalités de remplacement
des appelés par des MTA, du personnel civil et des appelés-futurs
volontaires.
Droits 1996 |
Droits 1997 |
||||
Appelés |
MTA |
Civils |
Appelés |
Total |
|
Colmar |
477 |
204 |
45 |
38 |
287 |
Ambérieu |
267 |
119 |
30 |
26 |
175 |
Cognac |
410 |
181 |
41 |
28 |
250 |
2. La population recherchée pour les MTA
L'armée de l'air a recruté 1 800 MTA en
1997, elle devrait en recruter 2 160 en 1998. Compte tenu des tâches
qu'elle est à même de proposer aux candidats, l'armée de
l'air a déterminé un profil-type : les postes sont
proposés à des candidats entre 17 et 25 ans, hommes ou femmes,
ayant un acquis professionnel pratique, directement exploitable, sans longue
phase de formation, d'où un recrutement parmi les jeunes se situant
entre le CAP et le bac professionnel.
L'objectif est également de recruter les futurs MTA dans le bassin
géographique où se trouve leur future base d'affectation.
- Le métier proposé
Les MTA se voient proposer une des 23 spécialités suivantes dans
des emplois de soutien qui ne requièrent pas une formation
complémentaire importante.
Spécialités
Securité cabine |
Agent d'opérations |
Mise en oeuvre avion |
Standardiste |
Agent de télécommunication |
Fusilier commando(1) |
Armement |
Conducteur de chiens (1) |
Electrotechnicien |
Agent de surveillance |
Mécanicien véhicule |
Opérateur sol-air |
Conducteur routier |
Agent paysagiste |
Mécanicien atelier |
Entretien des installations |
Pompier |
Agent bureautique |
Magasinier |
Agent de restauration |
Sapeur génie |
Auxiliaire sanitaire |
(1) Ces spécialités ne sont pas accessibles aux
personnels féminins.
Une formation militaire de base de 6 semaines, dispensée au centre de
formation des MTA situé à Saintes, est sanctionnée par la
délivrance d'un certificat militaire élémentaire.
La formation professionnelle proprement dite est ensuite dispensée en
deux périodes allant de 1 à 3 semaines, en fonction de la
spécialité choisie :
- une période d'instruction théorique
- une période d'application pratique de deux mois au sein de
l'unité où ils ont été affectés.
La période de stage professionnel est sanctionnée par un
certificat d'aptitude à l'emploi de technicien (CAET),
délivré par le commandant de la base.
Les MTA sont recrutés sur un premier contrat de 4 ans, renouvelable une
fois. La durée maximale est donc de 8 ans, exceptionnellement 11ans. La
solde mensuelle évolue entre 5 700 et 7 000 F selon les grades et
l'ancienneté. Il s'y ajoute une prime d'engagement de 7 000 F au titre
du premier contrat et une indemnité de départ correspondant
à 24 mois de solde, dès lors que les départs interviennent
entre 8 et 11 ans.
Au cours de cette période, le MTA peut, selon sa façon de servir
être nommé à la distinction de 1ère classe
(après 2 années de service), au grade de caporal (après 3
années), voire à celui de caporal-chef (après 5
années), si les conditions requises sont réunies. Enfin, certains
des MTA peuvent se présenter aux concours internes ou externes
(après 5 années de service) de recrutement de sous-officiers.
- Une reconversion préparée
Au moment de quitter l'armée à l'issue de son contrat, le MTA
peut bénéficier des dispositifs de reconversion prévus
pour les militaires de carrière. Par ailleurs, l'armée de l'air a
mis en place un dispositif d'enseignement et de formation pour l'insertion
(DEFI) afin de préparer le retour du MTA dans le secteur civil, ceci en
coopération avec les acteurs locaux et régionaux de l'emploi.
La campagne de recrutement, sur le plan quantitatif, peut être
appréciée positivement. Sur 4 900 candidatures recensées,
dont 3 300 déclarées recevables, 900 ont fait l'objet d'un
recrutement et 720 candidats sélectionnés sont en attente de
recrutement. Sur cette population dont la moyenne est de 20 ans, 75 % sont
titulaires d'un diplôme de type CAP, BEP ou bac professionnel et le taux
de féminisation atteint 30 %.
Cela étant, l'Armée de l'air a du rapidement réadapter
pour les MTA un dispositif d'instruction qui avait fait ses preuves pour des
appelés dont nombre d'entre eux détenaient un diplome
d'enseignement supérieur, mais qui s'est avéré très
décalé par rapport à la nouvelle population
d'engagés. A une période de formation théorique a donc
été substituée une immersion rapide sur le terrain et une
formation pratique.
L'Armée de l'air est donc souvent conduite , à partir de jeunes
gens en situation d'échec scolaire, à engager un travail de
formation, d'insertion, d'adaptation à une vie professionnelle qui,
dépassant les enjeux strictement militaires, lui donne une
responsabilité sociale et humaine beaucoup plus large. C'est, de l'avis
de votre rapporteur, avec cette redéfinition du lien entre la jeunesse
et l'armée, l'un des acquis importants de la professionnalisation.
3. Le recrutement difficile des civils
La loi de programmation militaire prévoit
l'augmentation de 1 825 postes de personnel civil pour l'armée de l'air
en 6 ans. Pour l'exercice 1998, l'armée de l'air est autorisée
à recruter 223 civils. Parmi les emplois de soutien que les civils
seront amenés à occuper, les domaines sont fort
diversifiés. Pour les fonctionnaires et assimilés : finances,
comptabilité, informatique, gestion du personnel, domaine juridique et
contentieux, communication. Les ouvriers se voient proposer les secteurs du
bâtiment, du génie civil, les services du commissariat
(laboratoire), de la mécanique, à travers les ateliers de
réparation et la logistique.
En termes statutaires, ce personnel recouvre plusieurs catégories : les
fonctionnaires recrutés sur concours -externe ou interne ; les ouvriers
spécialisés recrutés sans qualification spécifique
et les ouvriers professionnels (CAP ou BEP) ; les contractuels enfin qui, selon
qu'ils ont été recrutés avant ou après 1984
bénéficient ou non de la garantie de l'emploi.
La gestion du recrutement de personnels civils est réalisée sous
contraintes : géographique en premier lieu. Ainsi les personnels civils
provenant d'établissements restructurés font-ils l'objet d'un
recrutement de proximité par les structures d'accueil voisines.
Certaines bases, proches d'établissements restructurés sont donc
favorisées -c'est le cas de Cognac qui a pu honorer, dans le cadre de la
professionnalisation totale, 99 % de ses postes. Les difficultés sont en
revanche réelles pour les autres bases, notamment celles du Nord et de
l'Est, éloignées des sites -où se trouvent les principaux
effectifs en surnombre de la DCN, voire d'autres établissements de la
DGA-, sachant par ailleurs que les postes vacants sont gelés,
précisément dans l'attente du reclassement de personnels issus
des établissements de la DGA en cours de restructuration.
Pour toutes ces raisons, le sous-effectif en personnel civil -essentiellement
en ouvriers d'Etat- devrait être de 12 % fin 1997.
Votre rapporteur entend suivre avec attention l'évolution de cette
question qui risquerait de mettre en cause la démarche -très
délicate- de professionnalisation des bases.
4. Des craintes liées au dispositif de report pendant la période de transition
La récente loi portant réforme du service
national a prévu un dispositif destiné à permettre aux
jeunes gens exerçant une activité professionnelle de
bénéficier de reports d'incorporation renouvelables pouvant
conduire de fait à une exemption de l'obligation militaire qui ne
s'achèvera officiellement qu'en 2002. L'Armée de l'air se verra
ainsi privée d'une ressource importante en appelés,
déficit qui n'a pas été planifié dans la gestion
prévisionnelle des effectifs effectuée sur la base de la loi de
programmation.
L'Armée de l'air risque donc d'être conduite à
accélérer le recrutement des MTA afin de pouvoir faire face
à cette nouvelle donnée. Les premières estimations, encore
évidemment imprécises, évaluent à 3 000
appelés la ressource annuelle, principalement en 1998 et 1999, qui
viendrait à manquer à l'Armée de l'air en application de
cette mesure. Fonctionnellement, la perte de ressources de 3 000
appelés devrait être compensée par un recrutement
correspondant de 970 MTA en 1998. A enveloppe budgétaire constante, il
ne serait possible d'en recruter que 270, soit un déficit de 700 MTA en
1998. Surtout, en 1999 et toujours à enveloppe constante, le coût
des recrutements supplémentaires réalisés en 1998
produisant encore ses effets, il ne serait possible d'en recruter qu'une
centaine, portant dès lors le déficit à plus de 1 600 MTA
en 1999. Votre rapporteur souhaite vivement que cette nouvelle contrainte soit
financièrement prise en compte, faute de quoi le fragile
équilibre de la transition vers une armée
professionnalisée risquerait d'être compromis.