CHAPITRE IV -
LES AUTRES ACTIONS COMMUNES
I. LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT
Avec plus de 29,6 milliards de francs prévus pour 1998,
le budget de la Délégation générale pour l'armement
représente à lui seul plus de la moitié des crédits
de l'ancienne section commune. Ce chiffre ne saurait cependant résumer
à lui seul la place de la DGA au sein du ministère de la
Défense. En effet, au travers des programmes d'armement dont elle suit
le déroulement, elle est appelée à gérer environ 80
% des crédits d'équipement de la Défense. C'est dire son
rôle pivot tant sur le plan budgétaire qu'au regard de la
satisfaction des besoins exprimés par les états-majors et du
devenir des industries de défense.
Il était par conséquent logique que la DGA se trouve au coeur de
la réforme des armées et de la politique de défense, tout
particulièrement dans un contexte de restrictions budgétaires
incitant à rechercher une réduction du coût des programmes
d'armement.
Votre rapporteur évoquera la mise en oeuvre de la réforme de la
DGA puis l'avenir de ses structures industrielles ainsi que de ses centres
d'expertise et d'essais, avant de commenter l'évolution des
crédits qui lui sont affectés en 1998.
A. UNE RÉFORME AXÉE SUR LA RATIONALISATION DE LA CONDUITE DES PROGRAMMES D'ARMEMENT
L'année 1997 a été marquée par la mise en oeuvre de la refonte institutionnelle de la DGA, autour d'un objectif ambitieux : renforcer la cohérence et réduire les coûts des programmes d'armement. Elle a vu également se poursuivre les efforts de la DGA pour renforcer la coopération européenne en matière d'armement.
1. La refonte institutionnelle de la DGA
Le décret du 17 janvier 1997 a mis en place la nouvelle
organisation institutionnelle de la DGA :
.
les
directions chargées des programmes
, jusqu'alors
réparties par " milieux " (terre, air, mer, espace) ont
été remplacées par
trois directions agissant ensemble
pour assurer la cohérence de la préparation et de la conduite des
programmes
: la direction des systèmes de forces et de la
prospective, qui pilote les actions de recherche, conduit les
développements technologiques communs, prépare les programmes et
conduit ceux relatifs aux missiles stratégiques et aux moyens
d'observation, de télécommunications et de renseignement ; la
direction des systèmes d'armes, qui conduit les programmes terrestres,
navals, aéronautiques et de missiles tactiques ; la direction des
programmes, des méthodes d'acquisition et de la qualité, qui
regroupe les compétences nécessaires pour mener à bien
les programmes (achat, qualité, maintien en condition
opérationnelle, etc ...).
.
les
activités industrielles, d'expertise et d'essais,
ont été nettement séparées et relèvent
de trois structures : la direction des centres d'expertises et d'essais, le
service de la maintenance aéronautique et la direction des constructions
navales, désormais entièrement vouée à ses
tâches industrielles, les tâches étatiques et les personnels
les exécutant relevant du service des programmes navals de la direction
des systèmes d'armes.
.
la politique industrielle et la coopération relèvent de
la direction de la coopération et des affaires industrielles alors que
le contrôle et la promotion des exportations sont assurés par une
direction des relations internationales.
.
les tâches d'organisation sont dévolues à la
direction de la gestion et de l'organisation et à la direction des
ressources humaines
Au terme de l'année 1997, la nouvelle organisation devra être
définitivement mise en place et les modes de fonctionnement ainsi que
les objectifs à moyen terme devraient être définis.
2. Un objectif ambitieux : accroître la cohérence et réduire les coûts des programmes d'armement
La DGA a engagé au cours de l'année les
premières mesures visant à renforcer la cohérence et
à réduire les coûts des programmes d'armement.
Le
renforcement de la cohérence des programmes d'armement
trouve
sa traduction dans plusieurs innovations.
Tout d'abord, l'
approche
par grandes fonctions militaires
(par
exemple : commandement, conduite, communications, renseignement)
ou par
grandes missions
(par exemple : frappe dans la profondeur, maîtrise
du milieu aéroterrestre, du milieu aéronautique, du milieu
aérospatial, mobilité stratégique et technique) est
désormais privilégiée. Elle présente un fort
caractère interarmées et permet de mieux mesurer la
complémentarité des différents systèmes, en vue
d'une cohérence d'ensemble. La DGA utilise désormais la notion de
" système de forces " et a créé dans cette
perspective la fonction nouvelle d'" architecte " de système
de forces " disposant d'un homologue opérationnel dans les
états-majors. Leur rôle consiste à analyser la
cohérence et l'opportunité du lancement des nouveaux programmes,
et à veiller, pour les programmes existants, à la
cohérence d'ensemble de leur déroulement, sur le plan des
échéances, du financement et des caractéristiques
techniques.
La DGA élabore ensuite un
plan prospectif à 30 ans,
en
s'appuyant notamment sur ces architectes de système de forces. Le plan
prospectif doit éclairer les choix sur les armes futures, définir
les nouveaux types d'armement à développer à cet horizon
ainsi que les technologies nécessaires.
Enfin, une importante refonte du traitement des
études amont
a
été opérée. Les crédits correspondants ont
été pour l'essentiel regroupés sous le contrôle de
la DGA. Les études-amont seront orientées en fonction du plan
prospectif à 30 ans et un plan d'études amont sera établi
en vue de mieux les adapter aux besoins futurs et de permettre une utilisation
plus optimale de leurs résultats par les utilisateurs.
En ce qui concerne le
coût des programmes
, l'objectif d'une
réduction de 30 % a été affiché, ce chiffre devant
être entendu comme représentant l'économie à
réaliser sur un programme défini mais dont la réalisation
n'a pas commencé. Les méthodes retenues consistent à
limiter le besoin de matériel et de système " au juste
nécessaire " pour l'exécution des missions des forces
armées, à utiliser dans la mesure du possible les normes, les
technologies et les standards civils, à renforcer la compétence
d'acheteur des cadres de la DGA, à réduire les délais de
développement, à recourir plus fréquemment à la
concurrence et à fixer aux industriels des objectifs de
productivité volontaristes, mais aussi à accroître la
politique des commandes pluriannuelles.
Lors de son audition par la commission, le délégué
général pour l'armement a précisé que sur la
centaine de programmes d'armement en cours, 78 avaient été
placés sous contrôle de gestion en vue d'obtenir un coût
inférieur à celui prévu lors de l'adoption de la loi de
programmation. L'objectif fixé est de réaliser 85 milliards de
francs d'économies sur les programmes se déroulant sur la
période de la planification, c'est-à-dire d'ici 2015. Selon le
délégué, les négociations avec les industriels et
les révisions de spécifications admises par les
états-majors auraient d'ores et déjà permis d'assurer
27,6 milliards de francs d'économies
sur ces programmes,
dont
7,4 milliards de francs identifiés sur la période de la
programmation
(1997-2002) et le restant sur la période 2002-2015.
3. Le renforcement de la coopération européenne
Le renforcement de la coopération européenne
constitue également l'un des objectifs majeurs de la DGA, à la
fois pour satisfaire les besoins croissants d'interopérabilité
des équipements et pour réduire le coût des programmes pour
les budgets nationaux tout en offrant un marché plus vaste aux
industriels européens.
Dans ce domaine, les évolutions ne peuvent être que lentes et
progressives.
La création, le 12 novembre 1996, de l'organisation conjointe de
coopération en matière d'armement (OCCAR) par l'Allemagne, la
France, l'Italie et le Royaume-Uni constitue à ce titre un
élément très positif. Cette organisation, ébauche
d'un agence européenne d'armement, entend favoriser une meilleure
complémentarité technologique et industrielle entre les pays
concernés et dépasser la notion de " juste retour "
industriel, apprécié programme par programme, au profit d'un
" juste retour " globalisé sur plusieurs années et sur
plusieurs programmes.
Dans un premier temps, les programmes de missiles Milan, Hot, Roland et
d'hélicoptère Tigre, issus de deux bureaux de programme
franco-allemands, seront rattachés administrativement à l'OCCAR.
Pourraient également être concernés ultérieurement
les programmes de radar de contrebatterie Cobra, le véhicule
blindé VBCI, le satellite de télécommunications Syracuse
III et éventuellement, si la coopération se confirme, les
programmes Hélios II et Horus.
L'OCCAR dispose déjà d'une structure réduite (30
personnes) installée à Bonn et dirigée par un
Français. Son fonctionnement implique qu'elle soit dotée de la
personnalité juridique, ce qui n'est pas encore le cas, afin qu'elle
puisse passer directement des contrats et recevoir des engagements pluriannuels
de la part des Etats.