CHAPITRE II -
LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS
I. LES INSTANCES DU MOUVEMENT CONSUMÉRISTE
LE MOUVEMENT CONSOMMATEUR EN CHIFFRES
4.000 permanences locales à travers tout le pays.
500.000 heures de permanence par an.
150000 heures de représentation dans 27000 réunions des instances
nationales et locales
Plus de 100 essais comparatifs par an.
Plus d'un million de litiges et mécontentements par an.
Emissions télévisées : deux fois par semaine sur France 2
et France 3 : " Consomag ", plus de 10 millions de
téléspectateurs chaque semaine, et
" Décodages ", émissions régionales (5 millions
de téléspectateurs chaque semaine).
Magazine " 60 millions de consommateurs " et
" Que Choisir
? "
A. LES ASSOCIATIONS AGRÉÉES DE CONSOMMATEURS
1. Leur statut et leurs missions
Les associations de consommateurs sont constituées
d'après la loi de 1901.
Les articles L. 421-1 et suivants du code de la consommation et le
décret du 6 mai 1988 définissent
les règles
d'agrément
de ces associations : elles doivent justifier d'une
année d'existence, d'une activité effective et publique dans le
domaine de la consommation, ainsi que de 10.000 adhérents. Elles
doivent être indépendantes de toute forme d'activité
professionnelle. L'agrément permet, notamment, d'exercer en justice les
droits reconnus à la partie civile dans les affaires où un
préjudice est porté à l'intérêt des
consommateurs.
19 organisations nationales de consommateurs sont actuellement
agréées. Cette diversité est liée à leurs
différences d'origine, d'histoire et de culture. Il convient par
ailleurs de noter que certaines organisations, plus généralistes,
mais ayant un rôle et une activité de défense de
consommateurs, ont été contraintes de se constituer en
association, afin d'obtenir une reconnaissance institutionnelle et une
subvention leur permettant de répondre à leurs missions.
Votre commission a parfois souligné le caractère
éclaté du mouvement consumériste français. Votre
rapporteur pour avis, loin d'y voir un éparpillement des actions, note
que cette diversité peut constituer une richesse et une diversité
intéressante des approches. Ce sentiment est renforcé par
l'étroite et la fructueuse collaboration dont font preuve les
associations sur de nombreux sujets.
Votre rapporteur pour avis souhaite également noter que les associations
consuméristes agréées ont une charge de travail
considérable. Leurs représentants siègent dans des
instances multiples, tant au niveau national qu'au niveau départemental.
A ce titre, elles souhaiteraient que ce rôle soit reconnu par un
" statut " d'élu social qui leur permettrait d'exercer ces
différentes représentations dans de meilleures conditions.
LES ASSOCIATIONS AGRÉÉES DE
CONSOMMATEURS
ADEIC-FEN
|
Association
d'Education et
d'Information du Consommateur de
l'Education nationale
|
Les associations de consommateurs ont principalement deux
missions :
-
l'aide au consommateur individuel
, par l'accueil, l'information,
le règlement des litiges. Toutes les associations tiennent des
permanences, elles participent aux procès où
l'intérêt des consommateurs est en jeu ;
-
la représentation des consommateurs
, auprès des
pouvoirs publics ou des professionnels. Cette concertation est notamment
institutionnalisée au sein du Conseil National de la Consommation.
Mais les associations agréées participent également
à de multiples instances nationales (environ 100) telles que la
Commission de la Sécurité des Consommateurs, la Commission des
clauses abusives, le Conseil national du crédit. Elles interviennent
dans la certification des produits industriels et des services, dans la lutte
contre le surendettement et dans la promotion de la qualité (notamment
par la normalisation et la labellisation). Elles sont
représentées à la Commission nationale d'équipement
commercial, au Comité national de l'euro et dans de nombreuses autres
instances.
Au niveau local, les associations agréées sont
représentées dans une vingtaine d'instances
départementales telles que la Commission de surendettement, la
Commission départementale d'équipement commercial, la Commission
de conciliation des loyers, etc...
2. Un financement public qui se stabilise
Avec une dotation stabilisée à 40 millions dans le projet de budget pour 1998, le soutien de l'Etat aux associations de consommateurs stagne, après une réduction longue de cinq années . Après avoir doublé de 1988 à 1991, les aides aux organisations consuméristes n'ont en effet cessé de décroître, comme l'illustre le graphique suivant, qui retrace l'évolution des crédits adoptés en loi de finances initiale depuis 1982 :
Pour 1998 : crédits demandés dans le projet
de loi de finances
Votre rapporteur pour avis note avec une relative satisfaction qu'il semble
être mis fin à des baisses brutales telle que celle qui a
été observée en 1997 (- 28 %). Il ne s'agit
toutefois là que d'un bien maigre bilan...
...D'autant que les Gouvernements ont coutume de réduire, au cours de
l'exécution budgétaire, le soutien qu'ils s'étaient
pourtant engagés à fournir aux associations au moment du vote de
la loi de finances initiale, reprenant ainsi d'une main ce qu'ils
s'étaient engagés, auprès de la représentation
nationale, à donner de l'autre.
En effet, les régulations budgétaires ont eu
un effet
largement amplificateur
de l'effondrement des crédits de subvention
aux associations, comme le montre le graphique suivant :
Ainsi en 1997, au lieu des 40 millions de soutien
annoncés par le Gouvernement et votés par le Parlement, les
associations n'ont-elles en réalité pu disposer que de
38 millions de francs
. La régulation a donc amputé de
5 % les crédits de ce chapitre budgétaire.
Mais comme en 1996 la régulation avait été encore plus
importante (portant sur 14 % des crédits), la baisse
" réelle ", en exécution, entre 1996 et 1997 a
été de 19,4 % -et non de 28 %, chiffre qui
représente l'écart des crédits votés entre les lois
de finances initiales-.
La régulation budgétaire n'a pas cessé, depuis quelques
années, d'amputer les crédits destinés au mouvement
consommateur, même dans les périodes (1994 à 1996
notamment) où la stagnation des crédits votés pouvait
donner l'impression d'une stabilité du soutien de l'Etat.
Votre commission dénonce de telles pratiques qui enlèvent
largement de sa portée au vote du budget par la représentation
nationale.
3. La répartition inégale du financement public
Les subventions accordées aux différentes
associations se répartissent de la façon suivante :
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
|
ADEIC-FEN
|
909.370
|
500.652
|
374.013
|
331.700
|
300.029
|
256.608
|
324.547
|
Source : Ministère de l'Economie, des Finances et de
l'Industrie
Les associations qui ont reçu en 1997 les subventions les plus
importantes sont, dans l'ordre décroissant l'
UFC
(2,5 millions de francs),
Familles rurales
(1,2 million), la
Confédération syndicale du cadre de
vie
(1,2 million),
Familles de France
(1 million).
En revanche, ni l'UNAF ni la FNAUT n'ont, contrairement aux années
précédentes, reçu de soutien du Ministère
délégué aux finances en 1997. En effet, une concentration
accrue des subventions a été décidée. Notons que ce
changement s'est opéré, concernant l'UNAF, avec l'accord de cette
association.
B. L'INSTITUT NATIONAL DE LA CONSOMMATION
L'Institut national de la consommation (INC) est un
établissement public à caractère industriel et commercial
qui, en plus de sa mission générale d'information du
consommateur, dispose d'une fonction d'expertise technique et de centre d'essai.
Votre commission avait souligné, lors des années
précédentes, la
gravité de la situation
financière de l'INC
, qui avait conduit à la mise en place
d'un plan de redressement, adopté en octobre 1994 par le Conseil
d'administration de l'Etablissement.
Pourtant, le problème n'est
toujours pas résolu et la survie de cette institution est plus que
jamais menacée par les graves difficultés qu'il rencontre.
Le creusement inéluctable du déficit de cet organisme est
lié à la conjonction de l'amoindrissement des recettes
tirées de la vente des publications et de la baisse de la subvention de
l'Etat.
1. Le tarissement progressif des sources de financement de l'organisme
L'INC a dû faire face à la baisse de la subvention accordée par l'Etat : de 50 millions en 1992, elle est passée à 33 millions en 1994, pour atteindre seulement 25 millions en 1997 et dans le projet de loi de finances pour 1998. Ces évolutions sont retracées ci-dessous :
Depuis 1992, le montant de la subvention a
été divisé par deux
. En conséquence, elle ne
représente plus que 28 % des ressources de l'organisme en 1997,
contre 50 % il y a 15 ans.
Les recettes tirées de la vente des publications
n'ont pas
permis de compenser la baisse du soutien de l'Etat. Bien au contraire, les
ventes de la revue, confrontée à la concurrence et à
l'absence de promotion publicitaire, ont considérablement diminué
depuis cinq ans, comme le montre ce tableau :
VENTES DES PUBLICATIONS DE L'INC
(EN MILLIERS)
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
initial 97 |
modif 97 |
|
Mensuel
|
91
|
102
|
87
|
104
|
169
|
142
|
88
|
54
|
52
|
55
|
39
|
TOTAL |
390 |
383 |
488 |
540 |
577 |
495 |
316 |
221 |
219 |
229 |
193 |
En conséquence, le chiffre d'affaires réalisé a lui aussi beaucoup baissé depuis 1992, comme l'illustre le graphique ci-dessous :
L'INC ne tirera plus en 1997 que 49,7 millions de francs de la vente de ses publications, alors que ce chiffre était de 129 millions, soit 2,6 fois plus, en 1992.
2. La nécessité d'un redressement
Un plan de redressement a été adopté an
1994, qui s'est accompagné de la mise en uvre d'un plan social en 1995.
En 1996, M. Jean-Pierre PEINOIT, nouveau président du conseil
d'administration, a fait adopter de nouvelles orientations stratégiques.
Mais ces mesures n'ont pas permis de redresser significativement la situation.
En 1995
,
l'amélioration de la gestion
avait permis une
baisse des charges de 20 % par rapport à 1994, qui résultait
pour la moitié d'économies " volontaires " :
renégociation des contrats d'abonnement et de production
télévisée, affranchissement, téléphone,
compression de nombreux autres postes, réduction des charges de
personnel. Les fonctionnaires en détachement à l'INC avaient
été réintégrés dans leurs administrations.
L'Etat a accompagné l'organisme dans son effort de restructuration,
puisque la subvention initiale pour 1995 de 33,5 millions de francs a
été versée en une seule fois en début
d'année et que
10 millions de francs ont été
ajoutés à cette somme, à titre de
subvention
exceptionnelle
. Ce concours financier a évité que
l'établissement ne se trouve en cessation de paiement.
La perte pour 1995 s'est toutefois élevée à
7,5 millions de francs
, à comparer à des fonds
propres de 7,3 millions de francs.
En 1996
, le chiffre d'affaires net de l'organisme s'est redressé
(+ 9,3 %) et la baisse des charges (- 15,2 %) a continué,
ce qui a permis de dégager un
faible excédent de
611.275 francs
.
Mais le
redressement des ventes de la revue
constaté en 1996
était essentiellement dû aux numéros thématiques
(hors série, + 11 % de ventes en 1996, numéros pratiques +
8 %), les ventes du mensuel étant quant à elles en
régression (- 4 % par rapport à 1995), avec un
vieillissement très net du parc d'abonnés, qui se renouvelle peu.
1997 a montré la fragilité du redressement de 1996
puisque les ventes ont recommencé à baisser et que les
recettes tirées des produits de presse sont en régression par
rapport aux prévisions budgétaires. Cette situation a d'ailleurs
justifié une enquête de la Cour des comptes sur la santé
financière de cet organisme.
L'exercice 1997 sera certainement déficitaire, d'environ 4 millions
de francs,
ce qui devrait amener la tutelle à consentir une
contribution exceptionnelle pour passer ce cap difficile.
Les prévisions pour l'exercice 1998 sont encore plus pessimistes.
Certains font état d'un déficit prévisible de l'ordre
de 7 millions de francs.
Votre commission juge cette situation extrêmement préoccupante.
Elle engage vivement le Gouvernement à mener à terme enfin
l'indispensable réforme de l'établissement et à prendre
les mesures qui s'imposent pour le tirer de l'impasse actuelle.
Elle estime que les missions et les financements de l'INC doivent être
clairement redéfinis. La signature d'un contrat d'objectif avec l'Etat
pourrait être envisagée.
Il apparaît nécessaire en outre d'apaiser le climat interne,
parfois tendu, de l'établissement. Une plus grande visibilité
pour l'avenir et une meilleure sécurité dans le financement
contribueraient certainement à atteindre cet objectif .