II. 1998 : ANNÉE DE TOUS LES DANGERS ?
Au risque de paraître alarmiste, votre rapporteur tient
à mettre en évidence un certain nombre de risques ou de menaces
qui semblent se dessiner à l'horizon pour les budgets locaux.
L'analyse des principaux discours tenus tant par M. Jean-Pierre
Chevènement, ministre de l'Intérieur, que par M. Christian
Sautter, secrétaire d'Etat au budget, au sujet des finances locales
confirme en effet la volonté du Gouvernement de
" s'attaquer "
à un certain nombre de " dossiers " essentiels.
A. LE DISCOURS AMBIGU SUR " L'EXCEDENT " DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES
1. Un constat comptable non réfutable ...
Dans le cadre de l'audit sur l'état des finances
publiques effectué, à la demande du nouveau Gouvernement, par MM.
Jacques Bonnet et Philippe Nasse et dont les conclusions ont été
rendues publiques le 21 juillet 1997, il est constaté que le secteur des
administrations publiques locales (secteur de la comptabilité nationale
qui regroupe les communes, les départements, les régions ainsi
que leurs satellites) est devenu
" globalement excédentaire en
1996 et [que] cet excédent devrait s'accroître encore en
1997 ".
A cet égard, s'il ne s'agit pas de contester ce constat, il est en
revanche indispensable de réagir contre certaines interprétations
" constructives " qui pourraient en découler. Il s'agit en
particulier d'indiquer que
ce constat ne signifie pas que les
collectivités locales puissent être considérées
comme des " tiroirs-caisses " sur lesquels l'Etat pourrait
exercer un
droit de tirage
pour venir régulièrement compléter le
financement de politiques dont la responsabilité incombe à lui
seul.
Il faut rappeler à cet égard les propos du président
Christian Poncelet, à l'occasion du débat sur les
collectivités locales organisé en avril de cette année au
Sénat, et selon lesquels
" trop de faux et mauvais procès
sont encore instruits, dans certaines sphères de l'Etat, à
l'encontre des collectivités locales qui sont accusées, à
tort, d'être des ilôts de prospérité et de laxisme
dans un océan de pénurie et de rigueur ".
2. ... dont la signification doit être précisée
L'analyse de la signification des conclusions de l'audit sur
l'excédent des administrations publiques locales doit en
conséquence être précisé sur deux points puisque,
d'une part, il s'agit d'une moyenne et que, d'autre part, cet excédent
résulte notamment d'une réduction des investissements.
En premier lieu il faut mesurer, comme le notent eux-mêmes les
rédacteurs du rapport du 21 juillet 1997 sur l'état des finances
publiques, que
cet excédent
" n'est qu'une
moyenne "
qui recouvre des situations très
différentes puisque
" de nombreuses collectivités
territoriales continuent de connaître des problèmes financiers et
restent lourdement endettées ".
En second lieu, il convient de citer à nouveau MM. Jacques Bonnet et
Philippe Nasse qui notent du côté des dépenses des
collectivités locales l'action de
" deux facteurs de
modération [puisque] les
dépenses courantes évoluent
lentement
en raison du calme qui prévaut sur leurs deux principales
composantes (achats intermédiaires et masse salariale) [et que]
les
investissements ont fortement baissé
".
Cette analyse, dont les principes sont confirmés par le rapport de notre
collègue M. Joël Bourdin sur " L'état des lieux
des finances locales en 1997 ", traduit la
conjonction d'une saine
gestion
, et notamment d'une gestion active de la dette permettant la
diminution de la proportion des intérêts de la dette dans les
dépenses de fonctionnement, et d'un
relâchement de l'effort
d'investissement
. " L'excédent " des administrations
publiques locales ne constitue donc en aucun cas une accumulation de
" trésoreries dormantes ".
D'ailleurs, si le Gouvernement souhaite créer les conditions
nécessaires à une reprise de l'effort d'investissement des
collectivités locales, afin que celles-ci puisse soutenir un retour de
la croissance économique, il lui appartient d'éviter le recours
à des " participations forcées " pour préserver
une capacité de financement dans le domaine de l'investissement.
Or, cette voie ne semble pas avoir été retenue pour la mise en
oeuvre du premier " projet phare ", relatif au plan pour
l'emploi des
jeunes.