III. LES CENTRES D'AIDE PAR LE TRAVAIL : DES ÉTABLISSEMENTS SATURÉS
A. UNE PROGRESSION RAPIDE DU NOMBRE DE PLACES
Le financement des centres d'aide par le travail a
été récemment rationalisé. L'article 68 de la
loi du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social
a modifié les conditions de financement des centres d'aide par le
travail, en prévoyant :
- la distinction juridique entre l'activité sociale prise en charge
intégralement par l'aide sociale de l'Etat et l'activité de
production et de commercialisation, autofinancée à titre
principal ;
- la possibilité dérogatoire de prise en charge
exceptionnelle et temporaire de certaines dépenses de l'activité
de production et de commercialisation par l'aide sociale de l'Etat.
Au préalable, pour mener à bien la clarification et la
rationalisation des dépenses des CAT, une mission d'appui
interministérielle avait élaboré en 1994 de nouveaux
outils d'évaluation physico-financière de l'activité des
établissements ainsi que des références professionnelles
indicatives.
Dès 1995, les crédits budgétaires ont inclus une part
prioritairement affectée aux établissements dont la situation, au
regard notamment de ces références professionnelles, était
la plus inéquitable. Une nouvelle procédure d'allocation
régionalisée des ressources a, d'autre part, été
appliquée aux CAT.
Pour 1998, les crédits alloués aux centres d'aide par le
travail (chapitre 46-23, article 10) progressent de + 3,3 %
par rapport à 1997, pour atteindre 6,038 milliards de francs.
Cet accroissement de 370,1 millions de francs correspond à un
ajustement aux besoins de 235,1 millions de francs et à une mesure
nouvelle de 135 millions de francs destinée à financer la
création de 2.000 places supplémentaires. Il s'inscrit dans
le prolongement d'un effort budgétaire de l'Etat constant au cours des
dernières années.
Cet effort budgétaire accompagne la progression continue des places de CAT depuis dix ans :
B. DES BESOINS TOUJOURS INSATISFAITS
L'article 22 de la loi du 13 juin 1989 portant diverses
mesures d'ordre social, dit "amendement Creton", qui prévoit la
possibilité du maintien en établissements d'éducation
spéciale des jeunes adultes, a entraîné un certain nombre
de difficultés. Le contentieux qui opposait l'assurance maladie et les
départements sur les modalités de la prise en charge
financière des personnes concernées a pu être aplani par la
circulaire du 27 janvier 1995.
Les difficultés rencontrées dans l'application du dispositif
résultent de deux facteurs. Le premier est lié au silence du
législateur s'agissant de la prise en charge financière des
jeunes adultes maintenus suite à une orientation de la COTOREP vers le
secteur du travail protégé, et du recours à un texte
réglementaire pour la mise en oeuvre de l'amendement. Le second est
inhérent au dispositif lui-même dans la mesure où la
présence de jeunes adultes dans les établissements
d'éducation spéciale dont la vocation est d'accueillir les
enfants ou les adolescents, génère nécessairement, dans
nombre de cas, de graves perturbations dans l'activité de ces structures
et bloque très fréquemment, l'entrée des plus jeunes
qu'elles ont vocation à accueillir.
L'insuffisance des équipements pour adultes handicapés à
l'origine de "l'amendement Creton" perdure. Malgré l'effort
conséquent tant de l'Etat et de l'assurance maladie (27.500 places
de centres d'aide par le travail, maisons d'accueil spécialisées
et foyers à double tarification supplémentaires
créées de 1990 à 1997) que des conseils
généraux (15.900 places nouvelles de foyers de 1990 à
1996), la capacité d'accueil des structures pour adultes ne permet pas
de faire face à toutes les demandes et notamment à toutes celles
des jeunes adultes qui sont issus des établissements d'éducation
spéciale.
Fin 1996, les effectifs relevant du dispositif de
l'amendement Creton s'élevaient encore à 4.600 personnes.
Simultanément, on enregistre un engorgement des établissements
d'éducation spéciale et une liste d'attente de placement de
jeunes handicapés dans ces établissements.
Par ailleurs, les bases juridiques du dispositif apparaissent fragiles,
puisqu'elles ne reposent que sur des circulaires. Les dernières
instructions ministérielles du 27 janvier 1995, prises à la
suite d'une décision et d'un avis du Conseil d'Etat de juin 1993 et
à l'issue d'une concertation avec les principales parties
concernées, n'ont pas permis d'éviter les contestations.
Des
recours en annulation ont été introduits contre la circulaire
précitée, qui a été annulée par le Conseil
d'Etat dans sa décision du 9 juillet 1997.
Selon les indications fournies à votre rapporteur, pour les trois
prochaines années, 10.000 places de CAT et 5.500 places de
maisons d'accueil spécialisées et foyers à double
tarification seraient nécessaires. Cette évaluation couvre
à la fois la résorption définitive des effectifs "Creton",
les besoins nouveaux des jeunes qui sortent chaque année
définitivement des établissements d'éducation
spéciale (plus de 12.000) et une partie des besoins également
considérables recensés à partir des listes d'attente hors
du dispositif "Creton".
Votre rapporteur estime que ces évaluations devraient faire l'objet
d'une programmation en bonne et due forme, qui seule permettrait un
véritable suivi en cours d'exécution et une évaluation au
terme de la période fixée.