Rapport n° 323 (1996-1997) de M. Georges OTHILY , fait au nom de la commission des lois, déposé le 23 avril 1997
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N° 323
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 22 avril 1997 Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 avril 1997 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, MODIFIÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, consacrant le placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des peines privatives de liberté,
Par M. Georges OTHILY,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Robert Pagès, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Michel Charzat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud , Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.
Voir les numéros :
Sénat : Première lecture : 400 (1995-1996), 3 et T.A. 8 (1996-1997).
Deuxième lecture : 285 (1996-1997).
Assemblée nationale ( 10 ème législ.) : Première lecture : 3050 , 3405 et T.A. 686 .
Droit pénal.
CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
CONCLUSIONS DE LA COMMISSION Réunie le mercredi 23 avril 1997 sous la présidence de M. Pierre Fauchon, la commission des Lois a examiné en deuxième lecture, sur le rapport de M. Georges Othily, la proposition de loi consacrant le placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des peines privatives de liberté. Ce texte, issu d'une initiative de M. Guy Cabanel, a pour objet de permettre aux personnes condamnées à une peine d'emprisonnement n'excédant pas un an ou qui n'ont plus qu'un maximum d'un an à accomplir d'exécuter leur peine en dehors du milieu carcéral, dans des lieux déterminés par le juge de l'application des peines. Le contrôle à distance de la présence du condamné sur le lieu d'assignation s'effectue au moyen d'un dispositif électronique. Celui-ci se compose d'un émetteur, qui prend la forme d'un bracelet électronique fixé à la cheville ou au poignet, et d'un récepteur, relié à une ligne téléphonique installée au lieu d'assignation. L'appareil émet un signal dès que le condamné s'éloigne de plus d'une certaine distance (en pratique 40-50 mètres). Relayé par la ligne téléphonique, ce signal est transmis au poste de surveillance, équipé à cette fin d'un ordinateur central. L'Assemblée nationale a approuvé le dispositif retenu par le Sénat en première lecture. Elle a ajouté que le condamné qui neutraliserait le procédé de contrôle à distance pourrait être condamné pour évasion. M. Georges Othily a approuvé cette adjonction, qu'il a considérée comme se situant dans la logique de la « prison sans barreau » que constitue le PSE. Sur la proposition de son rapporteur, la commission a adopté la proposition de loi dans le texte des travaux issus de l'Assemblée nationale. |
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est appelé à examiner en deuxième lecture la proposition de loi « consacrant le placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution de peines privatives de liberté » , dont l'initiative revient à notre excellent collègue M. Guy Cabanel.
Le texte voté par l'Assemblée nationale comprend treize articles, soit dix de plus que celui que nous avions adopté le 23 octobre dernier.
Cette différence tient moins à des raisons de fond (car les deux textes sont fort proches sur ce point) qu'à la présentation retenue par nos collègues députés qui, dans un souci de clarification louable, ont souhaité diviser en plusieurs articles le texte de l'article premier voté par le Sénat.
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• L' article 1er a pour simple objet de diviser en sept sections le chapitre du code de procédure pénale consacré à l'exécution des peines privatives de liberté. Outre une section comprenant les dispositions générales (mode de calcul de la durée de peine effectuée, répartition des condamnés...), ce chapitre comprendrait ainsi des sections relatives :
- à la suspension et au fractionnement des peines ;
- à la période de sûreté ;
- aux réductions de peine ;
- aux attributions du juge de l'application des peines (JAP) et à la commission de l'application des peines ;
- au placement à l'extérieur, à la semi-liberté, aux permissions de sortir et aux autorisations de sortir sous escorte.
Le septième section, intitulée « du placement sous surveillance électronique », comprendrait les articles 723-7 à 723-14 que la proposition de loi vise à insérer dans le code de procédure pénale.
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• L' article premier insère dans le code de procédure pénale un article 723-7 qui reprend quasiment mot pour mot les trois premiers alinéas du texte adopté en première lecture par le Sénat pour définir les conditions du recours au placement sous surveillance électronique : champ d'application réservé aux personnes condamnées à un an d'emprisonnement au maximum ou n'ayant plus qu'un reliquat de peine à purger inférieur ou égal à un an ; faculté de recourir au placement sous surveillance électronique à titre probatoire de la libération conditionnelle ; nécessité de recueillir préalablement le consentement du condamné, donné en présence d'un avocat.
Sur ce point, l'Assemblée nationale n'a apporté que des précisions concernant la fixation des périodes et lieux d'assignation en indiquant que le JAP devrait tenir compte à cette fin du stage ou de l'emploi temporaire que le condamné serait susceptible d'effectuer ou d'occuper.
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• L' article premier bis A insère dans le code de procédure pénale un article 723-8, relatif au dispositif technique de contrôle de l'exécution du placement sous surveillance électronique, qui reprend littéralement les troisième et quatrième alinéas du texte adopté par le Sénat : possibilité d'imposer au condamné le port d'un dispositif intégrant un émetteur ; homologation par le ministre du procédé utilisé de la justice ; nécessité de respecter la dignité, l'intégrité et la vie privée de la personne.
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• L' article premier bis B insère dans le code de procédure pénale un article 723-9 relatif aux personnes chargées de contrôler l'exécution du placement sous surveillance électronique. Il reprend dans une large mesure le dispositif adopté par le Sénat : contrôle à distance assuré par des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire qui peuvent se rendre sur le lieu d'assignation et sont autorisés à mettre en oeuvre un traitement automatisé de données nominatives ; faculté pour les services de police et de gendarmerie de constater l'absence irrégulière du condamné et d'en faire rapport au JAP.
Le texte adopté par nos collègues députés présente cependant deux différences par rapport à celui du Sénat :
- la première réside dans la précision, apportée fort opportunément par l'Assemblée nationale, selon laquelle la personne sous surveillance électronique est placée sous le contrôle du JAP dans le ressort duquel elle a été assignée ;
- la seconde concerne les précautions prises pour assurer le respect de l'inviolabilité du domicile du condamné. A cette fin, le Sénat avait prévu que la présence du condamné à son domicile n'aurait pu donner lieu à un contrôle sur place entre 21 heures et 6 heures, sauf si le contrôle à distance laissait présumer une violation du placement sous surveillance électronique. L'Assemblée nationale a adopté un dispositif plus simple en interdisant de pénétrer dans les domiciles sans l'accord des personnes chez qui le contrôle serait effectué. La protection de l'inviolabilité du domicile est donc généralisée car elle va au-delà du seul domicile du condamné et n'est pas limitée à certaines plages horaires. Cette solution assure donc le respect de l'inviolabilité du domicile sans pour autant empêcher les contrôles sur place puisque seul le fait de « pénétrer » dans un domicile sans le consentement de l'intéressé est interdit. C'est pourquoi votre commission approuve la modification décidée par l'Assemblée nationale.
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• L' article 1er bis C insère dans le code de procédure pénale un article 723-10 qui reprend mot pour mot le dixième alinéa du texte adopté par le Sénat afin de permettre au JAP de soumettre la personne placée sous surveillance électronique à des mesures d'accompagnement.
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• L' article 1er bis D insère dans le code de procédure pénale un article 723-10 relatif aux modifications des conditions d'exécution du placement sous surveillance électronique. Comme dans le texte du Sénat, la décision relève du JAP qui peut la prendre, d'office ou à la demande du condamné, après avis du procureur de la République. En revanche, le consentement du condamné n'est plus expressément exigé, puisque celui-ci peut toujours refuser une modification (quitte à entraîner un retrait de la décision de placement sous surveillance électronique si cette modification s'avérait nécessaire).
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• L' article 1er bis E reprend le douzième alinéa du texte adopté par le Sénat, relatif à la désignation d'un médecin pour vérifier que le procédé de contrôle à distance à distance du placement sous surveillance électronique ne présente pas d'inconvénient pour la santé du condamné.
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• L' article 1er bis F insère au sein du code de procédure pénale un article 723-12 relatif au retrait de la décision de placement sous surveillance électronique.
Le retrait pourrait se fonder soit sur une inobservation des conditions du placement sous surveillance électronique, soit sur un refus par le condamné d'une modification nécessaire de ces conditions, soit sur la demande du condamné. L'Assemblée nationale a ajouté à ces trois motifs, déjà prévus par le Sénat, l'hypothèse d'une nouvelle condamnation. Votre commission approuve cette adjonction, l'hypothèse en question (d'ailleurs déjà prévue comme motif de révocation de la libération conditionnelle) tendant à prouver que le condamné n'est pas en voie de réinsertion.
S'agissant des modalités de la décision de retrait, l'Assemblée nationale a, comme le Sénat, prévu qu'elle serait précédée de l'audition par le JAP, des réquisitions du procureur de la République et des observations du condamné. En revanche, alors que le Sénat avait envisagé la faculté de déférer la décision de retrait au tribunal correctionnel, l'Assemblée nationale a prévu un appel interjeté dans les dix jours devant la chambre des appels correctionnels. Votre commission ne voit pas d'objection à retenir cette solution, l'essentiel étant que le condamné dispose d'un droit de recours contre une décision de retrait.
Les conséquences du retrait sont identiques à celles prévues par le Sénat (sous réserve de l'article 3 qui permettrait de considérer le condamné comme coupable d'une évasion) : le condamné subit alors, selon les dispositions de la décision de retrait, tout ou partie de la durée de la peine qui lui restait à accomplir au jour de son placement sous surveillance électronique, le temps pendant lequel il a été placé sous surveillance électronique comptant néanmoins pour l'exécution de sa peine.
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• L' article premier bis G renvoie, comme l'avait souhaité le Sénat, à un décret en Conseil d'Etat pour déterminer les conditions d'application de la section relative au placement sous surveillance électronique.
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• L' article 2 est relatif au recours du procureur de la République contre les décisions du JAP relatives au placement sous surveillance électronique. Le Sénat avait envisagé de porter chaque recours devant le tribunal correctionnel. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, l'Assemblée nationale a souhaité que les recours contre la décision de retrait seraient portés devant la chambre des appels correctionnels. Dans un souci de cohérence, elle a donc limité le champ de l'article 2 aux recours du procureur de la République contre les décisions relatives à l'octroi ou aux modalités de mise en oeuvre du placement sous surveillance électronique : ceux-ci seraient effectivement portés devant le tribunal correctionnel.
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• L' article 3 , inséré par l'Assemblée nationale, constitue la principale modification apportée par nos collègues députés. Il s'agit de considéré comme constitutif d'une évasion le fait, pour une personne placée sous surveillance électronique, de neutraliser le procédé permettant de détecter à distance la présence sur le lieu d'assignation.
Votre commission approuve cette adjonction, dans la mesure où la personne placée sous surveillance électronique est considérée comme incarcérée. Elle doit donc pouvoir être sanctionnée si elle trahit la confiance du juge à son égard, comme elle peut d'ailleurs l'être en cas de manquement aux obligations résultant d'une semi-liberté ou d'un placement à l'extérieur.
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• L' article 4 complète l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante afin de préciser que le placement sous surveillance électronique est applicable aux mineurs.
Cette précision se situe dans l'esprit du texte voté par le Sénat. Certes, en pratique, l'emprisonnement ferme n'est prononcé à l'égard d'un mineur qu'en ultime recours, lorsque son maintien en liberté paraît véritablement inconcevable. Dans ces conditions, on peut penser que l'application du placement sous surveillance électronique à un mineur devrait être rarissime. Mais, même si elle doit demeurer exceptionnelle, cette faculté doit être approuvée car elle constitue une chance supplémentaire d'échapper à l'incarcération. Au demeurant, le recours au placement sous surveillance électronique à l'égard d'un mineur pourrait également être décidé à la fin de l'exécution de la peine.
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Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous demande d'adopter la présente proposition de loi dans le texte de l'Assemblée nationale.