B. L'ORDONNANCE N° 96-268 DU 28 MARS 1996
L'ordonnance n° 96-268 du 28 mars 1996 procède à une harmonisation des dispositions de procédure pénale applicables dans les territoires d'outre-mer et à Mayotte avec celles en vigueur en métropole. Sont ainsi étendues dans ces collectivités territoriales les innovations introduites depuis 1986 dans le code de procédure pénale par les lois suivantes :
- les lois n° s 86-1020 et 86-1322 des 9 septembre et 30 décembre 1986 relatives à la lutte contre le terrorisme ;
- la loi n° 90-602 du 12 juillet 1990 relative au droit de certaines associations de se porter partie civile ;
- les lois n° 93-2 du 4 janvier 1993 et n° 93-1013 du 24 août 1993 qui ont réformé la procédure pénale ;
- la loi n° 93-992 du 10 août 1993 sur les contrôles d'identité ;
- la loi n° 94-89 du 1er février 1994 instituant une peine incompressible ;
- la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative.
L'article premier de l'ordonnance crée à cet effet dans le code de procédure pénale un livre sixième consacré aux territoires d'outre-mer (titre I) et à la collectivité territoriale de Mayotte (titre II) qui procède aux adaptations nécessaires.
Sont cependant exclus du champ de l'extension pour les territoires d'outre-mer les articles 529-3 à 529-9 et 717 à 719 du code de procédure pénale.
La première série d'exceptions exclut la possibilité pour le contrevenant aux contraventions des quatre premières classes à la police des services publics de transports terrestres et au code de la route de payer entre les mains de l'agent de l'exploitant ou de l'agent verbalisateur, l'amende forfaitaire qui doit être versée au Trésor public.
La seconde série d'exceptions tire les conséquences de l'absence d'établissements pour peines dans les territoires d'outre-mer qui rend inapplicables les dispositions selon lesquelles les condamnés doivent purger leur peine dans ce type d'établissement.
Pour Mayotte, sont exclus de l'extension les articles 191, 232, 235, 243 à 267, 288 à 303, 305, 398 à 398-2, 399, 510, 529 à 530-3, 717 à 719 du code de procédure pénale. Outre celles prévues pour les territoires d'outremer, ces exclusions tiennent compte de ce que, à Mayotte, le tribunal supérieur d'appel exerce les fonctions de chambre des appels correctionnels et de chambre d'accusation, il n'existe pas de jury criminel et le tribunal correctionnel est toujours composé d'un seul magistrat.
Les adaptations prévues résultent pour l'essentiel des spécificités de l'organisation juridictionnelle de ces collectivités territoriales ainsi que de leur situation géographique particulière.
Aussi les articles 805 et 878 prévoient-ils de supprimer la distinction entre le tribunal de grande instance et le tribunal d'instance qui n'a pas lieu d'être dans les territoires d'outre-mer et à Mayotte où seul existe un tribunal de première instance.
Aux termes des articles 864 et 900 relatifs à l'indemnisation des victimes d'un vol, d'une escroquerie ou d'un abus de confiance n'ayant pu obtenir une indemnité et se trouvant dans une situation matérielle grave, il convient, pour l'évaluation de ses ressources, de se référer aux dispositions des ordonnances n° 92-1147 et n° 92-1143 du 12 octobre 1992 relatives respectivement à l'aide juridictionnelle en matière pénale dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.
Les dispositions du chapitre VI (articles 825 à 834) concernant les juridictions compétentes en matière criminelle dans les territoires d'outre-mer prévoient également des adaptations pour tenir compte de l'organisation judiciaire, administrative et pénitentiaire qui leur est propre : elles concernent notamment la périodicité de tenue des assises, l'organisation des cours d'assises ou les modalités d'établissement de la liste annuelle du jury criminel.
Par ailleurs, il est tenu compte des difficultés matérielles de liaison et de déplacement dans les territoires d'outre-mer. Les articles 812 à 814 procèdent par exemple à des adaptations des dispositions du code de procédure pénale relatives à la garde à vue.
Ainsi, lorsque les conditions de transport ne permettent pas de conduire la personne retenue devant le procureur de la République ou le juge d'instruction, l'officier de police judiciaire peut imposer à celle-ci, en cas de prolongation de la garde à vue, de se présenter périodiquement à lui jusqu'au jour de la première liaison aérienne ou maritime.
En Polynésie française, en l'absence d'un médecin dans l'île où se déroule la garde à vue, l'examen médical prévu par l'article 63-3 du code de procédure pénale peut être effectué par un infirmier diplômé ou, à défaut, par un membre du corps des auxiliaires de santé publique.
Enfin, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, l'avocat avec lequel la personne gardée à vue peut demander à s'entretenir au terme de la vingtième heure de garde à vue peut être remplacé, lorsque le déplacement de l'avocat paraît matériellement impossible, par une personne choisie par la personne retenue qui ne doit ni être mise en cause pour les mêmes faits ou des faits connexes ni faire l'objet d'une condamnation, incapacité ou déchéance mentionnée au bulletin n° 2 du casier judiciaire.
L'article 2 de l'ordonnance n° 96-268 du 28 mars 1996 crée, dans l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, un chapitre étendant ses dispositions aux territoires d'outre-mer et à Mayotte sous réserve d'un certain nombre d'adaptations, ou d'exclusions qui résultent des compétences des autorités territoriales en matière de liberté surveillée.
L'ordonnance n° 96-268 portant actualisation des dispositions législatives de procédure pénale prévoit enfin son entrée en vigueur dans les territoires d'outre-mer et à Mayotte au 1er mai 1996. Or, en ce qui concerne la collectivité territoriale de Mayotte, la loi d'habilitation avait prescrit, à la demande du Gouvernement, de différer cette entrée en vigueur au 1er mai 1997, le parquet du tribunal supérieur de Mamoudzou risquant d'être réduit, au début de l'année 1996, à un seul magistrat, du fait des difficultés affectant le recrutement sur les postes budgétaires existants.
Faut-il penser que ces difficultés matérielles ont été résorbées peut-être par l'arrivée récente d'un deuxième substitut dans la collectivité territoriale en principe chargé de l'état civil ?