II. LE DROIT NATIONAL A PEU À PEU INTÉGRÉ LES NORMES COMMUNAUTAIRES
A. LES DIRECTIVES EUROPÉENNES SONT DES NORMES DE VALEUR SUPÉRIEURE QUE LE DROIT NATIONAL SE DOIT D'INTÉGRER
1. Les directives, droit « dérivé » des Traités, nécessitent une transposition en droit interne
Sans entrer dans l'analyse détaillée du droit communautaire 10 ( * ) , rappelons toutefois quelle est la nature juridique des directives et, partant, quelle est la raison d'être du présent projet de loi.
Les directives sont des actes unilatéraux, pris par le « triangle institutionnel » communautaire formé par la Commission, le Conseil et le Parlement, sur le fondement de l'article 189 du Traité instituant la Communauté européenne. Cet article dispose que « La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens ».
Contrairement au règlement communautaire par exemple, qui est directement applicable, pour la directive, une obligation d'introduction dans le droit national dans les délais impartis pèse donc sur les États membres. En droit français, cette transposition peut prendre une forme législative ou réglementaire, suivant la nature des dispositions en cause, en vertu du partage opéré entre loi et règlement par les articles 34 et 37 de la Constitution.
La transcription en droit interne est d'autant plus nécessaire que l'article 55 de la Constitution a permis de poser le principe d'une primauté du droit communautaire sur les lois.
2. L'absence de transposition ne fait pas échec à l'applicabilité d'une directive
L'article 55 de la Constitution dispose que les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois.
Cette disposition s'applique également aux directives et tant le juge judiciaire 11 ( * ) que le juge administratif écartent l'application d'une loi nationale, même postérieure, contraire aux dispositions d'une directive.
Ainsi, le non respect des obligations communautaires relatives aux procédures de passation des marchés publics pourrait être invoqué devant le juge national, judiciaire ou administratif, qui peut annuler, par exemple, une décision d'attribution d'un marché prise sur le fondement d'un texte de droit national contraire à une directive.
La non transposition d'une directive introduit donc une certaine fragilité dans l'ordre juridique interne et une insécurité manifeste pour les entreprises contractantes.
Aussi, le droit national a-t-il progressivement intégré les normes communautaires sur les marchés publics.
* 10 Pour une analyse approfondie des textes et de la jurisprudence, le lecteur pourra utilement se reporter à « L'application du droit de l'Union européenne en France », Jean-Luc Sauron, 1995, La Documentation française, collection réflexe Europe.
* 11 Cf. par exemple Cour de cassation, chambre criminelle, 7 nov. 1990, à la suite de la jurisprudence « Jacques Vabre », 1975.