2. Un avantage fiscal partagé
a) L'intérêt pour l'investisseur
L'exonération des sommes versées pour la souscription des parts de copropriété de navire a pour effet de rendre immédiatement rentable pour le bénéficiaire, un investissement qui, économiquement, ne le serait qu'à moyen terme. Les exemples chiffrés ci-après illustrent ce mécanisme.
Hypothèses :
Durée de l'opération 5 ans
Montant des sommes exonérées à l'entrée 100
Loyer annuel versé par l'armateur 7 %
Valeur de la reprise garantie par l'armateur 60 %
Amortissement dégressif sur huit ans, fiscalement
plafonné à la valeur des loyers pour les particuliers 85 %
Cas d'un particulier assujetti à l'IR :
Exonération 100
Avantage fiscal = 100 x 0,568 57
Loyers cumulés = 7x5 35
Revenus imposables après amortissement = 35 - 35 0
Économie d'impôt = 35 x 0,568 20
Valeur comptable résiduelle = 100 - 35 65
Valeur de reprise 60
Moins-value fiscale = 60 - 65 - 5
En trésorerie, le particulier ne récupère sur 5 ans que 95 : 35 de loyers + 60 de reprise. Mais l'avantage fiscal à l'entrée et les économies d'impôts sur les loyers versés en cours d'exploitation portent son gain à 95 + 57 + 20 = 172. Ce chiffre correspond à un taux de rendement interne de 11,5 %.
Cas d'une entreprise assujettie à l'IS :
Exonération. 100
Avantage fiscal = 100 x 0,366 37
Loyers cumulés : 7 x 5 = 35
Revenus imposables après amortissement = 35 - 85 - 50
Economie d'impôt = 85 x 0,366 31
Valeur comptable résiduelle = 100 - 85 15
Valeur de reprise 60
Plus-value fiscale = 60 - 15 45
Imposition de la plus-value = 45 x 0,19 8
En trésorerie, l'entreprise récupère également 95 sur les 5 années de l'opération. Son avantage fiscal à l'entrée est moindre que celui du particulier, en raison d'un taux d'imposition plus faible, mais les économies d'impôts en cours d'exploitation sont plus importantes en raison de l'imputation totale de l'amortissement dégressif. Au total, le gain de l'entreprise est de 95 + 37 + 31 - 8 = 155. Ce chiffre correspond à un taux de rendement interne de 8,9 %.
b) L'intérêt pour l'armateur
Pour l'armateur, l'intérêt du système est triple :
- au début de l'opération, il obtient le complément de financement qui lui permet d'entreprendre un investissement maritime que ses contraintes de fonds propres lui interdisaient jusqu'alors ;
- au cours de l'opération, il n'a à verser que le loyer d'exploitation relativement bas qui est compatible avec la rentabilité réelle de l'activité de transport maritime :
- à la fin de l'opération, il rachète un navire déjà amorti pour continuer à l'exploiter ou le revendre. Éventuellement, il pourra de surcroît réaliser une plus-value si le prix du navire sur le marché, au moment du dénouement de l'opération, est supérieur au prix de reprise garanti au départ aux quirataires non professionnels. En fait, l'armateur pourra arbitrer entre le montant du loyer qu'il offre aux investisseurs et la valeur de reprise qu'il leur garantit.
Le pivot du système sera constitué par les établissements financiers qui rapprocheront les investisseurs et les armateurs pour constituer les copropriétés de navires, apporteront les financements nécessaires et cautionneront les engagements mutuels.
Cette intermédiation financière aura bien sûr un coût propre, qui sera couvert par l'avantage fiscal. Le bénéfice de l'exonération sera ainsi partagé entre les investisseurs non-professionnels, les armateurs et les établissements financiers.
L'intervention de ces derniers devrait également permettre une sélection en amont des projets les plus fiables pour les investisseurs, avant même l'agrément ministériel.
Votre rapporteur relève toutefois que cette garantie n'est pas à toute épreuve, l'expérience des années récentes ayant, hélas, amplement prouvé que les établissements à la réputation la mieux assise pouvaient s'engager dans certaines opérations parfois douteuses.