AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le Premier ministre a présenté le 15 novembre dernier un plan de réforme de la protection sociale sans précédent depuis trente ans par son ampleur, sa cohérence et son ambition.
Face à un endettement de 230 milliards de francs pour le seul régime général, soit 4.000 francs par Français, il était devenu urgent d'agir. Le Gouvernement a eu le courage de décider les mesures immédiates qui permettront de rétablir l'équilibre financier de la sécurité sociale dès 1997, et la sagesse de les compléter par les mesures structurelles qui permettront de préserver cet équilibre dans le long terme.
Les développements qui suivent ne portent que sur les mesures financières de portée générale et les mesures concernant les branches vieillesse et famille de la sécurité sociale. Les réformes relatives au système de soins sont présentées à part, dans le rapport que votre rapporteur a consacré par ailleurs au budget de la Santé publique et de l'assurance maladie.
Votre rapporteur a la satisfaction de voir aboutir cette année nombre des réformes qu'il a eu l'honneur de défendre au nom de la commission des finances. Le renforcement du rôle du Parlement en matière de sécurité sociale, l'élargissement des conseils d'administration des caisses, la mise en place de fonds de pension, la rationalisation des prestations familiales, sont autant de propositions qu'il vous avait faites en 1992 dans son rapport d'information sur les aspects financiers de la protection sociale.
Certains aspects de notre système de sécurité sociale restent en revanche préoccupants. Trop de dépenses sociales, telles que le revenu minimum d'insertion, l'allocation de logement ou l'allocation aux adultes handicapés, poursuivent cette année leur dérive. Par ailleurs, le prélèvement nouveau qu'il faut se résoudre à instaurer pour apurer la dette passée de la sécurité sociale nous rapproche encore de la limite au-delà de laquelle les mécanismes de solidarité risquent de ne plus être tolérés.
Enfin, votre rapporteur s'est attaché à souligner l'importance d'une politique familiale efficace parce que globale. Il convient en effet de ne jamais perdre de vue qu'un renouvellement des générations est indispensable pour assurer l'équilibre tout entier du système de protection sociale et le dynamisme de la société.
CHAPITRE PREMIER LA CRISE FINANCIÈRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE APPELÉ UNE RÉPONSE ÉNERGIQUE
I. LE DÉFICIT DU RÉGIME GÉNÉRAL CONTINUE DE SE CREUSER
A. UNE DÉGRADATION MARQUÉE DEPUIS 1993
Depuis 1990, le solde des opérations courantes du régime général de sécurité sociale a été constamment négatif. Ce déficit de trésorerie, qui était de l'ordre de 15 milliards de francs chaque année, s'est brutalement amplifié en 1993 sous l'effet de la récession économique, pour dépasser les 55 milliards de francs.
En 1994 l'ensemble des branches du régime général est devenu déficitaire. Elles l'auraient d'ailleurs été dès 1993, si le produit du relèvement de 1,3 point de la CSG décidé en cours d'année n'avait pas été temporairement versé à la branche famille, avant d'être affecté l'année suivante au Fonds de solidarité vieillesse. Cette situation de déséquilibre simultané de toutes les branches du régime général est sans précédent depuis la création de la sécurité sociale en 1945.
En dépit d'un moindre déficit en 1994, les comptes du régime général ne se sont pas redressés depuis leur brutale détérioration de 1993. Les rentrées de cotisations sociales ont pourtant retrouvé un rythme de progression de + 1,8 % en 1994 et de + 4.6 % en 1995 mais les dépenses se sont accrues encore plus vite.
Évolution du solde du régime général et ventilation par branches
(en milliards de francs)
Source Commission des comptes de la sécurité sociale
(p) prévisions
B. LES PERSPECTIVES POUR 1996 NE LAISSENT PAS ESPÉRER D'AMÉLIORATION SPONTANÉ
Les prévisions tendancielles établies par la Commission des comptes de la sécurité sociale le 31 octobre dernier ne laissent pas espérer, en l'absence de mesures nouvelles, un rétablissement spontané de la situation financière du régime général en 1996 : malgré une progression des recettes de + 3,8 %, son déficit ne se réduirait que d'environ 5 milliards de francs, pour s'établir à - 60,4 milliards de francs.
Les comptes prévisionnels du régime général en 1996
(en millions de francs)
Cette prévision pour 1996 intègre les décisions récentes relatives à la fixation du taux directeur hospitalier à 2,1 % et le relèvement de 55 à 70 francs du forfait hospitalier, mais n'anticipe aucune des réformes annoncées par le Premier ministre le 15 novembre dernier.