EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS
ARTICLE 61
Répartition de la dotation globale
de fonctionnement (DGF)
Le présent article porte diverses mesures en lien avec la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
En premier lieu, il prévoit comme l'année précédente une hausse de 290 millions d'euros des composantes péréquatrices de la DGF, dont 150 millions d'euros au titre de la dotation de solidarité rurale (DSR) et 140 millions d'euros au titre de la dotation de solidarité urbaine (DSU). La dotation de péréquation des départements serait également majorée de 10 millions d'euros. Le maintien au montant global de la DGF proposé à l'article 29 du présent projet de loi de finances implique que cette hausse soit intégralement financée par les collectivités territoriales.
En deuxième lieu, cet article prévoit diverses mesures d'ajustement des modalités de calcul des indicateurs financiers utilisés pour la répartition des dotations de péréquation. Contrairement aux années précédentes, où il était nécessaire de procéder à des réformes d'ampleur pour tenir compte des réformes successives de la fiscalité locale, le présent article ne propose que des ajustements relativement mineurs, qui n'en sont pas moins utiles. Comme l'année précédente, l'article ne prévoit aucune mesure visant à ralentir l'application de la réforme de l'effort fiscal, dont le rythme serait considérablement accéléré faute d'intervention du législateur. Par leur amendement II-9 (FINC.2), les rapporteurs spéciaux entendent assurer la neutralisation financière de cette réforme à hauteur de 80 % en 2025, afin d'atténuer le choc que représenterait le retour à la trajectoire initialement prévue d'application de ces dispositions.
En troisième lieu, il prévoit diverses mesures applicables aux communes issues de la fusion de plusieurs communes ou de la division d'une commune. Ces dispositions, largement technique, ont été approuvées dans leur principe.
En quatrième lieu, il prévoit un prélèvement exceptionnel de DGF de 2,5 millions d'euros en faveur du fonds pour l'aide au relogement d'urgence (Faru), ce dont les rapporteurs spéciaux ont pris acte.
L'Assemblée nationale ayant rejeté la première partie du PLF pour 2025, le présent article n'a fait l'objet d'aucune modification entre le dépôt du texte au Parlement et sa transmission au Sénat.
La commission propose d'adopter cet article ainsi modifié.
I. LA POURSUITE DE LA PROGRESSION DES DOTATIONS DE PÉRÉQUATION VERTICALE À MOYENS CONSTANTS
A. LE DROIT EXISTANT : LES DOTATIONS DE PÉRÉQUATION VERTICALE SONT EN AUGMENTATION CONSTANTE SUR LES DERNIÈRES ANNÉES
1. Les dotations du bloc communal
a) Dotations forfaitaires et dotations de péréquation
Les dotations de péréquation verticale des communes et des départements sont des composantes de leur dotation globale de fonctionnement (DGF). En loi de finances initiale (LFI) pour 202449(*), le montant total de la DGF s'élevait à 27,2 milliards d'euros.
La DGF des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre s'élevait à 18,9 milliards d'euros en 2024. Celle-ci comporte en premier lieu une dotation forfaitaire des communes (6,7 milliards d'euros en 2024). Son montant socle est figé depuis 2015 et ses évolutions (hors minorations), ne dépendent que des évolutions de la population des communes, à laquelle s'applique un coefficient logarithmique variant de 1 à 2, afin de refléter les « charges de centralité » qu'elles supportent.
La DGF du bloc communal comporte également une composante forfaitaire financée au sein de la dotation d'aménagement : la dotation de compensation, créée pour compenser la disparition de l'ancienne part salaires de la taxe professionnelle en 1999, dite « compensation part salaires » (CPS), représentant 4,6 milliards d'euros en 2024. Jusqu'en 2023, sa répartition entre les communes et EPCI dépendait du régime fiscal de ce dernier : elle était versée directement aux EPCI faisant application du régime de la fiscalité professionnelle unique (FPU) ; dans les autres EPCI, elle était versée aux communes, qui elles-mêmes en versaient une partie à leur EPCI.
La loi de finances pour 202450(*) a modifié les articles L. 2334-7 et L. 5211-28-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) de façon à ce que la CPS soit intégralement perçue au profit des EPCI. En parallèle, elle a rétabli l'article L. 5211 32 du CGCT de façon à ce que, dans les EPCI ne faisant pas application du régime de la FPU, cette part soit rétrocédée aux communes sous forme d'attribution de compensation.
La DGF des EPCI comprend également une dotation forfaitaire versée aux groupement touristiques (18 millions d'euros en 2024), dont l'évolution est indexée sur celle de la DGF dans son ensemble.
Répartition de la dotation globale de fonctionnement en 2024
Source : direction générale des collectivités locales
La DGF du bloc communal comporte également des dotations de péréquation, regroupées au sein d'une dotation d'aménagement, définie à l'article L. 2334-13 du CGCT. Son montant est égal à la différence entre l'ensemble des ressources affectées à la dotation globale de fonctionnement des communes et l'ensemble formé par la dotation forfaitaire, soit 11,2 milliards d'euros en 2024.
Celle-ci comporte :
- la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) régie par les articles L. 2334-15 à L. 2334-18-4 du CGCT, qui est répartie en fonction de critères de population, de potentiel financier, de la part de logements sociaux dans le parc total, de la part de personnes couvertes par des prestations logements et de revenu moyen par habitant, obtenu à partir du revenu imposable. En 2024, le montant de DSU réparti s'élevait à 2,8 milliards d'euros. Il est à noter que les communes qui perdent l'éligibilité à cette dotation bénéficient d'un mécanisme de garantie non renouvelable prenant la forme d'une attribution égale à la moitié de celle qu'elle a perçue l'année précédente51(*) ;
- la dotation de solidarité rurale (DSR) régie par les articles L. 2334-20 à L. 2334-23 du CGCT, qui est répartie en fonction de critères de population, de potentiel financier et de charges propres aux zones rurales. Elle comporte trois fractions, obéissant à des logiques distinctes : la fraction « bourg-centre », la fraction « péréquation » et la fraction « cible » (voir encadré). En 2024, le montant de DSR réparti était de 2,2 milliards d'euros. Il est à noter que des dispositifs de garanties sont également prévus pour chacune des fractions en cas de perte d'éligibilité d'une commune ;
La dotation de solidarité rurale
En application de l'article L. 2334-20 du CGCT, la DSR est attribuée aux communes de moins de 10 000 habitants et à certains chefs-lieux d'arrondissement de moins de 20 000 habitants pour tenir compte, d'une part, des charges qu'ils supportent pour contribuer au maintien de la vie sociale en milieu rural, d'autre part, de l'insuffisance de leurs ressources fiscales.
Cette dotation comporte trois fractions. La variation annuelle de la DSR est répartie par le comité des finances locales entre ces trois fractions.
Prévue par l'article L. 2334-21, la fraction « bourg-centre » (709 millions d'euros en 2023) a pour objet d'apporter un soutien particulier aux communes exerçant des charges de centralité et devant, à ce titre, disposer des moyens suffisants pour créer ou entretenir une armature de services. Elle est attribuée aux communes dont la population représente au moins 15 % de la population du canton, aux communes sièges des bureaux centralisateurs, ainsi qu'aux communes chefs-lieux de canton (environ 4 200 communes).
Prévue par l'article L. 2334-22, la fraction « péréquation » (778 millions d'euros en 2023) est attribuée aux communes dont le potentiel financier par habitant est inférieur au double du potentiel financier moyen par habitant des communes appartenant au même groupe démographique. Elle bénéficie à la quasi-totalité des communes de moins de 10 000 habitants (environ 33 000 communes).
Prévue par l'article L. 2334-23, la fraction « cible » (452 millions d'euros en 2023) vise à renforcer l'intensité péréquatrice de la DSR. Elle est attribuée aux 10 000 premières communes de moins de 10 000 habitants, parmi celles éligibles au moins à l'une des deux premières fractions de la dotation de solidarité rurale, classées en fonction décroissante d'un indice synthétique de ressources et de charges.
Source : commission des finances du Sénat
- la dotation nationale de péréquation (DNP) régie par l'article L. 2334-14-1 du CGCT, qui est répartie en fonction du potentiel financier et de l'effort fiscal des communes. Celle-ci comporte une part principale et une part dite « majoration », à laquelle sont éligibles les communes satisfaisant des critères de ressources et de charges renforcés. Elle représente 0,8 milliard d'euros en 2024. Aucun mécanisme de garantie n'est prévu en cas de perte d'éligibilité à la part majoration de la DNP ;
- la dotation d'intercommunalité régie par l'article L. 5211-28 du CGCT, qui constitue quant à elle la composante péréquatrice de la DGF perçue par les EPCI à fiscalité propre. Elle est répartie en fonction de critères de population, de revenu, de potentiel fiscal mais également en fonction du coefficient d'intégration fiscale, indicateur mesurant la part de l'EPCI à fiscalité propre dans l'ensemble intercommunal, de façon à inciter au renforcement de l'intercommunalité. En 2024, le montant de dotation d'intercommunalité réparti était de 1,7 milliard d'euros. Un dispositif d'encadrement très strict des montants individuels perçu par les EPCI est prévu : ainsi pour une année donnée, un EPCI ne peut percevoir une attribution par habitant inférieure à 95 % ou supérieure à 110 % de celle perçue l'année précédente. Le financement de ces mécanismes est assuré par des minorations internes à l'enveloppe de la dotation d'intercommunalité.
b) Le financement interne à la dotation globale de fonctionnement de la progression des dotations de péréquation
Ces dotations de péréquation s'inscrivent dans une trajectoire d'augmentation puisque les lois de finances initiales pour 201952(*), 202053(*), 202154(*), 202255(*), 202356(*) et 202457(*) ont successivement prévu :
- pour la DSU, une augmentation de 90 millions d'euros en 2019, 2020 et 2021 suivie d'une augmentation de 95 millions d'euros en 2022 puis à nouveau deux hausses de 90 millions d'euros en 2023 et en 2024 ;
- pour la DSR, une augmentation de 90 millions d'euros en 2019, 2020 et 2021 suivie d'une augmentation de 95 millions d'euros en 2022, de 200 millions d'euros en 2023 puis de 100 millions d'euros en 2024 ;
- pour la dotation d'intercommunalité, une augmentation de 30 millions d'euros chaque année à compter de 2019 est prévue par le II de l'article L. 5211-28 du CGCT, mais le produit de cette hausse est prélevé sur la dotation d'aménagement. Depuis la loi de finances initiale pour 2024, la hausse annuelle de la dotation d'intercommunalité est en outre passée de 30 millions d'euros à 90 millions d'euros.
Au total, ces majorations représentent ainsi une hausse annuelle de la part « péréquée » de la DGF mise en répartition de 220 millions d'euros par an entre 2019 et 2021, de 230 millions d'euros en 2022, de 330 millions d'euros en 2023, puis de 290 millions d'euros en 2024.
S'agissant en particulier de la DSR, l'article L. 2334-20 du CGCT confère au CFL la faculté de répartir la variation annuelle de cette dotation entre ses trois fractions. Par dérogation, la LFI pour 2023 a prévu que 60 % au moins de la hausse annuelle de la DSR soit fléchée vers la fraction « péréquation » en 2023. Ce mécanisme de « fléchage » a été reconduit par la LFI pour 2024.
Le montant global de la DGF, qui est financée par prélèvement sur les recettes (PSR) de l'État, étant fixé en première partie des lois de finances, toute modification de ses règles de répartition intervenant en seconde partie, notamment pour renforcer les dotations de péréquation, doit en principe être « gagée », en application de l'article L. 2334-7- 1 du CGCT. Ce gage est opéré via un écrêtement de la dotation forfaitaire des communes dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur ou égal à 0,85 fois le potentiel fiscal moyen par habitant constaté pour l'ensemble des communes. À cet écrêtement sur la dotation forfaitaire des communes peut s'ajouter en tant que de besoin un écrêtement de la dotation de CPS. Il revient au comité des finances locales (CFL) de répartir ces écrêtements entre ces deux dotations.
L'article L.2334-13 du CGCT porte ses évolutions annuelles du montant des dotations de péréquation du bloc communal. Il confère au comité des finances locales (CFL) la faculté de majorer le montant des dotations de péréquation, en compensant les majorations correspondantes dans les conditions prévues à l'article L. 2334-7- 1 du CGCT précité.
Le II de l'article L. 5211-28 du même code prévoit également que l'accroissement de la dotation d'intercommunalité soit financé par la minoration de la dotation forfaitaire dans les mêmes conditions que les dotations de péréquation du bloc communal.
En revanche, le financement de la mise en oeuvre du dispositif d'encadrement de l'évolution des attributions individuelles est assuré par des minorations internes à la dotation d'intercommunalité.
2. La dotation globale de fonctionnement des départements
La DGF des départements s'élevait à 8,3 milliards d'euros en 2024. Son montant est stable par rapport à 2023, comme le prévoit expressément l'article L. 3334-1 du CGCT. Elle comprend une composante forfaitaire et une composante dédiée à la péréquation.
Sa composante forfaitaire comprend une dotation forfaitaire (4,1 milliards d'euros en 2024) évoluant en fonction de la population et une dotation de compensation correspondant au financement de compétences transférées (2,6 milliards d'euros en 2024).
Sa composante dédiée à la péréquation comprend également deux dotations :
- la dotation de péréquation urbaine (DPU) pour les départements urbains, répartie selon des critères de richesse fiscale et de revenu moyen par habitant. En 2024, le montant de DPU réparti s'élevait à 594 millions d'euros ;
- la dotation de fonctionnement minimale (DFM) pour les départements non urbains, répartie selon des critères de richesse fiscale et de charges (notamment la longueur de la voirie classée dans le domaine public départemental). En 2024, le montant de DFM réparti s'élevait à 959 millions d'euros.
La dotation de péréquation des départements s'inscrit également dans une trajectoire d'augmentation. En application de l'article L. 3334-4 du CGCT, le montant global qui lui est alloué progresse chaque année de 10 millions d'euros. Comme pour le bloc communal, cette hausse est financée par la minoration de la dotation forfaitaire.
B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE NOUVELLE HAUSSE DES DOTATIONS DE PÉRÉQUATION DE 290 MILLIONS D'EUROS POUR LES COMMUNES ET DE 90 MILLIONS D'EUROS POUR LES INTERCOMMUNALITÉS
S'agissant des communes, le a du 5° du I du présent article tend à modifier l'article L. 2334-7- 1 du CGCT pour prévoir une nouvelle hausse des dotations d'aménagement de 290 millions d'euros en 2024, qui se traduirait par :
- une hausse de 140 millions d'euros de la DSU, soit une progression de 5 % par rapport à 2024 ;
- une hausse de 150 millions d'euros de la DSR, soit une progression de 6,7 % par rapport à 2024.
Le 8° du même I tend à modifier l'article L. 2334-20 du CGCT de façon ce que, comme en 2023 et en 2024, le CFL soit tenu d'allouer au moins 60 % de la hausse de la DSR à la part « péréquation » en 2025.
S'agissant des EPCI, le II de l'article L. 5211-28 du CGCT prévoit d'ores et déjà qu'à compter de 2024, la hausse annuelle de la dotation d'intercommunalité soit de 90 millions d'euros, contre 30 millions d'euros auparavant. Cette augmentation est à nouveau financée, en 2025, par la dotation d'aménagement et, le cas échéant, par une minoration des composantes forfaitaires de la DGF.
S'agissant enfin des départements, les 1° et 2° du II du présent article tendent à modifier respectivement les articles L. 3334-1 et L. 3334-4 du CGCT pour prévoir, comme les années précédentes :
- une stabilité par rapport à 2024 du montant global de leur DGF ;
- une augmentation de 10 millions d'euros de la dotation de péréquation, financée par écrêtement de la dotation forfaitaire.
Enfin, le 1° du III propose toutefois de figer la dotation de compensation des groupements touristiques à son montant de 2024 (18 millions d'euros).
C. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE PROGRESSION DE LA PÉRÉQUATION HORIZONTALE, SUCCÉDANÉE D'UNE RÉFORME DE PLUS GRANDE AMPLEUR DE LA DGF
Les rapporteurs spéciaux prennent acte de cette nouvelle augmentation des dotations de péréquation au sein de la DGF, qui aurait pour effet de porter leur montant total à 9,5 milliards d'euros, dans une logique de solidarité territoriale.
Comme en 2024, il est proposé que l'accroissement de la DSR (+ 100 millions d'euros) soit d'un niveau supérieur à celui de la DSU (90 millions d'euros), dont il convient cependant de rappeler que le montant global resterait supérieur de 569 millions d'euros. Cet écart de 10 millions d'euros dans la progression des deux dotations, identique à celui adopté en LFI 2024, favorise donc une forme de « rattrapage » de la DSR.
Le choix de faire porter à nouveau et de façon obligatoire 60 % de l'accroissement de la DSR sur la fraction dite « péréquation » traduit le choix de faire bénéficier un maximum de communes de l'accroissement de la DGF et permet d'assurer une certaine stabilité. Il confirme une prise de conscience de la nécessité de conforter les moyens de la péréquation en faveur des communes rurales.
En cohérence avec leur souhait de voir progresser le montant des dotations de péréquation au sein de la DGF, les rapporteurs spéciaux n'ont pas souhaité remettre en cause le nouveau rythme de progression annuelle minimale de la dotation d'intercommunalité, qui est passée de 30 à 90 millions d'euros en LFI pour 2024.
En outre, ils relèvent que la progression plus modeste des montants de la péréquation départementale (+ 10 millions d'euros) ne devrait pas être accélérée pour éviter les effets redistributifs excessifs entre départements alors que la situation de cette catégorie de collectivités est particulièrement difficile.
Les rapporteurs spéciaux relèvent en outre que, compte tenu des contraintes budgétaires, cette progression des dotations de péréquation ne s'est pas accompagnée cette année, contrairement aux années précédentes, d'un relèvement à due concurrence du montant global de la DGF.
Plus fondamentalement, les rapporteurs spéciaux soulignent que la progression de la péréquation verticale ne saurait se substituer à une refonte globale de la DGF. Cette nécessité, qui fait consensus parmi les élus locaux, a notamment été rappelée par le groupe de travail sur la décentralisation présidé par le Président du Sénat58(*).
II. DES AJUSTEMENTS DES MODALITÉS DE RÉPARTITION DES DOTATIONS DE L'ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
A. LE DROIT EXISTANT : LA DGF EST RÉPARTIE EN FONCTION DE CRITÈRES DE RESSOURCES ET DE CHARGES ET DE LA POPULATION
1. La « population DGF » procède de diverses majorations appliquées au recensement de l'Insee, qui diffère à Mayotte
a) La « population DGF » est celle du recensement de l'Insee, à laquelle s'applique diverses majorations
La population des collectivités territoriales prise en compte dans le calcul de la DGF ne correspond pas exactement à la population dénombrée lors du dernier recensement. L'article L. 2334-2 du CGCT définit ainsi un critère de « population DGF » comprenant la population résultant du recensement, majorée :
- chaque année des accroissements de population ;
- d'un habitant par résidence secondaire ;
- d'un habitant par place de caravane située sur une aire d'accueil des gens du voyage, ou de deux habitants par place de caravane pour les communes éligibles l'année précédente à la DSU ou à la fraction « bourg-centre » de la DSR.
C'est en général à cette « population DGF » qu'il est fait référence en matière de DGF et, plus largement, en matière de péréquation.
b) La population de Mayotte fait l'objet d'un recensement spécifique
Le calcul de la « population DGF » des communes du département de Mayotte est effectué conformément au IV de l'article 252 de la loi de finances pour 202159(*). Entre 2021 et 2025, la population prise en compte est celle déterminée par un décret60(*) authentifiant un recensement de 2017, à laquelle est appliquée un taux d'évolution résultant, pour chaque commune, d'une estimation de la population municipale de Mayotte par l'Insee.
Aucune disposition ne prévoit la transition entre ce recensement spécifique et le recensement de droit commun, qui doit redevenir la référence pour le calcul de la population DGF à Mayotte à compter de 2026.
Aucune disposition ne prévoit la prise en compte de ce recensement spécifique pour la répartition du fond de solidarité régionale (FSR - article L. 4332-9 du CGCT).
2. Les indicateurs de ressources : potentiel fiscal et potentiel financier
Régis par l'article L. 2334-4 du CGCT, le potentiel fiscal et le potentiel financier visent à prendre en compte, pour une commune donnée, l'ensemble de la richesse potentiellement perçue sur son territoire, dont celle tirée de son appartenance à un EPCI.
Le potentiel fiscal d'une commune est déterminé par l'application aux bases communales des quatre taxes directes locales, soit la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB), la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) et la cotisation foncière des entreprises (CFE), du taux moyen national d'imposition à chacune de ces taxes.
Il prend également en compte les montants et produits communaux et intercommunaux des principales impositions établies au profit des collectivités territoriales, au premier rang desquels, jusqu'en 2023, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), mais également les impositions forfaitaires sur les entreprises de réseau (Ifer), la taxe additionnelle à la TFPNB, ou encore la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom). Il prend également en compte des ressources liées à la compensation de la perte ou du transfert de ressources fiscales, telles que les reversements et prélèvements au titre du fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR), la compensation liée à la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle (CPS) ou encore les attributions de compensations (AC) versées par les EPCI.
Le potentiel financier de la commune correspond quant à lui à son potentiel fiscal majoré de la dotation forfaitaire perçue l'année précédente à laquelle sont cependant susceptibles de s'appliquer certaines minorations61(*).
Le potentiel fiscal des EPCI est quant à lui régi par l'article L. 5211-29 du CGCT. Son calcul fonctionne selon des modalités similaires. Le même article définit également un coefficient d'intégration fiscale (CIF), qui permet, à des fins de répartition de la DGF, de mesurer l'intégration d'un EPCI au travers du rapport entre la fiscalité qu'il lève et la totalité de la fiscalité levée sur son territoire par les communes et leurs groupements. Il constitue un indicateur de la part des compétences exercées au niveau du groupement.
Enfin, compte tenu de sa répartition au niveau de l'ensemble intercommunal formé par l'EPCI et ses communes membres, la répartition du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) fait intervenir un troisième indicateur, le potentiel fiscal agrégé (PFIA), régi par l'article L. 2336-2 du CGCT.
3. L'effort fiscal
Pour mémoire, l'effort fiscal a initialement pour objet de mesurer le degré de pression fiscale des communes sur leurs ménages. Il repose sur le principe qu'une part plus importante de la péréquation doit être dirigée vers les communes fragiles mobilisant déjà fortement leurs bases fiscales plutôt qu'en direction de communes qui disposent encore de marges fiscales importantes. Afin de mesurer cette pression fiscale, l'effort fiscal se calcule en divisant les produits effectivement perçus sur le territoire de la commune au titre des taxes sur les ménages par les produits potentiels de ces mêmes taxes. Les produits au numérateur étant des produits réels, ils intègrent les impôts perçus tant par la commune que par l'EPCI au titre des impôts « ménages ».
Formule de calcul de l'effort fiscal des communes jusqu'en 2021
TFPB : taxe foncière sur les propriétés bâties ; TFPNB : taxe foncière sur les propriétés non bâties ; TH : taxe d'habitation ; TAFNB : taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties ; TEOM : taxe d'enlèvement des ordures ménagères ; REOM : redevance d'enlèvement des ordures ménagères.
Note : L'écrêtement mentionné concerne le mécanisme prévu aux trois derniers alinéas de l'article L. 2334-5 du CGCT prévoyant un mécanisme de minoration du produit pris en compte lorsque l'augmentation du taux moyen pondéré de la commune est supérieure à celle constatée pour les communes de même importance démographique.
Source : commission des finances du Sénat
Les travaux du CFL ont cependant remis en cause la pertinence de l'indicateur au regard des évolutions de la fiscalité locale. En premier lieu, sa finalité qui est de mesurer la pression fiscale exercée sur les ménages se heurterait au fait que, via la prise en compte de la TFPB, l'effort fiscal concerne également la pression exercée sur les entreprises. En second lieu, le mécanisme du coefficient correcteur issu de la suppression de la taxe d'habitation pour les communes entraîne une déconnexion entre les ressources perçues par la commune et celles acquittées par les contribuables qui résident sur son territoire.
Pour cette raison, et dans la lignée de réflexions engagées dans le cadre du CFL, l'article 194 de la loi de finances initiale pour 2022 a prévu une nouvelle rédaction de l'article L. 2334-5 du CGCT afin de redéfinir l'effort fiscal dans sa philosophie et dans son mode de calcul. L'indicateur aurait désormais pour fonction non plus de mesurer la pression fiscale exercée sur les ménages d'une commune donnée mais de mesurer la fiscalité effectivement levée par une commune par rapport à la fiscalité qu'elle peut effectivement mobiliser.
Ces réflexions conduisent à prendre pour référence non plus les ménages mais la commune, écartant ainsi les produits intercommunaux des impôts ménages qui n'auraient plus de pertinence selon cette conception renouvelée de l'effort fiscal.
La nouvelle formule proposée prévoirait ainsi de calculer l'effort fiscal comme le rapport entre les produits réels des impôts sur lesquels les communes conservent un pouvoir de taux (TH sur les résidences secondaires, TFPB, TFPNB) et le produit potentiel afférent à ces impôts.
Formule de calcul de l'effort fiscal des communes depuis 2022
Note : TFPB : taxe foncière sur les propriétés bâties ; TFPNB : taxe foncière sur les propriétés non bâties ; THRS : taxe d'habitation sur les résidences secondaires.
Source : commission des finances du Sénat
Le même article a assuré la coordination avec l'article L. 2336-2 du CGCT pour le calcul de l'effort fiscal agrégé (EFA) utilisé dans le cadre du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC).
En application de l'article 252 de la loi de finances initiale pour 2021 dans sa rédaction issue de la loi de finances initiale pour 2022, l'impact de cette réforme a cependant été intégralement neutralisé en 2022, via l'application des fractions de corrections mise en place dans le cadre plus large de la refonte des indicateurs financiers issu de la réforme de la taxe d'habitation (voir supra).
La loi de finances initiale pour 2023 a ensuite prévu une nouvelle neutralisation intégrale du dispositif au titre de l'année 2023. Alors que les rapporteurs spéciaux avaient à nouveau souhaité neutraliser intégralement cette réforme en 2024, la loi de finances pour 2024 n'a procédé à cette neutralisation qu'à hauteur de 90 %.
4. Les indicateurs de charges pris en compte dans les dotations de péréquation
Là où les indicateurs de ressources permettent de mesurer la richesse des collectivités, les indicateurs de charges visent à mesurer leurs besoins. S'ils sont relativement peu utilisés en droit français62(*), certains d'entre eux constituent des références classiques permettant d'objectiver - de manière imparfaite - les charges qui pèsent sur les collectivités locales afin de répartir aux mieux les dotations péréquatrices au sein de la DGF.
a) Les critères de charges utilisés pour la répartition de la DSU
La DSU ayant pour objet « de contribuer à l'amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines confrontées à une insuffisance de leurs ressources et supportant des charges élevées », sont pris en compte pour sa répartition :
- le rapport entre la proportion des logements sociaux dans le total des logements de la commune et cette même proportion dans les communes de la même strate (2° de l'article L. 2334-17 du CGCT).
- le rapport entre la proportion des bénéficiaires d'aides au logement, y compris leur conjoint et les personnes à leur charge vivant habituellement dans leur foyer, dans le nombre total de logements de la commune et cette même proportion dans les communes de la même strate (3° du même article) ;
- le rapport entre le revenu moyen par habitant de la commune et le revenu moyen par habitant des communes de la même strate (4° du même article).
Si la définition des bénéficiaires d'aides au logement63(*) et du revenu moyen par habitant64(*) est relativement aisée, ce n'est pas le cas des logements sociaux. Le sixième alinéa de l'article L. 2334-17 du CGCT étend ainsi cette qualification :
- aux logements locatifs appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré, aux sociétés d'économie mixte locales et aux filiales de la société ICADE ;
- aux logements de la Société nationale immobilière ou de ses filiales qui appartenaient au 1er janvier 2006 à la société ICADE et qui sont financés selon certaines conditions ;
- aux logements faisant l'objet d'une opération de requalification de copropriétés dégradées reconnue d'intérêt national selon les modalités définies à l'article L. 741-2 du code de la construction et de l'habitation (ORCOD-IN) ;
- aux logements appartenant à l'Entreprise minière et chimique et aux sociétés à participation majoritaire de l'Entreprise minière et chimique, aux logements appartenant aux houillères de bassin, aux sociétés à participation majoritaire des houillères de bassin ainsi qu'aux sociétés à participation majoritaire des Charbonnages de France, aux logements de la Société nationale immobilière qui appartenaient au 1er janvier 2001 aux Houillères du bassin de Lorraine et aux sociétés à participation majoritaire des Houillères du bassin de Lorraine et aux logements appartenant à l'Établissement public de gestion immobilière du Nord-Pas-de-Calais et aux logements locatifs ayant bénéficié de prêts spéciaux consentis par le Crédit foncier de France appartenant à des personnes morales autres que celles citées ci-dessus, à la condition qu'ils constituent sur le territoire d'une commune un ensemble d'au moins 2 000 logements.
b) Les critères de charges utilisés pour la répartition de la DSR
La DSR vise quant à elle à « tenir compte, d'une part, des charges [que les chefs-lieux d'arrondissement de moins de 20 000 habitants] supportent pour contribuer au maintien de la vie sociale en milieu rural et, d'autre part, de l'insuffisance de leurs ressources fiscales. » La DSR est ainsi répartie en référence à des critères de charges, tels que :
- la longueur de la voirie classée dans le domaine public communal, cette longueur étant doublée pour les communes de montagne et les communes insulaires (2° de l'article L. 2334-22 du CGCT) pour 30 % de la fraction de péréquation ;
- le nombre d'enfants de trois à seize ans domiciliés dans la commune lors du dernier recensement (3° du même article) pour 30 % de la fraction de péréquation ;
- le rapport entre la moyenne sur trois ans du revenu par habitant des communes appartenant au même groupe démographique et de cette même moyenne pour la commune concernée (b de l'article L. 2334-22-1 du CGCT) pour la fraction « cible », les revenus pris en compte étant les trois derniers revenus fiscaux de référence connus et la population prise en compte étant la « population DGF ».
B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : DIVERS AJUSTEMENTS DES CRITÈRES DE PÉRÉQUATION DU BLOC COMMUNAL
1. Une prise en compte des ORCOD-IN dans la « population DGF »
Le 1° du I du présent article tend à modifier l'article L. 2334-2 du CGCT afin de majorer la « population DGF » de 0,5 habitant supplémentaire pour chaque logement faisant l'objet d'une opération de requalification des propriétés dégradées reconnue d'intérêt national en application de l'article L. 741-2 du code de la construction et de l'habitation (ORCOD-IN).
2. S'agissant de la DSU et de la DSR, de nouvelles définitions des logements sociaux et du linéaire de voirie pris en comptes
Le 7° du I de l'article 61 prévoit en outre de modifier l'article L. 2334-17 du CGCT afin de changer la définition des logements sociaux pris en compte dans le rapport mentionné au 2° de l'article L. 2334-17 du CGCT. Seraient dorénavant considérés comme des logements sociaux les logements locatifs recensés au sein du répertoire des logements locatifs sociaux et de leurs occupants, prévu à l'article L. 411-10 du code de la construction et de l'habitation. Il est également précisé que les logements faisant l'objet d'une ORCOD-IN seraient toujours considérés comme des logements sociaux au sens de ces dispositions.
Le 10° du même I tend à modifier l'article L. 2334-22 du CGCT pour permettre la réforme du critère de la longueur de voirie utilisée pour la répartition de la fraction « péréquation » de la DSR. Il est proposé de ne plus tenir compte de la longueur de la voirie classée dans le domaine communal, mais de plusieurs types de voirie définies par décret en Conseil d'État.
Le 11° du même I prévoit également que, dans les communes sous secret fiscal pour lesquelles la moyenne du revenu par habitant sur les trois dernières années ne peut être connue, il soit tenu compte de la moyenne trisannuelle du revenu par habitant des communes appartenant au même groupe démographique.
Enfin, le 9° du I apporte une précision s'agissant de la définition des unités urbaines par l'Insee.
3. La prise en compte du versement de la dotation de compensation de la part « salaires » (CPS) directement aux EPCI
Pour tenir compte du fait que la dotation de compensation de la part « salaires » de la taxe professionnelle (CPS), perçue au profit des EPCI, est désormais obligatoirement reversées à ses communes membres dans les EPCI ne faisant pas application du régime de la fiscalité professionnelle unique (FPU)65(*), le a du 2° du I du présent article inclut le montant dû l'année précédente à la commune par son EPCI d'appartenance au titre de ce reversement obligatoire dans le potentiel fiscal des communes.
Par parallélisme, le 3° du III du présent article prévoit que le potentiel fiscal des EPCI ne faisant pas application de la FPU soit minoré du montant de la CPS qu'ils ont reversé à leurs communes membres.
Le 2° du III renforce enfin la transparence des critères de répartition de la CPS, en proposant un traitement simplifié des mouvements de communes entre EPCI. Il est proposé que lorsqu'une commune change d'EPCI, la dotation de compensation de son ancien EPCI soit minoré d'une part correspondant au poids de cette commune dans la population totale de l'EPCI, la dotation du nouvel EPCI étant majorée d'autant.
Le 4° du III procède à une coordination.
4. Des ajustements concernant les Outre-mer
Le b du 5° du I prévoit que la quote-part de la dotation d'aménagement destinée aux communes d'Outre-mer soit désormais prélevée directement sur la dotation d'aménagement des communes, et non plus sur la seule dotation nationale de péréquation. Par parallélisme, le a du 6° du I abroge l'article L. 2334-14-1 du CGCT.
Le 12° du I prévoit d'élargir l'éligibilité à la dotation particulière d'exercice des mandats locaux aux communes d'Outre-mer de moins de 5 000 habitants. Actuellement, le seuil d'éligibilité des communes ultramarines est fixé à 1 000 habitants, comme en métropole.
Le IV du présent article prévoit divers ajustements relatifs au recensement spécifique au département de Mayotte. Les a et b modifient le IV de l'article 252 de la loi de finances pour 2021 afin que la population résultant du recensement dérogatoire à Mayotte soit prise en compte pour la répartition du prélèvement et de l'attribution au titre du fonds de solidarité régionale, notamment s'agissant du nombre de personnes âgées de quinze à dix-huit ans.
Enfin, le c du IV prévoit d'insérer un IV bis au sein de l'article 252 de la loi de finances pour 2021 afin de prévoir, en 2026, que les attributions des communes mahoraises au titre de la dotation forfaitaire et de la quote-part de la dotation d'aménagement destinée aux communes d'Outre-mer (article L. 2334-13 du CGCT) ne puissent être inférieures à celles perçues l'année précédente au même titre. Il est prévu une compensation interne de cette garantie, opéré au sein de la dotation de péréquation des communes d'Outre-mer (III de l'article L. 2334-23-1 du CGCT).
5. Diverses mesures visant à rectifier des erreurs matérielles
Le présent article comporte également des dispositions d'ordre divers ou visant à rectifier des erreurs matérielles ou à abroger des dispositions inutiles ou obsolètes.
Ainsi, le second tiret du b du 2° du I, le b du 6° du I ou encore le b du 13° du I visent à supprimer des dispositions qui ont perdu leur actualité.
Le b du 6° du I du présent article propose de modifier l'article L. 2334-14-1 du CGCT afin de prendre en compte la fraction de TVA affectée au bloc communal à la suite de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) dans la loi de finances pour 202366(*) pour la répartition de la majoration de la dotation nationale de péréquation (DNP), modification, qui aurait dû être faite l'année dernière.
Le VI abroge un gage inutile.
C. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : SI LES AJUSTEMENTS DES CRITÈRES DE PÉRÉQUATION SONT ACCEPTABLES DANS LEUR ENSEMBLE, LA RÉFORME DE L'EFFORT FISCAL CONTINUE DE SUSCITER DES DIFFICULTÉS
1. La prise en compte ORCOD-IN dans la « population DGF », qui concernerait un nombre restreint de collectivités, doit permettre de tenir compte de certaines charges spécifiques
Plusieurs instruments existent pour assurer le traitement des copropriétés dégradées. Parmi ces instruments figurent notamment les opérations de requalification de copropriétés dégradées (ORCOD)67(*).
Leur objectif est de traiter des quartiers entiers avec un engagement fort des collectivités, des outils et des actions spécifiques. Ces ORCOD peuvent être mises en place par l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements. Chaque ORCOD fait l'objet d'une convention entre personnes publiques qui peut prévoit notamment68(*) :
- un dispositif d'intervention immobilière et foncière, incluant des actions d'acquisition, de travaux et de portage de lots de copropriété ;
- un plan de relogement et d'accompagnement social des occupants ;
- la mobilisation de dispositifs de lutte contre l'habitat indigne ;
- la mise en oeuvre d'actions ou d'opérations d'aménagement.
L'État peut également déclarer d'intérêt national une ORCOD - on parle alors d'ORCOD-IN - si l'opération de requalification présente des enjeux majeurs en matière d'habitat dégradé, une complexité de traitement particulière et nécessite de lourds investissements (article L. 741-2 du code de la construction et de l'habitation).
Les ORCOD, et singulièrement les ORCOD-IN, résultent ainsi en de nombreuses charges spécifiques pour les communes sur le périmètre desquelles elles sont déclarées. La population DGF « logarithmée » paraît un indicateur approprié pour tenir compte des charges spécifiques qu'impliquent les ORCOD-IN pour les communes où elles sont déclarées.
L'application d'un coefficient logarithmique à la « population DGF »
L'introduction d'un coefficient logarithmique pour le calcul de la DGF a été inspiré par plusieurs travaux économétriques ayant mis en évidence la croissance des charges subies par les communes en fonction de leur population. On parle à ce propos de « charges de centralité ».
Pour mieux appréhender ce phénomène, un tel coefficient a été introduit pour le calcul de la dotation de base de la dotation générale de fonctionnement (DGF) des communes par la loi de finances pour 2005. Celui-ci varie de 1 (communes de 0 à 500 habitants) à 2 (communes de plus de 200 000 habitants). Dans cet intervalle, la population prise en compte pour le calcul de la DGF (« population DGF ») suit une progression logarithmique par rapport à la population réelle.
Source : commission des finances du Sénat
La population DGF est déjà majorée d'un habitant par résidence secondaire et d'un habitant - voire deux habitants dans certaines conditions69(*) - par place de caravane située sur une aire d'accueil de gens du voyage. Dès lors, une majoration de 0,5 habitant par logement faisant l'objet d'un ORCOD-IN n'apparaît pas sans pertinence.
Un très faible nombre de collectivités seraient concernées, puisqu'il n'existe que cinq ORCOD-IN : Bas Clichy (Clichy-sous-Bois) depuis 2015, Grigny 2 à Grigny depuis 2016, Val Fourré à Mantes-la-Jolie depuis 2020, le Parc de la Noue à Villepinte depuis 2021 et Pissevin à Nîmes en 2022. Les effets redistributifs entre commune au sein de l'enveloppe de la DGF devraient donc être minimes, c'est pourquoi les rapporteurs spéciaux n'ont pas jugé utile de revenir sur cette proposition.
2. Le critère des logements sociaux fait enfin l'objet d'un élargissement bienvenu
Le périmètre retenu pour le nombre de logements sociaux permettant de calculer la répartition de la DSU ne correspond pas à celui de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (dite « loi SRU »). Le rapport Pires-Beaune - Germain de 2015 avait déjà relevé qu'il s'agissait « d'une source d'incompréhension pour les collectivités »70(*).
À l'époque, cette différence était justifiée par le fait que l'inventaire réalisé dans le cadre de la loi « SRU » n'était pas exhaustif, ce qui constituait « un frein majeur à une harmonisation à court terme des deux périmètres ».
Depuis 201771(*), le ministère du logement a cependant développé un répertoire des logements locatifs et de leurs occupants (RPLS), établi à partir des données transmises obligatoirement par les bailleurs sociaux. La portée obligatoire du reporting et la liste extensive de bailleurs retenus pour l'application de ces dispositions ont ainsi permis d'améliorer considérablement l'exhaustivité du répertoire.
Ce dernier concerne en effet :
- les organismes d'habitations à loyer modéré (HLM) ;
- les sociétés d'économie mixte (SEM) de construction et de gestion de logements sociaux ;
- la société anonyme Sainte Barbe ;
- l'association foncière logement, filiale d'Action logement, et les sociétés civiles immobilières dont les parts sont détenues pour au moins 99 % par cette association ;
- les organismes bénéficiant de l'agrément prévu à l'article L. 365-2 du CCH.
Le champ des logements sociaux concernés par le RPLS est donc sensiblement plus large que celui défini pour le calcul de la DSU à l'article L. 2334-17 du CGCT.
Selon l'administration, sa fiabilisation permettra à l'avenir de fonder les calculs de répartition de la DSU sur ces données, ce qui devrait conduire à apprécier plus finement le nombre de logement sociaux existants dans chaque commune et, corrélativement, les charges qui en résultent pour les communes.
Entendue par les rapporteurs spéciaux, l'administration a indiqué que les effets redistributifs entre communes de ce changement de base de données devraient être très faibles. Compte tenu des règles strictes régissant l'évolution de la DSU - les communes qui perdent l'éligibilité à cette dotation bénéficient d'un mécanisme de garantie non renouvelable prenant la forme d'une attribution égale à la moitié de celle qu'elle a perçue l'année précédente72(*) et les communes éligibles deux années de suite bénéficient d'une garantie de non-baisse73(*) -, cette affirmation semble crédible.
3. Une nouvelle tentative de réformer le critère de voirie afin de tenir compte de son transfert obligatoire aux EPCI
Le critère de voirie utilisé pour la répartition de la DSR a fait l'objet d'une tentative de réforme dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023.
Il avait alors été proposé de le supprimer, pour le remplacer par un critère de superficie, pondéré par un coefficient de densité et un coefficient de population Cette option avait fait l'objet de travaux au cours de l'année 2022 au sein du CFL.
À l'époque, l'un des arguments mobilisés contre le critère de voirie était qu'il s'agissait d'un critère inéquitable dans la mesure où l'appartenance d'une commune à une métropole ou à une communauté urbaine (soit près de 1 500 communes) entraîne l'obligation de transférer la propriété de la voirie communale à l'intercommunalité, celle-ci ne pouvant dès lors plus être prise en compte dans le calcul de la DSR puisque seule l'est la voirie « classée dans le domaine public communal »74(*).
Ces communes peuvent donc être potentiellement exclues d'une partie de leur DSR alors même que les charges que l'indicateur est censé représenter, liées à l'étendue et à la densité du territoire communal n'ont pas évolué et qu'une commune présentant des caractéristiques similaires mais appartenant à une autre catégorie de groupement ne le serait pas.
Le Sénat avait toutefois rejeté cette proposition de modification, jugeant que la disparition de la référence à la longueur de la voirie communale, qui constitue l'une des principales charges des communes rurales, n'était pas opportune.
Le texte aujourd'hui présenté se propose simplement de supprimer la référence à la voirie « classée dans le domaine public communal », et de prendre comme données de référence les données de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), uniformes et fiables, afin d'éliminer le biais lié à la forme juridique de l'intercommunalité.
Dans la mesure où cet ajustement permet de conserver le critère de la longueur de voirie et d'appréhender les charges des communes rurales de manière uniforme, sans biais de gestion, les rapporteurs spéciaux acceptent la modification proposée par le Gouvernement.
4. La nécessité d'atténuer l'impact de la réforme du calcul de l'effort fiscal sur les communes
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2022, les rapporteurs spéciaux avaient jugé la réforme de l'effort fiscal prématurée alors que la délibération n° 2021-12 du CFL du 20 juillet 2021 se limitait à « l'envisager ». Il est à noter que cette solution n'était d'ailleurs présentée que comme transitoire par le CFL, qui estimait que l'indicateur pourrait être à terme remplacé par la prise en compte du seul revenu par habitant de la commune, sous réserve d'une évaluation des conséquences d'un tel remplacement.
En retirant de la formule de calcul de l'indicateur la prise en compte des produits fiscaux intercommunaux, il est acquis que son application serait très pénalisante pour les communes membres d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) fortement intégrés.
Le Gouvernement, contre l'avis alors exprimé par la commission des finances, a persisté dans sa volonté de maintenir dans la loi le principe de la réforme, tout en neutralisant son impact au titre de 2022.
Les premières simulations présentées au CFL par la DGCL courant 2022 ont documenté l'impact très important de cette réforme sur les communes. Si la fraction de correction n'avait pas été appliquée, elle aurait entraîné des évolutions moyennes de l'effort fiscal supérieures à 5 % dans l'ensemble des strates, et pouvant aller jusqu'à 16 %. L'impact aurait été particulièrement important dans les strates les plus peuplées et parmi les communes de moins de 500 habitants.
Simulation de l'impact de la réforme de
l'effort fiscal en 2022
en l'absence de
neutralisation
EC : effort fiscal ; FC : fraction de correction.
Source : Direction générale des collectivités locales
Le PLF pour 2025 ne comporte aucune disposition sur ce sujet. Cette lacune est particulièrement dommageable dans la mesure où, en l'absence de nouvelle disposition dérogatoire, le rythme de dégressivité de la neutralisation du nouveau mode de calcul retrouverait son niveau initialement prévu, ce qui impliquerait une neutralisation à hauteur de seulement 60 % en 2025.
Ce passage d'un coefficient de neutralisation de 90 % en 2024 à un coefficient de 60 % en 2025 représenterait, selon l'association des maires de France et des présidents d'intercommunalités (AMF), « une marche particulièrement élevée, produisant des effets négatifs importants sur les dotations des communes les plus pénalisées par la nouvelle définition. »
Dégressivité du coefficient
appliqué à la fraction de correction de la
réforme
des indicateurs financiers des communes et
ensembles intercommunaux
Année |
Coefficient appliqué à la fraction de correction (trajectoire initiale) |
Coefficient appliquée à la fraction de correction (trajectoire dérogatoire) |
Évolution de la fraction de correction |
2022 |
1 |
1 |
- |
2023 |
0,9 |
1 |
0 |
2024 |
0,8 |
0,9 |
-0,1 |
2025 |
0,6 |
0,6 |
-0,3 |
2026 |
0,4 |
0,4 |
-0,2 |
2027 |
0,2 |
0,2 |
-0,2 |
2028 |
0 |
0 |
-0,2 |
Source : commission des finances du Sénat
Afin de préserver les communes affectées par la réforme du calcul de l'effort fiscal tout en évitant de creuser encore l'écart entre la trajectoire dérogatoire et la trajectoire initialement prévue pour la dégressivité du coefficient de neutralisation, la commission a adopté l'amendement II-9 (FINC.2) des rapporteurs spéciaux, qui neutralise les effets de cette réforme à hauteur de 80 % en 2025.
III. LES MESURES RELATIVES AUX COMMUNES NOUVELLES
A. LE DROIT EXISTANT : L'ATTRIBUTION DE LA DGF AUX COMMUNES NOUVELLES FAIT L'OBJET DE RÈGLES SPÉCIFIQUES
1. La loi de finances pour 2024 a créé une nouvelle dotation en faveur des communes nouvelles
Le régime juridique des communes nouvelles est issu de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales75(*). Au 1er janvier 2023, la France compte 795 communes nouvelles. Avant la loi de finances pour 2024, et dans l'objectif d'inciter les communes à fusionner, un régime dérogatoire à la répartition de droit commun de la DGF a été institué au profit de ces communes.
La loi de finances pour 202476(*) a institué, à compter du 1er janvier 2024, une nouvelle dotation sous forme de prélèvement sur les recettes de l'État destinée aux communes nouvelles regroupant une population inférieure ou égale à 150 000 habitants l'année de leur création.
Cette dotation, calculée selon des modalités prévues à l'article L. 2113-22-1 du code général des collectivités territoriales, se compose de deux parts :
1° une part d'amorçage destinée à accompagner la création de communes nouvelles ;
2° une part de garantie destinée à compenser, pour les communes nouvelles bénéficiaires de la dotation, une éventuelle baisse des attributions perçues au titre de la DGF.
Les attributions au titre de la part d'amorçage de la dotation s'élèvent, pour les trois premières années suivant la création de la commune nouvelle, à 15 euros par habitant depuis la loi de finances pour 2024.
S'agissant de la part de garantie, deux cas de figure sont distingués :
- pour les communes nouvelles dont l'arrêté de création a été pris avant le 2 janvier 2023, l'attribution au titre de cette part est égale à la différence, si elle est positive, entre le montant perçu en 2023 au titre de la DGF, multiplié chaque année par le taux d'évolution de la DGF, et le montant perçu au titre de cette même dotation par la commune nouvelle l'année de répartition ;
- pour les communes nouvelles dont l'arrêté de création a été pris après le 2 janvier 2023, cette attribution est égale à la différence, si elle est positive, entre la somme des attributions perçues au titre de la DGF par les communes fusionnées l'année précédant la création de la commune nouvelle, multipliée chaque année par le taux d'évolution de la DGF, et le montant perçu au titre de cette même dotation par la commune nouvelle l'année de répartition.
Cette garantie est pérenne, et non limitée à trois ans comme elle l'était jusqu'en 2023.
2. Des règles spécifiques sont prévues en cas de division de communes
En cas de division d'une commune, l'article L. 2334-12 du CGCT prévoit que la dotation forfaitaire de l'ancienne commune est répartie entre chaque nouvelle commune au prorata de la population.
S'agissant de la répartition des dotations de péréquation, la loi de finances pour 202477(*) a comblé le vide juridique relatif aux règles de répartition des dotations de péréquation entre les communes issues d'une division. Ainsi, en cas de division de communes, tant que les données permettant de calculer les indicateurs financiers de ces communes ne sont pas disponibles, les indicateurs financiers applicables sont ceux calculés pour l'ancienne commune l'année précédant la division, répartis entre elles au prorata de leur population.
La loi ne prévoit toutefois toujours pas les modalités de répartition des dotations n'entrant pas dans la composition de la DGF entre communes issues d'une division de commune.
B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : DE NOUVELLES MESURES DE PRÉCISION SUR LE RÉGIME FINANCIER DES COMMUNES ISSUES DE FUSIONS OU DE DIVISIONS
1. La prise en compte de la nouvelle dotation en faveur des communes nouvelles dans le potentiel financier de ces communes
Le premier tiret du b du 2° du I du présent article modifie le IV de l'article L. 2334-4 du CGCT afin de majorer le potentiel financier des communes du montant perçu l'année précédente au titre de la dotation en faveur des communes nouvelles. Le a du 13° du I procède à la même modification s'agissant du potentiel financier agrégé.
2. De nouvelles précisions sur les indicateurs applicables aux communes issues d'une division de communes
Le 3° du I du présent article vise à poursuivre l'effort de précision s'agissant des indicateurs applicables aux communes issues d'une division de commune. L'article L. 2334-6 du CGCT est à nouveau modifié pour prévoir qu'en cas de division de communes, tant que les données permettant de calculer les indicateurs financiers de ces communes ne sont pas disponibles, la répartition de la dotation particulière pour l'exercice des mandats locaux (DPEL - article L. 2335-1 du CGCT), de la dotation pour les titres sécurisés (DTS - article L. 2335-16 du CGCT), de la dotation de soutien aux communes pour la préservation des aménités rurales (article L. 2335-17 du CGCT) ainsi que pour la répartition des prélèvements et des attributions au titre du Fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) et du fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF), les indicateurs financiers applicables seraient ceux calculés pour l'ancienne commune l'année précédant la division, répartis entre elles au prorata de leur population.
Le 4° du I précise également les modalités de répartition de l'écrêtement subi par une commune issue d'une division de communes sur sa dotation forfaitaire afin de financer la progression de la dotation forfaitaire des communes dont la population augmente. Il est proposé que les recettes réelles de fonctionnement utilisées pour calculer le montant de cet écrêtement soient réparties entre les communes issues de la division au prorata de leurs population.
Le VII prévoit enfin l'application des dispositions relatives au calcul de la dotation forfaitaire en cas de division de communes (article L. 2334-12 du CGCT) aux communes de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, de même que l'application des dispositions portant sur la dotation d'aménagement (article L. 2334-13 du CGCT) et la dotation particulière d'exercice des mandats locaux (DPEL - article L. 2335-1 du CGCT) aux communes de la Polynésie française et de la Nouvelle -Calédonie, ainsi qu'aux circonscriptions territoriales de Wallis-et-Futuna.
C. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : DES DISPOSITIONS PRINCIPALEMENT TECHNIQUES QUI NE POSENT GUÈRE DE DIFFICULTÉ
En cas de division de commune, aucun indicateur financier n'est disponible la première année pour permettre la répartition de la DGF. Les rapporteurs spéciaux considèrent que la définition de tels indicateurs à partir du prorata de la population de ces communes est une solution simple et lisible qui peut s'appliquer temporairement aux communes concernées.
De même, l'inclusion dans le potentiel financier des communes nouvelles du montant qui leur est versé au titre de la dotation de garantie se justifie dans la mesure où cet indicateur prend déjà en compte la dotation forfaitaire, à laquelle la dotation de garantie est comparable.
IV. LA RECONDUCTION DU RÉABONDEMENT DU FONDS D'AIDE POUR LE RELOGEMENT D'URGENCE
A. LE DROIT EXISTANT : LE FONDS D'AIDE POUR LE RELOGEMENT D'URGENCE A ÉTÉ PROROGÉ ET RÉABONDÉ À PLUSIEURS REPRISES
Le fonds d'aide pour le relogement d'urgence (Faru) est régi par les dispositions de l'article 39 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 codifiées à l'article L. 2335-15 du CGCT. Il permet d'accorder des aides financières aux communes ou aux EPCI pour assurer, pendant une période maximale de six mois, le relogement d'urgence ou le relogement temporaire de personnes occupant des locaux représentant un danger pour leur santé ou leur sécurité et faisant l'objet d'une ordonnance d'expulsion ou d'un ordre d'évacuation. Il peut également leur être attribuée une aide pour mettre les locaux hors d'état d'être utilisables.
L'aide, versée sous forme de subvention, est destinée à recouvrir tout ou partie (75 % ou 100 %) des frais engagés.
L'octroi des subventions est actuellement réalisé par le ministre de l'intérieur, après instruction par le préfet de département.
Le dispositif, qui devait s'éteindre en 2020, a fait l'objet d'une prorogation d'un an en loi de finances initiale pour 2020 puis de cinq ans, soit jusqu'à 2025, en loi de finances initiale pour 202178(*).
En 2006, 2018, 2020 et 2024, le Faru a fait l'objet d'un abondement exceptionnel financé par un prélèvement sur l'enveloppe de la DGF. En loi de finances initiale pour 2024, cet abondement était de 2,5 millions d'euros.
B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN NOUVEAU RÉABONDEMENT DU FONDS D'AIDE POUR LE RELOGEMENT D'URGENCE PRÉLEVÉ SUR LA DGF DU BLOC COMMUNAL
Le V du présent article vise à prévoir, en 2025, un nouvel abondement du Faru financé par un prélèvement à hauteur de 2,5 millions d'euros sur l'enveloppe de DGF du bloc communal.
C. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE MESURE QUI NE DOIT PAS DISPENSER D'UNE RÉFLEXION STRUCTURELLE SUR L'AVENIR DU FONDS
Les rapporteurs spéciaux prennent acte de cette proposition.
Si l'abondement proposé ne représente qu'une part marginale de l'enveloppe de la DGF du bloc communal (2,5 millions d'euros sur un total de DGF de 18,6 milliards d'euros), les rapporteurs spéciaux réitèrent leur appel à ce qu'une réflexion structurelle s'engage rapidement au sujet de la pérennité et du niveau de dotation de ce fonds.
Décision de la commission : la commission propose d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 62
Répartition du fonds de
péréquation des ressources intercommunales et communales
(FPIC)
Le présent article prévoit une réforme des modalités de répartition du prélèvement au titre du FPIC dans le cadre de la Métropole du Grand Paris (MGP), à la suite de la censure par le Conseil constitutionnel, à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), des dispositions régissant cette matière depuis la création de la Métropole. Il est proposé de rapprocher sensiblement le droit applicable à la MGP du droit commun, objectif auquel les rapporteurs souscrivent.
Le présent article procède également à la rectification d'une erreur de plume s'agissant de la définition des ressources fiscales agrégées, qui détermine le plafond de prélèvement au titre du FPIC auquel peuvent être soumises les communes contribuant au fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF). Il procède également à la validation législative des actes administratifs pris en méconnaissance du texte erroné.
La commission propose d'adopter cet article sans modification.
I. LE DROIT EXISTANT : L'ÎLE-DE-FRANCE SE CARACTÉRISE PAR DES MODALITÉS PARTICULIÈRES D'INTÉGRATION AU FPIC
A. POUR LES ENSEMBLES INTERCOMMUNAUX FRANCILIENS, LA CONTRIBUTION AU FPIC EST PLAFONNÉE EN FONCTION DES « RESSOURCES FISCALES AGRÉGÉES »
En droit commun, les entités contributrices ou bénéficiaires du FPIC sont des ensembles intercommunaux (EI), correspondant à l'ensemble d'un établissement public de coopération intercommunale et de ses communes membres, ou des communes isolées. Sont contributeurs au fonds, les ensembles intercommunaux ou communes isolées dont le potentiel financier agrégé par habitant excède 90 % du potentiel financier agrégé79(*) moyen par habitant80(*).
Une fois déterminés les ensembles intercommunaux contributeurs, la contribution est répartie entre eux. Cette répartition est effectuée selon deux critères81(*) :
- un indice synthétique de ressources et de charges ;
- la population, affectée d'un coefficient logarithmique allant de 1 à 2, ce qui bénéficie aux ensembles intercommunaux ou communes isolées les plus peuplés.
Au sein d'un même ensemble intercommunal, la contribution est, d'abord, répartie entre l'EPCI et ses communes membres en fonction du coefficient d'intégration fiscale (CIF), de telle sorte que la contribution repose sur les EPCI dans les intercommunalités plus intégrées, et sur les communes dans les intercommunalités les moins intégrés. La contribution non-acquittée par l'EPCI est ensuite répartie entre les communes membres, en fonction du potentiel financier par habitant de ces communes, les mieux dotées étant appelées à davantage contribuer.
Les communes franciliennes sont en outre appelées à contribuer aux fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF), qui redistribue les ressources communales prioritairement au sein de cette région où les écarts de richesse sont très importants. S'agissant du FSRIF, sont contributrices les communes franciliennes dont le potentiel financier par habitant est supérieur au potentiel financier moyen des communes de la région.
Pour éviter que les contributions demandées aux communes franciliennes ne soient excessives en comparaison des communes des autres régions, l'article L. 2336-3 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que la somme, pour une même commune, des prélèvements au titre du FPIC et au titre du FSRIF, ne puisse être supérieure à 14 %82(*) du produit de leurs « ressources fiscales agrégées »83(*). Cette notion recouvre l'ensemble des ressources fiscales entrant dans le calcul du potentiel fiscal agrégé défini aux 1° à 7° de l'article L. 2336-2 du CGCT.
B. LA MÉTROPOLE DU GRAND PARIS EST INTÉGRÉE, SELON DES MODALITÉS DÉROGATOIRES, AU FONDS DE PÉRÉQUATION DES RESSOURCES INTERCOMMUNALES ET COMMUNALES (FPIC)
1. Le financement de la Métropole du Grand Paris : un « compromis boiteux »
Créée au 1er janvier 2016 en application de l'article 12 de la loi « MAPTAM » du 27 janvier 201484(*), la métropole du Grand Paris (MGP) est un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre regroupant pour l'essentiel Paris et les communes de la « petite couronne » (départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne). Les communes qui la composent appartiennent également à des établissements publics territoriaux (EPT) qui ont « remplacé », à compter de 2016, les EPCI qui existaient avant la création de la MGP tout en couvrant de nouvelles communes, jusqu'alors isolées.
Le schéma de financement de la MGP, qualifié de « compromis boiteux » par un rapport sénatorial85(*), a ainsi été adapté pour tenir compte de cette architecture à trois niveaux : un principe de « neutralité financière » a ainsi été consacré, qui implique de nombreux transferts financiers entre communes, ETP et MGP, résumés dans le schéma infra.
Les EPT ne perçoivent plus les ressources dont bénéficiaient les anciens EPCI, à l'exception de la cotisation foncière des entreprises (CFE) pour laquelle le 1° du A du XV de l'article 59 de la loi « NOTRe »86(*) a prévu qu'elle reste temporairement établie au profit des EPT. En lieu et place des autres ressources, le même article a institué un fonds de compensation des charges transférées (FCCT) versé annuellement par les communes, désormais prévu par le XI de l'article L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales. Ce fonds comprend :
- une fraction égale au produit de la taxe d'habitation (TH), de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) perçu par l'EPT à hauteur du produit perçu par l'EPCI existant au 31 décembre 2015 ;
- initialement et à compter de 2021, une fraction de la CFE perçue par la commune en 2020.
Schéma de financement de la MGP
Source : Forum métropolitain du Grand Paris (décembre 2021)
La neutralité financière est obtenue, entre EPT et MGP, par la création d'une dotation d'équilibre87(*), permettant de comparer les ressources perçues en 2015 par les EPCI préexistants et celles perçues en 2016 par les EPT. Si un de ces établissements perçoit moins en 2016 que ce qu'il percevait en 2015, c'est la MGP qui lui verse la différence sous la forme de cette dotation d'équilibre et inversement.
S'agissant enfin des relations entre la MGP et les communes, ces flux concernent notamment les attributions de compensation (AC), auparavant reversées par les EPCI à leurs communes membres. Figées à leur niveau de 202088(*), elles représentent 3,4 milliards d'euros de versement de la MGP aux communes89(*).
2. La Métropole du Grand Paris est intégrée au FPIC selon des modalités dérogatoires
Du fait du schéma de financement unique de la MGP, la participation de la métropole du Grand Paris à la péréquation horizontale incarnée par le fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) a également été adaptée.
La Métropole du Grand Paris étant de loin la plus peuplée (environ 7 millions d'habitants, contre 2 millions pour Marseille Provence Métropole par exemple) ce sont les EPT qui ont été désignés comme ensembles intercommunaux, et non la Métropole. Ce choix vise à garantir un niveau significatif de contribution de la MGP - celui-ci aurait en effet été insuffisamment élevé du fait du coefficient logarithmique90(*).
Sur le territoire de la MGP, les modalités de répartition de la contribution au FPIC au sein des EPT divergent du droit commun : alors qu'ailleurs en France le coefficient d'intégration fiscale permet la répartition de la contribution entre l'EPCI et ses communes membres, dans la Métropole du Grand Paris la contribution des EPT est égale à la contribution acquittée en 2015 par les EPCI qui leur préexistaient. De même, alors qu'en droit commun la part non acquittée par l'EPCI est répartie entre les communes en fonction de leur potentiel financier par habitant, au sein d'un EPT le b du 2° de l'article L. 5219-8 du code général des collectivités territoriales, cette répartition entre les communes est réalisée en fonction des prélèvements acquittés par chacune d'elles en 2015.
Ces modalités de répartition, introduites en nouvelle lecture lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2016 à l'Assemblée nationale91(*) sans qu'elles puissent être sérieusement examinées, étaient jugées nécessaires par le Gouvernement « afin d'éviter des variations trop importantes dans la répartition du FPIC en conséquence de la création de la MGP »92(*).
C. UNE CENSURE DES MODALITÉS DÉROGATOIRES DE RÉPARTITION DE LA CONTRIBUTION AU FPIC, SUR LE FONDEMENT DE L'ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES
1. Une erreur rédactionnelle a conduit à omettre la TVA au sein des ressources fiscales agrégées
La fin de l'affectation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) au bloc communal a conduit à cesser de prendre en compte le produit de cette imposition dans le potentiel fiscal des communes et des intercommunalités93(*) pour la répartition du fonds de péréquation des ressources communales et intercommunales.
Compte-tenu du remplacement de la CVAE du bloc communal par une fraction de TVA, partiellement répartie selon des modalités héritées des mécanismes de répartition de la CVAE entre collectivités affectataires94(*), il était nécessaire de substituer cette fraction de TVA à la CVAE dans le calcul du potentiel fiscal agrégé (8° du I de l'article L. 2336-2 du CGCT).
Le 3° du I de l'article L. 2336-3 du CGCT, qui fixe le plafond de 14 % des ressources fiscales au-delà duquel les communes contributrices au FSRIF ne sont plus tenues de contribuer, renvoie vers les 1° à 7° du I de l'article L. 2336-2 du CGCT. L'article 240 de la loi de finances pour 2024 a omis de modifier cette disposition afin de faire référence aux 1° à 8° du I, ce qui aurait inclus la TVA transférée.
En l'absence de cette coordination, le plafond de 14 % des ressources fiscales agrégées s'est ainsi retrouvé fixé à un niveau substantiellement plus faible qu'escompté. Cette situation, très avantageuse pour les communes franciliennes, a fait peser une forte insécurité juridique sur les prélèvements au titre du FPIC pour l'exercice 2024, de nombreuses décisions de prélèvements ayant été prises en méconnaissance de la lettre de la loi - erronée - bien qu'en conformité avec son esprit.
Il est en effet très clair que le législateur n'a pas entendu exclure la fraction de TVA du calcul du potentiel fiscal agrégé. Les rapporteurs spéciaux avaient ainsi noté dans leur rapport spécial sur le PLF 2024 que le projet de loi visait « à substituer au produit agrégé de CVAE perçu par l'EPCI et les communes membres (...) le produit agrégé de TVA perçu par eux »95(*).
2. Une censure des modalités dérogatoires de répartition de la contribution au FPIC, sur le fondement de l'égalité devant les charges publiques
Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par la commune de Saint-Cloud - qui contestait l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine portant prélèvement sur les ressources de l'ensemble intercommunal de Paris-Ouest-La-Défense pour l'exercice 2022 - et transmise par le Conseil d'État96(*), le Conseil constitutionnel a retenu que le fait de figer une clé de répartition fondée sur les prélèvements dus pour une année, sans qu'il soit tenu compte de l'évolution des capacités contributives des communes depuis cette année et alors que certaines communes avaient bénéficié, en 2015, du plafonnement au titre de leur participation au FSRIF, était constitutif d'une différence de traitement entre les communes membres d'un même ETP.
La censure du 25 avril 2024
10. Toutefois, en figeant une règle de répartition qui est fondée sur les prélèvements des communes calculés en 2015 et qui intègre le plafonnement dont certaines avaient bénéficié au titre de cette année, ces dispositions instaurent une différence de traitement entre les communes membres d'un même établissement public territorial, sans qu'il soit tenu compte de l'évolution de leurs capacités contributives depuis cette date.
11. S'il était loisible au législateur de prévoir, à titre transitoire, une règle de répartition dérogatoire pour les prélèvements des communes membres d'un établissement public territorial de la métropole du Grand Paris tenant compte de ceux calculés au titre de l'année 2015, il ne pouvait, compte tenu de l'objet du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, laisser subsister de façon pérenne une telle différence de traitement sans porter une atteinte caractérisée à l'égalité devant les charges publiques.
Source : décision n° 2024-1085 QPC du 25 avril 2024, Commune de Saint-Cloud
Le Conseil a ainsi déclaré les dispositions du b du 2° de L. 5219-8 du code général des collectivités territoriales contraires à la Constitution.
Dans l'immédiat, le Conseil a fait le choix, compte-tenu des conséquences qu'entrainerait l'abrogation immédiate de la disposition contestée, de fixer sa date d'abrogation au 1er janvier 2025. Il a également enjoint aux juridictions devant lesquelles des recours similaires sont pendants de surseoir à statuer jusqu'à l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions ou jusqu'au 1er janvier 2025, pour préserver l'effet utile de sa décision pour les requérants.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : REMÉDIER À DEUX ILLÉGALITÉS ET AMÉNAGER LEURS SUITES CONTENTIEUSES
A. LA CORRECTION D'UNE ERREUR DE PLUME QUI S'ACCOMPAGNE D'UNE VALIDATION LÉGISLATIVE
Le 1° du I rectifie l'erreur matérielle conduisant à ne pas prendre en compte la fraction de TVA affectée au bloc communal parmi les ressources fiscales agrégées.
Le II procède à la validation législative, sous réserve des décisions de justice passée en force de chose jugée, des actes par lesquels l'État a procédé en 2024 aux prélèvements destinés à alimenter le FPIC sans tenir compte du plafond de 14 % des ressources fiscales agrégées fixé au 3° du I de l'article L. 2336-3 du CGCT, pour ce seul motif d'illégalité.
B. POUR LA MÉTROPOLE DU GRAND PARIS, UN RETOUR AU DROIT COMMUN APPLICABLE DANS LES INSTANCES EN COURS
Le 2° du I du présent article tire les conséquences de la censure du Conseil constitutionnel. Il abroge les modalités dérogatoires de répartition interne du prélèvement (a du 2° du I) ainsi que des attributions (b du 2° du I) au titre du FPIC entre les communes membres d'un même EPT. Il remplace ces dispositions par les modalités de droit commun de répartition des prélèvements et des attributions au titre du FPIC au sein d'un même ensemble intercommunal, en s'appuyant sur le potentiel financier par habitant et la population.
Le III prévoit l'application de l'article L. 5219-8 du CGCT, dans sa rédaction résultant du présent article, aux instances en cours devant les juridictions à la date de publication de la loi de finances initiale pour 2025.
Le 3° du I procède à une précision rédactionnelle.
*
* *
L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi de finances, elle n'a pas adopté cet article.
III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE INTERVENTION LÉGISLATIVE NÉCESSAIRE ET PROPORTIONNÉE, QUI POURRAIT TOUTEFOIS MIEUX MAÎTRISER SES EFFETS DE BORD
A. LA VALIDATION LÉGISLATIVE PROPOSÉE SEMBLE CONFORME À LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
La validation législative - ou « loi de validation » - est un expédient auquel il est recouru lorsqu'il apparaît que l'illégalité dont est entaché un acte administratif aboutirait à son annulation et qu'il semble approprié, du fait des inconvénients qu'aurait son annulation pour l'intérêt général, de lui conférer, par le vote d'une loi, une immunité juridictionnelle. Compte tenu de l'atteinte portée à la séparation des pouvoirs et à l'accès au juge, un tel procédé est très encadré.
Si la technique des lois de validation n'est pas en elle-même contraire à la Constitution97(*), elle doit, sous peine d'être censurée par le Conseil constitutionnel ou écarté par le juge ordinaire lors d'un contrôle de conventionnalité, respecter plusieurs conditions :
- la portée de la validation doit être limitée et précisée par le législateur - la validation ne doit pas, en particulier, interdire tout contrôle juridictionnel de l'acte validé quelle que soit l'illégalité invoquée par les requérants98(*) ;
- la loi de validation doit réserver le cas des décisions juridictionnelle passées en force de chose jugée, c'est-à-dire toute décision rendue par une juridiction statuant en dernier ressort, même si elle peut faire ou fait l'objet d'un pourvoi en cassation99(*) ;
- le législateur ne peut procéder à la validation rétroactive d'un acte administratif que pour « un motif impérieux d'intérêt général » et seulement si l'acte validé ne méconnaît « aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le motif impérieux d'intérêt général soit lui-même de valeur constitutionnelle »100(*).
En l'occurrence, la portée de la validation à laquelle il est procédé à l'article 62 est strictement limitée au seul motif d'illégalité résultant de la méconnaissance du plafond de 14 % des ressources fiscales agrégées fixé au 3° du I de l'article L. 2336-3 du CGCT.
En outre, le cas des décisions de justice passées en force de chose jugée est réservé par le texte qui a été soumis au Parlement.
Enfin, la validation proposée est justifiée par un motif impérieux d'intérêt général. En effet, de nombreux actes administratifs ont été pris par les services déconcentrés de l'État afin de répartir le prélèvement annuel au titre du FPIC. Or la direction générale des collectivités territoriales (DGCL), entendue par les rapporteurs spéciaux, a indiqué avoir procédé à la répartition du prélèvement au titre du FPIC pour 2024 en se fondant sur une interprétation de la loi certes contraire à sa lettre, mais manifestement conforme à l'intention du législateur. Ainsi l'intégralité des actes administratifs portant prélèvement au titre du FPIC pour 2024 sont entachés d'une illégalité en méconnaissance de la lettre de la loi, temporairement affectée d'une erreur matérielle.
Or le respect de la lettre de la loi, en méconnaissance de la volonté du législateur manifestée dans l'exposé des motifs du projet de loi ainsi que dans les travaux préparatoires, aurait abouti à appliquer un prélèvement trop faible aux ensembles intercommunaux dont la contribution au FPIC est plafonnée. En l'occurrence, deux ensembles intercommunaux, Paris et l'établissement public territorial Paris-Ouest-La-Défense, auraient été concernés. Si leur contribution avait été réduite, une part substantielle du prélèvement au FPIC aurait ainsi été reporté sur des ensembles intercommunaux dont les capacités contributives réelles étaient inférieures.
Si ces actes n'avaient pas été pris, ou s'ils avaient été pris dans le strict respect de la lettre de la loi, il aurait pu en résulter une méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques, applicable aux dispositions législatives régissant les prélèvements au titre du FPIC101(*). Si ces actes devaient être annulés, cela remettrait en cause l'ensemble des prélèvements sur les ressources des ensembles intercommunaux, avec des effets redistributifs importants, incertains et injustes entre ensembles intercommunaux (EI) et entre communes.
Or le Conseil constitutionnel a déjà pris en compte, pour reconnaître l'existence d'un motif impérieux d'intérêt général dans le cadre d'une loi de validation, la volonté de prévenir les conséquences contentieuses d'une malfaçon législative méconnaissant l'intention du législateur102(*).
Enfin, dans la mesure où cette validation vise à assurer une juste péréquation des ressources entre collectivités, ce qui est un principe constitutionnel103(*) elle apparaît conforme aux autres règles et principes constitutionnels.
B. LE RETOUR AU DROIT COMMUN POUR LA MÉTROPOLE DU GRAND PARIS, APPLICABLE AUX LITIGES EN COURS, AURA POUR EFFET DE MINORER LE MONTANT MIS EN RÉPARTITION EN 2025
1. Si les règles régissant la péréquation au sein de la MGP se rapprochent du droit commun, elles conservent certaines particularités
a) Les conséquences de la censure du juge constitutionnel sont pleinement tirées
Le présent article tire les conséquences directes de la censure du juge constitutionnel en prévoyant un retour au droit commun s'agissant du prélèvement au titre du FPIC. Ainsi, au sein d'un EPT, le prélèvement sera à l'avenir réparti entre les communes en fonction de leur potentiel financier par habitant et de leur population, comme c'est le cas sur le reste du territoire, et non en fonction des prélèvements qu'elles ont acquitté en 2015, modalité de répartition qui ne se justifie plus.
Les rapporteurs spéciaux se félicitent que le Gouvernement ait également entendu prévenir une nouvelle censure potentielle s'agissant des modalités de répartition du versement des attributions au titre du FPIC aux collectivités bénéficiaires. En effet, en l'état du droit, ces attributions sont également reversées entre les communes membres d'un même EPT en fonction des attributions qui leur ont été versées en 2015. La logique qui a prévalu lors de la censure des modalités de répartition du prélèvement aurait pu, en théorie, également conduire à la censure de ces dispositions.
b) Quelques particularités de la MGP demeurent, sans apparaître risquer la censure
Le présent article ne modifie en rien à la désignation des EPT comme ensembles intercommunaux en lieu et place de la Métropole, qui semble préservée du risque de censure dans la mesure où la différence ainsi créée entre la MGP et les autres métropoles semble fondée « sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l'objectif de la loi »104(*) en raison de la population de la MGP et du coefficient logarithmique.
De même, la répartition du prélèvement entre les EPT et leurs communes membres pourrait faire l'objet d'une contestation, puisqu'il déroge au droit commun en prévoyant une clé de répartition figée à partir des contributions de 2015, sans faire intervenir le coefficient d'intégration fiscale (CIF). Toutefois, la spécificité des EPT et de leur mode de financement, qui ne permet pas de calculer de CIF, peut justifier une telle différence avec les autres EPCI ; la censure de ces dispositions apparaît donc relativement peu probable.
2. L'application des nouvelles dispositions aux instances en cours aura pour effet de minorer le montant global du FPIC en 2025
Si l'article L. 2336-1 du code général des collectivités territoriales dispose que les ressources du FPIC sont fixée à 1 milliard d'euros à compter de 2018, le montant mis en répartition au titre de ce fonds n'est pas nécessairement aussi élevé.
En effet, l'article L. 2336-5 du même code prévoit que les ressources du FPIC sont réparties entre les ensembles intercommunaux, EPCI et communes bénéficiaires « après prélèvement d'un montant égal aux régularisations effectuées l'année précédente », et après le prélèvement d'une quote-part dédiées aux communes et EPCI des départements d'Outre-mer. Par exemple, le montant mis en répartition au titre du FPIC était de 986,5 millions d'euros en 2023.
Ainsi, si la décision du Conseil constitutionnel devait conduire à l'annulation des actes de prélèvements au titre du FPIC contestés dans des instances en cours, le montant prélevé à tort viendra minorer le prélèvement subi par les collectivités requérantes pour l'année à venir.
Décision de la commission : la commission propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 63
Répartition des produits des taxes
afférentes aux laboratoires géologiques
et aux centres de
stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde
destinés au stockage de déchets radioactifs de haute
activité
et de moyenne activité à vie longue
(Cigéo)
Le présent article :
- encadre par la loi les modalités de répartition du produit du tarif de stockage de la taxe sur les installations nucléaires de base (IBN) afférente au centre de stockage de déchets radioactifs existant actuellement dans l'Aube, sans rendre nécessaire un changement de la situation actuelle ;
- prévoit les modalités de répartition du tarif de stockage afférent au centre de stockage Cigéo, qui doit ouvrir à compter de 2030 ;
- propose une adaptation, à titre transitoire dans l'attente de l'ouverture de Cigéo, de la répartition du tarif d'accompagnement afin d'accompagner les collectivités dans la mise en oeuvre du projet de territoire autour de ce centre.
La commission propose d'adopter cet article sans modification.
I. LE DROIT EXISTANT : UNE PARTIE DE LA FISCALITÉ SUR LES INSTALLATIONS NUCLÉAIRES DE BASE, RÉFORMÉE PAR L'ARTICLE 5 DU PLF 2025, EST AFFECTÉE AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
La fiscalité sur les installations nucléaires de base comprend actuellement six impositions : la taxe sur les installations nucléaires de base stricto sensu, la contribution spéciale pour la gestion des déchets radioactifs, la contribution de radioprotection et de sûreté nucléaire, et enfin les trois taxes additionnelles dite « d'accompagnement », de « recherche » et de « stockage ».
L'ensemble de ces impositions est dû annuellement, à compter de la délivrance de l'autorisation de création de l'installation jusqu'à son déclassement. Des tarifs et exonérations peuvent être appliqués pendant la phase de démantèlement. Ces impositions ont également la particularité de ne pas être codifiées.
Elles diffèrent cependant en termes d'assiette et d'affectation. En particulier, trois de ces impositions - la taxe additionnelle « recherche », la taxe additionnelle « accompagnement », et la contribution spéciale pour la gestion des déchets radioactifs - sont directement affectées à des entités en lien avec le projet « Cigéo » (centre industriel de stockage géologique), qui sera implanté à la frontière des départements de la Meuse et de la Haute-Marne. Le tableau suivant présente un récapitulatif de la taxation des installations nucléaires de base.
Taxations sur les installations nucléaires de base
Nom |
Types d'installations taxées |
Rendement (en millions d'euros) |
Affectataire |
Référence juridique |
Taxe sur les installations nucléaires de base |
Toutes |
558 |
Budget général |
Article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 |
Contribution de radioprotection et de sûreté nucléaire |
60,5 |
Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) |
Article 96 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 |
|
Taxe additionnelle « d'accompagnement » |
Production d'énergie, ou retraitement du combustible usé |
57 |
Groupements d'intérêt public (GIP) « Objectifs Meuse » et « Haute-Marne » |
V. de l'article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 |
Taxe additionnelle « de recherche » |
65 |
Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), fonds « recherche » |
||
Contribution spéciale pour la gestion des déchets radioactifs |
80,7 |
ANDRA, fonds « conception » |
Article 58 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 |
|
Taxe additionnelle « de stockage » |
Stockage |
58 |
Collectivités territoriales aux alentours de l'installation |
VI. de l'article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 |
Note : l'affectation des taxes additionnelles est régie par l'article L. 542-12-1 du code de l'environnement. L'affectation de la contribution spéciale pour la gestion des déchets radioactifs est prévue par l'article L. 542-12-3 du code de l'environnement.
Source : commission des finances du Sénat, commentaire de l'article 5 du PLF 2025
Les centres de stockage des déchets
nucléaires, le projet « Cigéo »
et
l'Agence nationale pour la gestion des déchets nucléaires
(ANDRA)
Les déchets nucléaires sont classifiés à travers une double catégorisation, selon le niveau de leur activité (calculée en becquerels/gramme) et la durée de leur « vie ». Les déchets nucléaires les plus actifs et à la durée de vie longue sont les plus dangereux - certains peuvent d'ailleurs perdurer pendant plusieurs centaines de milliers d'années.
Aujourd'hui, les déchets à très faible activité sont stockés dans le centre industriel de regroupement, d'entreposage et de stockage (CIRES) situé à Morvilliers dans l'Aube, et les déchets de faible activité ou d'activité moyenne à vie courte sont gérés par le centre de stockage de déchets radioactifs de Soulaines-Dhuys, dans le même département.
Les déchets nucléaires de haute activité ou d'activité moyenne à vie longue auront quant à eux vocation à être stockés dans un centre de stockage géologique profond, nommé « Cigéo », qui sera implanté à la frontière entre les départements de la Meuse et de la Haute-Marne.
Classification des déchets nucléaires et mode de gestion
Source : direction générale de l'énergie et du climat
En France, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) est l'établissement public à caractère industriel et commercial chargé de la gestion des déchets nucléaires. Elle est notamment l'agence qui assure la gestion du projet Cigéo. L'ANDRA est un opérateur rattaché au programme 174 « Energie, climat et après-mines » de la mission « Écologie, développement et mobilité durable ».
La loi n° 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs, dite loi « Bataille », avait déterminé trois options pour la gestion des déchets radioactifs de haute activité (ou de moyenne activité à vie longue) : la séparation-transmutation, l'entreposage de longue durée et le stockage géologique profond. La loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs, à la suite d'études menées par l'ANDRA et l'Agence de sûreté nucléaire (ASN), a tranché en faveur du stockage en couches géologique profonde.
En 2000, un laboratoire souterrain a été construit dans le territoire de la commune de Bure (Meuse) afin de préparer l'implantation du centre de stockage, qui devrait se situer à proximité. Il vise notamment à étudier les caractéristiques de la roche du site.
Le projet Cigéo a été déclaré d'utilité publique et opération d'intérêt national en 2022, et les premières constructions devaient démarrer en 2027, pour une mise en place prévue entre 2035 et 2040. L'article L. 542-10-1 du code de l'environnement, prévoit que le projet de Cigéo doit être réversible, et qu'il doit permettre d'intégrer les évolutions technologiques.
Source : commission des finances du Sénat, commentaire de l'article 5 du PLF 2025.
A. LA TAXE ADDITIONNELLE D'ACCOMPAGNEMENT EST REVERSÉE PRINCIPALEMENT À DEUX GROUPEMENTS D'INTÉRÊT PUBLIC (GIP) CONSTITUÉS DANS LES DÉPARTEMENTS SUR LE TERRITOIRE DESQUELS SE TROUVE UN LABORATOIRE GÉOLOGIQUE
Le V de l'article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 prévoit la création des taxes additionnelles « accompagnement » et « recherche ». L'assiette de ces taxes comprend l'ensemble des réacteurs nucléaires ainsi que les usines de traitement de combustibles nucléaires usés.
S'agissant de la taxe « d'accompagnement », l'article L. 542-11 du code de l'environnement prévoit que le produit de la taxe d'accompagnement est affecté aux groupements d'intérêt public (GIP) qui sont obligatoirement constitués dans chaque département sur le territoire duquel est situé tout ou partie du périmètre du laboratoire de Bure. Cette taxe est ainsi affectée aux GIP « Objectifs Meuse » et « Haute-Marne ».
Une fraction de cette taxe, dans la limite de 20 %, est également reversée au prorata de leur population aux communes de chaque département dont une partie du territoire est située à moins de dix kilomètres de l'accès principal au laboratoire de Bure. Depuis 2021, une autre fraction de cette taxe, également déterminée dans la limite de 20 %, peut être reversée aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) du département comprenant une ou plusieurs de ces communes au prorata de la population de ces dernières.
B. LA TAXE ADDITIONNELLE DE STOCKAGE EST EN PRINCIPE AFFECTÉE AUX COLLECTIVITÉS SITUÉES À PROXIMITÉ DES CENTRES DE STOCKAGE DES DÉCHETS RADIOACTIFS
Le VI de l'article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 prévoit une taxe additionnelle, dite de « stockage », dont l'assiette est constituée de toutes les installations servant à l'entrepôt des déchets nucléaires.
Le montant de la taxe est déterminé en multipliant une somme forfaitaire, calculée en faisant le produit de la capacité du stockage par une imposition au mètre cube, fixée à 2,2 euros/m, par un coefficient fixé par décret après avis des collectivités territoriales concernées, qui doit se situer dans les limites suivantes :
- pour les déchets de très faible activité, il doit être compris entre 0,05 et 0,5 ;
- pour les déchets de faible activité ou les déchets de moyenne activité à vie courte, il doit être compris entre 0,5 et 5 ;
- pour de déchets de haute activité et moyenne activité à vie longue, le coefficient n'est pas soumis à un plafond, et il est fixé par décret en Conseil d'État à partir du ratio de radioactivité au mètre cube des déchets de haute activité à vie longue.
La taxe n'est pas appliquée pour les installations de stockage de déchets de haute activité et moyenne activité à vie longue, dans la mesure où Cigéo n'existe pas encore.
Elle n'est pas non plus appliquée pour les déchets à très faible activité. En effet, soit ces déchets sont traités en amont, soit le stockage est réalisé au sein du centre industriel de regroupement, d'entreposage et de stockage (CIRES) situé à Morvilliers, qui relève du régime des installations classées pour la protection de l'environnement et n'est donc pas soumis aux taxes sur les installations nucléaires de base.
Pour les déchets de faible activité ou de moyenne activité à vie courte, le décret n° 2000-361 du 26 avril 2000, modifié par le décret n° 2013-737 du 12 août 2013, prévoit que le coefficient est de 1,5.
Le produit de la taxe additionnelle de stockage est affecté aux communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) situés autour des installations105(*). Dans les faits, la taxe additionnelle concerne uniquement le centre de stockage de l'Aube dédié aux déchets de faible et moyenne activité à vie courte (FMA-VC).
Le décret n° 2000-361 du 26 avril 2000 prévoit ainsi que cette taxe est reversée aux communes et aux EPCI des départements de l'Aube et de la Haute-Marne situés à l'intérieur du périmètre déterminé à partir de l'accès principal du centre de stockage de déchets radioactifs de Soulaines-Dhuys (Aube)106(*). La répartition des fractions de la taxe est la suivante :
- une fraction égale à 20 % du montant à répartir est reversée à la communauté de communes de Soulaines ;
- deux fractions, égales à respectivement à 25,31 % et à 6,69 % du montant à répartir, sont reversées respectivement aux communes membres de la communauté de communes de Soulaines, et à celles membres de la communauté de communes du pays du Der (Haute-Marne), au prorata de la population de chaque commune ;
- deux fractions, égales respectivement à 37,97 % et à 10,03 % du montant à répartir, sont reversées respectivement aux communes et EPCI du département de l'Aube et aux communes et EPCI du département de la Haute-Marne, dans un périmètre de solidarité autour de l'installation. Ces financements doivent être affectés à des projets de solidarité.
L'article 43 de la loi du 30 décembre 1999 de finances pour 2000 prévoit également que pour les centres de stockage de déchets de haute activité ou moyenne activité à vie longue, les départements et les régions d'implantation sont également affectataires de la taxe. Comme Cigéo n'existe pas encore, cette disposition n'a pas fait l'objet d'un décret d'application.
C. LA FISCALITÉ AFFÉRENTE AUX INSTALLATIONS NUCLÉAIRES DE BASE EST RÉFORMÉE PAR L'ARTICLE 5 DU PRÉSENT PROJET DE LOI DE FINANCES
L'article 5 du PLF pour 2025 codifie et rassemble les six impositions sur les installations nucléaires de base (INB) en deux taxes : la taxe sur les INB qui relèvent du secteur énergétique ou assimilées, qui aurait principalement pour assiette les réacteurs nucléaires, et la taxe sur les INB concourant à la gestion des substances radioactives (qui concernerait surtout les installations d'entrepôt et de stockage des déchets nucléaires).
Ainsi, la taxe additionnelle d'accompagnement deviendrait, en 2025, le tarif d'accompagnement de la taxe sur les INB qui relèvent du secteur énergétique ou assimilé, tandis que la taxe additionnelle de stockage deviendrait le tarif de stockage de la taxe sur les INB concourant à la gestion des substances radioactives.
Pour le tarif d'accompagnement, l'article 5 prévoit qu'il demeure affecté aux départements, aux EPCI et aux GIP des départements de la Meuse et de la Haute-Marne dans des conditions semblables à celles qui existent actuellement. L'affectation du tarif de stockage est entièrement définie un nouvel article L. 542-11-1 du code de l'environnement, créé par le présent article.
Comparaison entre l'ancienne et la nouvelle
architecture
de la fiscalité des installations nucléaires de
base
Droit existant |
Droit proposé |
Taxe sur les installations nucléaires de base relevant du secteur énergétique et assimilées |
|
Taxe sur les INB et contribution de sureté nucléaire et de radioprotection |
Tarif de base |
Taxe additionnelle de recherche |
Tarif de recherche |
Taxe additionnelle d'accompagnement |
Tarif d'accompagnement |
Contribution spéciale pour la gestion des déchets radioactifs |
Tarif de conception |
Taxe sur les installations nucléaires de base concourant à la gestion des substances radioactives |
|
Taxe sur les INB et contribution de sureté nucléaire et de radioprotection |
Tarif de base |
Taxe additionnelle de stockage |
Tarif de stockage |
Source : commission des finances du Sénat, commentaire de l'article 5 du PLF 2025.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : PENDANT DE L'ARTICLE 5 DU PLF 2025, LE PRÉSENT ARTICLE PRÉVOIT LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'AFFECTATION DES TARIFS D'ACCOMPAGNEMENT ET DE STOCKAGE AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
A. L'ABOUTISSEMENT DE LA DÉFINITION DU TARIF DE STOCKAGE ET LA CONSOLIDATION JURIDIQUE DES DISPOSITIONS EXISTANTES LE CONCERNANT
Le I du présent article tend à créer un nouvel article L. 542-10-2 dans le code de l'environnement afin de prévoir l'affectation du tarif de stockage jusqu'alors prévu uniquement par l'article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000.
Le A du I fixe des intervalles permettant au pouvoir réglementaire de déterminer le montant et les modalités de répartition de chaque fraction du produit du tarif de stockage entre les collectivités bénéficiaires.
Le B du I procède à la définition de trois zones concentriques permettant de répartir le produit du tarif de stockage entre les collectivités affectataires selon leur degré de proximité avec les installations de stockage. La détermination des collectivités relevant de chaque zone sera fixée par décret sur la base de ces définitions.
1. La définition des zones permettant de déterminer les collectivités concernées par l'affectation du tarif de stockage
Le 1° du B définit ainsi la zone d'implantation comme le territoire des communes et des EPCI où se trouve l'accès principal aux installations de stockage, ou à proximité immédiate de cet accès ;
Le 2° du B définit quant à lui la zone de proximité comme le territoire des communes et des EPCI situé à proximité de la zone d'implantation et concourant significativement à l'accueil des installations de stockage ;
Le 3° du B définit enfin la zone de solidarité comme le territoire des départements ou régions d'implantation des installations de stockage, ou dont la limite est située à moins de 10 kilomètres de leur accès principal, à l'exclusion des zones d'implantation et de proximité.
2. L'affectation des sommes recouvrées au titre des installations de stockage de déchets de très faible, de faible et de moyenne activité à vie courte (FMA-VC)
Le 1° du A du I prévoit l'affectation des sommes recouvrées au titre des installations de stockage de déchets de très faible, de faible et de moyenne activité à vie courte. Il s'agit du seul centre de stockage actuellement existant, situé à Soulaines-Dhuys dans l'Aube.
Le a de ce 1° prévoit qu'une fraction comprise entre 15 % et 25 % de ces sommes soit affectée aux EPCI de la zone d'implantation. Concrètement, il s'agit de la seule communauté de commune de Soulaines, qui serait l'affectataire unique de cette fraction.
Le b du 1° prévoit qu'une fraction comprise entre 25 % et 35 % de ces sommes soit affectée aux communes membres des EPCI de la zone de proximité. Cette fraction serait divisée en un nombre de parts égal au nombre d'EPCI concernés. La part d'un EPCI ne pourrait être ni inférieure à un cinquième, ni supérieure à quatre cinquièmes de la fraction. Elle serait ensuite reversée aux communes membres de ces EPCI au prorata de leur population. Concrètement, cette fraction est donc affectée aux communes membres de la communauté de commune de Soulaines et à celle de la communauté de communes du pays de Der, située dans le département voisin de la Haute-Marne.
Le c du 1° prévoit enfin qu'une fraction comprise entre 40 % et 60 % de ces sommes soit affectée aux communes et aux EPCI de la zone de solidarité. Cette fraction serait divisée en un nombre de parts égal au nombre de départements de la zone de proximité. La part de chaque département ne pourrait être ni inférieure à un cinquième, ni supérieure à quatre cinquièmes de la fraction. Elle serait ensuite reversée aux EPCI et communes pour la réalisation de projets concourant à la solidarité entre ces collectivités, sur la base d'un arrêté préfectoral pris sur proposition du conseil départemental. Concrètement, l'ensemble des communes et EPCI du département de l'Aube et du département de la Haute-Marne sont concernés.
3. L'affectation des sommes recouvrées au titre des installations de stockage de déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue (MHA-VL)
Le 2° du A du I prévoit l'affectation des sommes recouvrées au titre des installations de stockage de déchets de moyenne et de haute activité à vie longue. Il s'agit du centre de stockage de Cigéo, qui n'existe pas encore. De ce fait, la fiscalité concernée par ces dispositions n'est à ce jour productrice d'aucun revenu et ne devrait pas l'être avant 2030.
Le a de ce 2° prévoit qu'une fraction comprise entre 1 % et 10 % de ces sommes soit affectée aux communes de la zone d'implantation, à parts égales entre chaque commune bénéficiaire. Concrètement, seraient concernées les trois communes de Bure (Meuse - 55), de Saudron (Haute-Marne - 52) et Mandres-en-Barrois (55).
Le b du 2° prévoit qu'une fraction comprise entre 25 % et 45 % de ces sommes soient affectée aux EPCI de la zone d'implantation, à parts égales entre chaque EPCI bénéficiaire. Dans les faits, seraient concernées les deux communautés de communes des Portes de Meuse (55) et du bassin de Joinville-en-Champagne (52).
Le c du 2° prévoit qu'une fraction comprise entre 10 % et 25 % de ces sommes soit affectée aux EPCI de la zone de proximité. Cette fraction serait répartie entre les EPCI bénéficiaires dans des proportions comprises entre un vingtième et dix vingtièmes. Concrètement, les communautés d'agglomération de Bar-le-Duc Meuse (55) et du Grand Saint-Dizier Der (52), ainsi que la communauté de communes de Commercy Void Vaucouleur (55) pourraient être concernées.
Le d du 2° prévoit qu'une fraction comprise entre 25 % et 40 % de ces sommes soient affectée aux départements de la zone de solidarité. Cette fraction serait répartie entre les départements bénéficiaires dans des proportions comprises entre un quart et trois quarts. Ces dispositions concerneraient les deux départements de la Meuse et de la Haute-Marne.
Le e du 2° prévoit l'affectation d'une fraction comprise entre 1 % et 20 % de ces sommes aux régions de la zone de solidarité, c'est-à-dire, en l'espèce, à la seule région Grand-Est.
B. L'ADAPTATION DU FONCTIONNEMENT DE LA TAXE D'ACCOMPAGNEMENT JUSQU'À L'OBTENTION DE L'AUTORISATION DE CRÉATION DE CIGÉO
Le II du présent article crée un dispositif temporaire venant déroger aux dispositions de l'article L. 542-11-1 du code de l'environnement relatives aux modalités d'affectation du produit du tarif d'accompagnement.
Pour mémoire, cet article reconduit les dispositions en vigueur depuis 2000107(*), c'est-à-dire l'affectation de deux fractions définies dans la limite de 20 % aux communes de chaque département dont une partie du territoire est située à moins de dix kilomètres de l'accès principal au laboratoire de Bure et aux EPCI du département comprenant une ou plusieurs de ces communes au prorata de la population de ces dernières, le solde étant reversé aux GIP « Objectifs Meuse » et « Haute-Marne ».
Le II du présent article substitue une autre clé de répartition dans les départements sur le territoire duquel existe un laboratoire géologique mais où n'existe pas encore de centre de stockage. Dans ce cas, qui vise la situation de Cigéo pour lequel un laboratoire existe mais où le centre de stockage n'est pas encore ouvert, le produit du tarif d'accompagnement serait réparti en un nombre de parts égal au nombre de départements concernés - soit deux parts, d'une pour le département de la Meuse et l'autre pour celui de la Haute-Marne - chacune comprise entre un tiers et deux tiers.
Deux fractions chacune déterminée par décret dans la limite de 20 %, seraient prélevées sur chacune de ces parts et versées :
- pour la première fraction, aux communes du département dont une partie du territoire est distante de moins de dix kilomètres du laboratoire de Bure, au prorata de la population de ces communes ;
- pour la seconde fraction, aux EPCI du département comprenant une ou plusieurs de ces communes, au prorata de la population de ces dernières.
Le solde de chacune de ces parts serait reversé aux GIP « Objectifs Meuse » et « Haute-Marne ».
*
* *
L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi de finances, elle n'a pas adopté cet article.
III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : EN ATTENDANT CIGÉO, LA NÉCESSITÉ DE CONSOLIDER LES SOLUTIONS TROUVÉES SUR LE TERRAIN
A. LA CONSÉCRATION AU NIVEAU LÉGISLATIF DES DISPOSITIONS RELATIVES AU TARIF DE STOCKAGE VERSÉ DANS L'AUBE
Les dispositions relatives à la fiscalité afférente au centre de stockage de déchets de Soulaines-Dhuys dans l'Aube se bornent à consacrer au niveau législatif un cadre compatible avec les dispositions réglementaires d'application de la loi de finances pour 2000108(*), qui serait pour sa part abrogée. Ces dispositions prévoient déjà :
- l'affectation d'une fraction de 20 % du produit du tarif de stockage applicable au centre de Soulaines-Dhuys à la communauté de commune de Soulaines ;
- l'affectation de deux fractions de 25,31 % du montant à répartir aux communes membres de la communauté de communes de Soulaines et de 6,69 % de ce montant à celle du pays de Der ;
- l'affectation de deux fractions, l'une de 37,97 % du montant à répartir aux communes et EPCI du département de l'Aube, et l'autre de 10,03 % de ce montant aux communes et EPCI du département de la Haute-Marne.
Compatibilité des dispositions
réglementaires en vigueur
avec le cadre établi par le
présent article
Collectivités concernées |
Dispositions de l'article 63 |
Dispositions en vigueur |
CC de Soulaines |
Fraction comprise entre 15 % et 25 % |
Fraction de 20 % |
CC de Soulaines |
Fraction comprise entre 25 % et 35 %, répartie entre 1/5ème et 4/5èmes |
CC de Soulaines = 25,31 % |
Communes et EPCI de l'Aube |
Fraction comprise entre 40 % et 60 %, répartie au prorata de la population |
Aube = 37,97 % |
Source : commission des finances du Sénat
Les intervalles fixés par le 1° du A du présent article permettent de conserver cette répartition, qui ne devrait pas être amenée à évoluer.
B. POUR LE TARIF DE STOCKAGE AFFÉRENT À CIGÉO, LA DÉFINITION D'UNE CLÉ DE RÉPARTITION CONFORME AU RÉSULTAT DE LA CONSULTATION MENÉE SUR LE TERRAIN
L'application aux infrastructures de stockage des déchets radioactifs de la fiscalité de droit commun, essentiellement foncière, génèrerait une fois le centre de stockage mis en service des retombées fiscales à hauteur de 43 millions d'euros par an, ce qui constitue une manne financière non négligeable. Toutefois, en l'absence de règles d'affectation spécifiques, seules les collectivités d'implantation de centre en bénéficieraient, alors que le projet de territoire associé à la présence de ce centre est bien plus large. C'est pourquoi il a été décidé de substituer aux taxes foncières (qui font l'objet d'un abattement de 90 %), une répartition plus large du produit de la taxe de stockage109(*).
Le centre industriel de stockage géologique
(Cigéo)
et son territoire d'accueil
Source : Préfecture de la Meuse, Projet de développement du territoire pour l'accompagnement de Cigéo
Le projet de territoire tel que défini par la préfecture de la Meuse comprend en effet deux axes110(*). Il prévoit d'une part de réaliser les aménagements qui permettront la construction et l'exploitation de Cigéo, ce qui implique notamment :
- de densifier la desserte routière de proximité autour de Cigéo ;
- de réactiver une liaison ferroviaire jusqu'au centre de stockage ;
- de permettre l'acheminement des fluides par le déploiement des réseaux.
Le projet de territoire prévoit également, dans son second axe, de dynamiser le potentiel socio-économique de la zone de proximité :
- en créant les conditions d'un développement économique équilibré dès les aménagements préalables, par exemple en accompagnant les entreprises dans leur projet d'installation et de développement via une offre foncière et immobilière d'hyper proximité ;
- en mobilisant les outils susceptibles d'avoir un effet sur l'emploi, en accompagnant les demandeurs d'emploi et les publics en insertion afin qu'ils bénéficient des offres d'emploi générés par Cigéo ou en mettant en oeuvre la clause sociale pour les marchés relatifs au centre de stockage ;
- en offrant un habitat de proximité et énergétiquement performant, notamment par la rénovation de logements à proximité de la zone d'implantation ;
- en réinvestissant l'offre de santé sur le territoire.
Dans ces conditions, des modalités d'affectation permettant de faire bénéficier l'ensemble des collectivités locales qui prennent part au projet a été nécessaire. Une consultation menée par la préfecture de la Meuse a ainsi abouti à une répartition envisagée comme suit :
- l'affectation d'une fraction de 5 % à la région Grand Est, au titre de ses compétences de transport et de développement économique ;
- l'affectation d'une fraction de 33 % du montant généré par le tarif de stockage aux départements de la Meuse et le Haute-Marne, à répartir soit à 60 % pour les collectivités du premier département et à 40 % pour les collectivités du second, soit à parts égales ;
- l'affectation d'une fraction comprise entre 9 % du montant à répartir aux EPCI jouant un rôle de centralité à proximité du site - c'est-à-dire les communautés d'agglomération de Bar-le-Duc Meuse et du Grand Saint-Dizier Der, ainsi qu'une fraction de 2 % de ce montant à la communauté de commune de Commercy Void Vaucouleur, située à proximité de l'agglomération de Nancy - ;
- l'affectation d'une fraction de 36 % pour les deux EPCI de la zone d'implantation, soit l'affectation de 18 % à la communauté de communes des Portes de Meuse et de 18 % à la communauté de communes du bassin de Joinville-en-Champagne ;
- enfin, l'affectation d'une fraction de 2 % du produit du tarif de stockage à chaque commune d'implantation, soit 6 % répartis à parts égales entre les communes de Bure, de Saudron et de Mandres-en-Barrois.
Les rapporteurs spéciaux relèvent que la rédaction du présent article permettra, lorsque le centre de stockage de Cigéo aura ouvert, de mettre en oeuvre les solutions remontées du territoire et issues de la consultation menée par la préfecture de la Meuse.
Comparaison de la répartition envisagée avec le cadre établi par le présent article
Collectivités concernées |
Dispositions de l'article 63 |
Répartition envisagée |
Commune de Bure |
Fraction comprise entre 1 % et 10 %, répartie à parts égales |
Fraction de 2 % pour chaque commune |
CC des Portes de Meuse |
Fraction comprise entre 25 % et 45 %, répartie à parts égales |
Fraction de 18 % pour chaque EPCI Somme = 36 % |
CA de Bar-le-Duc Meuse |
Fraction comprise entre 10 % et 25 %, répartie entre 1/20ème et 10/20èmes |
Bar-le-Duc Meuse = 9 % |
Meuse |
Fraction comprise entre 25 % et 40 %, répartie entre 1/4 et 3/4 |
Pour les deux départements =
33 % |
Région Grand Est |
Fraction comprise entre 1 % et 20 % |
Fraction de 5 % |
Source : commission des finances du Sénat
C. UNE RÉPARTITION DÉROGATOIRE DU TARIF D'ACCOMPAGNEMENT DANS L'ATTENTE DE LA CRÉATION DE CIGÉO
L'ouverture du centre de stockage de Cigéo n'est toutefois pas prévue avant 2030 au plus tôt. Dans ces conditions, le tarif de stockage, dont le produit sera nul jusqu'à la date de mise en service du centre, ne saurait constituer une source de financement convenable pour le projet de territoire qu'il convient pourtant de mettre en oeuvre avant l'ouverture du site.
Le présent article propose en conséquence d'adapter, à titre transitoire, les modalités de répartition du produit du tarif d'accompagnement dans les départements sur le territoire desquels se trouve un laboratoire souterrain mais pas encore de centre de stockage, ce qui correspond précisément à la situation de Cigéo.
Les modalités de répartition dérogatoires, valables jusqu'à l'ouverture de Cigéo, seraient assez proches des modalités de droit commun, à deux exceptions près :
- plutôt que de prévoir que les GIP reversent les sommes aux communes et aux EPCI concernés, comme c'est le cas actuellement, l'article 5 comme l'article 63 du présent PLF prévoient que les fractions prélevées dans la limite de 20 % sont directement reversées aux communes et EPCI ;
- dans le dispositif transitoire (article 63), les parts de chaque département n'ont pas à être égales, contrairement à ce qui est proposé pour le nouveau droit commun (article 5). Le II du présent article prévoit en effet qu'elles soient déterminées par décret dans un intervalle compris entre un tiers et deux tiers.
Comparaison des dispositions existantes, du droit
commun proposé
et du dispositif transitoire de
l'article 63
Droit existant (article 43 LFI 2000 et mesures réglementaires) |
Droit commun proposé (article 5) |
Droit transitoire proposé
|
Fraction de maximum 20 % reversée par les GIP
aux communes des départements situés à moins de 10km de
Bure |
Versement direct aux communes |
Versement direct aux communes |
Fraction de maximum 20 % reversée par les GIP
aux EPCI des départements situés à moins de 10km de
Bure |
Versement direct aux EPCI |
Versement direct aux communes |
Solde versé aux GIP « Objectif
Meuse » et « Haute-Marne » |
Inchangé |
Inchangé |
Source : commission des finances du Sénat
Le peu de divergence entre le droit existant et le droit proposé, de même qu'entre le droit commun proposé à l'article 5 et le dispositif transitoire proposé à l'article 63, interroge.
Les rapporteurs spéciaux ont cru en trouver l'explication dans l'information qui leur a été transmise selon laquelle le Gouvernement avait initialement prévu d'instituer, avec le versement du solde aux GIP « Objectif Meuse » et « Haute-Marne », une troisième fraction déterminée par décret dans la limite de 4 %, qui aurait été reversée aux communes des EPCI sur le territoire desquels est situé l'accès principal du laboratoire souterrain, c'est-à-dire aux communes membres des communautés de communes des portes de Meuse et du bassin de Joinville en Champagne.
Cette phrase n'a finalement pas été introduite dans le texte car, le projet de loi ne prévoyant pas de modalité de répartition entre ces communes, une censure pour incompétence négative aurait pu être encourue. Ne disposant que de peu d'information à ce sujet, les rapporteurs spéciaux n'ont pas souhaité compléter cette lacune. Ils accueilleront toutefois favorablement des amendements en ce sens s'il apparaît qu'ils ne présentent pas de risque d'inconstitutionnalité.
Décision de la commission : la commission propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 64
Instauration et affectation d'un fonds de
réserve
au profit des collectivités territoriales
Le présent article crée un fonds de réserve des collectivités territoriales.
Ce fonds serait alimenté par un prélèvement, auquel seraient soumis les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre dont les dépenses réelles de fonctionnement (DRF) du budget principal excèdent 40 millions d'euros. Le montant du prélèvement, déterminé par l'écart entre un solde de référence et le solde constaté des collectivités locales, serait réparti entre les collectivités contributrices au prorata de leurs recettes réelles de fonctionnement (RRF), dans la limite de 2 % de ces RRF.
Les sommes affectées au fonds de réserve abonderaient, les trois années suivantes à raison d'un tiers par année, trois fonds de péréquation du bloc communal, des départements et des régions.
Les rapporteurs spéciaux estiment que le dispositif proposé est trop brutal et inabouti pour être acceptable. Le montant du prélèvement déterminé en vertu du critère d'écart de solde aboutirait en effet en 2025 à un prélèvement théorique de 14,2 milliards d'euros. Seules environ 450 collectivités étant concernées, celles-ci contribueraient toutes à hauteur de 2 % de leurs recettes réelles de fonctionnement, pour un « rendement » d'environ 3 milliards d'euros.
Le dispositif proposé est ainsi la source d'effets de seuil massifs entre les collectivités prélevées et celles qui sont exonérées du prélèvement, soit en raison de leur taille - mais non de leur richesse, ce qui paraît parfaitement injuste - soit au regard de critères, qui semblent avoir été définis de façon arbitraire et dans l'urgence.
Les rapporteurs spéciaux regrettent enfin que le Parlement soit ainsi dessaisi de la gouvernance du fonds. Par contraste, des marges de manoeuvre excessives seraient laissées au comité des finances locales (CFL) pour majorer les reversements du fonds de réserve et surtout pour répartir les sommes reversées entre le bloc communal, les départements et les régions.
Dans ces conditions, la commission a adopté l'amendement II-10 (FINC.3) des rapporteurs spéciaux visant à supprimer cet article.
La commission propose de supprimer cet article.
I. LE DROIT EXISTANT : LE COMPTE D'AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES PERMET À L'ÉTAT DE REVERSER AUX COLLECTIVITÉS LE PRODUIT DE LA FISCALITÉ LOCALE
A. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES » (ACT) VERSE PLUS DE 134 MILLIARDS D'EUROS DE RECETTES FISCALES
1. L'État collecte le produit de la fiscalité locale et le reverse aux collectivités par le biais du compte d'avances
Le compte d'avances aux collectivités territoriales, créé par le II de l'article 46 de la loi de finances pour 2006111(*), garantit aux collectivités, ainsi qu'à divers organismes, le versement par l'État du produit des impositions directes locales sous forme d'avances mensuelles régulières calculées en fonction du produit voté par les organes délibérants des collectivités.
Une régularisation s'effectue sur les derniers versements en fin d'année lors de la mise en recouvrement définitive de chaque impôt, indépendamment de la collecte de ce produit par les services de l'État. Il est rappelé que l'État procède seul à la collecte des impositions perçues sur rôle, y compris lorsque ces impositions sont perçues au profit des collectivités territoriales.
On parle de « douzièmes » de fiscalité pour désigner les versements mensuels réalisés par l'État via le compte d'avances. Ces « douzièmes » sont prévus à l'article L. 2332-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) s'agissant de la fiscalité affectée au « bloc communal », c'est-à-dire les communes et les établissements publics de coopérations intercommunale (EPCI), à l'article L. 3332-1-1 de ce même code s'agissant des départements et à l'article L. 4331-2-1 de ce code pour les régions.
2. L'augmentation des montants versés par l'intermédiaire du compte d'avances témoigne de l'interpénétration croissante des finances publiques locales et nationales
Le compte d'avances verse ainsi aux collectivités territoriales le produit de la fiscalité directe locale. C'est notamment le cas des taxes foncières sur les propriétés bâties (TFPB) et non bâties (TFNB), mais également la taxe d'habitation sur les seules résidences secondaires (THRS) depuis la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales (THRP), ainsi que des taxes additionnelles à ces impositions - comme, par exemple, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM).
Liste des taxes dont le produit transite par le compte d'avances
Les taxes transitant par le compte et dont le produit revient intégralement aux collectivités territoriales et à des organismes divers sont les suivantes :
- taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ;
- taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) ;
- taxe d'habitation (TH) (depuis 2021, seule la taxe d'habitation portant sur les résidences secondaires continue à transiter par le compte d'avances) ;
- taxe professionnelle (jusqu'à la fin de 2009 s'agissant des rôles généraux) ;
- taxe d'enlèvement des ordures ménagères (recouvrée avec la TF) ;
- taxe de balayage ;
- taxe pour frais de chambre d'agriculture (recouvrée avec la TF) ;
- taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie ;
- taxe pour frais de chambre des métiers ;
- taxe d'habitation sur les logements vacants.
Depuis 2011, transitent également par le compte d'avances dans le cadre de la réforme de la fiscalité directe locale :
- la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). À compter de 2023, cette taxe ne transite plus par le compte ;
- la cotisation foncière des entreprises (CFE) ;
- les impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux (IFER) ;
- la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) ;
- la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TA-TFPNB) ;
- la taxe additionnelle à la CVAE pour frais de chambre de commerce et d'industrie de région (TA-CVAE) ;
- les taxes additionnelles à la CFE pour frais de chambre de commerce et d'industrie de région (volet CCI-R de la TA-CFE) et pour frais de chambres régionales de métier et d'artisanat (volet CRMA de la TA-CFE).
Source : rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au projet de loi de finances pour 2025
Depuis la réforme de la taxe professionnelle, le produit des impositions directes locales pesant sur les entreprises, c'est-à-dire la contribution économique territoriale (CET), qui comprend le produit de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), mais également les impositions forfaitaires sur les entreprises de réseau (IFER) et la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), transite également par le compte. Depuis 2023, la CVAE ne fait plus l'objet de versement par le compte, puisque son produit est désormais entièrement perçu par l'État112(*).
La suppression de la THRP et de la CVAE a donné l'affectation par l'État de fractions de TVA aux collectivités afin de compenser la suppression de ces recettes locales. Ces fractions de TVA transitent également par le compte d'avances.
Ainsi, dans le cadre de la suppression de la THRP, les départements113(*), la Ville de Paris114(*) et les EPCI115(*) se voient verser leurs fractions de TVA par ce biais. De même, l'abondement par l'État du mécanisme du coefficient correcteur permettant d'éviter les situations de sur- et de sous-compensation des communes percevant désormais la TFPB, constitué d'une fraction des frais de gestion perçus par l'État116(*), est reversé à partir du compte d'avances.
La suppression de la CVAE a donné lieu à des transfert de même nature : la fraction de TVA affectée aux régions en substitution de la CVAE117(*) supprimée dans le cadre de la baisse des impôts de production est également versée par ce vecteur. La réaffectation totale de la CVAE à l'État, dans le cadre de sa suppression programmée par le précédent gouvernement, a également donné lieu au versement de deux fractions aux EPCI118(*) et aux départements119(*).
Plus récemment, les parts départementale et communale de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE)120(*) sont, depuis 2022 et 2023 respectivement, reversées par le biais du compte. Enfin, à compter de 2024, les quatre vecteurs de financement de la formation professionnelle sont désormais fusionnés et remplacés par une fraction du produit de l'accise sur les énergies d'un montant de 1 113,7 millions d'euros, marquant l'issue de la réforme du financement de la formation professionnelle.
Transitent également par le compte de concours financier « Avances aux collectivités territoriales » les fractions de l'accise sur les énergies (ex-TICPE) visant à compenser aux collectivités territoriales des transferts de compétences en application de l'article 72-2 de la Constitution.
Ainsi, les reversements d'accise sur les énergies pour les départements au titre du RMI121(*) puis du RSA122(*) transitent par le compte depuis 2006 (+ 4,9 milliards d'euros), de même que les reversements d'accise aux régions au titre de l'apprentissage123(*). Enfin, les frais de gestion de la TFPB reversés aux départements au titre du dispositif de compensation péréquée (DCP)124(*) transitent également par le compte d'avances.
Recettes et dépenses du compte d'avances
aux collectivités territoriales
entre 2002 et 2023
(en millions d'euros)
Source : rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au projet de loi de finances pour 2025
Il résulte des réformes de la fiscalité locale et des transferts de compétences aux collectivités territoriales une augmentation constante, depuis le début des années 2000, des montants transférés par le biais du compte de concours financier « Avances aux collectivités territoriales - à l'exception de l'année 2010, marquée par la mise en oeuvre de la réforme de la taxe professionnelle et durant laquelle les nouvelles impositions économiques ont été exceptionnellement recouvrées au profit de l'État sans transiter par le compte.
Alors qu'environ 57 milliards d'euros transitaient par le compte en 2002, ce ne sont pas moins de 134 milliards d'euros qui seraient reversée par son intermédiaire en 2025125(*).
Comme le relève la doctrine126(*), l'augmentation des sommes versées par l'État aux collectivités territoriales est un témoignage de l'interpénétration croissante des finances publiques locales et nationales, et de l'interdépendance d'un système de plus en plus intégré et unifié.
B. PAR LE PASSÉ, DES PRÉLÈVEMENTS SUR LES AVANCES ONT ÉGALEMENT PERMIS DE FAIRE CONTRIBUER LES COLLECTIVITÉS À L'EFFORT DE REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS
1. Dans le cadre de la contribution au redressement des finances publiques (CRFP), la « DGF négative » a pris la forme de prélèvements sur les avances de fiscalité
Entre 2014 et 2017, la contribution au redressement des finances publiques a consisté, pour les collectivités territoriales, en une diminution de la dotation globale de fonctionnement (DGF), principalement de ces parts forfaitaires, attribuée à chaque catégorie de collectivités ainsi que pour les EPCI. Ainsi :
- la dotation forfaitaire des communes a diminué de 558 millions d'euros en 2014, de 1 450 millions d'euros en 2015 et à nouveau en 2016, puis de 725 millions d'euros en 2017, soit une réduction de 4,153 milliards d'euros sur cette période127(*) ;
- la dotation d'intercommunalité versée aux EPCI a diminué de 252 millions d'euros chaque année entre 2014 et 2017, soit une baisse de 1,008 milliards d'euros en quatre ans128(*) ;
- la dotation forfaitaire des départements a diminué de 476 millions d'euros en 2014, puis de 1 148 millions d'euros en 2016 et à nouveau en 2017, soit une diminution de 2,772 milliards d'euros sur la période129(*) ;
- la dotation forfaitaire des régions, à l'époque où celles-ci percevaient encore la DGF, a diminué de 184 millions d'euros en 2014, puis de 451 millions d'euros en 2015, et à nouveau en 2016 et 2017, soit une réduction de 1,537 milliards d'euros sur la période130(*).
Le montant de ces diminutions, appliquées aux DGF « catégorielles » était réparti entre les collectivités ou EPCI concernés au prorata des recettes réelles de fonctionnement de leur budget principal. Toutefois, lorsqu'une collectivité était appelée, en application de ce critère, à contribuer au-delà de la minoration du montant de DGF qui lui était appliquée, le prélèvement était répercuté sur ses recettes fiscales par un prélèvement sur les douzièmes versés par le compte « Avances aux collectivités territoriales », dans ce qu'il a été convenu d'appeler une « DGF négative »131(*).
2. Le volet correctif des contrats dits « de Cahors » reposait sur des prélèvements sur les avances de fiscalité à titre de sanction
Sous la mandature précédente, la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 a prévu une autre modalité d'association des collectivités territoriales à l'équilibre des comptes publics, les contrats dits « de Cahors ». Ce dispositif, qui ne concernait que les collectivités dont les dépenses réelles de fonctionnement (DRF) du budget principal dépassaient 60 millions d'euros, supposait un « dialogue entre l'État, représenté par le préfet, et les collectivités afin d'aboutir à un « contrat » de trois ans portant sur l'évolution des finances de la collectivité concernée. »132(*) L'objectif global d'évolution des dépenses des collectivités ou « ODEDEL »133(*) était fixé à + 1,2 % par an.
Outre ce volet « préventif » fondé sur le dialogue, le dispositif imaginé à l'époque pouvait s'appuyer sur un volet « correctif » visant à sanctionner les collectivités qui dépasseraient l'objectif d'évolution de 1,2 % par an.
Ainsi, l'article 29 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022134(*) prévoyait que, lorsque l'objectif annuel de dépense fixé par le contrat était dépassé, il était appliquée « une reprise financière dont le montant était égal à 75 % de l'écart constaté », dans la limite de 2 % des recettes réelles de fonctionnement du budget principal de l'année considérée. Pour les collectivités ayant refusé de conclure un contrat avec l'État, le montant de la reprise financière s'élève à 100 % de l'écart constaté, toujours dans la limite de 2 % des recettes réelles de fonctionnement du budget principal.
Si, à l'issue d'une procédure contradictoire entre la collectivité et le représentant de l'État, le préfet décidait de procéder à une reprise, celle-ci était prélevé soit :
- pour les régions, la Collectivité de Corse, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique ainsi que le Département de Mayotte, sur la fraction de TVA transférée en compensation de la suppression de la DGF des régions135(*) ;
- pour les autres collectivités et EPCI, sur les douzièmes de fiscalité versés par le compte de concours financier « Avances aux collectivités territoriales ».
3. Malgré des objectifs ambitieux, aucun mécanisme de maîtrise des finances des collectivités n'existe aujourd'hui faute de consensus sur la méthode
Alors que la nouvelle loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027136(*) prévoit un ODEDEL fixé à - 0,5 % par an en volume pour cette période, soit un objectif sensiblement plus ambitieux encore que celui prévu sous l'empire des « contrats de Cahors », aucun mécanisme de maîtrise des finances des collectivités ne peut garantir l'atteinte de cet objectif.
Trajectoire d'évolution des dépenses
réelles de fonctionnement
des collectivités territoriales
prévu à l'article 17 de la LPFP 2023-2027
(en pourcentage)
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
|
Taux d'évolution des dépenses réelles de fonctionnement en valeur |
4,8 |
2,5 |
1,6 |
1,3 |
1,3 |
Indice des prix à la consommation (hors tabac) |
4,8 |
2,5 |
2,0 |
1,8 |
1,8 |
Taux d'évolution des dépenses réelles de fonctionnement en volume |
0,0 |
- 0,5 |
- 0,5 |
- 0,5 |
- 0,5 |
Source : commission des finances du Sénat
Le mécanisme proposé par le Gouvernement dans le projet de loi de programmation des finances publiques initialement déposé au Parlement a en effet été rejeté par les parlementaires. Ce dispositif était, à juste titre, considéré comme attentatoire aux libertés locales, dans la mesure où, s'il était pour l'essentiel inspiré des contrats de Cahors, il comportait plusieurs « innovations » inacceptables, en particulier l'exclusion, avant même la signature de tout contrat, de l'octroi de certaines dotations de l'État.
Mais si ces nouveaux « contrats » léonins ont - et c'est heureux - été rejetés, aucun mécanisme alternatif de participation des collectivités au redressement des finances publiques n'a été proposé depuis par le Gouvernement.
Ainsi, si le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » a pu être mobilisé par le passé pour faire contribuer les collectivités territoriales à l'effort collectif, son utilisation à cette fin aujourd'hui est plus marginale.
En effet, comme l'indique le tableau ci-dessous, les prélèvements dits « pour participation à l'équilibre des comptes publics » dans le rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au présent PLF représentent 139,5 millions d'euros. Ce montant paraît, dans les faits, quelque peu surestimé puisqu'il inclut le prélèvement relatif aux lois « SRU » et « Duflot », qui représente le prélèvement le plus important (65,2 millions d'euros) mais ne constitue pas un prélèvement en faveur de l'équilibre des comptes publics dans le même sens que les prélèvements relatifs à la CRFP ou aux contrats de Cahors.
Listes de prélèvements pour participation à l'équilibre des comptes publics appliqués sur les versements du compte d'avances aux collectivités territoriales
(en euros)
Intitulé du prélèvement |
Base légale |
Collectivités concernées |
Montant en 2023 |
Prélèvement relatif au transfert de la TASCOM figée |
Article L.2334-7 CGCT |
Bloc communal |
94 987 |
Prélèvement relatif à la contribution au redressement des finances publiques (CRFP) |
Articles L.2334-7-3, L.5211-28 et L.4332-7 CGCT |
Bloc communal |
62 425 788 |
Prélèvement pour apurement d'indu-DGF |
Articles L.2334-1 à 3 et
|
Bloc communal |
6 572 |
Prélèvement Fonds national des aides à la pierre (FNAP) |
|
Bloc communal |
0 |
Prélèvement relatif aux lois "Solidarité et renouvellement urbains" (SRU) et "Mobilisation du foncier public en faveur du logement" |
Articles L.302-7 et L.302-9-1 CCH |
Bloc communal |
65 240 200 |
Prélèvement relatif au Fonds d'aménagement urbain (FAU) en faveur des départements d'Outre-mer |
|
Bloc communal |
0 |
Prélèvements relatifs à la suppression des contingents communaux d'aide sociale |
Article L.2334-7-2 CGCT |
Bloc communal |
754 272 |
Prélèvement de recentralisation sanitaire des départements vers le fonds d'intervention régional (FIR) |
Articles 107 LFI 2015 et |
Départements 06 et 75 |
10 993 996 |
Prélèvements relatifs aux contrats de Cahors |
|
Toutes collectivités |
0 |
TOTAL |
139 515 815 |
Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au projet de loi de finances pour 2025
C. AUJOURD'HUI, LES PRÉLÈVEMENTS SUR LES AVANCES PERMETTENT PRINCIPALEMENT D'ALIMENTER DES FONDS DE PÉRÉQUATION HORIZONTALE, PARFOIS ASSORTIS DE MÉCANISMES DE MISE EN RÉSERVE PRUDENTIELLE
1. Toutes les catégories de collectivités territoriales disposent de fonds de péréquation alimentés par des prélèvements sur les avances versées par le compte de concours financiers
Outre le fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR), qui constitue le principal instrument de péréquation horizontale entre collectivités, chaque catégorie de collectivités dispose d'un instrument national de péréquation horizontale : le fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) pour le bloc communal, le fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (FNP-DMTO) pour les départements et le fonds de solidarité régional (FSR) pour les régions.
Listes de prélèvements pour
péréquation appliqués sur les versements
du compte
d'avances aux collectivités territoriales
(en millions d'euros)
Intitulé du prélèvement |
Base légale |
Collectivités concernées |
Montant en 2023 |
Prélèvement au fonds de garantie individuelle des ressources (FNGIR) |
Article 78 LFI 2010 |
Bloc communal |
3 324,5 |
Prélèvement au fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) |
Article L.2336-3 CGCT |
Bloc communal |
986,5 |
Prélèvement au fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF) |
Article L.2531-13 CGCT |
Bloc communal |
350,0 |
Prélèvement au fonds national de péréquation de la CVAE perçue par les départements |
Article L.3335-1 CGCT |
Départements |
0,0 |
Prélèvement au fonds national de péréquation des DMTO (FNP-DMTO) |
Article L.3335-2 CGCT |
Départements |
1 998,6 |
Prélèvement au fonds de solidarité en faveur des départements |
Article L.3335-3 CGCT |
Départements |
0,0 |
Prélèvement au fonds de solidarité pour les départements de la région Île-de-France (FSDIF) |
Article L.3335-4 CGCT |
Départements |
60,0 |
Prélèvement transports au bénéfice d'Île-de-France Mobilités (IDFM) et de la région Île-de-France (IDF) |
Article L.2334-25-1 CGCT |
Région IDF |
41,6 |
Prélèvement au fonds de péréquation des ressources perçues par les régions et la collectivité territoriale de Corse (FPRR) |
Article L.4332-9 CGCT |
Régions |
0,0 |
Prélèvement au fonds de solidarité régional (FSR) |
Article L.4332-9 CGCT |
Régions |
23,8 |
TOTAL |
6 785,1 |
Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au projet de loi de finances pour 2025
a) La péréquation horizontale du bloc communal est principalement réalisée par la voie du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC)
Le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) a été créé par l'article 144 de la loi de finances pour 2012137(*), codifié aux articles L. 2336-1 et suivants du code général des collectivités territoriales (CGCT). Il constitue le premier mécanisme national de péréquation horizontale à l'échelle d'un ensemble intercommunal (EI). De 360 millions d'euros en 2013, la solidarité au sein du bloc communal s'est accrue : elle atteint 1 milliard d'euros depuis 2016.
Lors de la création du FPIC, de nouveaux indicateurs financiers ont dû être institués pour servir de socle aux prélèvements et reversements s'opérant à l'échelle « agrégée » des territoires. La richesse d'un territoire est ainsi appréciée grâce à un nouvel indicateur : le potentiel financier agrégé (PFIA), ajoutant la richesse de l'EPCI à de celle de ses communes membres.
Plus précisément, le PFIA, tel qu'il est défini à l'article L. 2336-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), est obtenu par la consolidation des potentiels fiscaux d'un EPCI et de ses communes membres, majorée de la somme des dotations perçues par les communes membres l'année précédente. Pour les ensembles intercommunaux concernés, le PFIA est majoré ou minoré par les contributions ou les reversements au titre du fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF).
(1) Un prélèvement fondé avant tout sur les ressources
Conformément à l'article L. 2336-3 du CGCT, le critère unique établissant l'éligibilité d'un établissement intercommunal (EI) au prélèvement au titre du FPIC est la richesse d'un territoire, ici interprétée comme le fait de disposer d'un PFIA par habitant supérieur à 0,9 fois la moyenne nationale. Le montant de la contribution du territoire est déterminé en fonction de sa population, multipliée par un indice synthétique de prélèvement qui est lui-même fonction :
- pour 75 %, d'un critère de ressources : l'écart relatif entre le PFIA par habitant et 0,9 fois le PFIA moyen par habitant ;
- pour 25 %, d'un critère de charges : l'écart relatif entre le revenu par habitant et le revenu moyen par habitant.
Un plafonnement de la contribution est toutefois appliqué : le prélèvement ne peut excéder 14 % des ressources fiscales agrégées. Pour les EI de la région Île-de-France, ce plafond s'applique au cumul des prélèvements opérés aux titres du FPIC l'année considérée et du FSRIF l'année précédente.
(2) Un reversement majoritairement fondé sur les charges
Après application d'une quote-part réservée aux territoires ultramarins (voir encadré) et conformément à l'article L. 2336-5 du CGCT, sont éligibles au reversement au titre du FPIC 60 % des EI métropolitains, classés selon un indice synthétique de reversement qui est fonction :
- pour 60 %, d'un critère de charges : le rapport entre le revenu moyen par habitant en métropole et le revenu par habitant de l'EI ou de la commune isolée ;
- pour 40 %, de deux critères de ressources : d'une part, le rapport entre le PFIA par habitant moyen national et le PFIA par habitant de l'EI ou de la commune isolée (20 %) et d'autre part, pour les raisons évoquées supra, le rapport entre l'effort fiscal agrégé (EFA) de l'EI ou de la commune isolée et l'EFA moyen national (20 %).
Il est à noter que le critère de l'EFA est même susceptible de s'appliquer deux fois, puisque sont exclus du reversement les EI ou communes isolées dont l'EFA est inférieur à 1.
b) La péréquation départementale repose largement sur les droits de mutation à titre onéreux (DMTO)
Avant 2020, la solidarité entre les départements reposait sur quatre instruments nationaux de péréquation horizontale. Outre un fonds de péréquation permettant la redistribution des ressources perçues au titre de la part départementale de la CVAE, trois fonds redistribuaient une partie du produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) :
- un fonds de péréquation des DMTO138(*) : créé en 2011, qui redistribuait 703 millions d'euros en 2019 ;
- un fonds de solidarité des départements139(*), créé en 2014 et provisoirement reconduit en 2015 afin de réduire les inégalités relatives aux restes à charges en matière d'allocations individuelles de solidarité (AIS), qui a permis de redistribuer 586 millions d'euros en 2019 ;
- un fonds de soutien interdépartemental (FSID)140(*), créé en 2019 et doté de 250 millions d'euros.
La loi de finances pour 2020 a procédé à la fusion de ces trois fonds en un fonds unique, le fonds national de péréquation des DMTO (FNP-DMTO). Les modalités de fonctionnement de ce nouveau fond, résultent de la volonté de conserver le fonctionnement des trois fonds préexistants. En conséquence de cette fusion, les ressources du fonds sont très importantes, puisqu'elles se sont élevées à 1 679 millions d'euros en 2020.
Schéma récapitulatif du fonctionnement du FNP-DMTO
Source : commission des finances du Sénat
Si les deux prélèvements alimentant le fonds correspondent pour l'essentiel aux modalités d'alimentation de l'ancien fonds de péréquation des DMTO, les trois enveloppes correspondent quant à elles à la juxtaposition, dans un unique dispositif, des trois fonds de péréquation préexistants : la première enveloppe reprend les modalités de répartition du FSID, la deuxième enveloppe reprend les modalités de répartition du fonds de péréquation des DMTO et la troisième enveloppe celles du fonds de solidarité des départements.
Il convient également de noter que le FNP-DMTO est à ce jour le seul dispositif de péréquation horizontale doté d'un « fonds de garantie départemental des corrections conjoncturelles » permettant la mise en réserve de la dynamique haussière des DMTO en prévision de fluctuations futures à la baisse, prévisibles compte tenu de la volatilité du produit de cette imposition (cf. infra).
Le fonds national de péréquation de la CVAE a quant à lui été supprimé par la loi de finances pour 2023, en cohérence avec la volonté du Gouvernement de supprimer l'imposition répartie par ce fonds.
c) La péréquation entre régions, marginale, s'est récemment dotée d'un nouveau fonds de solidarité régional (FSR) d'ampleur réduite
Jusqu'à 2022, la solidarité entre régions reposait sur un fonds de péréquation des ressources des régions (FPRR) et de la collectivité de Corse. Les ressources prises en compte dans le calcul du fonds étaient celles issues de la suppression de la taxe professionnelle, à savoir la CVAE, les IFER, la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) perçues par les régions ainsi que les prélèvements et reversements au FNGIR.
Le fonds reposait sur une logique de régulation de l'évolution, dans l'optique de faire converger les taux de croissance des ressources des régions vers la moyenne : les régions dont le taux de croissance des ressources était supérieur à la moyenne étaient donc contributrices au fonds.
Ce fonds s'inscrivait en forte progression depuis sa création : il était ainsi alimenté à hauteur de 185 millions d'euros en 2020, contre 56 millions d'euros en 2015. Toutefois, avec la suppression de la part régional de la CVAE, le fonds a connu en 2021 une baisse de son montant (41,2 millions d'euros contre 185 millions d'euros l'année précédente).
En conséquence, la loi de finances initiale pour 2022141(*) a remplacé le FPRR par un nouveau fonds de solidarité régional (FSR) dont le montant est assis sur la dynamique de la fiscalité régionale (imposition forfaitaire des entreprises de réseau, cartes grises), de la fiscalité transférée (fraction de TVA) et des concours financiers de l'État (dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle). La péréquation régionale repose désormais :
- sur les montants attribués en 2020 et en 2021 au titre du FPRR et dorénavant intégrés dans la fraction de TVA perçue par les régions ;
- sur les sommes redistribuées par le FSR.
Le montant total prélevé au titre de ce nouveau fonds est égal à 0,1 % de la fraction de TVA attribuée aux régions en 2021, soit 9,7 millions d'euros, ce qui représente 5 % des sommes redistribuées en 2020 par le FPRR. Depuis, le montant du fonds augmente chaque année de 1,5 % de la dynamique de la fraction de TVA attribuée aux régions. En 2023, le fonds a redistribué 23,8 millions d'euros et devrait redistribuer 26,7 millions d'euros en 2024.
Seules les régions dont la somme des ressources (fraction de TVA remplaçant la CVAE, IFER, DCRTP, taxe sur les certificats d'immatriculation), rapportée à la population, est supérieure à 80 % de la moyenne sont contributrices. Le prélèvement étant réparti entre elles au prorata de leur population. Les montants prélevés par le fonds sont reversés aux régions non éligibles au prélèvement, soit en 2023 la Corse ainsi que l'ensemble des régions d'outre-mer et Mayotte. Le reversement est déterminé en fonction de la population, pondérée par un indice synthétique composé :
- du rapport entre le revenu par habitant moyen de l'ensemble des régions et le revenu par habitant de la région bénéficiaire, à hauteur de 55 % ;
- du rapport entre la proportion de personnes âgées de 15 à 18 ans dans la population de la région bénéficiaire, et cette proportion constatée sur l'ensemble des régions, pour 40 % de l'indice ;
- du rapport entre la densité moyenne de l'ensemble des régions et la densité de la région bénéficiaire, à hauteur de 5 %.
2. Les quelques mécanismes de mise en réserve existants sont largement insuffisants
a) À ce jour, les principaux dispositifs prudentiels concernent les départements
Les départements constituent la principale catégorie de collectivités pour laquelle existent des mécanismes de mise en réserve. Cette situation est aisément compréhensible compte tenu de la sensibilité des recettes départementales à la conjoncture : en effet, la majorité des recettes fiscales des départements sont également corrélées à la conjoncture, à l'instar des DMTO, qui dépendent de la situation du marché immobilier. Depuis 2021 ; et a fortiori depuis 2023 ; s'ajoute à cette liste la TVA, qui est elle aussi fortement sensible à la conjoncture. La fiscalité liée à la conjoncture économique représenterait ainsi entre deux tiers et trois quarts des recettes fiscales des départements.
Dans ces conditions, le législateur puis le pouvoir réglementaire ont établi des dispositifs prudentiels visant à « épargner » une partie de la dynamique de la fiscalité lorsque la conjoncture est défavorable afin de disposer de réserves lorsque la conjoncture se dégrade.
Le premier de ces dispositifs est le « fonds de garantie départemental des corrections conjoncturelles » mentionné au troisième alinéa de l'article L. 3335-2 du code général des collectivités territoriales. Le fonctionnement de ce dispositif, « greffé » au FNP-DMTO est simple : lorsque les ressources du fonds excèdent 1,6 milliard d'euros, le comité des finances locales (CFL) peut décider de mettre en réserve tout ou partie du montant excédant ce niveau. Sur décision du CFL, tout ou partie des sommes mises en réserve viennent abonder les ressources mises en répartition l'année suivante.
En complément de ce dispositif « collectif », un dispositif de mise en réserve « individuel », codifié à l'article R. 3321-4 du code général des collectivités territoriales, permet à chaque département d'affecter en réserve une fraction des DMTO, puis de libérer les sommes ainsi conservées « lorsque le département enregistre une dégradation caractérisée de sa situation financière ».
Enfin, un troisième dispositif de mise en réserve a été créé par le législateur dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale en 2020, qui a vu la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales (THRP). L'article 16 de la loi de finances pour 2020142(*) a en effet créé un fonds de sauvegarde des départements, alimenté par une fraction de la dynamique annuelle de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour un montant initial de 250 millions d'euros.
b) Les crises récentes tendant à démontrer l'insuffisance des mécanismes de mise en réserve existants et la pertinence d'outils de plus grande ampleur
L'expérience récente tend toutefois à montrer que ces fonds sont largement insuffisants pour faire face aux aléas conjoncturels. La chute vertigineuse des DMTO que connaissent actuellement les départements en est un bon exemple : en effet, en 2023, les départements ont connu une diminution de 21 % de leurs recettes de DMTO, qui devrait se poursuivre en 2024, avec une baisse attendue de l'ordre de 13 %.
Ce recul représente en valeur absolue une baisse très importante, de 3,7 milliards d'euros en 2023 et d'environ 1,7 milliard d'euros en 2024. Face à ces montants très significatifs, les mécanismes actuels de mises en réserve semblent largement insuffisants.
S'agissant de la mise en réserve collective du FNP-DMTO, le comité des finances locales a décidé, lors de sa séance du 12 juillet 2022, de mettre en réserve 191 millions d'euros, qui se sont ajoutés aux 58 millions d'euros mis en réserve en 2021 et non libérés. En 2023, le CFL a décidé de ne pas abonder la réserve, d'un montant de 249 millions d'euros, ni de la libérer. En 2024, dans le contexte de baisse du montant des DMTO que l'on sait, le comité des finances locales a fait le choix de libérer intégralement la réserve.
S'agissant des mises en réserve individuelles de DMTO par les départements, leur montant total s'élevait en 2023 à 1,0 milliard d'euros au total, pour 37 départements ayant choisi de constituer de tels coussins contracycliques. Compte tenu de la poursuite de la chute des recettes de DMTO, une large partie d'entre eux reprendra en 2024 les recettes qu'ils ont ainsi épargnées. Entendue par les rapporteurs spéciaux, la direction générale des collectivités territoriales a indiqué que la quasi-totalité des départements avait « libéré » leurs réserves.
Enfin, le fonds de sauvegarde des DMTO a bénéficié de la dynamique d'une fraction de TVA sur une « base » de 250 millions d'euros : au bout de deux ans, 53 millions d'euros avaient ainsi été accumulé dans le fonds de sauvegarde. Face à la très forte diminution des DMTO constatée en 2023, les montants affectés au fonds de sauvegarde ont toutefois déjà été « libérés » par la loi de finances pour 2024143(*), avec un abondement supplémentaire de l'État à hauteur de 53 millions d'euros. En 2024, les sommes affectées au fonds de sauvegarde s'établissent donc à une trentaine de millions d'euros, alors que la situation des départements s'est considérablement dégradée et que 29144(*) d'entre eux seraient, selon l'Assemblée des départements de France (ADF), éligible à un reversement en 2025.
La situation actuelle est donc la suivante : alors que les départements ont subi une diminution de 5,4 milliards d'euros de recettes en deux ans, les montants disponibles en 2024 pour soutenir ces collectivités ne s'élèvent qu'à 1,28 milliard d'euros, soit au titre de la réserve du FNP-DMTO, du fonds de sauvegarde ou des réserves individuelles. Au surplus, la plupart des montants mis en réserve l'ont été à titre individuel par une partie des départements, les autres départements étant « uniquement protégés par des mécanismes collectifs moins bien dotés »145(*) (280 millions d'euros, tout au plus).
Si l'on s'intéresse aux autres catégories de collectivités territoriales, on constate également que l'absence de mécanisme de mise en réserve de la dynamique des recettes est dommageable en cas d'aléa conjoncturel important. Ainsi, la poussée inflationniste de 2022 et 2023 s'est accompagnée, en particulier pour certaines collectivités du bloc communal, d'une hausse très importante des dépenses de personnel - du fait de la revalorisation du point d'indice - et des dépenses d'approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain, ainsi que des dépenses de denrées alimentaires. S'il est indéniable que le « filet de sécurité »146(*) adopté dans la loi de finances rectificative pour 2022 a eu un effet bénéfique pour les collectivités concernées, il est également exact que son coût pour les finances publiques s'est élevé à 414,7 millions d'euros pour la seule année 2022.
Un dispositif prudentiel aurait pu permettre d'atténuer l'impact de la crise inflationniste sur les finances publiques.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA CRÉATION D'UN FONDS DE RÉSERVE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AFIN DE LIMITER LA PROGRESSION DE LA DÉPENSE LOCALE
Le VII du présent article crée un fonds de réserve des collectivités territoriales.
A. LES MODALITÉS D'ÉTABLISSEMENT DU PRÉLÈVEMENT AU TITRE DU FONDS DE RÉSERVE
Le I prévoit que ce fonds soit alimenté, à compter de 2025, par un prélèvement sur le montant des impositions versées aux collectivités territoriales dont les dépenses réelles de fonctionnement (DRF) ont été supérieures à 40 millions d'euros en 2023.
1. Le fait générateur du prélèvement
Le fait générateur de ce prélèvement en année N serait le dépassement, pour l'année N-1, d'un solde de référence des collectivités territoriales et des EPCI à fiscalité propre.
Aux termes du II, le solde de référence correspond à la différence entre le solde prévisionnel des administrations publiques locales (APUL) mentionné dans l'article liminaire de la loi de finances, retraité du solde prévisionnel des organismes divers d'administration locale (ODAL).
Il serait déterminé par arrêté du ministre du budget selon des modalités définies par décret en Conseil d'État.
2. Le montant, la répartition et la mise en oeuvre du prélèvement
Aux termes du premier alinéa du III, le montant du prélèvement réalisé en année N est en principe égal à l'écart, pour l'année N-1, entre le solde de référence et le solde effectivement réalisé par les collectivités territoriales et les EPCI à fiscalité propre. Toutefois, ce principe est assorti d'une importante nuance puisque le dernier alinéa du III précise que le prélèvement ne peut excéder 2 % des recettes réelles de fonctionnement (RRF)147(*) du budget principal d'une collectivité.
S'agissant de la répartition du prélèvement entre les collectivités contributrices, le deuxième alinéa du III indique qu'elle est réalisée au prorata de la somme des ressources nettes qui leur ont été versées au titre de l'année civile précédente par la voie du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »148(*).
Enfin, le V exclut du champ d'application du prélèvement, sans que l'on sache à quelle étape du calcul appliquer cette exclusion, le produit :
- de la part du produit de l'accise sur les énergies affectée à chaque département et à Saint-Pierre et Miquelon en compensation du transfert aux départements du financement du revenu minimum d'insertion (RMI)149(*), de la création du revenu de solidarité active (RSA)150(*) et de la départementalisation de Mayotte151(*) ;
- la part du produit de l'accise sur les énergies affectées aux régions, à la Collectivités de Corse, aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique et au département de Mayotte en compensation du transfert à ces collectivités de la compétence en matière de formation professionnelle continue et d'apprentissage152(*) ;
- des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) affectés aux départements par le biais du dispositif de compensation péréquée (DCP)153(*).
Le même V exclut également du champ du prélèvement les établissements publics fonciers locaux (EPFL).
3. Les exonérations du prélèvement
Le VI du présent article prévoit d'exonérer du prélèvement au titre du fonds de réserve certaines collectivités qui, bien que présentant un montant de DRF en 2023 supérieur à 40 millions d'euros, remplissent certains critères de fragilité financière. Il s'agit :
- des 250 premières communes classées l'année N-1 selon l'indice synthétique utilisé pour la répartition de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU)154(*) ;
- des 2 500 premières communes classées l'année N-1 en fonction de l'indice synthétique utilisé pour la répartition de la fraction « cible » de la dotation de solidarité rurale (DSR)155(*) ;
- des établissements publics territoriaux (EPT) dont l'ensemble intercommunal n'était pas contributeur au FPIC l'année N-1 ;
- des 300 premiers EPCI à fiscalité propre classés l'année N-1 en fonction de l'indice synthétique permettant de répartir la dotation de péréquation interne à la dotation d'intercommunalité156(*) ;
- des 20 premiers départements classés l'année précédente en fonction de l'indice de fragilité sociale défini pour la répartition du fonds de sauvegarde des départements157(*) ;
- des régions qui n'étaient pas contributrices, l'année N-1, au fonds de solidarité régionale158(*).
B. CONSTITUTION ET LIQUIDATION DE LA MISE EN RÉSERVE
Le produit du prélèvement est affecté au fonds de réserve des collectivités territoriales créé par le VII, où ils sont mis en réserve. Le VIII dispose qu'à compter de 2026, les sommes affectées au titre d'une année sur le fonds abondent, les trois années suivant leur mise en réserve et à hauteur d'un tiers par année, le FPIC, le FNP-DMTO et le FSR.
Aux termes du b du 1° du XI, il revient au comité des finances locales (CFL) de répartir l'abondement entre ces trois fonds de péréquation.
Le a du 1° et le 2° du IX prévoient enfin que le CFL peut majorer ou minorer l'abondement dans la limite de 10 %, ce qui a pour effet de diminuer ou augmenter, selon le cas, l'abondement qui sera versé au titre de l'année suivante.
Les X, XI et XII procèdent aux coordinations nécessaires à l'intégration de l'abondement du fonds de réserve aux ressources réparties, respectivement, par le FPIC, le FNP-DMTO et le FSR.
*
* *
L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi de finances, elle n'a pas adopté cet article.
III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LE FONDS DE RÉSERVE, DONT LE FONCTIONNEMENT EST BRUTAL ET INABOUTI, EST INACCEPTABLE
A. UN PRÉLÈVEMENT MASSIF EN THÉORIE ET BRUTAL EN PRATIQUE
Les modalités de calcul du prélèvement au titre du fonds créé par le présent article sont le premier et le principal écueil du dispositif. En effet, le présent article commence par instituer un prélèvement, qui serait mis en oeuvre lorsqu'un « solde de référence » des collectivités territoriales serait dépassé.
Ce prélèvement serait ensuite réparti entre les collectivités et EPCI contributeurs, définies en fonction de leur taille : sont en effet contributeurs au titre de ce prélèvement les collectivités et EPCI dont les dépenses réelles de fonctionnement (DRF) constatées dans le budget principal en 2023 sont supérieures à 40 millions d'euros. La répartition entre les collectivités serait ainsi réalisée au prorata de leurs recettes réelles de fonctionnement (RRF), dans la limite de 2 % de ces RRF159(*).
1. Le prélèvement présente un risque élevé d'aléa moral et ne saurait atteindre ces objectifs
On comprend à la lecture de l'article que le prélèvement en question serait d'autant plus élevé lorsque le solde constaté pour les collectivités territoriales est dégradé par rapport au solde de référence. Si le but de la manoeuvre consiste à améliorer le solde public, le dispositif apparaît donc d'entrée comme complètement inadapté : il aurait pour conséquence de priver de recettes les collectivités au moment même où celles-ci constatent une dégradation de leur solde.
Certes, le dispositif est présenté comme visant à inciter les collectivités à maîtriser leurs dépenses, afin de ne pas dépasser le solde de référence. Mais cet argument manque sa cible, puisque la rédaction soumise au Parlement comprend de nombreuses lacunes.
D'abord, le prélèvement ne repose pas spécifiquement sur les collectivités qui contribuent au dépassement du solde, mais sur les seules collectivités dont les DRF du budget principal dépassent 40 millions d'euros. Ainsi, une collectivité dont le budget est admirablement bien géré pourrait être prélevée au titre du dépassement d'un solde global auquel elle n'a en rien contribué. Cet écueil avait déjà été identifié dans la nouvelle version des « contrats de Cahors » proposée dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, ce qui avait contribué à faire rejeter ce dispositif.
À ce sujet, le rapporteur général relevait, en sa qualité de rapporteur du texte, que « le dispositif créée une situation d'« aléa moral », dans la mesure où une collectivité n'est pas incitée à maîtriser sa dépense dès lors qu'elle perçoit sa catégorie comme « vertueuse » dans son ensemble. »160(*) Le même vice entache aujourd'hui le dispositif soumis au Parlement.
On relève au passage que cette formulation, qui s'inspire de dispositifs passés visant à faire contribuer les collectivités territoriales à la maîtrise des dépenses publiques, constitue un biais important puisqu'elle exclut les dépenses des budgets annexes, qui peuvent être particulièrement importante, notamment pour certaines EPCI. Ainsi, en 2023, les DRF des budgets principaux aux EPCI s'élevaient à 31,23 milliards d'euros, alors que la prise en compte de leurs budgets annexes porte ce niveau à 43,93 milliards d'euros de dépenses réelles de fonctionnement - un écart de 12,7 milliards d'euros.
S'il est aisé de remarquer que ce critère est repris des « contrats de Cahors », qui concernaient les collectivités dont les DRF du budget général représentaient plus de 60 millions d'euros, le dispositif proposé aujourd'hui est autrement plus attentatoire aux libertés locales et ce critère apparaît réellement discriminant.
2. Une mode de calcul qui aboutit à un prélèvement sans proportion avec les capacités contributives des collectivités
Ensuite, les modalités de détermination du montant du prélèvement sont obscures et n'offrent aucune garantie aux collectivités. Celui-ci est en effet égal à l'écart entre le solde de référence et le solde constaté pour les collectivités locales. Rien n'empêche en effet l'État de définir, dans la loi de finances de l'année, un solde de référence qu'il sait pertinemment que les collectivités ne peuvent pas atteindre, ce qui aurait pour conséquence un dépassement prévisible de ce solde de référence et la définition d'un montant très élevé de prélèvement.
Surtout, ce mode de calcul aboutit en pratique à la définition d'un prélèvement théorique excessivement élevé, comme c'est le cas, dans la rédaction du Gouvernement, pour l'année 2025. L'évaluation préalable du présent article indique ainsi que pour 2024, « l'écart de solde est estimé, à date des dernières prévisions, à - 14,2 milliards d'euros ».
Dans ces conditions, le montant du prélèvement est en vérité déterminé non par l'écart de solde, mais par le nombre de collectivités assujetties et la limite de 2 % des recettes réelles de fonctionnement, qui constitue une garantie forte au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel161(*).
Le montant du prélèvement n'est donc pas à proprement parler « réparti » entre les collectivités territoriales au prorata de leurs recettes réelles de fonctionnement. Dans ces conditions, le dispositif revient en réalité à prélever, pour chaque collectivité effectivement assujettie, 2 % de ses RRF.
Cette malfaçon constitue, aux yeux des rapporteurs spéciaux, un défaut rédhibitoire qui emporte à lui seul leur décision de ne pas accepter le dispositif proposé par le Gouvernement.
B. LA DÉFINITION DES COLLECTIVITÉS CONTRIBUTRICES POSENT D'INNOMBRABLES PROBLÈMES D'ÉQUITÉ
Comme cela a déjà été relevé, les collectivités contributrices au prélèvement alimentant le fonds de réserve sont sélectionnées non en fonction de leur richesse, mais en fonction de leur taille. Une collectivité peut en effet être très « grosse » tout en étant très « pauvre » : on pense, par exemple, au département de Seine-Saint-Denis, dont les recettes réelles de fonctionnement s'élèvent à plus d'1,7 milliard d'euros en 2023, mais dont le taux de pauvreté est le plus élevé de France métropolitaine, ce qui induit des charges certaines, notamment en matière de politiques sociales.
Une absence totale de prise en compte des situations individuelles des collectivités dont le budget dépasse 40 millions d'euros - qui sont toutes amenées à contribuer à hauteur de 2 % de leurs RRF - serait apparu comme profondément injuste alors que certaines collectivités très riches, mais dont le budget est inférieur à 40 millions d'euros, n'aurait pas contribué du tout. Elle aurait, en outre, immanquablement fait risquer au présent article une censure immédiate du juge constitutionnel.
Face à cette évidente incohérence, le Gouvernement a opté pour la définition de critères permettant d'exonérer certaines collectivités du prélèvement : 250 communes urbaines classées parmi les premières bénéficiaires de la DSU, 2 500 communes rurales classées parmi les premières bénéficiaires de la DSR, 20 départements classés selon l'indice de fragilité sociale servant à répartir le fonds de sauvegarde, etc. Pour reprendre l'exemple évoqué supra, ce critère permettrait ainsi au département de Seine-Saint-Denis de ne pas contribuer au prélèvement.
Toutefois, cette rustine crée de nouveaux problèmes d'équité là où elle prétendait en supprimer. En effet, elle revient à ajouter un nouvel effet de seuil à celui déjà identifié en fonction de la taille : le contraste est ainsi très marqué entre la dernière collectivité exonérée, qui ne serait pas prélevée, et la première collectivité assujettie, qui devrait contribuer à hauteur de 2 % de ses recettes réelles de fonctionnement.
La commune de Bourg-en-Bresse, classée parmi les 250 premières communes éligibles à la DSU en 2023 mais légèrement au-delà en 2024, constitue un exemple particulièrement frappant porté par son maire à la connaissance des rapporteurs spéciaux.
C. UN DISPOSITIF HYBRIDE DONT LE FONCTIONNEMENT ÉCHAPPERAIT LARGEMENT AU PARLEMENT
1. Le fonds de réserve proposé est une chimère
Une fois prélevées, les sommes soustraites aux collectivités territoriales seraient affectées à un fonds de réserve. Les précisions quant au fonctionnement de ce fonds ne sont que parcimonieusement livrées par le dispositif proposé, qui se montre à ce sujet fort laconique : le texte précise simplement que les montants mis en réserve au titre d'une année sont reversés les trois années suivantes, à hauteur d'un tiers par année.
Le graphique ci-dessous illustre un fonctionnement théorique du fonds de réserve.
Fonctionnement théorique du fonds de réserve
(en milliards d'euros)
Source : commission des finances du Sénat
Le fonctionnement théorique exposé ci-dessus repose sur deux hypothèses : d'une part, il fait l'hypothèse d'un prélèvement stable à 3 milliards d'euros chaque année, ce que le dispositif ne prévoit pas explicitement - bien que la « marche » permettant de passer d'un écart de solde de 14,5 milliards d'euros à un écart de solde inférieur à 3 milliards d'euros apparaisse difficile à franchir. De même, le schéma ci-dessus exposé repose sur l'hypothèse d'absence d'intervention du comité des finances locales.
Sous ces deux réserves, le fonctionnement théorique exposé ci-dessus tend à démontrer que, passées quelques années, le fonds de réserve pourrait aboutir à reverser des montants équivalents à ceux qu'il prélève. Le présent article prévoyant que les sommes reversées par le fonds abondent trois dispositifs de péréquation, ce dispositif pourrait rapidement, d'un dispositif de mise en réserve semblable au dispositif aujourd'hui intégré au FNP-DMTO, se transformer en un super-dispositif de péréquation.
2. Une créature qui ne demande qu'à échapper au contrôle du législateur
Enfin, le présent article ressemble fort à un dessaisissement du Parlement de certaines de ses prérogatives essentielles. La rédaction actuelle ne prévoit, en effet, aucune garantie pour la représentation nationale quant à la gouvernance future du fonds de réserve, passée sa création.
Le Gouvernement serait d'abord chargé de « déterminer »162(*) le montant et à mettre en oeuvre le prélèvement.
Le comité des finances locales (CFL) serait quant à lui doté par le dispositif de pouvoirs très étendus, qui dépassent de loin ses prérogatives traditionnelles.
En effet, il aurait la faculté de majorer ou de minorer, pour une année donnée et dans la limite de 10 %, les reversements réalisés par le fonds de réserve - le montant d'une éventuelle majoration ou minoration étant répercutée dans l'autre sens l'année suivante.
Enfin, il lui reviendrait de répartir les sommes reversées par le fonds de réserve entre le FPIC, le FNP-DMTO et le FSR, c'est-à-dire d'attribuer ces sommes au bloc communal, aux départements ou aux régions, sans qu'aucun cadre ne soit fixé à ce titre par le législateur. Cette prérogative est inédite pour le CFL, dont la marge de manoeuvre est, traditionnellement, strictement limitée par le législateur. Compte tenu, par exemple, de l'existence de tunnels d'évolution entre les différentes fractions de la DSR, ou encore des précisions apportées par le législateur quant à la répartition de la progression des dotations de péréquation entre DSR et DSU, il aurait pu être attendu que le dispositif proposé encadre la latitude accordée au CFL, éventuellement en « compartimentant » les contributions de chaque catégorie de collectivités pour les flécher, à terme, vers le fonds de péréquation dédié à cette catégorie.
Mais il n'en est rien.
Les rapporteurs spéciaux regrettent que le présent dispositif se détourne du Parlement. Ils rappellent avec force la vocation représentative de ses deux chambres, et singulièrement du Sénat que la Constitution désigne expressément comme le représentant des collectivités territoriales.
Pour toutes ces raisons, la commission a adopté l'amendement II-10 (FINC.3) des rapporteurs spéciaux afin de supprimer cet article.
Décision de la commission : La commission propose de supprimer cet article.
ARTICLE
ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 64
Création d'un dispositif de
lissage conjoncturel
des recettes des collectivités
territoriales
Le présent article issu d'un amendement portant article additionnel du rapporteur spécial Stéphane Sautarel, crée un dispositif de lissage conjoncturel des recettes des collectivités territoriales.
Si la commission des finances propose de supprimer l'article 64 qu'elle juge inacceptable, elle souhaite néanmoins tenir l'engagement pris auprès du Gouvernement de permettre aux collectivités territoriales de contribuer à hauteur de 2 milliards d'euros au lieu des 5 milliards d'euros proposés.
Dans ces conditions, la commission a adopté un amendement II-11 (FINC.4) visant à substituer au fonds de réserve prévu à l'article 64 un dispositif de lissage conjoncturel des recettes des collectivités territoriales. La contribution des collectivités serait ainsi réduite à 1 milliard d'euros et répartie selon des critères de richesse pour en assurer l'équité.
La commission des finances propose d'adopter cet article.
I. LE DROIT EXISTANT : SI L'ENGAGEMENT A ÉTÉ PRIS DE FAIRE CONTRIBUER LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS, LE DISPOSITIF DU FONDS DE RÉSERVE EST INACCEPTABLE
La contribution demandée par le Gouvernement aux collectivités territoriales à l'effort de redressement des finances publiques s'élève à 5 milliards d'euros dans le texte soumis au Parlement : 800 millions d'euros au titre de l'article 30 (mesure sur le FCTVA), 1,2 milliard d'euros au titre de l'article 31 (gel des fractions de TVA) et 3 milliards d'euros au titre de l'article 64 (fonds de réserve).
Conscient de la nécessité d'une contribution des collectivités à hauteur de leur responsabilité, le Sénat, par la voix de son président, a pris l'engagement de ramener cette contribution à 2 milliards d'euros.
Comme l'ont démontré les rapporteurs spéciaux, le dispositif du fonds de réserve proposé par le Gouvernement est brutal et inabouti. La commission des finances a donc supprimé l'article 64, et proposé un dispositif de lissage conjoncturel des ressources des collectivités territoriales, à hauteur de 1 milliard d'euros.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LA COMMISSION DES FINANCES : POUR TENIR L'ENGAGEMENT D'UNE CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES RAMENÉE À 2 MILLIARDS D'EUROS SUR LES 5 MILLIARDS PROPOSÉS, LA CRÉATION D'UN DISPOSITIF DE LISSAGE CONJONCTUREL DES RECETTES
A. SUBSTITUER AU FONDS DE RÉSERVE PROPOSÉ UN DISPOSITIF DE LISSAGE DES RECETTES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
La rapporteure spéciale Isabelle Briquet considère que tout dispositif de participation des collectivités territoriales au redressement des comptes publics est superflu, voire dangereux, et n'a pas souhaité soutenir cet article.
Si le rapporteur spécial Stéphane Sautarel partage les constats de sa co-rapporteure sur le dispositif soumis à la représentation nationale par le Gouvernement, il considère toutefois que le Sénat doit être force de proposition pour substituer au dispositif inabouti du Gouvernement une proposition alternative à la fois robuste et respectueuse des libertés financières locales.
La commission a adopté son amendement II-11 (FINC.4) à cette fin.
1. Une contribution réduite, proportionnée et équitablement répartie
Il est d'abord proposé de revoir entièrement les modalités de détermination du montant du prélèvement, tant il est évident qu'une contribution de 14,5 milliards d'euros est excessive. Ce quantum pourrait être défini directement dans la loi, comme c'est le cas pour les ressources de certains fonds de péréquation existants, à l'instar du FPIC.
Un montant d'1 milliard d'euros est proposé.
a) « Les collectivités territoriales n'existent pas », ou la nécessité d'un raisonnement par catégorie de collectivités
Comme de nombreux témoignages recueillis lors des auditions menées par les rapporteurs spéciaux l'ont souligné, l'expression « les collectivités territoriales » recouvre des situations extrêmement diverses, qui varient en particulier selon que l'on considère une commune, un établissement public de coopération intercommunale, un département ou une région.
C'est pourquoi il est proposé de répartir la contribution des collectivités territoriales au redressement des comptes publics entre plusieurs contributions « catégorielles », afin qu'elles puissent être finement adaptées à la réalité de chaque catégorie, en particulier des départements dont la situation financière est particulièrement préoccupante. La contribution de 1 milliard d'euros serait ainsi répartie entre :
- une contribution du bloc communal, qui serait répartie à égalité entre les communes et les EPCI ;
- une contribution départementale, à laquelle ne contribueraient pas la Ville de Paris (classée parmi les communes) et le département de Mayotte (classé parmi les régions) ;
- une contribution régionale, qui concernerait également la collectivité de Corse, les collectivités territoriales uniques (CTU) de Guyane et de Martinique et le département de Mayotte.
La ventilation du montant de 1 milliard d'euros entre ces trois prélèvements tiendrait compte du « poids » de chaque catégorie de collectivités dans les finances locales, mesuré par la part de leurs RRF dans les RRF de l'ensemble des collectivités et EPCI. Ce poids tiendrait compte des recettes du budget général, mais également des recettes des budgets annexes. Elle dépendrait également de la dégradation relative de la situation financière de chaque « bloc » de collectivités, par la prise en compte du niveau d'épargne brute moyen de chaque catégorie par rapport à celui des autres. Les simulations réalisées par la commission des finances aboutissent ainsi à une répartition comme suit :
Répartition de la contribution des
collectivités territoriales
au titre de l'article 64 et au
titre de l'amendement
II-11
(FINC.4)
(en millions d'euros)
Article 64 initial |
Amendement FINC.4 |
|||
Montant |
Part du total |
Montant |
Part du total |
|
Communes |
765 |
25,5 % |
255 |
25,5 % |
EPCI |
495 |
16,5 % |
255 |
25,5 % |
Départements |
1 230 |
41,0 % |
220 |
22,0 % |
Régions |
510 |
17,0 % |
270 |
27,0 % |
Total |
3 000 |
100,0 % |
1 000 |
100,0 % |
Source : commission des finances du Sénat
b) Au sein de chaque catégorie, une répartition tenant compte des capacités contributives et évitant les effets de seuil
(1) La contribution du bloc communal serait répartie entre les communes et les EPCI dont les capacités contributives sont les plus importantes
S'agissant de la contribution du bloc communal, il est proposé de la diviser en deux parts égales, à répartir entre les communes d'une part et les EPCI d'autre part. Celle solution, qui vise à traiter équitablement les communes et les établissements, résulte de la volonté de traiter ensemble ce « bloc » de collectivités.
Si une répartition de la contribution par territoire, c'est-à-dire, sur le modèle du FPIC, par ensembles intercommunaux (EI), a été envisagée, elle a été écartée au regard de sa complexité, qui aurait induit une faible visibilité sur la répartition finale entres EPCI et communes.
Le FPIC a toutefois fourni l'inspiration du critère de répartition de cette contribution, puisqu'il est proposé d'apprécier la capacité contributive des communes et des EPCI en fonction leur population, multipliée par un indice synthétique composé :
- pour 75 %, d'un critère de ressources : le potentiel financier par habitant ;
- pour 25 %, d'un critère de charges : le revenu par habitant.
Seuls contribueraient au prélèvement les communes ou les EPCI dont l'indice serait supérieur à l'indice moyen majoré de 10 %. La contribution, de 255 millions d'euros pour les communes, serait répartie entre les communes contributrices en fonction de l'écart relatif entre la valeur de leur indice synthétique et la valeur de l'indice moyen des communes. La clé de répartition de la contribution serait identique pour les EPCI.
Il est précisé que la contribution d'une commune ou d'un EPCI ne peut dépasser 2 % de ses recettes réelles de fonctionnement, ce qui constitue une garantie forte. Lorsque ce plafond est atteint, la différence est répartie entre les autres collectivités contributrices.
(2) La contribution des départements, significativement réduite, ne serait pas imposée à la moitié d'entre eux
Le 15 novembre 2024, aux assises des départements de France, le Premier ministre a accepté de réduire le prélèvement prévu au titre du fonds de réserve « pour tenir compte du fait qu'une part importante des dépenses des départements n'est pas pilotable », comme c'est notamment le cas des allocations individuelles de solidarité. Il a indiqué à ce titre qu'il serait légitime d'envisager une « réduction très significative » de la contribution des départements au titre de ce fonds.
Le dispositif proposé respecte cet engagement.
D'une part, la contribution demandée aux départements s'élève à 219,9 millions d'euros, contre environ 1,3 milliard d'euros dans la copie initiale du Gouvernement. Après avoir défini le même indice synthétique que pour les communes et les EPCI, il exonère les départements dont l'indice est inférieur à la médiane, soit la moitié des départements et répartit le prélèvement entre les départements contributeurs en fonction de l'écart relatif entre leur indice et l'indice médian.
Le résultat est une contribution fortement progressive, dans laquelle les effets de seuils, notamment entre le premier département contributeur et les départements exonérés163(*), sont inexistants.
(3) Une juste contribution des régions, exonérant les outre-mer et la collectivité de Corse
Les modalités de répartition de la contribution régionale s'inspirent du fonctionnement du FSR. L'amendement exonère en effet de la contribution des régions les collectivités qui ne sont pas contributrices à ce fonds, mais qui bénéficient au contraire de reversements à ce titre. En 2023, les régions de Guadeloupe et de La Réunion, la collectivité de Corse, les collectivités territoriales unique de Martinique et de Guyane ainsi que le département de Mayotte étaient concernés.
Ces collectivités sont ainsi exonérées de la contribution régionale. Le montant de cette contribution, de 270 millions d'euros, serait ainsi réparti entre les régions contributrices au prorata de leur population, comme c'est déjà le cas pour la contribution au FSR.
2. Envisager des modalités de répartition des sommes mise en réserve respectueuses de l'ensemble des collectivités
Répartie dans les conditions exposées supra, la contribution des collectivités au titre du présent article apparaît acceptable.
Restent à définir des modalités de reversement des sommes prélevées aux collectivités. Le dispositif proposé par le Gouvernement proposait que ces sommes puissent abonder, les trois années suivantes, le FPIC, le FNP-DMTO et le FSR. Lors des auditions menées par les rapporteurs spéciaux, il est apparu que cette solution ne fait pas consensus : si la péréquation n'a pas nécessairement été rejetée en elle-même, de nombreuses voix se sont élevées pour rappeler que le fonds créé par le Gouvernement à des fins de maîtrise des finances publiques ne devait pas devenir un fonds de péréquation.
Une autre alternative serait de prévoir un reversement des sommes prélevées aux collectivités contributrices, au prorata de leur contribution, de telle sorte que ces sommes leurs reviennent à l'issue de la mise en réserve. Une telle solution s'approche, dans son esprit, de la proposition de créer un dispositif de mise en réserve individuelle au sein des comptes des collectivités contributrices, dans l'esprit de ce qui existe pour les DMTO dans les comptes de chaque département.
Il semble en tout état de cause qu'un équilibre puisse être trouvé entre juste retour aux contributeur et solidarité entre collectivités. Il n'est pas proposé ici de trancher définitivement cette question, qui devra se poursuivre lors de la discussion budgétaire - et dans le débat public.
En tout état de cause, il est proposé de supprimer la marge de manoeuvre excessive du comité des finances locales dans la détermination du montant des reversement et de leur répartition.
Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article.
* 49 Article 109 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 50 Article 240 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.
* 51 Article L. 2334-18-3 du code général des collectivités territoriales.
* 52 Article 250 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.
* 53 Article 250 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
* 54 Article 252 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
* 55 Article 194 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.
* 56 Article 195 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 57 Article 240 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.
* 58 « Libre administration, simplification, libertés locales : 15 propositions pour rendre aux élus locaux leur “pouvoir d'agir”, Groupe de travail du Sénat sur la décentralisation, 6 juillet 2023.
* 59 Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
* 60 Décret n° 2017-1688 du 14 décembre 2017 authentifiant les résultats du recensement de la population 2017 du Département de Mayotte.
* 61 Minorations éventuelles lis à des prélèvements fiscaux subis par la commune à la suite du calcul de sa dotation forfaitaire au titre de l'année précédent ou au titre du renouvellement de la contribution au redressement des finances publiques (CRFP) des communes en application des dispositions de l'article L. 2334-7-3 du code général des collectivités territoriales.
* 62 Matthieu Houser, Droit de la péréquation financière, 2015.
* 63 Il s'agit des prestations prévues à l'article L. 821-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 64 Il s'agit du dernier revenu fiscal de référence connu divisé par la « population DGF » définie à l'article L. 2334-2 du CGCT.
* 65 Pour plus de précisions, se reporter au a du 1 du A du I du présent commentaire d'article.
* 66 Article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 67 Article L. 741-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 68 Pour plus de détail, se reporter au rapport n° 342 (2023-2024) fait au nom de la commission des affaires économiques par notre collègue Amel Guaquerre sur le projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement.
* 69 Article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales.
* 70 Christine Pires-Beaune, Jean Germain, « Pour une dotation globale de fonctionnement équitable et transparente : Osons la réforme », 15 juillet 2015.
* 71 Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté.
* 72 Article L. 2334-18-3 du code général des collectivités territoriales.
* 73 Article L. 2334-18-2 du code général des collectivités territoriales.
* 74 Article L. 2334-22 du code général des collectivités territoriales.
* 75 Dispositions codifiées aux articles L. 2113-1 à L. 2113-22-2 du code général des collectivités territoriales.
* 76 Article 248 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.
* 77 Article 240 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.
* 78 Article 254 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
* 79 Le potentiel financier (PFI) n'est utilisé que pour les communes isolées, le potentiel financier agrégé (PFIA) est utilisé pour les ensembles intercommunaux.
* 80 1° du I de l'article L. 2336-3 du code général des collectivités territoriales.
* 81 2° du I de l'article L. 2336-3 du code général des collectivités territoriales.
* 82 La décision du Conseil d'État du 2 mai 2018, Commune de Neuilly-sur-Seine, n° 400495 a clarifié ce point. Le plafonnement n'était auparavant, en vertu d'une jurisprudence antérieure, pas pris en compte (CE, 19 octobre 2016, Commune de Courbevoie, n° 400574 et 401676).
* 83 3° du I de l'article L. 2336-3 du code général des impôts.
* 84 Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.
* 85 « Réformer la gouvernance du Grand Paris : une méthode, une grille de lecture, un calendrier », rapport d'information de MM. Philippe DALLIER et Didier RAMBAUD, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, n° 444 (2020-2021) - 11 mars 2021.
* 86 Article 59 de la loi n° 2015-991 du 15 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.
* 87 Les modalités de calcul de la dotation d'équilibre sont fixées au 2 du G du XV de l'article 59 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.
* 88 X de l'article L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales.
* 89 Rapport sur le budget primitif 2024 de la Métropole du Grand Paris.
* 90 Voir, sur ce point, les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public, sur les décisions n° 400574 et 401676 du 19 octobre 2016, Commune de Courbevoie.
* 91 « Relation avec les collectivités territoriales », Rapport général n° 164 (2015-2016) sur le projet de loi de finances pour 2016, fait par MM. Charles Guené et Claude Raynal au nom de la commission des finances.
* 92 Évaluation préalable du présent article.
* 93 Article 240 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.
* 94 Le B du XXIV de l'article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a prévu l'affectation de la dynamique de la TVA à un fonds d'attractivité économique des territoires, dont le produit est réparti de la même manière que la CVAE avant sa suppression aux termes des décrets n° 2023-364 du 13 mai 2023 et n° 2023-1101 du 27 novembre 2023 pris en application de l'article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 95 « Relation avec les collectivités territoriales », Rapport n° 128 (2023-2024) fait au nom de la commission des finances du Sénat par M. Stéphane Sautarel et Mme Isabelle Briquet sur le projet de loi de finances pour 2024 - annexe n° 26.
* 96 Conseil d'État, 25 janvier 2024, Commune de Saint-Cloud, n° 489088.
* 97 Conseil constitutionnel, décision n° 80-119 DC du 22 juillet 1980, Loi portant validation d'actes administratifs.
* 98 Conseil constitutionnel, décision n° 99-422 DC du 21 décembre 1999, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.
* 99 Conseil constitutionnel, décision n° 86-223 DC du 29 décembre 1986, Loi de finances rectificatives pour 1986.
* 100 Conseil constitutionnel, décision n° 2013-366 QPC du 14 février 2014, SELARL PJA, ès qualité de liquidateur de la société Maflow France [Validation législative des délibérations des syndicats mixtes instituant le « versement transport »].
* 101 Conseil constitutionnel, décision n° 2014-397 QPC du 6 juin 2014, Commune de Guyancourt.
* 102 Conseil constitutionnel, décision n° 2013-366 QPC du 14 février 2014 précitée ; décision n° 2017-644 QPC du 21 juillet 2017, Communauté de communes du pays roussillonnais.
* 103 Article 72, alinéa 5 de la Constitution.
* 104 Conclusions de M. Vincent Daumas, précitées.
* 105 VI de l'article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000.
* 106 Le périmètre est déterminé par les conseils généraux des départements de l'Aube et de la Haute-Marne.
* 107 V de l'article 43 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000.
* 108 Décret n° 2000-361 du 26 avril 2000, modifié par le décret n° 2013-737 du 12 août 2013.
* 109 Article 127 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
* 110 Préfecture de la Meuse, Projet de développement du territoire pour l'accompagnement de Cigéo, 2019.
* 111 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.
* 112 XXVI de l'article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 113 3° du V de l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
* 114 2° du V de l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
* 115 1° du V de l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
* 116 IV de l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
* 117 C du IV de l'article 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
* 118 XXIV de l'article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 119 XXV de l'article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 120 Article 54 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
* 121 I de l'article 59 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.
* 122 I de l'article 51 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.
* 123 Article 41 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.
* 124 Article L. 3334-16-3 du code général des collectivités territoriales.
* 125 Projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2025.
* 126 Michel Bouvier, Les finances locales, LDGJ, L'Extenso, 2022.
* 127 Article L. 2334-7-3 du code général des collectivités territoriales.
* 128 Article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors en vigueur.
* 129 Article L. 3334-3 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors en vigueur.
* 130 Article L. 4332-7 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors en vigueur.
* 131 Antoinette Hastings-Marchadier, « Dotation et autonomie financière locale. Pour une affirmation du rôle des dotations dans l'approche conceptuelle de l'autonomie », Gestion et finances publiques, 2017, n° 2.
* 132 Gil Desmoulin, « La fin des « contrats de Cahors » : quelles leçons ? », Gestion et finances publiques, 2024, n° 2.
* 133 Pour « objectif d'évolution des dépenses locales ».
* 134 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.
* 135 Article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
* 136 Loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
* 137 Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.
* 138 Article L. 3335-2 du code général des collectivités territoriales.
* 139 Article L. 3335-3 du code général des collectivités territoriales.
* 140 Article 261 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.
* 141 Article 196 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.
* 142 2° du 4 du E du V de l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
* 143 Article 131 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.
* 144 Il s'agit des départements suivants : Aisne, Ardennes, Aude, Bouches-du-Rhône, Cher, Creuse, Dordogne, Doubs, Haute-Garonne, Gers, Gironde, Indre-et-Loire, Loir et Cher, Loire, Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Marne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Nièvre, Nord, Pas-de-Calais, Saône-et-Loire, Vienne, Territoire de Belfort, Seine-Saint-Denis, Guadeloupe, Martinique, Réunion.
* 145 Cour des comptes, Les finances publiques locales, 2024, Fascicule n° 2.
* 146 Article 14 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.
* 147 Les recettes réelles de fonctionnement sont minorées des atténuations de produit, des recettes exceptionnelles et du produit des mises à disposition de personnels facturées dans le cadre d'une mutualisation de services entre un EPCI et ses communes membres. Pour les communes de la Métropole du Grand Paris, les RRF sont en outre minorées du montant de la dotation individuelle au Fonds de compensation des charges territoriales (FCCT).
* 148 Mentionné au II de l'article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.
* 149 Article 59 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.
* 150 Article 51 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.
* 151 Article 39 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.
* 152 Article 41 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.
* 153 Article L. 3334-16-3 du code général des collectivités territoriales.
* 154 1° de l'article L. 2334-16 du code général des collectivités territoriales.
* 155 Article L. 2334-22-1 du code général des collectivités territoriales.
* 156 b du 1° du IV de l'article L. 5211-8 du code général des collectivités territoriales.
* 157 2° du 4 du E du V de l'article 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
* 158 Article L. 4332-9 du code général des collectivités territoriales.
* 159 Minorées des atténuations de produit, des recettes exceptionnelles et du produit des mises à disposition de personnels facturées dans le cadre d'une mutualisation de services entre un EPCI et ses communes membres. Pour les communes de la Métropole du Grand Paris, les RRF sont en outre minorées du montant de la dotation individuelle au Fonds de compensation des charges territoriales (FCCT).
* 160 Rapport n° 86 (2022-2023) fait par Jean-François Husson au nom de la commission des finances du Sénat sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, déposé le 27 octobre 2022. Se reporter au commentaire de l'article 23.
* 161 Conseil constitutionnel, décision n° 2017-760 DC du 18 janvier 2018, Loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.
* 162 On aurait pu croire que le Gouvernement se bornerait à constater l'écart de solde dans le cadre fixé par le législateur et le pouvoir réglementaire.
* 163 Sont exonérés dans cette hypothèse : Aisne, Hautes-Alpes, Ariège, Aube, Aude, Calvados, Cantal, Côte-d'Or, Cotes-d'Armor, Creuse, Eure, Eure-et-Loir, Indre, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Haute-Loire, Loiret, Lot, Lot-et-Garonne, Lozère, Maine-et-Loire, Manche, Marne, Haute-Marne, Mayenne, Meuse, Morbihan, Moselle, Oise, Orne, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Pyrénées-Orientales, Haute-Saône, Saône-et-Loire, Sarthe, Deux-Sèvres, Somme, Tarn, Vienne, Yonne, Territoire de Belfort, Seine-Saint-Denis, Val d'Oise, Guadeloupe et La Réunion.