C. LA COOPÉRATION CULTURELLE ET D'INFLUENCE AU DÉFI D'UNE STAGNATION DES MOYENS

Le programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » rassemble les crédits destinés aux politiques culturelle, linguistique, universitaire, scientifique et d'attractivité. Placé sous la responsabilité de la direction générale de la mondialisation (DGM), il comprend également les subventions versées aux opérateurs de la mission.

Une grande partie des crédits du programme 185 est gérée par trois opérateurs :

- l'Agence française pour l'enseignement français à l'étranger, évoquée supra et placée sous la tutelle du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, a pour principal objectif d'assurer les missions de service public relatives à l'éducation en faveur des enfants de nationalité française résidant à l'étranger ;

- l'Institut français, placé sous la double tutelle du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et du ministère de la culture, assure la promotion de la culture française à l'étranger et accompagne le réseau culturel français ;

Campus France, placé sous la double tutelle du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, est chargé d'assurer la promotion de l'enseignement supérieur français à l'étranger et de financer des programmes de mobilité internationale.

Pour 2025, le total des crédits alloués aux trois opérateurs de la mission devrait s'élever à 545,18 millions d'euros au titre du programme 185. Le montant de cette enveloppe globale contribue à rigidifier les dépenses du programme. Près de 81 % des crédits du paiement du programme sont ainsi versés aux opérateurs dans le cadre de SCSP.

Sans constituer des opérateurs au sens de la loi organique relative aux lois de finances, les Alliances françaises mettent également en oeuvre une partie des crédits de la mission.

Évolution des crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence »
de la mission « Action extérieure de l'État »

(en millions d'euros)

 

LFI 2024

PLF 2025

Évolution en valeur

Évolution en pourcentage

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

P185 - Diplomatie culturelle et d'influence

721,18

721,18

675,94

675,94

- 45,24

- 45,24

- 6,27 %

- 6,27 %

Appui au réseau

44,1

44,1

44,9

44,9

0,8

0,8

+ 1,82 %

+ 1,82 %

Coopération culturelle et promotion du français

86,34

86,34

75,57

75,57

- 10,77

- 10,77

- 12,48 %

- 12,48 %

Objectifs de développement durable

2,35

2,35

1,77

1,77

- 0,58

- 0,58

- 24,72 %

- 24,72 %

Enseignement supérieur et recherche

123,04

123,04

107,87

107,87

- 15,17

- 15,17

- 12,33 %

- 12,33 %

Agence pour l'enseignement français à l'étranger

454,93

454,93

440,83

440,83

- 14,1

- 14,1

- 3,10 %

- 3,10 %

Diplomatie économique et attractivité

10,42

10,42

5

5

- 5,42

- 5,42

- 52,02 %

- 52,02 %

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

1. Si le soutien au réseau de la coopération culturelle fait l'objet d'une sanctuarisation, il n'est pas certain qu'il soit en mesure de couvrir le besoin de financement des établissements

Le réseau français de la coopération culturelle se caractérise par une très forte diversité des acteurs et des statuts juridiques. Il comprend ainsi :

- les services de coopération et d'action culturelle (SCAC) des ambassades ;

- les établissements à autonomie financière (EAF), soit les Instituts français45(*) et les unités mixtes des instituts français de recherche à l'étranger (IFRE). Inscrits dans la Lolf, ces établissements disposent de ressources propres et perçoivent une dotation de fonctionnement sur le programme 185 ;

- les Alliances françaises, dotées de statuts associatifs de droit local, qui bénéficient de subventions.

En 2024, le MEAE, dans un contexte de baisse de leur taux d'autofinancement, avait renforcé d'un million d'euros son soutien aux EAF. La reprise de l'inflation et la dégradation du taux de change ont eu pour effets d'augmenter les charges des EAF (dépenses immobilières, salaires...) et d'affaiblir leur taux d'autofinancement46(*), en raison d'une dégradation des recettes principalement issues des cours de français et des certifications de langues.

Pour 2025, la dotation de fonctionnement accordée aux EAF progresse du même montant, pour se situer à 41 millions d'euros. Le dynamisme de la dotation s'inscrit dans le prolongement des engagements des états généraux de la diplomatie. Elle vise notamment à couvrir le processus de convergence des cadres salariaux des agents de droit local des Instituts français avec ceux des ambassades, d'une part, et l'élargissement des mesures de protection sociale des agents de droit local, d'autre part.

Il n'est néanmoins pas certain que le volume de cette enveloppe initiale soit suffisant pour couvrir les besoins de financement de ces établissements, en particulier ceux découlant d'aléas internationaux. Pour rappel, en fin d'exercice 2023, le MEAE avait été contraint de verser une aide de 45 000 euros à l'Institut français de Jérusalem.

Par ailleurs, comme pour l'exercice 2024, il est surprenant de constater l'absence de précisions, dans les documents budgétaires, sur la doctrine d'utilisation des différentes enveloppes libellées « autres crédits d'intervention de postes à l'étranger et en administration centrale », en matière de promotion du français (8,7 millions d'euros), de coopération culturelle (12,5 millions d'euros) et de coopération universitaire et scientifique (21,2 millions d'euros).

2. Une stabilisation des crédits de l'attractivité universitaire et scientifique qui compromet les ambitions affichées

L'enseignement supérieur et la recherche figure désormais au coeur de la diplomatie d'influence. La « feuille de route de l'influence » publiée en 2021 par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères avait placé cette question parmi les six priorités stratégiques de l'influence. La feuille de route rejoignait en cela l'objectif de 500 000 étudiants étrangers en France d'ici à 2027, fixé en 2018 par la stratégie « Bienvenue en France ». Cette dernière prévoyait également un doublement des bourses d'études accordées par la France47(*).

Les efforts engagés ces dernières années ont permis de renforcer l'attractivité universitaire de la France, sans pour autant réaliser l'objectif fixé par le Gouvernement en 2018. Avec 430 000 étudiants internationaux en France sur l'année universitaire 2023-2024, le volume de mobilité internationale vers la France a progressé de 17 % sur les cinq dernières années. Les visas pour études représentent, depuis 2022, le premier flux d'immigration légale en France.

La mobilité étudiante en France selon la zone géographique en 2022-2023

(en pourcentage et en nombre d'étudiants)

Source : commission des finances d'après les données de Campus France

Les bourses du Gouvernement français (BGF) constituent le principal outil de promotion de l'attractivité universitaire et scientifique. Elles s'élèvent en 2025 à 70,1 millions d'euros, soit une stabilisation par rapport à l'exercice 2024. Les BGF regroupent différentes enveloppes dont les bourses « enseignement supérieur et recherche » forment la majorité, pour un montant de 65,2 millions d'euros en 2025.

Il importe de souligner que ces bourses, dont la gestion est assurée par l'opérateur Campus France, sont loin de financer l'ensemble des étudiants internationaux présents en France. Seulement 3 % d'entre eux ont bénéficié d'une bourse MEAE en 2024, soit 11 617 bourses versées sur le programme 185.

Au-delà d'un effort porté sur le volume de bourses, la direction générale de la mondialisation, responsable du programme 185, s'est engagée dans une démarche plus qualitative de la politique d'attractivité étudiante qui vise :

- à assurer une continuité entre la mobilité internationale et l'enseignement français à l'étranger, en ciblant les meilleurs élèves des lycées à l'étranger ;

- à concentrer les efforts sur les meilleurs profils au niveau du master et du doctorat ;

- à cibler les priorités scientifiques qui pourraient être mobilisées comme levier d'influence (droit, santé, lutte contre le changement climatique, hautes technologies).

Évolution des bourses pour étudiants et chercheur étrangers
entre 2028 et 2025

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Cette stabilisation apparente du volume des BGF aura néanmoins pour conséquence de réduire le nombre de bourses nouvelles par rapport à l'année 2024, interrompant la trajectoire haussière engagée les années passées. Une partie conséquente de l'enveloppe prévue sera, en effet, utilisée pour financer les engagements pris lors des années précédentes à financer des mobilités couvrant plusieurs années civiles.

Campus France

Campus France est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), créé en 2011 et placé sous la double tutelle du MEAE et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Cet opérateur est chargé de la promotion des formations supérieures françaises à l'étranger, d'une part, et de la gestion de prestations au bénéfice des étudiants internationaux notamment la gestion des bourses du gouvernement français, d'autre part.

Le financement de l'opérateur est assuré par une subvention pour charges de service public, de l'ordre de 3,38 millions d'euros pour 2025, en diminution de 87 000 euros par rapport à l'année précédente. Cette relative stabilité de la SCSP s'explique par les efforts budgétaires conséquents consentis par l'opérateur dans le cadre de la LFI 2024. Les annulations de crédits de février 2024 avaient en effet conduit à une réduction de 1,38 million d'euros du budget de Campus France.

Campus France bénéficie également d'un prélèvement pour frais de gestion sur les programmes de bourses, soit un montant de 7,5 millions d'euros en 2024. L'opérateur a, par ailleurs, développé des ressources propres qui reposent sur des frais de gestion de programmes au bénéfice de tiers ou de réponses à des appels d'offre européens.

Source : commission des finances

3. La diplomatie économique et d'attractivité constitue désormais une dépense résiduelle du programme 185

Pour mémoire, depuis juillet 2022, la compétence « Tourisme » a été transférée du ministère de l'Europe et des affaires étrangères vers le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Pour cette raison, l'opérateur Atout France ne relève plus du programme 185.

Pour 2025, l'action « Diplomatie économique et attractivité » est dotée de 5 millions d'euros en AE=CP, soit une diminution de près de 50 % des moyens par rapport à l'année passée. L'essentiel des crédits permet au MEAE de participer aux grands évènements de promotion de l'attractivité économique française.


* 45 Distincts de l'opérateur Institut français de Paris.

* 46 Il se situait à 76 % en 2023.

* 47 Pour passer de 7 000 bourses en 2017 à 15 000 en 2027.

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