EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 30 octobre 2024, sous la présidence de M. Philippe Mouiller, président, la commission examine le rapport de Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure, sur la proposition de loi (n° 570, 2023-2024) visant à améliorer le repérage et l'accompagnement des personnes présentant des troubles du neuro-développement et à favoriser le répit des proches aidants.
M. Philippe Mouiller, président. - Monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous débutons aujourd'hui nos travaux par l'examen, en deuxième lecture, de la proposition de loi visant à améliorer le repérage et l'accompagnement des personnes présentant des troubles du neuro-développement (TND) et à favoriser le répit des proches aidants.
Comme l'a décidé la Conférence des présidents, avec l'accord de tous les présidents de groupe, nous légiférons selon la procédure de législation en commission prévue aux articles 47 ter à 47 quinquies du Règlement du Sénat. Le droit d'amendement s'exerce donc uniquement en commission.
La réunion de la commission se tient en présence du Gouvernement ; elle est publique et retransmise sur le site du Sénat.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. - Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité des suffrages exprimés, le 2 mai dernier, cette proposition de loi déposée par nos collègues Jocelyne Guidez, Laurent Burgoa et Corinne Féret à la suite d'un rapport d'information de notre commission.
Plusieurs modifications ont été apportées au texte par les députés. L'Assemblée nationale a adopté conforme un article, confirmé la suppression d'un autre et modifié cinq articles du texte transmis par le Sénat en janvier dernier. Trois nouveaux articles complètent par ailleurs la proposition de loi. À ce stade de la navette, huit articles demeurent donc en discussion.
Ce texte, que nous avons adopté à l'unanimité en janvier dernier, permettra d'améliorer le repérage et le suivi des personnes présentant des TND, de favoriser leur inclusion scolaire et de simplifier leur parcours. D'après la délégation interministérielle à la stratégie nationale pour les TND, ces troubles concerneraient 17 % de la population. La proposition de loi contribuera également à soutenir les proches qui les accompagnent. Elle répond ainsi à plusieurs des difficultés identifiées par le rapport d'information de 2023.
Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale ne bouleversent pas l'économie générale du texte et ne réduisent pas sa portée. C'est pourquoi je vous proposerai de l'adopter sans modification supplémentaire afin qu'il puisse rapidement entrer en vigueur.
Attardons-nous, d'abord, sur les modifications apportées par l'Assemblée nationale aux dispositions visant à améliorer les conditions de scolarisation des élèves présentant un TND. Celles-ci doivent permettre de garantir à tous les élèves présentant un TND, même complexe, l'accès à un parcours scolaire aussi ordinaire que possible, à proximité de leur domicile.
L'article 1er, qui vise la création de dispositifs dédiés à la scolarisation en milieu ordinaire de ces élèves dans chaque circonscription académique métropolitaine et dans chaque académie d'outre-mer d'ici à 2027 est, à cet égard, particulièrement important. Les députés ont largement soutenu ses dispositions et n'y ont apporté que des ajustements rédactionnels.
L'Assemblée nationale a, par ailleurs, introduit un nouvel article 1er bis faisant obligation à l'éducation nationale de s'assurer que, dans chaque établissement scolaire, un relais ou un référent pour l'accueil d'enfants présentant un TND soit désigné. Notre commission avait rejeté un amendement similaire, le jugeant insuffisamment précis et largement satisfait par les dispositions de l'article 1er. Je vous proposerai néanmoins d'entendre la volonté de l'Assemblée nationale et d'adopter, en conséquence, cet article.
Les députés ont adopté conforme l'article 2, qui vise à renforcer la formation des équipes pédagogiques à l'accueil et à l'accompagnement des élèves présentant un TND.
Enfin, l'Assemblée nationale n'a apporté que des modifications rédactionnelles à l'article 4. En prévoyant que les mesures d'inclusion scolaire prises par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) puissent être notifiées pour la durée d'un cycle pédagogique, soit trois ans, cet article permettra aux parents et aux professionnels, dont le temps est précieux, de ne pas se plonger trop régulièrement dans des procédures administratives.
L'Assemblée nationale a également adopté, avec modifications, les dispositions de la proposition de loi visant à favoriser un repérage et un diagnostic précoces des TND. Il s'agit là d'un enjeu essentiel : un enfant sur six serait atteint d'un TND, mais, en raison de carences dans le repérage, un sous-diagnostic important persiste en France. Ce dernier est à l'origine de retards, voire d'absences de prise en charge, qui se traduisent par des surhandicaps et, bien souvent, du mal-être pour les enfants concernés.
À cet égard, moyennant quelques modifications rédactionnelles, l'Assemblée nationale a adopté l'article 5 du texte, qui vise à inscrire dans la loi l'existence d'une stratégie de repérage adaptée au niveau de risque identifié chez l'enfant, fondée sur l'organisation d'examens complémentaires le cas échéant.
Si cette stratégie de repérage graduée en fonction du risque a permis d'importants progrès, elle doit toutefois être complétée par une politique de repérage en population générale. C'est l'objectif de l'article 6, plus substantiellement modifié par les députés, qui prévoit la réalisation de deux examens médicaux obligatoires de repérage des TND, intégralement pris en charge par la sécurité sociale. Contre l'avis du Gouvernement et de la commission des affaires sociales, les députés ont adopté deux amendements identiques fixant à 9 mois plutôt qu'à 18 mois l'âge du premier examen de repérage obligatoire.
Je regrette, naturellement, que l'Assemblée nationale n'ait pas suivi les préconisations de la Haute Autorité de santé (HAS), pourtant fondées sur une expertise scientifique reconnue. L'âge retenu ne semble pas le plus opportun en population générale. Toutefois, réaliser un premier examen à 9 mois est recommandé chez les enfants à risque et pourrait accélérer la prise en charge de certains troubles observables précocement. Afin de permettre l'adoption rapide de la proposition de loi, il ne me semble pas opportun d'amender le texte pour rétablir à 18 mois l'âge cible du premier examen de repérage. Je ne peux toutefois qu'encourager le Gouvernement à sensibiliser, dans le cadre de la réforme du carnet de santé, les parents et les professionnels de santé sur l'opportunité de réaliser également des tests de repérage des TND aux alentours de 18 mois.
Les députés ont, par ailleurs, confirmé la suppression de l'article 3, qui visait à renforcer la formation continue des professionnels de santé aux situations de handicap et de TND. Nous avions jugé, en première lecture, que ses dispositions étaient déjà entièrement satisfaites en droit.
L'Assemblée nationale a inséré dans le texte deux articles additionnels destinés à favoriser l'implication des professionnels de l'accueil du jeune enfant et de l'accueil collectif des mineurs, en milieu extrascolaire, dans le repérage et le suivi des TND.
L'article 3 bis, d'une part, vise à rendre obligatoire la formation à l'accueil et au suivi des mineurs présentant un TND pour les personnels des établissements et services d'accueil du jeune enfant ou d'accueil collectif des mineurs (crèches, assistants maternels, centres de loisirs, etc.)
L'article 6 bis, d'autre part, confie à ces professionnels une mission de participation au repérage précoce des TND, au suivi et à l'accompagnement des enfants concernés.
Il me semble que ces dispositions complètent utilement le texte. Les professionnels qui côtoient les enfants au quotidien sont probablement les mieux placés pour observer certains écarts de développement ou identifier des comportements inhabituels. Sans se substituer à l'intervention du médecin de première ligne, dont l'expertise scientifique demeure indispensable pour permettre le repérage, les professionnels de l'accueil du jeune enfant ont un rôle important à jouer en réalisant, en quelque sorte, un « pré-repérage » permettant d'anticiper la consultation d'un médecin de première ligne. Des guides à l'attention de ces professionnels, contenant des grilles d'observation à différents stades du développement, ont ainsi été publiés par la délégation interministérielle en 2021. La stratégie nationale mise en place par le Gouvernement pour la période 2023-2027 souligne par ailleurs la nécessité de renforcer la formation des professionnels interagissant avec l'enfant dans sa vie quotidienne, afin qu'ils puissent agir favorablement sur son développement. C'est pourquoi je vous proposerai d'adopter sans modification ces deux articles.
Enfin, l'Assemblée nationale a apporté plusieurs modifications aux dispositions du texte visant à soutenir les aidants.
À l'article 7, qui pérennise l'expérimentation permettant des dérogations au droit du travail dans le cadre de prestations de « relayage » ou de séjours de répit, les députés ont supprimé, d'une part, la possibilité de mobiliser des salariés du particulier employeur pour effectuer ce type de prestations, et, d'autre part, la possibilité pour le conjoint survivant de prolonger le contrat de travail avec le salarié embauché comme aide à domicile en cas de décès du conjoint employeur.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a introduit l'obligation, pour les établissements et services souhaitant fournir des prestations de relayage dans ce cadre dérogatoire, d'obtenir l'accord préalable du président du conseil départemental ou du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS). Elle a également prévu la définition, par décret, des critères auxquels les personnes aidées doivent répondre pour avoir accès aux prestations de relayage de longue durée.
Les députés ont finalement différé l'entrée en vigueur de ce dispositif au 1er janvier 2025.
Ces modifications, substantielles, permettront de mieux encadrer le dispositif prévu et de maîtriser son champ d'application. Pour ne pas retarder davantage l'entrée en vigueur de ces dispositions attendues, je vous proposerai d'adopter cet article dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, si certaines modifications apportées par l'Assemblée nationale apparaissent discutables, la grande majorité d'entre elles complètent utilement la proposition de loi et maintiennent son ambition.
Ces dispositions sont attendues des familles et des associations. Nécessaires pour améliorer le parcours scolaire et médical des enfants présentant un TND, et pour développer l'offre de répit des proches aidants, elles doivent désormais rapidement entrer en application.
Dans l'intérêt des enfants concernés et en accord avec son auteure, Jocelyne Guidez, je vous propose donc d'adopter cette proposition de loi sans modification.
M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes. - Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi qui nous réunit ce matin me tient particulièrement à coeur, comme vous le savez. Je veux tout d'abord remercier Jocelyne Guidez, l'auteure de ce texte et Anne-Sophie Romagny, sa rapporteure pour le Sénat. Je salue les travaux menés par la Haute Assemblée dès janvier dernier ainsi que le choix de recourir à la procédure de législation en commission.
Adopté à l'unanimité au Sénat en janvier 2024, puis à l'Assemblée le 2 mai dernier, ce texte nous rassemble et dépasse les clivages politiques. Je suis à présent membre du Gouvernement, mais je n'oublie pas, bien entendu, mon travail de rapporteur sur ce texte.
La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a travaillé rigoureusement à l'élaboration d'amendements constructifs, confirmés ensuite en séance, sans pour autant modifier l'essentiel du texte que vous aviez adopté, démontrant ainsi, je le crois, notre harmonie de vues, d'objectifs et de méthode.
Les députés ont notamment adopté un article qui oblige l'éducation nationale à s'assurer de la présence dans chaque établissement d'un référent au moins pour l'accueil des enfants présentant un trouble du neuro-développement, à savoir l'autisme, les troubles dys, le trouble de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) et les troubles du développement intellectuel. Tout comme les parents, les enseignants souhaitent voir se réaliser l'école pour tous, mais ils nous font part de leurs difficultés à accompagner certains élèves. Ils doivent être rassurés et savoir qu'ils ne sont pas seuls. Cette mesure vient compléter efficacement l'article 2, que les députés avaient adopté conforme en première lecture, ce dernier étant à son tour complété par un nouvel article qui vise à élargir la formation aux personnels des centres de loisirs et des crèches. La vie des enfants ne s'arrêtant pas au portail de l'école, nous devons partout nous soucier de leur bien-être.
Cet article rejoint notre objectif commun d'oeuvrer pour les droits des enfants en situation de handicap. La conférence nationale du handicap a acté en 2023 une réforme du cadre d'emploi des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) pour faciliter leur travail, leur permettre d'accompagner aussi les élèves sur les temps périscolaires et généraliser le bonus périscolaire pour les centres qui accueillent des enfants en situation de handicap. Ensemble, Parlement et Gouvernement agissent pour que les droits des personnes soient mieux respectés.
Cette union des forces s'observe également dans l'élaboration de la stratégie nationale pour les troubles du neuro-développement, en particulier leur repérage précoce, dont il est question dans la deuxième partie de ce texte. Le code de la santé publique prévoit vingt examens médicaux obligatoires entre la naissance et la majorité, mais aucun n'est dédié spécifiquement au repérage des TND. Des grilles seront bientôt incluses dans le carnet de santé, mais nous devons aussi prévoir des examens dédiés pour repérer au plus vite ces troubles et éviter les risques de surhandicap. Nous savons également que la formation des professionnels de santé sur les TND doit être améliorée ; je travaille avec le délégué interministériel en ce sens.
Un repérage plus efficace est aussi la garantie pour nos politiques publiques de fournir par la suite un meilleur accompagnement aux enfants, aux adultes et aux familles. Je renouvelle donc devant vous mon attachement à l'article 6 et à la création de deux examens médicaux, aux 9 mois de l'enfant pour repérer les troubles les plus sévères, notamment l'autisme, et à ses 6 ans, avant l'entrée au cours préparatoire, pour repérer les troubles d'apparition plus tardive comme le TDAH et les troubles dys. J'ai toutefois entendu votre invitation, madame la rapporteure, et je m'engage, dans le cadre du déploiement du nouveau carnet de santé, à ce qu'une attention particulière soit portée au repérage autour des 18 mois de l'enfant.
La complémentarité dont je parlais s'observe enfin avec la stratégie pour les aidants. Le dispositif de relayage de longue durée, expérimenté depuis 2019 et prolongé à plusieurs reprises, a démontré son impact positif auprès des personnes concernées, de leurs proches aidants et des salariés des établissements mobilisés. Nous avions statué à l'Assemblée nationale sur le report de son entrée en vigueur en raison d'un risque d'insécurité juridique liée au droit du travail. Notre priorité doit être de garantir la continuité des parcours d'accompagnement et d'éviter une rupture délétère pour les personnes, leur sécurité et l'organisation des services. Un travail devra être accompli à ce titre au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour permettre la bonne continuité des dispositifs entre le prolongement de l'expérimentation et sa pérennisation, toujours au profit des personnes concernées et de leur famille, dans l'optique d'une mise en oeuvre de l'article 7 au 1er janvier 2025.
Je suis très heureux de voir ce texte aboutir prochainement et je vous renouvelle mes remerciements.
M. Philippe Mouiller, président. - Je remercie l'auteure de la proposition de loi, Jocelyne Guidez, de son implication constante, depuis des années, sur la cause des aidants et sur la prise en charge des TND.
Mme Jocelyne Guidez, auteure de la proposition de loi. - Je commencerai par adresser des remerciements à Annick Jacquemet, Laurent Burgoa, Corinne Féret, notre président Philippe Mouiller, le ministre Paul Christophe et Anne-Sophie Romagny, enfin, pour sa prise de relais.
Il y a beaucoup d'émotion quand on en arrive à ce stade d'une proposition de loi traitant d'un handicap, a fortiori d'un handicap invisible. Ce genre de sujets, très pointus, exigent de l'humilité : on ne peut avancer qu'à plusieurs ! Je suis donc heureuse d'être là aujourd'hui et, monsieur le ministre, je tiens tout particulièrement à vous remercier pour votre écoute, car c'est ensemble que nous avons pris les décisions.
Voilà quinze jours, j'ai reçu M. Étienne Pot, délégué interministériel, lui-même médecin, qui m'a rassurée sur la question des neuf mois, m'indiquant que cet examen neurosensoriel était important et qu'il permettrait de mieux détecter un souci en cas d'autisme et, pourquoi pas, de TDAH.
Je vous remercie tous d'avoir travaillé à mes côtés et d'avoir permis les avancées réalisées. Cela étant, prenons le cas des professeurs d'écoles : ils peuvent bénéficier de stages à condition de les financer eux-mêmes. Ce n'est pas normal ! Prenons les dossiers MDPH : tous les ans, pour un enfant atteint d'autisme depuis ses 9 ou 18 mois, pour un enfant détecté TDAH à 3 ans, les parents doivent retourner un dossier extrêmement compliqué à remplir et, quand on parle de le simplifier, on ajoute quatorze pages... C'est honteux ! Prenons, enfin, la question des adultes : l'âge actuel de repérage est 37 ans. Il faut trouver des solutions pour les jeunes de 25 ans qui n'ont pas encore été repérés et qui se retrouvent sans travail, parfois avec une addiction. Autrement dit, le travail ne s'arrête pas là !
Mme Florence Lassarade. - Merci, chère Jocelyne Guidez, d'avoir mis l'accent sur une pathologie que je connais ; ayant exercé le métier de pédiatre pendant quarante ans, j'ai souvent été confrontée à la détresse des parents.
Les pédiatres savent établir le repérage. En revanche, on semble parfaitement accepter l'idée qu'il n'y en ait plus, au motif que les médecins généralistes peuvent faire leur métier. Or, ces derniers bénéficient de trois mois de formation en pédiatrie et refusent d'en avoir plus. Il y a plusieurs âges de repérage, l'examen à 9 mois n'étant que l'examen obligatoire - il est d'ailleurs censé revenir à la protection maternelle et infantile (PMI), dont nous n'avons pas parlé. Va-t-on laisser le médecin généraliste faire ce repérage ou va-t-on réellement former des internes en pédiatrie, et ce pas uniquement pour faire de la réanimation au sein des maternités ?
J'y insiste, la difficulté dans le parcours tient plus à l'accueil et à l'accès aux consultations spécialisées qu'à l'établissement du repérage et du diagnostic. Sur l'autisme, il y a un réel malentendu : on ne recourt pas assez aux spécialistes capables de détecter et on n'en forme pas assez.
Ce refus de recourir aux spécialistes et cette délégation permanente des tâches entraînent une perte de compétences, et je déplore que l'on se contente de cet état de fait.
Mme Corinne Féret. - Cette proposition de loi tire son origine des conclusions de la mission d'information sur les troubles du neurodéveloppement que nous avions menée, Jocelyne Guidez, Laurent Burgoa et moi-même. Depuis, nous avons progressé sur ce sujet concernant de très nombreuses familles, des enfants comme des adultes.
Avec ce texte, nous répondons à une attente ancienne de ces familles. C'est pourquoi nous le soutiendrons.
Toutefois, je me permettrai de rappeler, en votre présence, monsieur le ministre, que les moyens font défaut. La proposition de loi apporte des solutions visant à améliorer le dépistage, la prise en charge, l'accompagnement, tant des personnes atteintes que des aidants. Mais il faut aussi des professionnels aux côtés de ces enfants ! Il faut des moyens ! Or les pénuries sont réelles dans certaines professions. S'y ajoute la problématique de l'accès aux soins pour les familles éloignées des structures d'accueil.
Mme Laurence Muller-Bronn. - Je remercie à mon tour les collègues ayant travaillé sur ce texte. Je voudrais saluer tout particulièrement l'article concernant les aidants et la pérennisation d'une expérimentation en cours depuis 2018, à laquelle le département du Bas-Rhin a participé.
Ayant eu l'occasion de rencontrer les acteurs qui effectuaient ce « relayage » ou « baluchonnage », je peux confirmer que, tout comme les familles, ils n'ont que des éloges à formuler sur un programme permettant aussi de retarder l'entrée en établissement. Le maintien à domicile présente beaucoup d'intérêts, et cet assouplissement du droit du travail est très positif.
Mme Laurence Rossignol. - Je voudrais, moi aussi, saluer le travail réalisé par nos collègues et pour autant, à titre personnel, me démarquer un peu de la position de notre chef de file sur le sujet, Corinne Féret. Mon intervention est cohérente avec ce que j'avais déjà exprimé au moment de l'examen du rapport d'information précédemment cité.
Favoriser le repérage pour accélérer le dépistage, aider les parents en travaillant sur le répit, introduire les neurosciences dans les diagnostics des enfants atteints de TND, tout cela est positif. Mais quelques sujets me posent problème, à commencer par le monde réel dans lequel on s'inscrit...
Je veux bien que l'on parle d'un repérage à 9 mois, mais c'est le temps qu'il faut pour avoir un premier rendez-vous dans un centre de dépistage TDAH !
Et que va-t-il se passer dès lors que cet examen devient obligatoire ? On risque de devoir faire appel à des médecins non formés.
Et que fera-t-on face à des enfants dont les troubles du développement sont, non pas liés au neurodéveloppement, mais par exemple à une situation d'inceste ?
Autant les neurosciences sont un apport, autant la conversion totale et exclusive à ces neurosciences est dangereuse. Je me méfie donc de ce qui pourrait devenir une nouvelle religion, au même titre que je me méfie de n'importe quelle mode en matière de diagnostic sur les troubles du développement. Il y a dix ans de cela, tout le monde était bipolaire. Maintenant les enfants sont TDAH, sauf les enfants de bonne famille qui sont à haut potentiel intellectuel (HPI)... Soyons vigilants sur ces questions !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Quel combat, chère Jocelyne Guidez, quelle constance, quelle force dans la détermination ! Je vous ai sentie parfois proche d'abandonner - sentiment que doivent aussi connaître les familles - et, chaque fois, vous êtes repartie. Je suis donc heureuse que nous aboutissions aujourd'hui, et je vous en félicite.
Ce que vient de dire Laurence Rossignol est intéressant. Je ne doute pas que viendra ensuite le temps de l'évaluation. Cette évaluation devra-t-elle être annuelle ou pas ? Je ne saurais le dire, mais il faudra la réaliser, et je ne doute pas que vous prêterez attention aux évolutions et progrès. C'est le sens même de ce texte !
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Je sais combien Jocelyne Guidez est attachée à cette cause et combien elle a travaillé pour faire aboutir ce texte, qui traite d'un sujet important, et nous l'en remercions.
Cela a été souligné, il faut vraiment travailler à la simplification administrative pour les enfants et les familles.
Malheureusement, se pose aussi la question des centres médico-psychologiques (CMP) et des centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP). Les temps d'attente y sont longs : il faut plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous. J'espère que nous pourrons avancer sur cette question dans le cadre du PLFSS, même si celui-ci est, je le sais, très encadré.
Veillons aussi aux bonnes volontés qui s'expriment dans nos départements. Je viens d'inaugurer La Maison d'Antoine à Lens, une structure ouverte par les parents d'un jeune atteint de TND et accueillant aujourd'hui plusieurs jeunes adultes en situation de handicap. Pour quelques milliers d'euros manquants, elle va peut-être devoir fermer. Il faut aider ces petites structures, utiles pour le répit des proches aidants.
Mme Anne Souyris. - Je dirai un mot sur le continuum de la prise en charge. Ayant été professeur des écoles dans une autre vie, je voudrais évoquer une difficulté d'ordre administratif importante. Peut-être n'existe-t-elle pas partout, mais elle est éprouvante pour les parents et les accompagnateurs que sont les enseignants. Il s'agit du fait qu'au passage d'un établissement à l'autre - crèche, école maternelle, école élémentaire et au-delà - tous les suivis s'arrêtent. Se pose donc une question d'amélioration de la transmission d'informations, qui ne coûterait d'ailleurs pas forcément plus d'argent, pour ne pas imposer aux familles de tout recommencer à chaque étape.
Mme Anne-Sophie Romagny, rapporteure. - Le fait que la plupart des articles du texte aient été évoqués montre bien l'appétence qu'il suscite, et je vous en remercie, mes chers collègues. Il s'agit évidemment d'une première étape, qui appellera un suivi. À ce titre, j'entends les remarques et les inquiétudes concernant les délais. L'examen à 9 mois permet un repérage par un médecin de première ligne ; il faut ensuite poser le diagnostic et enclencher le suivi. Non seulement il existe aujourd'hui des difficultés en termes de délais de diagnostic et de prise en charge, mais ceux-ci risquent de s'allonger si l'on repère plus d'enfants. Il faudra y être attentifs.
M. Philippe Mouiller, président. - Je vous rappelle que les articles 2 et 3 ne sont plus en navette.
EXAMEN DES ARTICLES SELON LA PROCÉDURE DE LÉGISLATION EN COMMISSION
Article 1er
L'article 1er est adopté sans modification.
Articles 1er bis et 3 bis (nouveaux)
Les articles 1er bis et 3 bis sont successivement adoptés sans modification.
Articles 4, 5 et 6
Les articles 4, 5 et 6 sont successivement adoptés sans modification.
Article 6 bis (nouveau)
L'article 6 bis est adopté sans modification.
Article 7
L'article 7 est adopté sans modification.
La proposition de loi est adoptée sans modification.