TRAVAUX DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique se réunit au Sénat le mardi 26 mars 2024.
Elle procède tout d'abord à la désignation de son Bureau, constitué de Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente, de M. Luc Lamirault, député, vice-président, de MM. Paul Midy et Denis Masséglia, députés, rapporteurs pour l'Assemblée nationale, de Mmes Louise Morel, Mireille Clapot et Anne Le Hénanff, députées, rapporteures pour l'Assemblée nationale, et de MM. Patrick Chaize et Loïc Hervé, sénateurs, rapporteurs pour le Sénat.
La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - J'ai le plaisir de vous accueillir aujourd'hui pour la réunion de la commission mixte paritaire (CMP) chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique.
Je rappelle que ce projet de loi comportait initialement trente-six articles. Le Sénat a adopté huit nouveaux articles, et l'Assemblée nationale vingt-quatre, ce qui porte le total à soixante-huit articles.
Parmi ces articles, cinq ont fait l'objet d'une adoption conforme par l'Assemblée nationale.
C'est donc sur soixante-trois articles restant en discussion que les travaux de notre commission mixte paritaire porteront, dans un esprit que je souhaite constructif.
Avant de passer à notre discussion proprement dite, je voudrais dire un mot du calendrier très inhabituel qui fut celui de nos travaux.
Le projet de loi a été présenté en conseil des ministres le 10 mai dernier. Le Sénat a adopté un texte le 5 juillet, l'Assemblée nationale le 17 octobre. Depuis cette date, nous n'avons pas été en mesure, avant ce jour, de réunir la CMP parce que ce texte relève pour une très large partie des domaines de compétence de l'Union européenne, et qu'en la matière des législations sont ou bien déjà adoptées ou bien en cours d'adoption, ce qui ne nous a pas facilité la tâche. En application de la directive du 9 septembre 2015, le Gouvernement a en effet dû procéder à des notifications à la Commission européenne, et attendre de recevoir une réponse.
Ainsi, après la notification du projet de loi initial, une nouvelle notification a eu lieu portant sur le texte du Sénat, le 24 juillet 2023. La Commission y a répondu le 25 octobre, soit après le vote de l'Assemblée nationale. Son « avis circonstancié » a montré combien les autorités européennes sont soucieuses de maintenir le droit français dans l'épure du droit européen.
Compte tenu de l'ampleur des apports de l'Assemblée nationale, une troisième notification s'est révélée nécessaire, ce qui fut chose faite le 8 novembre. La réponse de la Commission est parvenue le 17 janvier et a été transmise au Sénat la semaine suivante.
Je dois compléter ce tableau d'une situation déjà bien tortueuse par la mention d'une coïncidence de calendrier qui rend notre tâche encore plus complexe. Le lendemain de cette dernière notification, soit le 9 novembre 2023, la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu un très important arrêt dans l'affaire dite « Komm Austria » opposant le gouvernement autrichien aux grandes plateformes TikTok, Meta et Google. Cet arrêt est fondamental, car la Cour y limite très fortement le pouvoir des États membres quant à leur faculté d'imposer au niveau national des obligations aux plateformes établis dans d'autres États de l'Union européenne.
Nos travaux de ce jour sont donc enserrés dans les limites du droit européen, dont nous sommes les garants à ce stade ultime de la procédure.
Avant de laisser la parole à nos rapporteurs, je souhaite vous faire part de ma préoccupation : cette réunion constitue une étape décisive vers l'aboutissement des travaux que nous avons menés au sein de la commission des affaires européennes du Sénat et, à cet égard, le parcours législatif de ce texte me tient particulièrement à coeur. Je profite donc de ces propos liminaires pour remercier tous les parlementaires, députés comme sénateurs, qui se sont investis dans l'examen de ce texte et ont permis de l'enrichir et de faire vivre nos débats.
M. Luc Lamirault, député, vice-président. - Je remercie la présidente Catherine Morin-Desailly pour son accueil et pour la préparation de cette commission mixte paritaire.
Le projet de loi qui nous réunit aujourd'hui a connu une histoire relativement mouvementée. Bien qu'il ait été examiné et adopté successivement par nos deux assemblées dans des délais contraints, des rebondissements ont quelque peu retardé la réunion de notre commission mixte paritaire ; je pense évidemment à la procédure de notification à la Commission européenne.
Nos deux commissions spéciales ont fait, je le crois, oeuvre utile, en complétant et en enrichissant le projet initial du Gouvernement. À l'issue d'une lecture dans chaque chambre, des différences se sont fait jour sur certains points ; voilà qui est après tout bien normal dans le cadre d'un système bicaméral et compte tenu des réalités politiques distinctes qui prévalent respectivement au Palais du Luxembourg et au Palais Bourbon.
Néanmoins, je suis convaincu que nous partageons toutes et tous le même objectif : agir au bénéfice de nos concitoyens pour faire de l'espace numérique l'espace le plus sécurisé possible, tout en respectant les libertés et droits fondamentaux ainsi que les engagements européens et internationaux de la France.
Nos rapporteurs ont beaucoup travaillé, sur une période relativement longue, et ont beaucoup échangé ces dernières semaines ; je tiens à les remercier sincèrement pour leur implication.
Certaines dispositions restent en débat, mais nos divergences ne me semblent pas insurmontables au regard des enjeux. Je ne doute pas que nous saurons collectivement aplanir nos différences sans pour autant renier nos convictions, et faire un pas les uns vers les autres au nom de l'intérêt général, pour le bien de nos concitoyens. Tel est en tout cas mon souhait.
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je délivrerai trois messages.
Je veux redire, premièrement, l'importance de ce projet de loi s'agissant de protéger nos concitoyens dans l'espace numérique, où ils passent désormais plus de temps que dans l'espace public, alors qu'y règne un niveau de violence qui ne saurait nous satisfaire. On peut se féliciter du travail qui a été accompli pour lutter à la fois contre le cyberharcèlement - mesures éducatives, responsabilisation des plateformes, sanctions prévues à l'endroit des cyberharceleurs -, contre les arnaques en ligne, qui touchent des millions de nos concitoyens chaque année, et contre l'exposition des mineurs à la pornographie. La construction de ce bloc de protection de nos concitoyens impliquait également que nous régulions un certain nombre d'activités nouvelles - je pense à l'informatique en nuage (cloud) et aux jeux à objets numériques monétisables (Jonum).
Je salue, deuxièmement, l'important travail collectif et transpartisan qui a été réalisé par les rapporteurs de nos deux assemblées et par l'ensemble des groupes politiques ; j'espère que nous allons continuer dans cette voie.
Je forme le voeu, troisièmement, que nous parvenions à un accord - je suis un grand optimiste. Nous ferons ce qu'il faut pour que cette CMP soit conclusive, mais pas à n'importe quelles conditions.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Comme vous le savez, il m'a été confié une bonne moitié de ce projet de loi, ce qui m'a conduit à travailler sur des sujets divers, nouveaux et passionnants.
Je ne peux que constater à quel point il est aujourd'hui difficile de légiférer pour réguler notre économie numérique, malgré la bonne volonté et les nombreuses initiatives des parlementaires issus de l'ensemble des groupes politiques.
Pour mener à bien l'examen parlementaire de ce projet de loi, il nous a fallu surmonter un grand nombre de difficultés, car le chemin a été semé d'embûches.
Il a d'abord fallu surmonter, à de nombreuses reprises, l'opposition du Gouvernement, qui n'a jamais admis, derrière le vernis du « marketing gouvernemental », que ce projet de loi était avant tout un projet de loi d'adaptation au droit de l'Union européenne.
Il a ensuite fallu faire des compromis, parfois renoncer à nos ambitions, afin de nous assurer de la pleine compatibilité de nos travaux avec le droit de l'Union, la Commission européenne ayant transmis à deux reprises au Gouvernement des avis circonstanciés sur les versions du projet de loi respectivement adoptées par le Sénat puis par l'Assemblée nationale.
Il a également fallu tirer les conséquences, la présidente l'a rappelé, d'un récent arrêt de la CJUE durcissant considérablement le principe du pays d'origine prévu par la directive dite « e-commerce », la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur.
Il a enfin fallu identifier, au milieu de toutes nos initiatives croisées, les points auxquels le Sénat est particulièrement attaché.
Je ne citerai que les principaux d'entre eux, car j'aurai l'occasion de m'exprimer plus en détail lors de l'examen des articles : la prévention et la sensibilisation de nos « concitoyens-internautes » face aux actes de cybermalveillance qui « polluent » notre quotidien et notre environnement numérique ; la nécessité de permettre une régulation plus juste et plus équitable du marché de l'informatique en nuage afin de laisser davantage de chances à nos entreprises françaises et européennes de se développer ; la nécessité d'avancer prudemment sur la question des Jonum, en refusant catégoriquement tout recours à une ordonnance et en excluant, par principe, l'obtention de tout gain monétaire ; la nécessité de ne pas oublier nos élus locaux, car, même si texte ne semble pas les concerner de prime abord, je puis vous assurer qu'ils sont bel et bien mobilisés sur plusieurs sujets relevant du domaine qui nous occupe aujourd'hui.
Malgré des négociations difficiles, je souhaite que cette CMP soit l'occasion de compléter notre arsenal législatif, surtout en matière de protection de nos données : il y va d'un impératif de souveraineté, auquel il est de notre responsabilité de veiller.
Je veux conclure cette brève intervention en remerciant mes collègues rapporteurs de l'Assemblée nationale, qui ont pleinement contribué à enrichir et à améliorer ce projet de loi, ainsi que l'ensemble des députés mobilisés sur ce texte, car vous avez été nombreux à partager les positions défendues par les sénateurs, et je vous en remercie.
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - J'interviendrai en qualité de rapporteure pour le titre III, qui comprend les articles 7 à 14.
Ce qui a guidé l'Assemblée nationale dans l'examen de ce titre, c'est la volonté de coller au maximum au règlement européen du 13 décembre 2023 concernant des règles harmonisées portant sur l'équité de l'accès aux données et de l'utilisation des données, ou Data Act (Digital Accountability and Transparency Act), qui nous arrive de Bruxelles, alors même que des négociations ont lieu en ce moment même qui vont avoir un impact majeur sur le niveau de cybersécurité des services de cloud, via la politique de certification pilotée par l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi).
Il était important par ailleurs de réguler l'espace numérique, notamment les pratiques commerciales relevant de législations extraterritoriales - je pense notamment aux Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) -, sans jamais oublier qu'une telle régulation peut avoir un impact sur les acteurs nationaux. Il faut donc, en la matière, trouver le juste équilibre.
Je remercie Patrick Chaize, avec qui j'ai eu des échanges très fructueux, et mes collègues députés, qui ont permis un certain nombre d'avancées lors de l'examen du texte dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale.
Il ne faut pas oublier qu'un autre texte arrive de Bruxelles qui va avoir des effets majeurs sur plus de 10 000 entités en France, la directive européenne du 14 décembre 2022 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l'ensemble de l'Union, dite « NIS 2 » - Network and Information Security 2 - ; ce sujet s'étudie donc en tenant compte d'un environnement global. Il va falloir prendre un petit peu de hauteur pour être pragmatiques, réalistes et crédibles.
M. Denis Masséglia, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je suis quant à moi rapporteur des titres IV et VII, donc chargé principalement des Jonum.
Qu'est-ce donc qu'un Jonum ? Cela a la couleur et l'odeur d'un jeu vidéo, mais ce n'est pas un jeu vidéo ; cela a la couleur et l'odeur d'un jeu d'argent et de hasard, mais ce n'est pas un jeu d'argent et de hasard.
Tout notre travail a consisté à définir un cadre extrêmement précis pour cet objet hybride, afin d'accompagner les entreprises françaises du secteur dans leur développement tout en veillant à éviter quelque porosité que ce soit avec les jeux d'argent et de hasard. L'enjeu était en particulier que l'expérimentation relative à l'autorisation des Jonum, d'une durée de trois ans, garantisse la protection des mineurs. Il fallait également que nous, parlementaires, puissions être éclairés par la remise de rapports au fur et à mesure de l'expérimentation.
Je tiens à remercier M. Chaize, dont la contribution à nos travaux a été essentielle : la définition qu'il a proposée en première lecture au Sénat est extrêmement riche et intéressante. Je suis persuadé que cette réunion va être l'occasion de trouver des compromis sur tous les points qui restent pendants.
Mme Mireille Clapot, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Ce projet de loi est porteur, pour nos concitoyens, de nombreuses avancées, relatives en particulier à la protection des mineurs sur les réseaux sociaux et à la lutte contre la désinformation qui mine nos sociétés.
En tant que rapporteure des articles 16, 17 et 18, je souhaite apporter quelques précisions.
Je remercie pour commencer le rapporteur Patrick Chaize du travail constructif réalisé au cours de ces dernières semaines.
L'article 17, seul article qui concerne les collectivités, crée une interface numérique sur un sujet très sensible, à savoir les données relatives à la location des meublés de tourisme. Les données des plateformes seront accessibles aux communes de façon centralisée, ce dispositif remplaçant un système lourd et archaïque qui pénalise les services administratifs.
Les communes seront ainsi mieux aidées pour remplir leurs obligations et exercer leurs facultés de régulation, en particulier le contrôle du fameux plafond annuel de 120 jours de location qui s'applique aux résidences principales.
Une législation européenne similaire étant en cours d'élaboration, nous avons choisi la prudence et opté pour rester dans un cadre maîtrisé.
Au cours des travaux de la commission spéciale s'est posée la question d'un éventuel élargissement du spectre des données concernées à l'ensemble des données utiles pour mener une politique publique du tourisme et du logement, orientation qu'il s'est agi de mettre en regard avec la nécessité d'aboutir rapidement à la mise à disposition de cette plateforme. S'est imposée à nous également la volonté de simplification.
Quant aux articles 16 et 18, ils portent plus précisément sur le pôle d'expertise de la régulation numérique (PEReN), dont les activités d'expérimentation et de recherche sont très précieuses.
L'article 16 a fait l'objet d'une réécriture visant à prendre en compte les préoccupations formulées par la Commission européenne dans son avis circonstancié, tout en permettant au PEReN de mener des recherches sur les risques systémiques qui menacent l'Union européenne, concernant y compris les données générées par l'intelligence artificielle.
L'article 18 fixe dans la loi les modalités de la collaboration entre le PEReN et l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), cette dernière étant désignée par le présent texte comme coordinateur pour les services numériques en France.
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - Mon collègue Patrick Chaize a rappelé qu'il s'était vu confier une bonne moitié du texte ; j'ai été chargé, de mon côté, de l'autre moitié qui concerne pour l'essentiel, la régulation de l'accès aux contenus. En un mot, il s'agit de construire un internet plus sûr pour nos concitoyens, et surtout - ils sont au coeur des premiers articles - pour les mineurs.
Dans ce combat, nous nous sommes heurtés- et je sais que mes collègues de l'Assemblée nationale partagent mon analyse - à la double muraille, d'une part, des possibilités - ou de la bonne volonté ! - technologiques, s'agissant de limiter l'accès des mineurs aux contenus pornographiques, et, d'autre part, de l'impérieuse nécessité du respect plein et entier du droit européen. Comme la présidente Catherine Morin-Desailly l'a indiqué, nous avons en effet été « rappelés à l'ordre », et nous le serons plus encore demain si nous ne prenons pas en compte les avis circonstanciés dont le Gouvernement a été destinataire, car la CJUE nous observe de près. Notre marge de manoeuvre a donc été réduite, et il nous appartient aujourd'hui de proposer sur ces volets un texte qui à la fois soit acceptable pour nos assemblées et ne place pas notre pays en position délicate à l'égard de Bruxelles.
Le Sénat a donc cherché à agir avec responsabilité, mais sans renoncer à ses ambitions. Nous sommes en particulier très attachés à l'article 5 bis du projet de loi, qui introduit dans notre droit une amende forfaitaire délictuelle (AFD) dont seraient passibles ceux qui harcèlent, insultent, intimident les autres en ligne et croient que leur écran les protège de la sanction pénale qu'ils méritent et qui leur serait appliquée dans le monde réel. Je souhaite donc vivement que cette CMP soit l'occasion de compléter notre arsenal législatif par ce dispositif qui me paraît proportionné et à la hauteur des enjeux.
Je veux conclure cette brève intervention en remerciant mes collègues rapporteurs de l'Assemblée nationale, qui ont tout autant que nous contribué à enrichir ce texte. J'espère que notre réunion de ce jour permettra, dans le respect de nos deux assemblées, de parvenir à un accord !
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Je vous remercie, messieurs les rapporteurs du Sénat, pour nos échanges constructifs. Il existe des deux côtés une volonté sincère d'aboutir à un accord. Je suis convaincue qu'un tel accord est à notre portée ; mais, à ce stade, il n'est pas encore acquis, compte tenu des multiples enjeux de ce texte ambitieux.
Certains articles font d'ores et déjà l'objet d'un consensus entre nous. Nous nous sommes ainsi retrouvés sur la volonté de mieux protéger les mineurs face au fléau de la pornographie. Les articles 1er et 2, qui avaient suscité beaucoup de débats à l'Assemblée nationale, ont été aménagés dans le sens d'une meilleure articulation entre les sanctions liées au non-respect du référentiel et celles qui sont liées à l'absence de mesures prises pour empêcher l'accès des mineurs aux sites pornographiques. Pour répondre aux avis circonstanciés de la Commission européenne et à la décision de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), nous avons également inséré dans la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique un nouvel article 10-2, qui crée une procédure de consultation des autres États membres.
Nous avons également trouvé un compromis sur l'article 5, qui crée la peine complémentaire de bannissement numérique : il s'agit d'une véritable avancée. Il est bien précisé que les mesures mises en oeuvre par les plateformes pour empêcher la création d'autres comptes doivent être nécessaires et proportionnées, et surtout respecter la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
Je salue la volonté des deux chambres d'avancer sur les sujets qui ont trait à la lutte contre les violences faites aux femmes ; je pense à l'article 3 bis A, sur le retrait des images présentant des actes de torture et de barbarie, ou à l'article 4 A, sur l'obligation d'affichage par les producteurs de contenus à caractère pornographique simulant la commission de certains crimes ou délits d'un message avertissant l'utilisateur du caractère illégal des comportements ainsi représentés. Ce dernier article s'inscrit dans la suite logique des travaux du Sénat sur les dérives de la pornographie.
Nos discussions préparatoires ont également permis de trouver un juste point d'équilibre sur le filtre « anti-arnaque ».
Malgré une volonté commune d'avancer sur l'outrage en ligne et d'instituer en la matière une amende forfaitaire délictuelle, nous ne sommes pas parvenus, pour le moment, à une rédaction de compromis sur l'article 5 bis. Nous avons des interrogations quant à la rédaction retenue par le Sénat, et en particulier quant au caractère aisément constatable de la nouvelle infraction que vous proposez. Nous verrons, au fil de nos discussions, si et comment un article 5 bis peut être conservé.
Je forme le voeu, comme les autres rapporteurs, que nous trouvions le meilleur équilibre.
EXAMEN DES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION
Article 1er
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition commune de rédaction n° 1 que mon collègue rapporteur pour le Sénat Loïc Hervé et moi-même soumettons à la CMP vise à mettre en conformité l'article 1er avec l'avis circonstancié de la Commission européenne.
Il s'agit de préciser le champ d'application de l'article afin qu'il concerne les services de communication au public en ligne qui publient des contenus pornographiques sous leur responsabilité éditoriale, ainsi que les fournisseurs de plateformes de partage de vidéos (PPV) qui relèvent de la directive (UE) 2018/1808 du 14 novembre 2018, dite directive relative aux services de médias audiovisuels (SMA), celle-ci prévoyant une obligation pour lesdites PPV de mettre en place et d'utiliser des systèmes permettant de vérifier l'âge des utilisateurs pour ce qui est de l'accès à des contenus susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs.
La proposition commune de rédaction n° 1 des rapporteurs est adoptée.
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 2 que je présente avec ma collègue députée Louise Morel tend à supprimer la sanction prévue en cas d'absence totale de système de vérification de l'âge, cette sanction étant redondante avec celle qui est prévue à l'alinéa 6 de l'article 2 en cas d'accès de mineurs à un contenu pornographique en violation de l'article 227-4 du code pénal.
En l'absence de mesures visant à empêcher les mineurs d'accéder à des contenus pornographiques, l'Arcom pourra en effet constater une violation de cet article du code pénal et engager la procédure prévue à l'article 2.
Maintenir les deux pénalités risquerait de contrevenir à la règle bien connue du « non bis in idem ».
La proposition commune de rédaction n° 2 des rapporteurs est adoptée.
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition commune de rédaction n° 3 vise à supprimer les dispositions de l'article 1er qui confient à l'Arcom une mission de contrôle des systèmes de vérification de l'âge mis en oeuvre par les services de communication au public en ligne qui mettent à disposition des jeux à objets numériques monétisables (Jonum), ce contrôle étant censé en particulier s'exercer via l'élaboration d'un référentiel.
Il ne semble pas très opportun de traiter de manière identique les plateformes pornographiques et les sites proposant des Jonum, car, de part et d'autre, les acteurs sont différents, tout comme sont différentes les autorités administratives indépendantes (AAI) impliquées dans leur supervision.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Je vote contre.
Mme Laurence Rossignol, sénatrice. - Nous de même.
La proposition commune de rédaction n° 3 des rapporteurs est adoptée.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 2
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - Nous proposons d'insérer dans la loi pour la confiance dans l'économie numérique un article tirant les conséquences de l'arrêt du 9 novembre 2023 par lequel la CJUE a durci l'interprétation du principe du pays d'origine fixé par la directive sur le e-commerce. L'adoption de la proposition de rédaction n° 4 assurerait ainsi la conformité des articles 1er et 2 à cette directive.
Mme Laurence Rossignol, sénatrice. - Par l'arrêt du 9 novembre 2023, la CJUE a certes considéré que l'industrie pornographique relevait des règles relatives au commerce. Nous pourrions tout à fait considérer, néanmoins, que l'industrie pornographique relève bien plutôt des règles relatives à la santé publique et à l'ordre public, donc de la compétence des États membres, c'est-à-dire échappe à cette décision ; et cette position me semble parfaitement défendable devant les institutions européennes.
Pourquoi donc, à ce stade, nous précipiterions-nous pour tirer les conséquences de cette jurisprudence contestable ?
La proposition commune de rédaction n° 4 des rapporteurs est adoptée.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 2 bis
L'article 2 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve d'une modification rédactionnelle.
Article 2 ter (nouveau)
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Nous proposons, avec mon collègue rapporteur Patrick Chaize, de supprimer cet article.
En effet, il y est fait référence à la loi du 9 juin 2023 visant à encadrer l'influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, ce qui ne paraît pas opportun, étant entendu que cette loi nécessite elle-même d'être mise en conformité avec les différents règlements européens qui s'appliquent depuis sa promulgation.
En procédant à une telle suppression, nous suivrions l'avis circonstancié rendu le 17 janvier 2024 par la Commission européenne sur le texte voté par l'Assemblée nationale.
La proposition commune de rédaction n° 5 des rapporteurs est adoptée.
L'article 2 ter est supprimé.
Article 3
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
La réunion, suspendue à 16 heures 55, est reprise à 17 heures 30.
Article 3 bis A (nouveau)
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 64 vise à sécuriser le dispositif adopté par l'Assemblée nationale.
En premier lieu, le dispositif est transformé en expérimentation, d'une durée de deux ans, pour permettre aux responsables de la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (Pharos) d'en tirer un premier bilan opérationnel.
En deuxième lieu, le périmètre de cet article est restreint aux seuls actes de torture et de barbarie, l'idée étant d'organiser une montée en charge plus progressive du dispositif. Il s'agit là d'une première étape, j'y insiste, qui nous permettra demain d'élargir de la meilleure des manières le champ d'action de Pharos.
En troisième lieu, les représentations d'actes de torture et de barbarie ne sont plus concernées : le dispositif se limite aux seules images d'actes de torture et de barbarie.
En dernier lieu, aucune sanction pénale n'est associée à l'absence de retrait des images, et ce afin de garantir la proportionnalité du dispositif.
Le maintien dans le texte de cet article 3 bis A illustre la volonté des parlementaires des deux chambres de lutter contre les violences faites aux femmes. Voilà le compromis que nous vous proposons, mes chers collègues.
Mme Laurence Rossignol, sénatrice. - Le Sénat est la première institution à avoir travaillé sur l'industrie pornographique ; à l'issue de ce travail pionnier, nous avions émis un certain nombre de préconisations. Si nous n'avions pas toujours visé juste - je pense au référentiel -, il n'en demeure pas moins que ces recommandations étaient nettement plus ambitieuses que les dispositions inscrites dans le projet de loi initial. Je citerai en particulier l'obligation imposée aux sites pornographiques d'afficher un écran noir tant que l'internaute n'a pas décliné son âge et que cet âge n'a pas été vérifié.
Je rappelle qu'a été votée au Sénat, en 2020, la création d'une procédure visant à obliger les éditeurs de sites pornographiques à empêcher l'accès des mineurs à leurs contenus. Nous pouvons considérer que 80 % des scènes disponibles sur les sites visés constituent en elles-mêmes des infractions pénales - apologie du viol, apologie de l'inceste, actes de torture et de barbarie, etc. Et nous sommes un certain nombre de spécialistes, ici et à l'extérieur, à considérer, comme la totalité des militantes travaillant auprès des parties civiles dans le cadre des procès pour viols qui sont en cours contre l'industrie pornographique, que le présent projet de loi ne règle en rien ce problème crucial : depuis trois ans, les éditeurs de sites pornographiques contournent l'obligation de procéder à un contrôle de l'âge, arguant que l'on ne leur en donne pas les moyens.
Voilà une situation absolument exceptionnelle : imaginez un restaurateur qui dirait qu'il ne peut appliquer les normes d'hygiène et de sécurité parce que l'État ne lui a pas versé les subventions nécessaires ! Cette situation ne prospère que sur la tolérance dont jouit l'industrie pornographique dans nos sociétés, laquelle s'explique notamment par les 19 millions de connexions uniques par mois dont ladite industrie peut se prévaloir - autrement dit, tout le monde est plus ou moins impliqué.
Vous connaissez, mes chers collègues, l'effet de la pornographie sur les mineurs. En tout état de cause, le texte initial du Gouvernement se situait bien en deçà des exigences minimales que, pour notre part, nous avions fixées. L'article 3 bis A permettait du moins d'étendre à ces matières les pouvoirs de contrôle de Pharos, cette plateforme étant pour le moment compétente dans les seuls domaines de la pédocriminalité et du terrorisme. Or cet article adopté par l'Assemblée nationale ne passera pas le cap de la CMP...
Je sais moi-même très bien pratiquer le style parlementaire quand il le faut. Cette rédaction « vise à sécuriser le dispositif adopté par l'Assemblée nationale », avez-vous dit, madame la rapporteure. Non ! Voici ce qu'il eût fallu dire : « Cette rédaction vide totalement de son contenu le dispositif adopté par l'Assemblée nationale. »
J'en tiens pour preuve que l'on remplace une compétence par une expérimentation ; mais les éditeurs de sites pornographiques adorent les expérimentations, qui leur permettent de ne rien faire ! On restreint par ailleurs les actes visés aux seuls actes de barbarie, à l'exclusion de l'inceste, sujet essentiel - il y a apologie de l'inceste dans toutes les vidéos des rubriques dites « En famille »... À quoi bon lancer des campagnes contre l'inceste et installer des commissions indépendantes sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants - Ciivise 1, Ciivise 2 et, bientôt, peut-être, Ciivise 3 - si l'on n'est pas prêt à aller jusqu'à inscrire cette politique publique dans la loi ?
Cette nouvelle rédaction a un autre inconvénient : elle se limite aux images d'actes de torture et de barbarie effectivement réalisés, à l'exclusion de tout ce qui relève de l'apologie.
Enfin, il n'est plus prévu de sanction pénale, et ce, je cite, pour « garantir la proportionnalité du dispositif » ! Je veux bien que l'on m'explique...
On mesure, par l'énoncé de ces lacunes, tout ce que le Parlement ne veut pas faire en matière de lutte contre les sites pornographiques.
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Ces propos sont injustes : il n'y a pas de monopole d'une chambre sur ce sujet. Ce texte, initialement, ne contenait pas cet article : c'est l'Assemblée nationale qui l'a adopté, dans une rédaction large. C'est pour répondre aux inquiétudes de la chambre haute que nous proposons ce compromis d'une expérimentation. En effet, Pharos ne dispose pas d'une telle compétence aujourd'hui. Lui confier directement le signalement de l'inceste, la torture et la barbarie serait disproportionné. Nous voulons tous trouver une solution aux violences faites aux femmes dans l'espace numérique. Dans deux ans, nous pourrons déjà commencer à adapter le dispositif. C'est bien une avancée pour les droits des femmes parce que ce dispositif n'existe pas à l'heure actuelle.
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - L'écran noir, il est inscrit à l'article 1er - nous venons de le voter. Ensuite, le sujet des moyens de Pharos est considérable et donne lieu à des inquiétudes lancinantes. L'avantage d'une commission spéciale est d'auditionner les professionnels qui, à longueur de journée, visionnent des vidéos pédopornographiques, de décapitations à caractère terroriste, et autres. Entre les dispositions adoptées par la chambre haute et celles adoptées par l'Assemblée nationale, nous trouvons une voie de compromis, ce dont je me réjouis.
Madame Rossignol, je suis, comme vous, membre de la délégation aux droits des femmes du Sénat. Nous aurons un débat sur le droit à l'oubli. On ne peut pas dire que la commission mixte paritaire revienne en arrière.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Le traitement de certaines vidéos, notamment liées à l'inceste ou au viol, a fait l'objet d'un large consensus dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Le choix de l'expérimentation de vingt-quatre mois est étrange : avant que Pharos puisse mener une action pleine et entière, il faudra du temps pour recruter et pour créer les procédures nécessaires.
Dans la mesure où l'objectif est de lutter contre la diffusion et la représentation d'actes abjects, pourquoi décider d'une expérimentation au lieu de décréter qu'on lutte contre ce phénomène ? Dans d'autres circonstances, comme la légalisation du cannabis, par exemple, une expérimentation se comprend. Mais nous parlons ici de lutte contre des actes de torture et de barbarie, l'inceste, le viol. Il faut mettre en place des moyens effectifs de lutte.
Mme Laurence Rossignol, sénatrice. - Le monde de l'industrie pornographique relève de la criminalité, mais on en discute comme si nous parlions d'acteurs économiques de bonne volonté, avec qui on peut tenter des expérimentations. C'est un monde délinquant, qui refuse d'appliquer la loi depuis trois ans !
Avec cette expérimentation, notre pays ne veut pas se donner les moyens de lutter réellement contre la pédopornographie, les actes de torture et de barbarie et l'inceste. J'entends que Pharos n'en aurait pas les moyens : elle les aurait si la loi l'imposait.
M. Thomas Dossus. - Je relève des propos contradictoires de la rapporteure pour l'Assemblée nationale avec la montée en puissance de Pharos et une expérimentation sur deux ans. Après l'assassinat de Samuel Paty, on a immédiatement octroyé plus de prérogatives à Pharos, puis doublé ses effectifs dans le cadre du projet de loi de finances suivant, car il importait de lutter contre la diffusion d'images terroristes. Ici, s'il s'agit d'une expérimentation, pourquoi recruter ? Il y a une contradiction entre l'ambition et la rédaction de cet article.
La proposition commune de rédaction n° 64 des rapporteurs est adoptée.
L'article 3 bis A est ainsi rédigé.
Article 3 bis (nouveau)
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction commune n° 65 tire les conséquences du vote sur l'article 3 bis A, en retirant les actes de torture et de barbarie du périmètre du rapport.
La proposition commune de rédaction n° 65 des rapporteurs est adoptée.
L'article 3 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 4 AA (nouveau)
L'article 4 AA est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 4 ABA (nouveau)
L'article 4 ABA est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve d'une modification rédactionnelle.
Article 4 AB (nouveau)
L'article 4 AB est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 4 AC (nouveau)
L'article 4 AC est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 4 AD (nouveau)
La proposition commune de rédaction n° 30 des rapporteurs est adoptée.
L'article 4 AD est ainsi rédigé.
Article 4 A
La proposition commune de rédaction n° 6 des rapporteurs est adoptée.
L'article 4 A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 4 B (supprimé)
L'article 4 B est rétabli dans la rédaction du Sénat.
Article 4
L'article 4 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve d'une modification rédactionnelle.
Article 4 bis
L'article 4 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 5
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - La proposition commune de rédaction n° 7 rectifiée tend à éviter que les plateformes ne créent un fichier des personnes condamnées et à encadrer le blocage des comptes tiers de personnes bannies.
La proposition commune de rédaction n° 7 rectifiée des rapporteurs est adoptée.
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition commune de rédaction n° 8 rétablit la peine de bannissement pour diffusion d'informations exposant l'identité d'emprunt d'un agent des services de renseignement ou de lutte contre le terrorisme, et en supprime la possibilité en cas de non-respect des obligations imposées aux influenceurs, pour des raisons de compatibilité avec le droit européen.
La proposition commune de rédaction n° 8 des rapporteurs est adoptée.
L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 5 bis A (nouveau)
La proposition commune de rédaction n° 9 rectifiée des rapporteurs est adoptée.
L'article 5 bis A est ainsi rédigé.
Article 5 bis B (nouveau)
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - Cette proposition commune de rédaction n° 10 transforme en faculté l'obligation pour les plateformes de créer un dispositif de médiation des litiges de communication en ligne, afin que l'article soit conforme au Digital Services Act (DSA).
La proposition commune de rédaction n° 10 des rapporteurs est adoptée.
L'article 5 bis B est ainsi rédigé.
Article 5 bis
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 66 rétablit l'article 5 bis dans la rédaction du Sénat. En effet, l'article 5 quater, inopérant en procédure, ne permet pas l'identification des auteurs de contenus constituant des outrages et est limité aux contenus sexistes et sexuels. C'est doublement insatisfaisant.
Le dispositif du Sénat permettra le prononcé effectif d'une amende forfaitaire délictuelle pour sanctionner des comportements discriminatoires, injurieux ou de harcèlement aujourd'hui impunis.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Je suis surprise et attristée de voir le retour de cet article, supprimé par l'Assemblée nationale pour de nombreuses et bonnes raisons, alors que peu de sujets sont consensuels dans notre hémicycle. Le texte pourrait être invalidé sur ce point, et nous courons un risque énorme quant au contrôle de masse de ce qui est dicible ou non. C'est une pente très glissante vers la police de la pensée.
La rédaction est très large. Voulons-nous un monde où nous ne pouvons plus rien dire ? Il faut bien sûr lutter contre toute forme de violence, mais cela va trop loin.
M. Aurélien Lopez-Liguori, député. - L'AFD est inadaptée, et cet article avait été supprimé par 138 voix contre 72 par l'Assemblée. Toute la gauche, les groupes Les Républicains, Rassemblement national, la plupart des députés Modem, quelques membres des groupes Renaissance et Horizons avaient voté la suppression de l'article. Nous étions prêts à nous abstenir, mais ce retour de l'AFD pourrait nous pousser à voter contre le texte en séance.
La proposition de rédaction n° 66 du rapporteur pour le Sénat est adoptée.
L'article 5 bis est rétabli dans la rédaction du Sénat.
Article 5 ter A (nouveau)
L'article 5 ter A est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 5 ter
L'article 5 ter est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 5 quater A (nouveau)
L'article 5 quater A est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 5 quater B (nouveau)
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - Il s'agit, avec la proposition commune de rédaction n° 11, de préciser les modalités d'information du procureur de la République par les membres de la réserve constatant une infraction et de prévoir, comme pour les autres réserves citoyennes, un décret en Conseil d'État.
M. Ludovic Haye, sénateur. - De qui dépendrait cette réserve citoyenne ?
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - Elle relève du ministre chargé du numérique.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Donc de Bercy ?
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - Ce ministère est, en effet, actuellement rattaché au ministère de l'économie et des finances.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Je voterai contre cette proposition de rédaction.
La proposition commune de rédaction n° 11 des rapporteurs est adoptée.
L'article 5 quater B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 5 quater (nouveau)
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - Cette proposition de rédaction n° 49 est de coordination avec notre vote sur l'article 5 bis. En tout état de cause, l'article 5 quater ne permet ni l'identification des auteurs ni de prononcer une AFD pour des faits commis en ligne.
La proposition de rédaction n° 49 du rapporteur pour le Sénat est adoptée.
L'article 5 quater est supprimé.
Article 5 quinquies (nouveau)
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Selon l'avis circonstancié de la Commission européenne, l'article 5 quinquies est contraire au DSA. En outre, il donne aux plateformes un rôle quasi juridictionnel de qualification pénale des propos en ligne, ce qui n'est pas acceptable en pratique. La proposition commune de rédaction n° 12 tend donc à le supprimer.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Je m'abstiendrai.
La proposition commune de rédaction n° 12 des rapporteurs est adoptée.
L'article 5 quinquies est supprimé.
Article 6
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Il convient, avec cette proposition commune de rédaction n° 13, de préciser que l'hameçonnage en ligne est bien une escroquerie au sens de l'article 313-1 du code pénal.
La proposition commune de rédaction n° 13 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition commune de rédaction n° 14 tend à sensibiliser davantage les utilisateurs aux actes quotidiens de cybermalveillance. Les messages d'avertissement renverront au site officiel de prévention de la cybermalveillance, de même que la page d'information d'un site bloqué. Sans préjudice du décret à venir, il devrait s'agir du site cybermalveillance.gouv.fr.
La proposition commune de rédaction n° 14 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Cette proposition commune de rédaction n° 15 rétablit une disposition, votée par le Sénat, qui complète le filtre anti-arnaques. L'autorité administrative pourra ordonner le déréférencement de sites malveillants faisant l'objet d'une mesure de blocage ou de filtrage.
La proposition commune de rédaction n° 15 des rapporteurs est adoptée.
L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 6 bis (nouveau)
L'article 6 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 7
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Vous constaterez de nombreuses modifications rédactionnelles aux articles 7 à 14 à la suite de la publication officielle en français du Data Act, qui n'avait pas eu lieu lors de l'examen dans nos deux chambres.
La proposition commune de rédaction n° 16 prévoit que le plafonnement à un an de la durée maximale d'octroi des crédits d'informatique en nuage inclue le renouvellement éventuel de ces crédits, conformément à ce qui avait été voté par le Sénat.
La proposition commune de rédaction n° 16 des rapporteurs est adoptée.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 7 bis (nouveau)
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition commune de rédaction n° 17 supprime l'alinéa 14, afin de rassembler toutes les missions de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) à l'article 10.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Elles ne seront donc que déplacées ?
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - En effet.
La proposition commune de rédaction n° 17 des rapporteurs est adoptée.
L'article 7 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 8
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 9
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition commune de rédaction n° 18 précise le délai dans lequel l'Arcep édictera les règles d'interopérabilité et de portabilité applicables aux fournisseurs de services d'informatique en nuage.
La proposition commune de rédaction n° 18 des rapporteurs est adoptée.
L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 10
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition commune de rédaction n° 19 réintègre les dispositions du paragraphe VII bis de l'article 7 bis à l'article 10, afin d'y centraliser les compétences de l'Arcep en cas de désaccord sur : les frais de transfert, y compris dans le cadre d'un recours simultané à plusieurs fournisseurs ; les frais de changement de fournisseur et les obligations de transparence contractuelle, à l'article 7 bis ; la mise en oeuvre des exigences essentielles de portabilité et d'interopérabilité, à l'article 8 ; ainsi que la mise en oeuvre des standards et des spécifications techniques d'interopérabilité et la mise en oeuvre de l'obligation d'équivalence fonctionnelle, à l'article 9.
La proposition commune de rédaction n° 19 des rapporteurs est adoptée.
L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
La réunion, suspendue à 18 h 10, est reprise à 18 h 20.
Article 10 bis A
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Avec la proposition commune de rédaction n° 60, nous abordons les articles 10 bis A et 10 bis B, ajouts souhaités par la représentation nationale, souvent contre l'avis du Gouvernement, selon lequel il n'est pas nécessaire de légiférer davantage sur la protection des données sensibles.
Les rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale avaient supprimé l'article 10 bis A, mais la mobilisation des groupes de l'Assemblée, que je remercie, a permis sa réintroduction en séance, dans une version remaniée. Après en avoir discuté avec la rapporteure Anne Le Hénanff, je reconnais que la solution est astucieuse, mais insuffisante. Il faut sécuriser au niveau législatif les dispositions de la circulaire « Cloud au centre », mise à jour en mai 2023. Ainsi, les acteurs de l'État manipulant des données sensibles devront être plus rigoureux quant à la législation extraterritoriale, combat de longue date du Sénat, au-delà des divergences politiques.
Ne nous laissons pas abuser par l'inertie d'une administration qui rechigne à se transformer, surtout sur des sujets aussi importants. Avec la rapporteure, nous nous sommes mis d'accord pour limiter la capacité de dérogation du Gouvernement, qui devra faire l'objet d'une motivation publique.
En l'état, l'article 10 bis A concerne les administrations de l'État et ses plus de 400 opérateurs figurant dans la liste annexée au projet de loi de finances. Mais la circulaire est plus large, mentionnant les acteurs de l'État. Parmi eux, les groupements d'intérêt public (GIP), qui exercent une mission d'intérêt général, sont incontournables, et beaucoup manipulent des données sensibles. Ne soyons pas moins exigeants avec eux, ce qui serait préjudiciable à notre souveraineté.
Cela vaut aussi pour les données de santé à caractère personnel. Nous proposons la même méthodologie que pour l'article 10 bis A : inscrire dans loi des critères de protection contre les législations extraterritoriales, introduits par le Gouvernement même dans le référentiel sur l'hébergement des données de santé (HDS). Selon nous, il faut le sécuriser au niveau de la loi, mais nous légiférons à périmètre constant.
M. Aurélien Lopez-Liguori, député. - La rédaction du Sénat, en première lecture, était parfaite. La définition de l'extraterritorialité ne laissait rien passer, tout en respectant le droit européen et le chapitre 19.6 du référentiel SecNumCloud, jamais cassé par une décision de justice européenne ou nationale. Le Gouvernement et la majorité ont refusé, arguant d'un risque sur les négociations autour de la certification européenne sur le cloud (EUCS). Or la France y a été mise en minorité par l'Allemagne et les Pays-Bas. Un front des pays du Nord refuse une définition de l'extraterritorialité. L'argument ne tient donc plus.
De plus, votre proposition est moins-disante, car elle maintient la version de l'Assemblée nationale sur la protection contre « tout accès non autorisé par des autorités publiques d'États en dehors de l'Union européenne ». En d'autres termes, un accord d'adéquation, par exemple avec les États-Unis, permettra aux entreprises américaines de ne pas être concernées.
De plus, la proposition de rédaction n° 60 mentionne une dérogation ne pouvant dépasser 18 mois après la date à laquelle une offre « acceptable est disponible en France » - par exemple, des entreprises américaines non soumises à l'article 10 bis A grâce à un accord d'adéquation. Vous vous êtes fait dépouiller : cela ne touchera que des sociétés de pays sans accord d'adéquation : Israël, Corée du Sud... Or 90 % des entreprises sont américaines. Votre article 10 bis A perd toute applicabilité.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Je vous remercie de faire l'éloge de la rédaction du Sénat, issue d'un amendement de Catherine Morin-Desailly, mais la navette invite au compromis. Évidemment, j'aurais préféré, à titre personnel, la rédaction du Sénat.
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - Mon amendement était maximaliste. Il fallait avancer sur cette question, ce qui a enfin eu lieu. Je remercie Anne Le Hénanff, la rédaction proposée cadre aussi les dérogations. Il faut prendre en compte la réalité des situations.
La commande publique doit favoriser le développement du marché français et européen de l'informatique en nuage.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Il est en effet dommage d'avoir perdu dans cette navette une forme de perfection. S'il y avait un article que mon groupe souhaitait voir aboutir, c'était celui-là, ne serait-ce que pour des questions de souveraineté et de protection des données de nos concitoyens. On peut se réjouir que les GIP soient intégrés, mais il est regrettable que l'article soit moins-disant.
La proposition commune de rédaction n° 60 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 46 vise à mieux préciser les conditions dans lesquelles une dérogation peut être accordée aux acteurs de l'État afin de rehausser notre niveau d'exigence collective vis-à-vis de l'État et de la commande publique.
Premièrement, la dérogation serait accordée par le ministre responsable du projet, après validation du Premier ministre, et non plus par le Premier ministre seulement. Deuxièmement, cette dérogation devrait être motivée et rendue publique. Troisièmement, elle ne serait plus accordée sans limite de temps, mais jusqu'à dix-huit mois après la date à laquelle une offre de services d'informatique en nuage acceptable est disponible en France, ces critères d'acceptabilité étant définis par décret en Conseil d'État.
La proposition commune de rédaction n° 46 des rapporteurs est adoptée.
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 47 vise à intégrer, par souci de cohérence, la demande de rapport prévue à l'article 38 du projet de loi au sein de l'article 10 bis A.
La proposition commune de rédaction n° 47 des rapporteurs est adoptée.
L'article 10 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 10 bis B (nouveau)
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 48 vise à renforcer notre cadre légal applicable à la protection des données de santé à caractère personnel face aux risques que font peser les législations extraterritoriales d'États tiers.
En sécurisant au niveau législatif les dispositions introduites par le Gouvernement dans la nouvelle version du référentiel applicable aux hébergeurs de données de santé à caractère personnel, cette proposition de rédaction complète le cadre légal actuel avec : des obligations de localisation pour les hébergeurs de données de santé à caractère personnel, ces obligations étant définies par voie réglementaire dans la continuité du nouveau référentiel ; des obligations contractuelles afin de mieux informer sur les mesures prises face aux risques de transfert ou d'accès non autorisé aux données de santé à caractère personnel par des États tiers, ces obligations étant également définies par voie réglementaire dans la continuité du nouveau référentiel.
M. Aurélien Lopez-Liguori, député. - Je ferai la même remarque que sur l'article 10 bis A : les entreprises américaines vont passer au travers ! Même si le stockage des données se fait sur le territoire d'un État membre de l'Union européenne, une entreprise comme AWS ou Microsoft ne sera pas soumise à ce dispositif qui vise pourtant à préserver notre souveraineté. Certes, c'est mieux que rien, mais on passe ainsi à côté du sujet, à savoir l'extraterritorialité appliquée par les Américains.
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - La plateforme des données de santé dépendra de SecNumCloud, et non du HDS qui est effectivement moins-disant. C'est bien ce que nous avons acté dans l'article 10 bis A. SecNumCloud est beaucoup plus protecteur.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - C'est une avancée par rapport à la situation actuelle.
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - Le référentiel HDS est en cours de révision - une autre révision devrait avoir lieu en 2027 - ; des critères complémentaires liés à cette question de souveraineté devraient y être intégrés, mais il restera moins protecteur que SecNumCloud.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons bien prévu, dans l'article 10 bis A, que les données relatives à « la protection de la santé et de la vie des personnes » sont « d'une sensibilité particulière ».
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - C'est donc bien une grande avancée, même s'il reste un gros travail à faire sur d'autres données sensibles. Je remercie les rapporteurs de nous avoir proposé cette rédaction, car il s'agit d'un sujet majeur de préoccupation.
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Je comprends, monsieur Lopez-Liguori, que vous soyez attaché à ce que certains termes comme « souveraineté » ou « SecNumCloud » figurent explicitement dans le texte, mais la rédaction que nous vous proposons devrait vous rassurer. Le Health Data Hub est une plateforme de santé pour laquelle nous avons un niveau d'exigence très élevé en termes de cybersécurité. C'est pourquoi nous l'introduisons dans l'article 10 bis A. Je suis ainsi allée dans le sens des sénateurs.
À l'article 10 bis B, nous allons finalement plus loin. Je n'en voyais pas nécessairement l'utilité au début de nos travaux, mais Patrick Chaize et Catherine Morin-Desailly m'ont convaincue, et nous inscrivons des dispositions spécifiques dans le code de la santé publique. Ce n'est pas parce que nous n'écrivons pas explicitement les mots « souveraineté » ou « SecNumCloud » que les données de santé ne sont pas protégées.
M. Aurélien Lopez-Liguori, député. - C'est quand même un dispositif amoindri !
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - Avec cette rédaction, nous répondons aussi aux préoccupations de la commission des affaires sociales et de la commission des affaires européennes du Sénat - par exemple, mes collègues sénatrices Pascale Gruny et Laurence Harribey ont déposé, au nom de la commission des affaires européennes, un rapport d'information sur l'espace européen des données de santé. Dans la perspective de l'adoption d'un schéma européen de certification, il est important que le modèle français soit robuste.
La proposition commune de rédaction n° 48 des rapporteurs est adoptée.
L'article 10 bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 10 ter (nouveau)
L'article 10 ter est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article additionnel après l'article 10 ter
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 20 tend à insérer un article additionnel visant à tirer les conséquences de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 9 novembre 2023 qui durcit l'interprétation du principe du pays d'origine fixé par la directive e-commerce.
Ainsi, les principales dispositions relatives à l'informatique en nuage ne peuvent concerner que les fournisseurs établis en France ou en dehors de l'Union européenne. Pour ceux qui sont établis dans les autres États membres de l'Union européenne, ils devront être désignés individuellement par arrêté du ministre chargé du numérique, après avis ou sur proposition de l'Arcep.
La proposition commune de rédaction n° 20 des rapporteurs est adoptée.
Un article 10 quater est ainsi rédigé.
Article 11
L'article 11 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 12
L'article 12 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 13
L'article 13 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 15
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Nous débutons désormais l'examen du titre IV de ce projet de loi qui est relatif au développement des jeux à objets numériques monétisables (Jonum). Permettez-moi de débuter mon propos en retraçant le parcours parlementaire de ce titre.
Premièrement, je tiens à rappeler qu'il a été introduit de façon cavalière par le Gouvernement sans étude d'impact ni concertation, au sein d'un projet de loi dont la première finalité est d'adapter notre droit à divers règlements européens. Si nous mettons de côté le « marketing gouvernemental » qui entoure ce projet de loi, il s'agit en réalité d'un texte d'adaptation au droit de l'Union européenne, un Daddue qui ne dit pas son nom...
Deuxièmement, le Gouvernement avait initialement demandé une habilitation à légiférer par ordonnance, ce qui a été catégoriquement refusé par le Sénat. Le sujet est nouveau, complexe et n'était pas demandé par les parlementaires. Il n'était pas admissible de laisser le Gouvernement légiférer en toute discrétion... C'est pourquoi nous avons supprimé cette demande d'habilitation et esquissé une première définition des Jonum et de leur cadre expérimental afin de poser les fondamentaux.
Je l'ai toujours dit, cette définition était une première et elle pouvait, bien entendu, être améliorée. Lors de l'examen du projet de loi au Sénat, les fondamentaux que nous avions posés avaient quand même recueilli l'assentiment du Gouvernement et du Conseil d'État.
Si cette définition n'était peut-être pas parfaite, elle avait au moins un mérite : ne laisser aucun doute quant au fait que les Jonum pouvaient être définis sans être qualifiés de jeux d'argent et de hasard ni être confondus avec des jeux vidéo. Il y avait un espace, étroit, pour les définir. C'est ce que nous avions fait au Sénat. Il nous a fallu convaincre, argumenter, expliquer, car le débat était nouveau. C'est pour cela que nous avions refusé, malgré l'insistance du Gouvernement, d'introduire tout de suite dans le projet de loi un cadre de régulation adossé à cette expérimentation.
Il fallait d'abord se mettre d'accord sur les fondations de ce que nous étions en train de construire avant d'édifier le mur d'enceinte. Autrement dit, il ne fallait pas légiférer à la hâte, mais laisser le temps du débat parlementaire et des consultations auprès des acteurs concernés.
Troisièmement, plusieurs mois plus tard, ce cadre de régulation a été introduit par l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi en commission. Même si nous avons des désaccords, je dois reconnaître que le rapporteur, Denis Masséglia, a effectué, avec l'aide du Gouvernement, un travail sérieux sur ce point. Ce cadre de régulation correspond à l'actuel article 15 bis du projet de loi, sur lequel nous n'avons que quelques légères demandes de modification.
Ce que je regrette, c'est la méthode employée. Aujourd'hui, nous avons un mur d'enceinte solide, mais il repose sur des fondations instables - jusqu'à aujourd'hui en tout cas !
En effet, l'article 15 a été modifié en commission spéciale, sur l'initiative du rapporteur de l'Assemblée nationale, par un amendement qui a été présenté comme étant rédactionnel. Pourtant, en remplaçant les mots « à l'exclusion de l'obtention de tout gain monétaire » par les mots « à l'exclusion de l'obtention de tout gain en monnaie ayant cours légal », cet amendement autorise par principe l'octroi de récompenses de jeux sous forme de cryptomonnaies, ce qui ne constitue en aucun cas une modification rédactionnelle. Nous avons vérifié les comptes-rendus de la commission, cette explication n'a jamais été donnée aux députés.
Surtout, cette modification fragilise le travail effectué par le Sénat, puisque, en l'état actuel de la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, les Jonum répondent aux quatre critères permettant de qualifier un jeu de jeu d'argent et de hasard, à savoir une opération offerte au public, faisant naître l'espérance d'un gain, même partiellement dû au hasard, et nécessitant un sacrifice financier de la part du joueur. Cette espérance de gain, c'est la possibilité d'être récompensé en cryptomonnaie.
En l'état actuel du texte, au moindre contentieux juridique, à la moindre saisine du Conseil constitutionnel, le risque est sérieux que les Jonum soient requalifiés de jeux d'argent et de hasard, ce qui fait perdre tout intérêt à la nécessité de construire un tiers statut entre ces jeux et les jeux vidéo.
Au-delà de la fragilité juridique que ces modifications induisent, je me dois de vous faire part de nos doutes et de nos réserves quant à l'acceptabilité de cette expérimentation qui concentre aujourd'hui un fort niveau de contestations : d'abord, de la part de l'Autorité nationale des jeux (ANJ), qui demeure opposée à l'octroi de récompenses sous forme de cryptomonnaie ; ensuite, de la part de l'Autorité des marchés financiers (AMF), qui n'y est pas non plus favorable de peur que l'octroi d'une telle possibilité ne crée la confusion avec le cadre juridique applicable aux prestataires de services sur actifs numériques ; de la part des filières traditionnelles des jeux d'argent et de hasard, qui craignent un contournement de l'interdiction des casinos en ligne ; de la part des associations représentatives d'élus locaux, en particulier l'Association nationale des élus des territoires touristiques, l'Association nationale des élus des littoraux, l'Association nationale des maires de communes thermales et l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité ; enfin, de la part des associations de lutte contre le jeu excessif et pathologique.
Dans un tel contexte, il nous semble que des modifications importantes doivent être adoptées, surtout à l'article 15, afin de laisser une chance à cette expérimentation.
Premièrement, il est indispensable de revenir à la rédaction adoptée par le Sénat selon laquelle, par principe, les entreprises de Jonum ne peuvent pas distribuer de gains monétaires.
Deuxièmement, il est préférable de considérer que d'autres récompenses, y compris l'obtention de gains monétaires, peuvent éventuellement être accordées de façon dérogatoire et à titre expérimental. Cette dérogation, que les rapporteurs de l'Assemblée nationale souhaitent permettre par décret en Conseil d'État après avis de l'ANJ, doit être encadrée de façon beaucoup plus stricte.
Les décrets doivent tous être adoptés après consultation des associations représentatives d'élus locaux et des filières économiques concernées, soit la filière des jeux d'argent et du hasard et celle du jeu vidéo.
Les autres récompenses qui peuvent être accordées à titre dérogatoire doivent l'être à titre « accessoire et ponctuel » : accessoire pour que cela ne constitue pas la principale motivation du joueur ; ponctuel pour que de telles récompenses soient distribuées à certains moments du jeu seulement, et non de façon systématique.
Des critères stricts de plafonnement doivent être fixés, ce qui implique de déterminer, au moins dans les grandes lignes, l'assiette de calcul ainsi que le seuil, et ce dans la limite d'un montant annuel par joueur.
Voilà, mes chers collègues, la feuille de route qui a été la nôtre.
M. Denis Masséglia, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je veux remercier Patrick Chaize pour la qualité de nos échanges et j'ai bon espoir que nous trouvions un compromis.
Nous sommes partis de la très bonne définition qu'avait inscrite le Sénat dans le projet de loi, mais nous sommes aussi partis de la réalité, c'est-à-dire de ce qui existe déjà, mais sans cadre.
Nous voulions trouver un équilibre entre un cadre protecteur en termes d'addiction, de blanchiment d'argent ou s'agissant de l'âge des joueurs, et la préservation du tissu économique français qui s'est créé dans ce secteur. Le cadre que nous avons adopté est évidemment plus dur que l'absence actuelle de cadre.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Ce sujet est vraiment arrivé comme un cheveu sur la soupe dans ce texte ! Il n'y a aucune justification à ce qu'il soit traité ici. Vous nous dites qu'il n'y a pas de réglementation, mais il y en a bien une, celle des jeux d'argent et de hasard, puisque ces Jonum répondent parfaitement aux quatre critères qui les définissent - cela a été rappelé. Aujourd'hui, les entreprises concernées ne fonctionnent pas dans un vide juridique : elles se soustraient tout simplement à la loi. Nous légiférons donc pour rendre légale une pratique illégale ! Je peux comprendre la volonté de soutenir des start-up, mais il est faux de dire qu'il n'existe pas de cadre.
Cette pratique est vingt-sept fois plus addictive que les jeux de hasard et d'argent ; elle est donc plus dangereuse. Certes, c'est une version que nous ne connaissions pas jusqu'ici, les modalités sont différentes, mais la définition des jeux de hasard et d'argent s'applique clairement aux Jonum. Nous avons donc bien la possibilité de dire non à ce nouveau cadre.
Par ailleurs, qu'en est-il des règles fiscales qui s'appliqueront aux Jonum ? Ces entreprises se soustraient à la fois aux règles des jeux de hasard et d'argent et à leurs règles fiscales.
Je vous invite à ne pas accepter d'intégrer les Jonum dans ce texte, car ils ne doivent pas être une exception aux jeux de hasard et d'argent.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Je ne suis pas d'accord pour dire que les Jonum n'existent pas. Nous avons justement démontré qu'il existait un espace entre les jeux d'argent et de hasard et les jeux vidéo dans la version adoptée par le Sénat. Un univers est bien présent et nous avons tenté de lui fixer un cadre via une expérimentation.
J'en viens maintenant à nos propositions de rédaction sur ce sujet.
La proposition de rédaction n° 33 vise à rétablir la version du Sénat consistant à interdire, par principe, l'obtention de tout gain monétaire.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Cette proposition de rédaction permettra-t-elle aux joueurs de gagner un gain en cryptomonnaie ?
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Non, par principe, il ne pourra pas y avoir de gain monétaire. Pour autant, nous vous proposerons d'introduire la possibilité, par dérogation et dans des conditions strictes, d'un gain en cryptomonnaie.
M. Denis Masséglia, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Madame Amiot, vous nous dites que les Jonum sont beaucoup plus addictifs ? Si vous avez des éléments à ce sujet, je suis preneur ! Parce qu'il n'existe aujourd'hui aucune donnée en la matière... C'est d'ailleurs pourquoi nous avons prévu que le Gouvernement remette au Parlement un bilan d'étape au bout de dix-huit mois.
En ce qui concerne la fiscalité, je suis certain que vous allez nous proposer quelque chose lors du prochain projet de loi de finances... Aujourd'hui, nous en sommes uniquement à définir un cadre.
La proposition commune de rédaction n° 33 des rapporteurs est adoptée.
M. Denis Masséglia, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 61 vise à permettre à un décret en Conseil d'État, pris après avis de l'Autorité nationale des jeux (ANJ), d'autoriser l'attribution, à titre expérimental et par dérogation, d'autres récompenses que les seuls objets numériques monétisables - nous venons d'en parler.
Cette possibilité est fortement encadrée : consultations obligatoires des associations représentatives d'élus locaux et des filières économiques concernées ; ces autres récompenses ne peuvent être attribuées, par dérogation, qu'à titre accessoire ; ajout d'un critère de plafonnement de la valeur totale des autres récompenses qu'une entreprise de Jonum peut attribuer ; ajout d'un critère de plafonnement annuel par joueur.
Ces critères sont plus restrictifs que ceux applicables aux jeux d'argent et de hasard.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Nous intégrons bien ainsi une dérogation dans l'expérimentation.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Et vous laissez le Gouvernement agir par décret ! Je m'y oppose évidemment.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - En effet, mais le décret est pris après avis de l'ANJ et après consultation de différents acteurs.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Mais c'est uniquement consultatif ! Le Gouvernement pourra donc aisément passer outre.
M. Denis Masséglia, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je veux rappeler qu'il n'existe pas à l'heure actuelle de cadre pour ce secteur d'activité. C'est pourquoi nous prévoyons une expérimentation durant trois ans avec un bilan d'étape à mi-parcours. Il reviendra au législateur d'intervenir à ce moment-là ou au terme de l'expérimentation.
Mme Ségolène Amiot, députée. - J'entends ce que vous dites, mais il y a clairement une question de confiance vis-à-vis de ce Gouvernement. Vous prévoyez un avis consultatif de l'ANJ sur lequel le Gouvernement pourra s'asseoir et il y a un risque évident de généralisation de l'expérimentation à son terme - on a des précédents fâcheux de cet ordre. Je n'ai aucune raison de croire en votre bonne foi, vu les expériences précédentes !
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - C'est un procès d'intention. Nous proposons une expérimentation de trois ans dans un cadre précis et avec des conditions strictes de mise en oeuvre. C'est en tout cas l'esprit dans lequel nous avons construit ce dispositif.
M. Denis Masséglia, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'expérimentation a une durée de trois ans ; il faudra un nouveau vote du Parlement pour, le cas échéant, la prolonger ou la généraliser.
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - Il est important de prévoir, pour la dérogation dont nous parlons, que la filière, les associations d'élus locaux et l'ANJ soient consultés. J'ajoute que le texte prévoit que les récompenses en question devront être accessoires.
Le Parlement devra évidemment jouer son rôle durant l'expérimentation et contrôler l'action du Gouvernement sur ces Jonum.
La proposition commune de rédaction n° 61 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 63 vise à préciser que le décret autorisant à titre expérimental certaines catégories de jeux doit être un décret en Conseil d'État pris après avis de l'ANJ et après consultation des associations représentatives d'élus locaux et des filières du jeu d'argent et de hasard et du jeu vidéo.
Mme Ségolène Amiot, députée. - C'est encore un avis consultatif ?
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Oui.
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - Il ne peut guère en être autrement, quand on consulte autant d'acteurs !
La proposition commune de rédaction n° 63 des rapporteurs est adoptée.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Je vote contre l'article 15.
L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 15 bis (nouveau)
M. Denis Masséglia, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 34 vise à imposer une vérification préalable de l'identité du joueur au moment de l'ouverture de son compte auprès d'une entreprise de jeux à objets numériques monétisables.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - L'Assemblée nationale a excellemment travaillé, avec l'aide du Gouvernement, l'article 15 bis lorsqu'elle a examiné le texte en première lecture. Cet article important définit la réglementation des Jonum, et nos propositions de rédaction visent à en préciser la portée.
La proposition commune de rédaction n° 34 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 35 vise à imposer aux entreprises de Jonum l'ouverture d'un seul compte par joueur.
La proposition commune de rédaction n° 35 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 36 prévoit que les entreprises de Jonum doivent tenir à la disposition de l'Autorité nationale des jeux leurs données relatives aux opérations financières associées à leurs joueurs et leurs évènements de jeu, dans un souci de transparence.
La proposition commune de rédaction n° 36 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 37 prévoit que le décret en Conseil d'État précisant la mise en place des mécanismes d'autoexclusion et de dispositif d'autolimitation des dépenses et du temps de jeu est pris après avis de l'ANJ.
La proposition commune de rédaction n° 37 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 38 prévoit que l'interdiction des prêts entre joueurs ou consentis par des entreprises de Jonum ne peut permettre ni l'achat d'objets numériques monétisables ni l'obtention des autres récompenses éventuellement attribuées à titre dérogatoire par voie réglementaire.
La proposition commune de rédaction n° 38 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 39 tire les conséquences de l'entrée en application du règlement européen sur les marchés de crypto-actifs qui, à compter du 30 décembre 2024, substitue la notion de cryptoactifs à celle d'actifs numériques.
La proposition commune de rédaction n° 39 des rapporteurs est adoptée.
L'article 15 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 16
Mme Mireille Clapot, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 21 vise à réécrire les alinéas 3 à 7 de l'article 16 pour tenir compte des préoccupations exprimées par la Commission européenne dans son avis circonstancié du 17 janvier 2024 sur le texte voté par l'Assemblée nationale.
Cette nouvelle rédaction est bien « alignée » avec l'article 40 du règlement européen sur les services numériques, qui porte sur les obligations incombant aux fournisseurs de très grandes plateformes en ligne et très grands moteurs de recherche en ligne.
L'esprit général de l'article est conservé ; il s'agit simplement d'une réécriture.
La proposition commune de rédaction n° 21 des rapporteurs est adoptée.
L'article 16 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 17
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - L'élargissement du périmètre des données transmises voté par l'Assemblée nationale soulève des questions d'articulation avec le droit de l'Union européenne, puisqu'une proposition de règlement européen est en cours de discussion sur ce sujet et devrait être adoptée cette année.
Par conséquent, les dispositions de cet article, bien qu'ayant fait l'objet d'un compromis avec la rapporteure de l'Assemblée nationale, Mme Mireille Clapot, pourraient être prochainement modifiées par le Gouvernement, notamment à l'occasion de l'examen de la proposition de loi sur les meublés de tourisme.
Mme Mireille Clapot, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 22 tend à préciser le périmètre des données transmises aux communes : celles qui permettent de contrôler le respect des obligations prévues à l'article L. 324-1-1 du code du tourisme ou celles qui peuvent être utiles à la conduite d'une politique de tourisme et de logement. Cette disposition correspond à un souhait exprimé par les collectivités.
La proposition commune de rédaction des rapporteurs n° 22 est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 23 tend à supprimer la création d'un comité de suivi : la création d'un tel comité n'est pas plébiscitée par les acteurs concernés et ne s'inscrirait pas dans une logique de simplification administrative.
La proposition commune de rédaction n° 23 des rapporteurs est adoptée.
L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 18
L'article 18 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve d'une modification rédactionnelle.
Article 19
L'article 19 est adopté dans la rédaction issue de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 20
L'article 20 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 21
L'article 21 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 22
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 40 vise à supprimer les dispositions de la loi pour la confiance dans l'économie numérique relatives au régime de responsabilité limitée des services d'hébergement. En effet, ces dispositions sont issues de la transposition de l'article 14 de la directive e-commerce, mais cet article a été abrogé par le règlement européen sur les services numériques, qui prévoit désormais des dispositions nouvelles relatives à ce régime de responsabilité. Le règlement européen étant d'application directe, toute disposition nationale qui prévoit des règles identiques ou similaires est désormais incompatible avec le droit de l'Union européenne.
La proposition commune de rédaction n° 40 des rapporteurs est adoptée.
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 41 vise à supprimer des dispositions votées par l'Assemblée nationale, dont l'objet était de prévoir que les réseaux sociaux indiquent le nombre d'utilisateurs de leurs dispositifs de contrôle parental. Cependant, ces dispositions visent non pas les réseaux sociaux et le nombre d'utilisateurs, mais les fournisseurs d'accès à internet et les statistiques d'utilisation.
La proposition commune de rédaction n° 41 des rapporteurs est adoptée.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 42 tend à supprimer des dispositions votées par l'Assemblée nationale qui prévoyaient que les fournisseurs d'accès à internet devaient informer leurs abonnés de l'interdiction de vendre à distance des marchandises contrefaisantes ou de médicaments falsifiés.
Il s'agit d'une précision superfétatoire dans la mesure où toute vente de médicaments falsifiés et de marchandises contrefaisantes est interdite, peu importe la modalité de cette vente, au contraire du tabac manufacturé, qui est un produit légal, mais dont la vente à distance est réglementée.
La proposition commune de rédaction n° 42 des rapporteurs est adoptée.
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 43 vise à supprimer des dispositions votées par l'Assemblée nationale dont l'intention était de demander aux fournisseurs d'accès à internet de respecter la neutralité d'internet. Mais les dispositions votées confondent la neutralité technologique avec la neutralité d'internet, par ailleurs déjà garantie dans notre droit depuis l'entrée en application du règlement européen sur l'internet ouvert il y a déjà plusieurs années.
La proposition commune de rédaction n° 43 des rapporteurs est adoptée.
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 31 tend à ajouter le trafic de stupéfiants parmi la liste des infractions contre lesquelles les personnes dont l'activité consiste à fournir des services d'hébergement doivent concourir à lutter.
La proposition commune de rédaction n° 31 des rapporteurs est adoptée.
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 44 vise à supprimer les dispositions relatives aux obligations d'information des services de réseaux sociaux introduites par la loi du 7 juillet 2023 visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne. Cette proposition de suppression s'inscrit dans une volonté de mise en cohérence avec les dispositions déjà prévues par le règlement européen sur les services numériques, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises au Gouvernement par la Commission européenne lors de la transmission de ses observations sur ce texte et de ses avis circonstanciés sur le présent projet de loi.
La proposition commune de rédaction n° 44 des rapporteurs est adoptée.
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 45 effectue une coordination juridique liée à la réécriture de l'article 6 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique prévue par l'article 22 de ce projet de loi.
La proposition commune de rédaction n° 45 des rapporteurs est adoptée.
L'article 22 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 23
L'article 23 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 24
L'article 24 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 25
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 24 vise à supprimer l'obligation, introduite par l'Assemblée nationale, faite à l'Arcom, à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) de saisir le comité européen des services numériques préalablement à la mise en oeuvre de toute décision susceptible d'entraîner des obligations additionnelles applicables aux fournisseurs de services intermédiaires, de services d'hébergement et de plateforme en ligne.
Une telle obligation, en plus d'être contraire au règlement européen sur les services numériques, d'application directe et d'harmonisation maximale, est susceptible de porter atteinte à l'efficacité de l'action publique et de nature à affaiblir les pouvoirs des autorités de régulation.
Il conviendra néanmoins de s'assurer que les acteurs français ne soient pas davantage régulés que ceux d'autres pays.
La proposition commune de rédaction n° 24 des rapporteurs est adoptée.
L'article 25 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 28
L'article 28 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 29
L'article 29 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 31
L'article 31 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de modifications rédactionnelles.
Article 31 bis (nouveau)
L'article 31 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 32
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 25 vise à clarifier et à mettre en conformité l'article avec le DSA.
La proposition commune de rédaction n° 25 des rapporteurs est adoptée.
M. Aurélien Lopez-Liguori, député. - La proposition de rédaction n° 32 vise à ouvrir le champ de la loi au cryptage homomorphique.
M. Victor Habert-Dassault, député. - Il s'agit d'un amendement incitatif, afin que les données anonymisées soient davantage utilisées, notamment dans le cadre du développement de l'intelligence artificielle.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Un amendement identique avait été déposé en séance au Sénat, et avait reçu un avis défavorable. Il en fut de même à l'Assemblée nationale.
Sur le fond, cette proposition de rédaction me paraît intéressante, mais elle doit être expertisée, notamment en vue des futurs textes sur la cybersécurité. À ce stade, il me paraît hasardeux de la retenir, d'autant qu'elle semble contraire à la directive ePrivacy, dont l'article 82 de la loi Informatique et libertés est la transposition.
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je suis du même avis.
La proposition de rédaction n° 32 des députés Les Républicains n'est pas adoptée.
L'article 32 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 32 bis (nouveau)
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 26 vise à surmonter les difficultés présentées par la rédaction actuelle de l'article au regard du droit de l'Union européenne : en effet, cette rédaction étend le champ d'application du règlement général sur la protection des données (RGPD) au-delà de ce que prévoit le texte.
Il apparaît préférable de retenir une formulation qui corresponde plus étroitement au RGPD et qui s'en tienne à indiquer explicitement que les pratiques des acteurs visés par l'article 32 bis entrent bien dans l'une des catégories pour lesquelles le RGPD prévoit une application à des acteurs établis hors de l'Union.
La proposition commune de rédaction n° 26 des rapporteurs est adoptée.
L'article 32 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 33
M. Loïc Hervé, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 27 est rédactionnelle.
La proposition commune de rédaction n° 27 des rapporteurs est adoptée.
L'article 33 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 34
L'article 34 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 36
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 28 vise à aligner le calendrier d'entrée en vigueur des dispositions du projet de loi relatives aux frais de transfert de données avec le calendrier prévu par le Data Act.
La proposition commune de rédaction n° 28 des rapporteurs est adoptée.
L'article 36 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 37 (nouveau)
L'article 37 est supprimé.
Article 38 (nouveau)
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 29 vise à supprimer cet article dont les dispositions ont été intégrées, par souci de cohérence, au sein de l'article 10 bis A.
La proposition commune de rédaction n° 29 des rapporteurs est adoptée.
L'article 38 est supprimé.
Mme Ségolène Amiot, députée. - Certaines lignes rouges ont été franchies avec ce texte, notamment en ce qui concerne les Jonum.
En revanche, nous soulignons l'effort fait sur la sécurisation des données - nous avions d'ailleurs déposé des amendements en ce sens lors de la discussion du projet de loi à l'Assemblée nationale.
Le projet de loi aurait mérité d'être divisé en plusieurs textes pour permettre un examen plus minutieux des différents thèmes, ce qui aurait évité que nous ne troquions des oranges contre des pommes afin de parvenir à un résultat plus ou moins consensuel.
M. Rémi Cardon, sénateur. - Je souligne que, pour la première fois, l'intitulé du projet de loi du Gouvernement correspond à son contenu. Et grâce aux apports du Sénat, le texte est presque parfait ! (Rires.)
Néanmoins, les premiers articles sur le volet relatif à la protection des mineurs sont insuffisants. Il aurait fallu aller plus loin.
Mme Laurence Rossignol, sénatrice. - Je suis moins enthousiaste que mon collègue. Le texte que nous avons adopté ne fera pas trembler l'industrie pornographique. Nous sommes très en deçà de l'enjeu de société auxquels nous étions confrontés.
Si l'objet du projet de loi était de transposer le DSA, le DMA et le Data Act, alors la régulation de l'industrie pornographique n'aurait pas dû y figurer. Le texte a souffert du manque d'engagement du Gouvernement : il n'y a aucune prise de risque, alors que, quand on légifère, il faut savoir en prendre, y compris à l'égard de l'Union européenne. Nous sommes englués dans des procédures judiciaires contre l'industrie pornographique, ce qui lui permet de ne pas appliquer la loi. Quand ses représentants prendront connaissance du compte rendu de la commission mixte paritaire et des votes, ils ne seront pas inquiets pour l'avenir de leur business...
M. Ludovic Haye, sénateur. - Je remercie tous ceux qui se sont investis sur ce texte. On peut se demander si nous sommes allés assez loin, mais il faut prendre en compte ce que la technologie nous permettra de faire. Nous aimerions que les expérimentations soient pérennisées, mais elles permettront déjà de faire des points d'étape. Nous vivons une révolution numérique, et nous devons nous adapter, légiférer, encadrer, et les évolutions ne sont pas terminées.
Mme Anne Le Hénanff, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - L'examen de ce texte a été très long ; à l'origine, il s'agissait d'une transposition d'un texte européen à laquelle des dispositions ont été rajoutées. Face à la multiplication des textes européens à transposer, nous aurions peut-être intérêt à faire des retranscriptions fidèles, sans que cela nous empêche de prévoir des textes nationaux sur des sujets qui nous tiennent à coeur. Car notre culture est différente de celle des autres États : au niveau européen, notre position n'est pas forcément partagée, par les pays du Nord notamment.
Le cheminement du texte a été compliqué ; nous devrions peut-être réfléchir à une meilleure anticipation, à un travail plus en amont pour éviter des incompréhensions entre nous, parce que nous aurons beaucoup de textes à examiner, sur l'intelligence artificielle, sur le quantique, sur les influences étrangères par le biais du numérique...
M. Patrick Chaize, rapporteur pour le Sénat. - Le travail a été compliqué, mais nous devons nous féliciter du résultat. Nous avons été confrontés à des difficultés ; je pense notamment au changement de ministre, et aux allers et retours consécutifs et aux avis de la Commission européenne. Nous avons fait des pas les uns vers les autres - qui ont fini par être des sauts de haies ! -, mais l'important a été de parvenir à conclure nos travaux.
M. Paul Midy, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je remercie tous ceux qui ont contribué à ce projet de loi, en particulier les présidents et les rapporteurs. Nous avons beaucoup travaillé sur ce texte, et nous pouvons nous féliciter de la qualité de notre travail. Comme l'a dit Patrick Chaize, il faut faire des pas les uns vers les autres : cela ressemble parfois à des sauts de haies, et parfois à des pas de danse. (Sourires.) Nous avons oeuvré au service des Français et, je l'espère, des Européens si nous parvenons à les influencer par nos régulations.
Mme Louise Morel, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Je remercie les rapporteurs. Le travail a été compliqué ; le suivi des procédures de notification a nécessité une grande attention. Je forme le voeu que notre méthode de travail servira d'inspiration pour travailler mieux et plus vite à l'avenir.
J'espère que le compromis que nous avons trouvé recueillera l'approbation de nos deux assemblées.
M. Luc Lamirault, député, vice-président. - Un président d'une récente commission mixte paritaire disait que lorsque les députés et les sénateurs repartaient déçus c'était que la commission mixte paritaire était réussie : chacun avait dû accepter de faire des compromis. J'ai l'impression qu'aujourd'hui c'est au contraire grâce à la discussion que tout le monde repart content ! Je vous en félicite, madame la présidente.
Sur ces sujets, il faut être humble : nous devrons y revenir, car les techniques évoluent et les sociétés vont vite. Nous sommes toujours un peu en retard !
Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente. - Oui, nous sommes un peu lents, mais comme le disait Maria Ressa, une journaliste philippino-américaine, l'Europe a gagné la course des tortues en matière de législation du numérique ! Nous y sommes parvenus grâce à trois textes - le DSA, le DMA, l'AI Act - auxquels il faut ajouter le Data Act et des textes connexes. La proposition de règlement visant à prévenir et à combattre les abus sexuels sur les enfants sera aussi un point d'attention particulier.
Nous voulions aller beaucoup plus loin pour le DSA, et prévoir une redevabilité et une responsabilité des plateformes. Nous n'avons pas pu réguler de manière plus exigeante, mais nous continuerons le combat.
Il faut travailler avec nos députés européens : dans le cadre des commissions des affaires européennes, nous pouvons nous saisir des textes, émettre des avis politiques et des propositions de résolution européenne afin de peser en amont sur les textes. Nous n'avons pas encore assez ce réflexe.
Malgré le contexte, nous avons réussi à avancer et à garder le cap !
La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique.