II. UNE PROPOSITION DE LOI « PUZZLE », ENTRE AMÉNAGEMENTS TECHNIQUES ET RENVERSEMENT DE LA LOGIQUE DES CONFISCATIONS
La présente proposition de loi entend apporter une réponse, au moins partielle, à ces défaillances et faciliter l'action des parties prenantes. Les dispositions qu'elle contient sont d'inégale importance mais répondent toutes à un objectif commun consistant, pour reprendre les mots utilisés par l'auteur du texte lors de son audition, à adapter la législation aux besoins des intervenants.
Elles s'articulent schématiquement selon trois axes.
La première partie des dispositions du texte vise à améliorer le fonctionnement de l'Agrasc en :
- rendant systématique la notification à l'Agrasc de toutes les saisies opérées et de toutes les décisions de confiscation prises par les juridictions de jugement - y compris pour les saisies probatoires ou pour les biens confisqués sur lesquels l'Agence n'a pas de compétence aux termes du code de procédure pénale (article 1er bis C) ;
- étendant la compétence de l'Agrasc aux biens non-restitués (article 1er bis E), ce qui procède d'une volonté bienvenue de rationalisation administrative et d'unification de la gestion des biens confisqués sous l'égide de l'Agence mais présente un impact difficilement évaluable dans un contexte où le volume représenté par les biens concernés n'est pas connu ;
- reconnaissant la compétence de l'Agrasc en matière de formation des officiers de police judiciaire et des magistrats, sans que cela se traduise par l'attribution à celle-ci d'un monopole qui aurait mis fin à l'organisation de formations par des autres entités qui, comme la PIAC et les CeRAC, interviennent aujourd'hui auprès des policiers et gendarmes (article 1er bis) ;
- prévoir que la décision de confiscation d'un bien immobilier vaut titre d'expulsion du condamné et des « occupants de son chef » (article 3), ce qui a pour intérêt d'épargner à l'Agrasc de devoir mener une procédure civile d'expulsion longue, coûteuse et dont l'issue est de facto favorable à l'Agence dans 100 % des cas.
Un second groupe de dispositions vient élargir les possibilités d'affectation des biens saisis et confisqués. Celles-ci prévoient :
- que les biens meubles saisis au cours des enquêtes ou des instructions pourront être affectés, à titre gratuit, aux fédérations sportives délégataires, aux associations et fondations reconnues d'utilité publique et aux organismes gestionnaires d'un parc naturel national ou régional (article 1er) ;
- que les collectivités territoriales pourront bénéficier d'une affectation sociale des immeubles confisqués (article 1er bis D).
Les autres dispositions viennent aménager la procédure pénale applicable aux saisies et aux confiscations. Elles viennent ainsi :
- simplifier la procédure d'appel contre les décisions avant jugement relatives à la destruction des biens saisis ou à leur remise à l'Agrasc, en substituant à la compétence de la chambre de l'instruction celle d'un juge unique (article 1er) ;
- ajouter aux missions des officiers de police judiciaire celle de « [réaliser] des enquêtes patrimoniales aux fins d'identification des avoirs criminels » (article 1er bis A) ;
- ouvrir la possibilité au procureur, dans le cadre d'une convention judiciaire d'intérêt public (CJIP), d'imposer à la personne morale mise en cause de se dessaisir au profit de l'État de tout ou partie des biens saisis dans le cadre de la procédure (article 1er bis B) ;
- faciliter les confiscations en valeur en supprimant, dans cette hypothèse, l'obligation posée par le droit en vigueur d'une motivation renforcée de la juridiction de jugement (article 1er ter) ;
- obliger la juridiction de jugement, sauf décision spécialement motivée, à prononcer la confiscation des biens saisis qui sont l'instrument ou le produit direct ou indirect de l'infraction (article 3) ;
- intégrer les comptes bancaires au dispositif de restitution des biens « mal acquis » (article 4), qui ne concerne aujourd'hui que les biens susceptibles d'être cédés.