LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

À la suite de la première délibération à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a retenu, dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité au titre de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, deux amendements qui sont venus modifier les crédits du programme 203 « Infrastructures et services de transports » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Un premier amendement déposé par le Gouvernement a minoré de 19,5 millions d'euros les crédits de l'action 04 « Routes-entretien » du programme 203 « Infrastructures et services de transports » afin de tenir compte du transfert de portions du réseau routier national aux départements et aux métropoles prévus par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « 3DS ». En vertu d'un autre amendement déposé par le Gouvernement duquel résultent les dispositions de l'article 25 bis du présent projet de loi de finances, la compensation de ces transferts s'effectuera par l'affectation d'une fraction du produit de l'accise sur les produits énergétiques (l'ancienne taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques ou TICPE).

Un second amendement déposé par Mme Annaïg Le Meur ainsi que plusieurs de ses collègues députés a ouvert 8 millions d'euros sur le programme 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » dans le but d'apporter une aide conjoncturelle aux entreprises du secteur du mareyage qui ont enregistré des pertes à la suite du Brexit.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 22 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen des crédits consacrés aux transports terrestres et au transport aérien de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens »

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial sur les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie », « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » et « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ». - Sans considérer l'évolution des dépenses de soutien à l'énergie, qui ont été très importantes en 2023, les crédits des programmes sont globalement en hausse. Cependant, leur progression reste inférieure à l'inflation, à rebours de la communication du Gouvernement, qui présente ce budget comme celui de la transition écologique.

S'agissant du fonctionnement du ministère, le plafond d'emplois augmente pour la première fois depuis des années. Je souligne au passage que certains crédits visent à rénover la façade de la tour Séquoia, achetée par le ministère en 2015, le bâtiment s'étant avéré peu performant d'un point de vue énergétique.

En ce qui concerne le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », les crédits semblent quasiment doubler. En réalité, il s'agit d'un transfert, puisque les crédits liés à la stratégie nationale de la biodiversité, rattachés l'an dernier au programme 380 du fonds vert, rebasculent sur le programme 113. Cette réorganisation est positive en matière de lisibilité, tous les crédits consacrés à la biodiversité étant désormais rassemblés au sein du même programme.

Ces crédits ont fait l'objet d'une gestion plus encadrée au niveau national que les autres politiques du fonds vert. Un exemple est que lorsque des régions n'utilisaient pas leur enveloppe, le montant était repris et transféré à d'autres régions. L'Office français de la biodiversité (OFB), principal opérateur du programme 113, sera en mesure de voter un budget à l'équilibre pour la première fois en 2024, grâce à une augmentation de sa subvention pour charges de service public.

J'en viens au programme 181 « Prévention des risques », dont l'augmentation des crédits s'explique quasi intégralement par la hausse de la subvention versée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), son principal opérateur. En effet, l'Agence fait face à des frais de fonctionnement qui augmentent en même temps que ses crédits d'intervention. Ces derniers proviennent aussi de France 2030 et du fonds Chaleur.

L'Ademe gère le fonds économie circulaire, qu'il ne faut pas confondre avec les financements assurés par les éco-organismes.

Elle se charge aussi du fonds Hydrogène, qui est de taille modeste et dont les crédits vont baisser de 38 à 20 millions d'euros, à rebours des discours affichant la volonté de développer ce vecteur énergétique. Les crédits du fonds viennent parfois compléter des crédits de France 2030, ce qui n'est pas idéal en matière de lisibilité.

Les risques technologiques sont pris en considération par ce programme et, vingt-deux ans après l'accident de l'usine AZF, tous les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) devraient être approuvés d'ici à la fin 2023.

En ce qui concerne les risques climatiques, les dernières tempêtes Ciarán et Domingo figurent parmi les cinq épisodes de tempête les plus coûteux. Les fonds manquent pour faire face aux dépenses engendrées, et il serait urgent de revoir l'enveloppe financière du régime de catastrophe naturelle. À ce titre, je déposerai un amendement visant à augmenter les crédits du fonds Barnier.

Le financement de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est également porté par le programme. Un projet de loi a été déposé au Conseil d'État, qui vise à fusionner l'ASN et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), pour former l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR). La traduction budgétaire de la fusion n'apparaît pas encore clairement. Par ailleurs, l'ASN plaide pour un programme budgétaire unique, les crédits étant actuellement éclatés entre la mission « Recherche et enseignement supérieur » et celle que nous examinons.

Le programme 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » ou fonds vert connaît une progression véritable, les crédits de paiement (CP) augmentant de 125 %, pour passer de 500 millions d'euros à 1,125 milliard d'euros. Ce nouveau budget semble plus sincère, notamment au regard du nombre important de dossiers déposés en 2023, qui n'ont pas pu être financés faute de crédits suffisants.

De plus, la maquette du programme évolue et deux nouvelles sous-actions sont créées. D'abord, la sous-action « Soutien aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) en milieu rural » se voit allouer 30 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et reprend pour partie les propositions faites par Stéphane Sautarel et Hervé Maurey dans le rapport d'information qu'ils ont remis sur le sujet. Ensuite, la sous-action « Territoires d'industrie » est dotée de 100 millions d'euros en AE. La pertinence de son inscription dans le fonds vert me semble plus critiquable compte tenu de sa mission, qui consiste d'abord à soutenir une activité économique. Le rattachement de ces crédits au programme 380 plutôt qu'à la mission « Économie » permet de présenter artificiellement un volume de financement plus important pour le fonds vert.

Comme l'an dernier, la répartition prévisionnelle des crédits entre les différentes actions et sous-actions du fonds vert n'apparaît pas dans le projet annuel de performances, ce qui est regrettable. Au cours des auditions que nous avons menées, nous avons appris que des grilles de répartition étaient préparées par la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) et transmises aux préfets. Si cette grille n'est pas rendue publique, il devient difficile d'opérer une comparaison entre le prévisionnel et ce qui a été effectivement dépensé. Ce travail de répartition est en cours pour 2024.

La gestion des crédits du fonds est assimilable à celle de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Ainsi, comme pour la DSIL, il n'y a pas de comité d'attribution des fonds. Les porteurs de projets ont signalé des difficultés rencontrées pour déposer leur dossier. Néanmoins, les dossiers qui n'ont pas été retenus en 2023 seront considérés comme déjà déposés pour 2024. Par ailleurs, dans certains départements, quand les crédits manquent sur le fonds vert, on a recours à la DSIL ou à la DETR, l'inverse se vérifiant également. Une quasi-fongibilité existe donc entre les trois enveloppes.

J'en viens au programme 345 « Service public de l'énergie ». En 2022 comme en 2023, la hausse significative des prix de l'électricité et du gaz avait entraîné un effet inattendu : les énergies renouvelables devenaient rentables et contribuaient au budget de l'État. L'an dernier, des recettes exceptionnelles étaient prévues pour un montant d'environ 36 milliards d'euros. Finalement, les recettes générées en 2022 et 2023 ne s'élèvent qu'à 17,7 milliards d'euros et, pour 2024, la prévision n'est que de 2,7 milliards d'euros, en raison de la baisse des prix sur les marchés de gros. À cet égard, le Gouvernement a diminué les montants prévus par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en septembre 2023.

Dans la loi de finances initiale pour 2021, un mécanisme avait été introduit, qui prévoyait de réviser le tarif d'achat de contrats de soutien à la production d'électricité photovoltaïque, signés entre 2006 et 2011. Le Sénat avait supprimé l'article, mais le Gouvernement a persévéré. Finalement, un arrêté a été annulé par le Conseil d'État et le Gouvernement vient de renoncer à appliquer ce dispositif, qui avait conduit à d'importants travaux préparatoires et mobilisé 10 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires.

Par ailleurs, le 26 octobre dernier, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel un article de la première loi de finances rectificative pour 2022, qui prévoyait un déplafonnement partiel des contrats de complément de rémunération de certains producteurs, sans inscrire ses modalités précises dans la loi. Suite à cette décision, le Gouvernement a déposé un amendement intégré dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en première lecture à l'Assemblée nationale qui prévoit désormais un déplafonnement intégral et sans conditions.

Crée en 2023, l'action n° 18 « Soutien hydrogène » est pour la première fois, dotée de 680 millions d'euros en AE et de 25 millions d'euros en CP.

Enfin, s'agissant des mesures de soutien aux consommateurs, trois types de dispositifs perdureront en 2024 : le bouclier sur les prix de l'électricité prévu à l'article 52, un dispositif d'amortisseur ciblé prévu au même article, pour lequel le Gouvernement n'a pas su expliquer qui il concernait, et des mesures destinées aux structures d'habitat collectif chauffées au gaz.

Je terminerai en évoquant le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », qui prévoit un montant significatif alloué à des mesures de soutien aux consommateurs, notamment au travers du chèque énergie et des primes à la transition. À cet égard, le fonctionnement du dispositif MaPrimeRénov' évoluera en 2024 pour compter deux parcours : « performance » et « efficacité ».

Le parcours « performance » sera constitué d'aides proportionnelles au coût des travaux visant à soutenir la réalisation de travaux de rénovation globale. Ces financements seront majorés pour les logements F et G. L'accompagnement sera obligatoire. Ce parcours sera financé par le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission « Cohésion des territoires ».

Les crédits du programme 174 de la mission que nous examinons seront alloués au financement du parcours « efficacité » de MaPrimeRénov'. Pourtant, bien qu'il soit inscrit sur la mission « Écologie », ce dispositif vise à soutenir la décarbonation du chauffage des logements, sans prévoir de rénovations globales, alors que celles-ci permettent véritablement la réduction de la consommation d'énergie.

Quoi qu'il en soit, les crédits réunis des programmes 135 et 174 ne permettront pas d'atteindre les objectifs fixés en matière de bâtiments de basse consommation. De plus, même si les aides doivent augmenter pour les ménages des déciles inférieurs, le niveau de reste à charge restera bien trop élevé. En effet, pour les ménages très modestes, le reste à charge représente aujourd'hui 45 % du coût des travaux.

Par ailleurs, nous observons une sous-exécution des crédits de MaPrimeRénov' en 2023, qui pourrait aussi perdurer en 2024. Les difficultés rencontrées pour trouver des artisans qualifiés ou définir une rénovation globale expliquent notamment ce problème.

En ce qui concerne le dispositif d'aide à l'acquisition de véhicules propres, il prend deux formes : le bonus ou la prime à la conversion. J'ignore comment les fonds sont répartis entre les deux, car le ministère n'a pas pu répondre. Les modalités d'attribution et le montant de ces deux dispositifs en 2024 ne sont pas encore connus. Comme vous le savez, suite aux débats qui ont eu lieu au Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2023 et à l'amendement que j'avais soutenu au nom de la commission des finances, nous avons été finalement entendus et le bonus ne sera dorénavant attribué qu'à des véhicules présentant un bilan carbone correct. Un arrêté a défini les critères et la grille d'analyse sur lesquels reposera ce bilan. L'Ademe passe en revue tous les véhicules commercialisés en France pour définir les notes obtenues, qui seront connues au mois de décembre. Ce retard perturbera sûrement la consommation des crédits alloués au bonus en 2024.

Des crédits modestes, s'élevant à 50 millions d'euros, seront fléchés pour le leasing social. Nos craintes sont nombreuses quant à l'opérationnalité du dispositif, notamment parce que les véhicules potentiellement éligibles ne sont pas encore produits. Tenant compte de cette difficulté, le Gouvernement étudie la possibilité d'adopter des critères géographiques pour les ménages éligibles. L'article 52 bis porte sur l'inscription dans la loi de cette pratique.

Le programme comprend aussi le dispositif « gros rouleurs », introduit par la loi de finances pour 2023, qui visait à cibler les personnes utilisant leur véhicule pour aller travailler. Le dispositif est prorogé pour 2024 et étendu jusqu'au sixième décile.

Je finirai mon intervention en évoquant le compte d'affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (Facé), dont les crédits n'ont pas évolué depuis 2018, s'élevant toujours à 360 millions d'euros, alors qu'un rapport de la Cour des comptes s'est montré assez sévère, soulignant notamment qu'en raison de l'inflation l'enveloppe ne permet pas de mener l'ensemble des travaux nécessaires.

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». - Les crédits consacrés à l'énergie dans la mission sont très impactés par l'extinction annoncée des mécanismes exceptionnels de protection des consommateurs d'ici à 2024. Les montants baissent de 70 % au sein du programme 345 et de 3 % dans le programme 174. Certes, la conjoncture économique explique cette extinction et je rappelle que, selon la CRE, les prix sont redescendus à 140 euros pour un mégawatt d'électricité et à 50 euros pour un mégawatt de gaz, atteignant des niveaux très inférieurs à ceux de l'année 2022, marquée par le conflit en Ukraine et la découverte du phénomène de corrosion sous contrainte, qui avait limité la production d'énergie.

Pour autant, notre commission s'inquiète de la reconduction limitée du bouclier tarifaire. En ce qui concerne l'électricité, seuls les boucliers individuels et collectifs, ainsi que la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), sont pleinement prolongés. Ce ne sera pas le cas de l'amortisseur et du filet de sécurité, pourtant utiles aux entreprises et aux collectivités. À cet égard, je rappelle que certains contrats signés sont basés sur des niveaux bien supérieurs aux 140 euros par mégawatt. S'agissant du gaz, le projet de loi de finances (PLF) prévoit un bouclier pour les ménages bénéficiant d'un système de chauffage collectif, mais pas de bouclier individuel ni de baisse de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN). Pour les carburants, seule une indemnité est proposée. Les chèques énergie exceptionnels sont abandonnés. Au total, les crédits se limitent à 2,9 milliards d'euros et connaissent une baisse de 90 %.

De plus, une forte incertitude pèse sur les hypothèses macroéconomiques retenues pour le budget. D'abord, si les charges de service public de l'énergie finançant les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables sont positives pour la seconde année consécutive, avec 2,7 milliards d'euros, elles restent très sensibles aux fluctuations des prix du marché. En outre, l'article 11 du PLF autorise le Gouvernement à doubler réglementairement la TICGN pour un montant de 4 milliards d'euros. Enfin, l'article 52 permet de caper à 1,6 milliard d'euros les recettes exceptionnelles tirées des compléments de prix pénalisant les demandes excessives des fournisseurs, dans le cadre de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh). Or c'est au consommateur que doivent être reversés ces compléments de prix de l'Arenh, comme l'ont proposé la CRE et le rapport d'information intitulé Mieux prévenir et réprimer la fraude à l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, remis par notre commission en juillet dernier. Le PLF prévoit aussi de plafonner les contrats de compléments de rémunération des producteurs d'électricité renouvelable pour 1,3 milliard d'euros.

Enfin, nous déplorons plusieurs angles morts dans ce PLF. D'une part, la revitalisation des territoires n'est pas soutenue, contrairement à l'engagement pris dans la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat. D'autre part, la neutralité technologique n'est pas toujours appliquée, l'énergie nucléaire, l'hydroélectricité, l'hydrogène, les biocarburants et les biogaz en pâtissant. Enfin, plusieurs opérateurs de l'État ne disposent pas d'effectifs suffisants, à commencer par la CRE, qui a pourtant besoin de contrôler et de sanctionner les comportements opportunistes.

Le budget prévoyant une revalorisation des crédits alloués à la rénovation énergétique, la mobilité propre et la chaleur renouvelable, je proposerai à notre commission un avis favorable. Par ailleurs, je déposerai plusieurs amendements visant à supprimer la disposition sur les compléments de prix de l'Arenh, pour compléter les effectifs de la CRE et relever les crédits alloués aux centrales à charbon, au chèque énergie et au fonds Chaleur.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je mesure, au fil des années, l'importance de cette mission budgétaire au poids particulièrement dense.

Le fait que le ministère ne soit pas en mesure de répondre aux questions de notre rapporteur spécial est révélateur. Une incompréhension gagne l'opinion, à force d'injonctions sur des sujets qui touchent à l'environnement, à l'écologie, à la consommation et aux pratiques de la vie quotidienne. Nous observons une inadéquation entre les moyens que le budget de la Nation doit consacrer à ces questions et les moyens que les Français doivent aussi y dédier.

Christophe Béchu avait annoncé que le fonds vert serait à la main des élus et cette promesse n'a pas été tenue. Il faut rappeler le Gouvernement à cet engagement. Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires avait émis une réserve, expliquant que, pour la première année, les préfets agiraient pour le compte des élus. Quand ce fonds sera-t-il réellement à la main de ces derniers ?

Enfin, je ne suis pas contre la souplesse offerte par la fongibilité des fonds, mais il faut le dire et le faire en transparence. Si les informations ne sont pas partagées, ces transferts ont lieu au bon vouloir de l'État et de ses représentants dans les départements, dans lesquels les situations diffèrent. La cohérence est nécessaire. Il s'agit aussi de la confiance que les élus placent en la parole et le soutien de l'État.

M. Stéphane Sautarel. - D'abord, la Commission européenne appelle certains pays, dont la France, à interrompre les dispositifs de soutien mis en place pour faire face à l'inflation énergétique. Notre rapporteur spécial et le rapporteur pour avis s'interrogent sur les niveaux de ces boucliers, qui sont déjà en baisse.

Ensuite, s'agissant du fonds vert, la meilleure solution pour le mettre aux mains des collectivités serait de le transférer dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales », qui rassemble les autres fonds de soutien à l'investissement des collectivités.

Enfin, la Cour des comptes a souligné certaines limites du Facé ; pourrions-nous travailler en 2024 à des solutions pour sortir de la situation de blocage dans laquelle se trouve le fonds depuis 2018 ?

Mme Florence Blatrix Contat. - Je partage les inquiétudes exprimées par Daniel Gremillet concernant la forte réduction des soutiens à la consommation d'énergie, alors que certaines entreprises et collectivités ont signé des contrats pour une durée de trois ans, au moment où les prix étaient très élevés.

De manière plus générale, l'objectif de cette mission est d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050, d'accélérer la préservation et la restauration de la biodiversité et d'assurer notre souveraineté énergétique. Ces priorités doivent faire l'objet d'une planification pluriannuelle reposant sur une méthode et sur une volonté de rupture. Nous ne pouvons pas nous contenter de simples réajustements de la trajectoire et d'actions prises au fil de l'eau. Or je peine à identifier une véritable stratégie.

Par ailleurs, la transition doit être socialement juste et inclusive ; il s'agit d'un préalable pour qu'elle soit acceptée, notamment par les plus modestes. À ce titre, je partage les inquiétudes de Christine Lavarde, notamment sur les effets de MaPrimeRenov', qui restent trop faibles pour les plus modestes.

J'en viens au leasing social, qui pourrait constituer une piste pour permettre aux plus modestes de se déplacer. Je regrette les retards pris en la matière.

La mission compte quelques avancées, mais souffre d'un manque d'ambition. Par conséquent, nous nous abstiendrons.

M. Vincent Delahaye. - Je voudrais interroger Christine Lavarde sur les aides exceptionnelles pour l'énergie et les carburants. Je m'étais opposé à des aides trop générales et plaide toujours pour mieux cibler les dispositifs. Les boucliers comportent-ils un niveau de prix à partir duquel ils cessent d'être utilisés ?

M. Hervé Maurey. - Sur le fonds vert, je me réjouis que les propositions que nous avions faites avec Stéphane Sautarel soient reprises et que nous puissions en affecter une partie à la mobilité.

Par ailleurs, je parlerai plus de frontière douteuse que de fongibilité. À titre d'exemple, dans mon département, il arrive souvent que des crédits du fonds vert soient alloués à des bornes incendie.

L'absence de contrôle du fonds vert par les élus est problématique.

Le dispositif MaPrimeRénov' est complexe et change tout le temps, ce qui crée un problème de lisibilité et de compréhension ; pourrait-on simplifier, clarifier et stabiliser les choses ?

Enfin, s'agissant des véhicules propres, sommes-nous en règle avec les dispositions légales, qui prévoient d'atteindre un certain pourcentage de véhicules propres au sein des administrations de l'État ?

M. Laurent Somon. - Sur le fonds vert, je partage l'idée que les collectivités devraient exercer un contrôle sur l'affectation des crédits. Dans le PLF pour 2023, il était prévu qu'une partie soit affectée pour compenser la perte de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour les collectivités ; est-ce toujours le cas ?

Vous avez précisé qu'il n'y avait pas d'affectation du fonds vert par objet, mais des priorités sont-elles identifiées ? Les crédits du premier fonds vert semblent avoir été essentiellement affectés au logement alors que les budgets actuels devaient être orientés vers la réindustrialisation ; est-ce le cas ?

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Je commencerai par les dispositifs de soutien aux consommateurs, qui demeurent. Cependant, les prix du gaz ayant fortement baissé, ils sont passés sous le seuil au-delà duquel se déclenche la mise en place du bouclier gaz. Le dispositif de soutien est donc tombé de lui-même. Lorsque, en juin dernier, j'avais présenté mon rapport d'information intitulé L'usine à gaz des aides énergie, j'avais fait remarquer qu'il était dommage de ne pas garder dans la loi le principe d'un dispositif, de manière que, si le besoin se présentait de nouveau, le dispositif soit prêt à être activé. En l'état, il sera de nouveau nécessaire de légiférer.

En ce qui concerne l'électricité, les consommateurs bénéficient toujours des tarifs réglementés de vente. Le projet de loi de finances prévoit bien de conserver le bouclier dont l'ampleur sera déterminée par le niveau d'augmentation des prix, que le Gouvernement arrêtera en février, suite à la détermination des tarifs réglementés théoriques par la CRE. Jusqu'à présent, ce bouclier s'est matérialisé dans une limitation de la hausse des prix à 4 % en février 2022, à 15 % en février 2023, puis à 10 % supplémentaires en juillet de la même année alors que les calculs de la CRE faisaient état d'une augmentation de 100 %. Avec le bouclier, l'État compense la différence entre le prix de vente théorique et le prix de vente de réel. Le bouclier s'applique à tous les consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente de l'électricité (TRVE), soit les consommateurs ayant une puissance inférieure à 36 kilovoltampères (kVA) : particuliers, TPE et petites collectivités.

Ceux qui ne sont pas éligibles au TRVE bénéficiaient précédemment de l'amortisseur, qui se déclenchait dès lors que les prix de l'électricité devenaient supérieurs à 180 euros le mégawatt. Seuls les consommateurs ayant signé des contrats de long terme à un tarif très élevé devraient continuer de bénéficier d'un dispositif d'amortisseur. Ainsi, tous les consommateurs d'électricité devraient pouvoir bénéficier d'un dispositif de soutien dès lors qu'ils payent un prix largement supérieur au prix du marché actuel.

Le bouclier électricité prend deux formes. D'abord, il consiste en un « capage » de l'augmentation du prix des fournitures. Ensuite, l'État a réduit à son niveau le plus bas l'accise sur les prix de l'électricité, l'ancienne taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), ce qui représente une perte de recettes pour le budget évaluée à 10 milliards d'euros. Le Gouvernement propose de reconduire cette mesure en 2024. En première partie du budget pour 2024, le rapporteur général a fait adopter par la commission une mesure visant à annuler cette minoration d'accise pour les particuliers. Afin que cette hausse ne s'impute qu'aux déciles les plus élevés, nous ouvrons dans la mission un complément de chèque énergie, qui s'adressera aux ménages modestes et moyens. Grâce à ce dispositif, nous aiderons plus que ce qui était prévu les ménages des premier et deuxième déciles ; nous aiderons à même hauteur les ménages des troisième, quatrième, cinquième et sixième déciles et nous faisons payer plus cher ceux des classes moyennes supérieures et aisées. Il s'agit d'une question de soutenabilité de la trajectoire des finances publiques. Comme l'a exprimé la Commission européenne dans son récent rapport publié dans le cadre du semestre européen, nous ne pouvons pas continuer à vivre sous perfusion.

L'aide au carburant ne repose pas sur un seuil de prix. Le guichet est ouvert et, quand les particuliers répondent aux conditions d'éligibilité et qu'ils en font la demande, ils reçoivent le chèque. L'année dernière, les crédits ont été sous-consommés, ce qui explique peut-être que le Gouvernement ait étendu les déciles éligibles.

J'en viens au fonds vert. Je ne souhaite pas un transfert des crédits vers la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et préférerais supprimer le dispositif. Nous demandons à toutes les collectivités de voter des schémas, comme les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires, qui ne peuvent être mis en place, faute de ressources. Une partie des recettes de la fiscalité écologique, notamment la TICPE et la TICFE, devrait être affectée aux collectivités, qui s'en serviraient pour financer leurs schémas. Chaque année, un amendement allant dans ce sens est déposé au Sénat. À titre d'exemple, les préfets demandent à toutes les communes d'identifier les écoles ayant besoin de rénovation, afin que celle-ci soit financée par le fonds vert. Si les rénovations ont déjà eu lieu, les communes ne sont pas éligibles. Par ailleurs, une semaine a été donnée aux collectivités pour répondre. Il ne s'agit pas d'une bonne méthode. Il faut décentraliser la gestion des crédits. Le fonds vert ne sert qu'à annoncer que de l'argent a été alloué à l'écologie et, sur les 7 milliards d'euros d'AE annoncés dans ce budget, 2,5 milliards d'euros reposent sur le fonds vert.

L'année dernière, les collectivités n'ont pas été compensées à la hauteur de la CVAE collectée en 2022. On s'aperçoit que 500 millions d'euros ont été fléchés par un amendement déposé à l'Assemblée nationale, pour abonder les crédits du fonds vert. Sur cette somme, 350 millions d'euros étaient dédiés à la stratégie nationale biodiversité, qui rebasculent cette année du programme 380 sur le programme 113. Nous avons assisté à un tour de passe-passe.

En ce qui concerne la réindustrialisation, la nouvelle sous-action « Territoires d'industrie » offre un début de réponse, mais celle-ci n'a pas sa place dans le fonds vert, n'ayant rien à voir avec le verdissement des entreprises.

Le ministère de l'écologie est-il vertueux et responsable ? Je leur ai posé la question, leur document de présentation donnant l'impression d'un ministère exemplaire. Cependant, il n'existe malheureusement pas de comparaisons entre les ministères, donc je ne saurais pas dire où il se situe.

Je finirai en évoquant le leasing social de véhicules électriques. Aujourd'hui, les offres de leasing proposées sur le marché prévoient un premier loyer significatif, entre 3 500 et 4 000 euros, et la durée de détention pour laquelle on s'engage est longue, autour de 36 mois au minimum. Dans sa proposition, le Gouvernement annonce un loyer de 100 euros par mois, sans premier loyer particulier, et une durée de détention minimum plus courte. Ces annonces posent un problème d'équilibre économique. Par ailleurs, les ménages les plus modestes seraient intéressés par des véhicules d'occasion, mais le marché de l'occasion du véhicule électrique n'existe pas encore.

M. Claude Raynal, président. - Nous poursuivons avec l'examen des programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture ».

M. Hervé Maurey, rapporteur spécial sur les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». - Nous présentons les crédits des programmes 203 « Infrastructures et services de transports » et 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

D'abord, je rappellerai que l'essentiel des investissements de l'État dans les infrastructures de transport est financé par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France). La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) comporte une programmation des dépenses de l'Agence qui s'achève en 2023. Par ailleurs, son article 3 prévoit que cette programmation devait être actualisée au plus tard en juin 2023, puis tous les cinq ans. Nous regrettons que le Gouvernement n'ait toujours pas respecté cette disposition.

Pourtant, le travail d'analyse qui doit servir de base à cette programmation a bien été mené par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), qui a remis son rapport en février dernier, dans lequel nous retrouvons certaines de nos remarques passées. Dans le scénario de « planification écologique » qu'il privilégie, le Conseil recommande que l'État, via l'AFIT France, dépense 26 milliards d'euros d'ici à 2027 dans les infrastructures de transport. Certes, la Première ministre a annoncé que le scénario central du COI servirait de base à la construction de la nouvelle programmation, mais cet engagement reste purement verbal et ne saurait se substituer à l'adoption d'une trajectoire d'investissement pluriannuelle par le Parlement.

En attendant la formalisation de cette trajectoire, le budget pour 2024 de l'AFIT France prend en compte les enjeux de décarbonation des transports. Les ressources de l'Agence devraient augmenter de 900 millions d'euros et ses dépenses pourraient atteindre un niveau inédit de 4,6 milliards d'euros. Notons à cet égard qu'une sous-consommation des crédits votés a déjà été observée dans le passé. Ces montants sont loin d'être excessifs tant les besoins de la transition écologique des infrastructures de transport sont colossaux.

Nous en parlons depuis deux ans, mais restons toujours scandalisés par l'attitude des sociétés concessionnaires d'autoroute qui, parce qu'elles sont en conflit avec l'État sur l'indexation de la taxe d'aménagement du territoire, refusent de verser la contribution annuelle de 60 millions d'euros qu'elles doivent à l'AFIT France. Des procédures judiciaires sont en cours. La recrudescence actuelle des tensions entre l'État et ces sociétés ne présage pas un règlement rapide du conflit, qui est plutôt relancé par la nouvelle taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance, qui conduira à imposer 4,6 % de la fraction de chiffre d'affaires des sociétés d'autoroute qui excède 120 millions d'euros. Cette taxe devrait leur coûter environ 450 millions d'euros en 2024.

En 2024, la hausse significative des crédits attendue sur le programme 203 s'explique principalement par l'augmentation de la contribution de SNCF Voyageurs au fonds de concours dédié au financement du réseau ferroviaire. Nous reviendrons plus spécifiquement sur ce sujet qui nous interpelle.

Par ailleurs, le réseau routier national non concédé est engagé dans une spirale de dégradation préoccupante. Le directeur général des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) nous a aussi fait part de son inquiétude. Les crédits consacrés ont été rognés par l'inflation et sont désormais insuffisants. Ainsi, un audit de 2018 estimait qu'une somme annuelle d'au moins 1 milliard d'euros d'investissement serait nécessaire pour enrayer la dégradation des chaussées. En tenant compte de l'inflation, ce montant correspond aujourd'hui à 1,2 milliard d'euros. Or en 2024, les crédits devraient tout juste dépasser la barre du milliard d'euros. Dès 2017, le Sénat a alerté les pouvoirs publics sur ces risques de dégradation.

En ce qui concerne les trains de nuit, le Gouvernement n'est pas au rendez-vous de ses engagements. Alors qu'il a multiplié les déclarations, le renouvellement du matériel roulant n'avance pas. Pourtant, la qualité de service reste la condition du succès de ces trains. Nous appelons le Gouvernement à mettre ses actes en cohérence avec ses promesses.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale sur les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

En juillet dernier, la mission d'information de la commission des finances sur le financement des AOM a dressé dans son rapport le constat du besoin de financement résultant de l'indispensable choc d'offre des mobilités du quotidien. En septembre, l'État et Île-de-France Mobilités (IDFM) ont conclu un protocole de financement, que des dispositions fiscales proposées dans ce PLF visent à mettre en oeuvre.

Le Gouvernement ignore une nouvelle fois les AOM locales, métropolitaines et régionales, auxquelles n'est proposée qu'une obscure conférence de financement, assortie d'une demande de rapport. Or un travail sérieux appréhendant l'ensemble des enjeux a été accompli par la mission d'information, qui a notamment formulé des recommandations pour permettre aux AOM de faire face à la hausse prévisionnelle de leurs dépenses.

Le Gouvernement s'obstinant à ne pas vouloir se préoccuper des AOM, notre commission défendra un amendement visant à leur affecter une nouvelle ressource dès 2024, constituée par une fraction des 250 millions d'euros du produit des mises aux enchères des quotas carbone. Cette initiative est salutaire et coche toutes les cases : il s'agit d'une ressource immédiate, pérenne et en ligne avec l'objectif de décarbonation des transports.

Par contraste avec une éventuelle augmentation des taux du versement mobilité, la ressource proposée présente l'avantage de ne pas être réservée aux AOM les mieux dotées en matière de base fiscale ni à celles qui organisent déjà un service de transport collectif régulier. Elle apportera aussi une solution à la mobilité en zone rurale, grande oubliée du système de financement des transports du quotidien.

J'en viens à la question du fret. La Commission européenne a lancé une enquête sur les aides publiques apportées à la société Fret SNCF, notamment sur la reprise de sa dette en 2020 par la filiale de tête du groupe SNCF. La Commission les considérera sans doute comme des aides d'État et, si elle demandait un remboursement de 5 milliards d'euros assorti d'une amende, cela se traduirait par une faillite immédiate de Fret SNCF.

Pour éviter ce scénario, le Gouvernement a choisi la voie de la négociation et proposé un plan de discontinuité, qui est douloureux. Nous sommes préoccupés par l'approche de la Commission, qui paraît incohérente. En effet, le secteur du fret ferroviaire est structurellement déficitaire en Europe et, en favorisant la concurrence sur ce marché, on favorise les filiales d'opérateurs historiques européens. Fret SNCF comptera donc deux sociétés : une dédiée à la maintenance et une autre au transport de marchandises. De plus, elle devra abandonner 23 lignes, qui seront ouvertes à la concurrence et figurent parmi les plus rentables. Fret SNCF se concentrerait donc sur le wagon isolé, qui constitue le secteur le moins rentable.

J'en viens à la régénération et à la modernisation des infrastructures ferroviaires. En mars 2022, dans leur rapport d'information intitulé Situation de la SNCF et ses perspectives, Hervé Maurey et Stéphane Sautarel avaient démontré à quel point les investissements étaient insuffisants. Ils avaient recommandé d'augmenter de 1 milliard d'euros par an les dépenses de régénération, mais aussi de programmer et de financer le déploiement des technologies de modernisation du réseau.

En février dernier, le rapport du COI a dressé le même constat et formulé les mêmes recommandations. La Première ministre a repris à son compte ces propositions et annoncé que, d'ici à 2027, les dépenses augmenteraient de 1,5 milliard d'euros par an.

Malgré ces paroles, des zones d'ombre demeurent. Il reste à décider de la trajectoire de montée en puissance des investissements et de savoir qui va payer. À cette dernière question, l'État répond qu'il doit plutôt s'agir de la SNCF, grâce aux bénéfices dégagés par sa filiale Voyageurs. Ainsi, le Gouvernement a déjà annoncé que 300 millions d'euros supplémentaires seraient prélevés en 2024 sur les résultats de la SNCF. D'après nos informations, le conseil d'administration de la SNCF ajoutera 175 millions d'euros dès 2024.

À moyen terme, cette modalité de financement présente des risques importants. En premier lieu, il n'est pas certain que SNCF Voyageurs reste en situation favorable et qu'elle puisse supporter ce fardeau. En deuxième lieu, cette solution est antinomique avec le contexte d'ouverture à la concurrence. D'une part, SNCF Réseau va accroître son lien de dépendance financier avec SNCF Voyageurs et, d'autre part, SNCF Voyageurs se trouvera lestée d'un lourd handicap face à ses concurrents, en finançant 50 % de la régénération et de la modernisation du réseau. En troisième lieu, cette pression financière contraindra les investissements de SNCF Voyageurs et aura un effet négatif sur le développement de l'offre ferroviaire, ce dont s'inquiète aussi l'Autorité de régulation des transports (ART). En quatrième lieu, ce choix pourrait se traduire par la poursuite de l'inflation des prix des billets. Pour toutes ces raisons, nous continuons à appeler à une nouvelle LOM et nous travaillerons sur le financement des infrastructures de transport en général, afin de trouver des solutions innovantes et en phase avec l'objectif de décarbonation.

Enfin, les crédits du programme 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » devraient rester relativement stables en 2024.

En conclusion, nous vous proposons d'adopter les crédits des programmes 203 et 205 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial sur le programme « Expertise, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». - Le programme 159 regroupe les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.

Après une décennie de baisses substantielles de ses moyens, Météo-France connaît un répit bienvenu depuis l'année dernière. Comme je l'avais exposé dans un rapport d'information en 2021, cet opérateur est de plus en plus sollicité du fait de la multiplication des phénomènes extrêmes. En 2024, ses effectifs doivent progresser de 25 équivalents temps plein travaillés (ETPT).

À l'horizon 2026, Météo-France devra investir dans de nouveaux supercalculateurs pour 350 millions d'euros. Il s'agit d'un enjeu important pour multiplier la surface de calcul, rester dans la course et s'adapter au changement climatique. J'avais indiqué, dans le même rapport, que la direction générale de l'aviation civile (DGAC) devait mieux participer à l'analyse météorologique pour le secteur aéronautique. Je me réjouis, à cet égard, que Météo-France engage une mise à jour de sa comptabilité analytique en 2024, puisque cela permettra de rouvrir les discussions entre les deux organismes. En effet, le financement que fournit la DGAC pour la prévision aéronautique est gelé depuis 2012. La commission des finances a soulevé ce sujet et a été entendue, du moins sur la méthode.

L'année dernière, dans un autre rapport d'information, je vous avais présenté la transformation en cours au sein de l'IGN.

Je vous avais aussi signalé un certain nombre de risques associés à son nouveau modèle économique, dont celui de devenir plus dépendant de grands programmes financés par des commanditaires publics. En l'occurrence, de grands ministères tels que celui de la défense ou de l'agriculture font appel à l'opérateur : soumis eux-mêmes à des contraintes, ils ont parfois tendance à considérer que l'IGN est une variable d'ajustement, d'où un risque de trou d'air que je pressentais. Celui-ci est malheureusement arrivé plus tôt que je ne l'imaginais, et l'IGN risque fort d'être confronté à un problème budgétaire et de se trouver à court de trésorerie dès l'année prochaine.

Je salue ici les efforts que nous avons collectivement fournis lors de l'examen du projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) à l'occasion de la commission mixte paritaire qui s'est tenue hier. Le rapporteur général a relayé cette préoccupation, ce dont je le remercie, et nous avons voté une subvention de 4 millions d'euros en faveur de l'IGN, qui doit réussir sa transformation. Je crois que nous avons ainsi joué un rôle utile pour lui permettre d'achever cette mutation, qui mobilise l'ensemble de ses équipes.

J'en viens au Cerema qui, après un passage à vide, a retrouvé une vraie dynamique. Lors du vote de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS), nous avions validé le passage à une quasi-régie conjointe État-collectivités, qui permet aux collectivités adhérentes de cotiser et de faire appel au Cerema.

Ce nouveau modèle économique a été mis en place cette année : les premiers résultats semblent encourageants et devront être observés à l'avenir. Si ces ressources nouvelles permettent à ces organismes de boucler leur budget, elles ne sont pas sans présenter des risques dans la mesure où la part de la subvention pour charges de service public devient nettement minoritaire.

Du fait de cette vitalité retrouvée et pour la première fois de son histoire, les effectifs du Cerema devraient augmenter de 10 ETP en 2024, ce qui est sans doute insuffisant. J'aurai l'occasion de déposer un amendement à ce sujet, le Cerema souhaitant voir son plafond d'emplois augmenter sans que sa subvention progresse nécessairement, en estimant qu'il pourra couvrir cette hausse par son chiffre d'affaires, au moyen de la conquête de marchés.

J'en viens au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dit « Bacea », c'est-à-dire les dépenses de la DGAC.

Après des années marquées par la pire crise de son histoire et des chutes considérables du trafic, le transport aérien retrouve des couleurs, le trafic ayant presque retrouvé son niveau d'avant-crise. En 2024, les évolutions incluent un dispositif de rattrapage des conséquences de la crise, qui s'est traduite par une augmentation de la dette, dans la mesure où les redevances de navigation aérienne - c'est-à-dire les principales recettes du Bacea - dépasseront leur niveau d'avant-crise.

Le transport aérien se porte mieux, j'en conviens. Cependant, je ne peux pas vous cacher mon scepticisme, voire ma préoccupation, s'agissant des répercussions sur le secteur de la nouvelle taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance, instaurée par l'article 15. Les aéroports sont en effet la victime collatérale de la volonté de l'État de mettre à contribution les sociétés d'autoroutes, puisque le Conseil d'État a estimé que d'autres secteurs devaient être soumis à cette taxe, à hauteur d'au moins 20 %, afin qu'elle soit valide sur le plan juridique.

Avec ce cran d'imposition supplémentaire, plusieurs aéroports seront confrontés à des difficultés, en particulier l'aéroport de Nice. J'ai eu l'occasion d'auditionner le président du directoire de cet aéroport, qui a fait état d'une très faible rentabilité des investissements, nettement en deçà des normes du marché : si cette trajectoire se confirme, il deviendra très malaisé d'investir, y compris dans l'amélioration du service ou dans la sécurité.

Pour de nombreux aéroports, cette taxe sera d'autant plus lourde à supporter que la capacité à la répercuter sur les billets des passagers n'existe pas, ce qui est le cas de Nice, en vertu du principe de modération tarifaire qui s'impose à l'ART, chargée d'agréer les redevances.

Au-delà de ce constat, la taxe aura un effet paradoxal puisqu'elle accordera un avantage concurrentiel aux compagnies low cost, basées dans d'autres aéroports que les quatre plus grands du pays, ce qui viendra encore affaiblir des compagnies françaises qui perdent 1 % de parts de marché chaque année.

La DGAC, pour sa part, se trouve en pleine négociation de son nouveau protocole social. Les grèves étant récurrentes chez les contrôleurs aériens, le Sénat a apporté sa contribution en votant une proposition de loi relative à la prévisibilité de l'organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social et à l'adéquation entre l'ampleur de la grève et la réduction du trafic, proposition votée dans des termes identiques par l'Assemblée nationale la semaine dernière.

Cette loi viendra instaurer une forme de prévisibilité dans les déclarations des contrôleurs aériens grévistes, ce qui devrait permettre de mieux calibrer le service minimum. Ce texte a déclenché une grève en réaction la semaine dernière, mais nous avons accompli un effort afin que le dialogue social soit désormais basé sur la réalité du nombre de grévistes et non sur des prévisions erratiques, en vue d'éviter des annulations de dernière minute.

Ce texte reflète, une fois encore, la volonté d'améliorer le dialogue social, les contrôleurs aériens devant encore fournir des efforts de productivité en contrepartie de mesures indemnitaires. Dénommées « protocoles sociaux », ces pratiques semblaient assez atypiques et n'avaient pas fait leurs preuves - c'est un euphémisme. Si les objectifs de performance de ce nouveau protocole social semblent ambitieux, je reste à ce stade dubitatif, et je proposerai à la commission de s'y pencher de plus près.

En outre, le PLF 2024 marque une impulsion budgétaire supplémentaire en faveur d'un domaine que j'avais évoqué dans un rapport d'information en juin dernier, à savoir les grands investissements de la DGAC pour la modernisation du contrôle aérien. J'avais alors souligné l'obsolescence de certaines infrastructures de base, sujet jusqu'alors masqué par les grands programmes informatiques et numériques, mais qui était porteur de difficultés, voire de risques.

Au sein de la DGAC, la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) doit donc maintenir à niveau et moderniser les infrastructures, d'où la nécessité de lui apporter un soutien. Parmi les investissements nécessaires, citons ceux qui visent à assurer la transition du nouvel outil d'assistance du contrôle aérien (4-Flight) vers un système qui pourra être mutualisé avec des partenaires européens de la DSNA.

Un dernier mot sur la lourde dette du Bacea : après avoir culminé à 2,7 milliards d'euros en 2022, elle a amorcé un repli cette année, mais la décrue sera longue et nous devrons rester vigilants.

Je souhaite que la commission propose au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». En ce qui concerne le programme 159, je suis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. -

Sur le fond, je salue la hausse des crédits alloués au programme 203 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » par rapport à la loi de finances initiale pour 2023. La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable plaide depuis plusieurs années en faveur d'un renforcement des moyens consacrés à la régénération, à la modernisation et au développement de nos infrastructures de transport, en particulier les infrastructures ferroviaires.

Pour autant, ce nouveau PLF n'apporte pas réellement de traduction concrète des annonces du Gouvernement en la matière. Je pense en particulier à la « nouvelle donne ferroviaire » promise par la Première ministre, avec 100 milliards d'euros en faveur du secteur d'ici à 2040 : nous n'en connaissons à ce jour ni les modalités de financement ni la ventilation. En outre, le montant de 1,5 milliard d'euros attendu chaque année d'ici à la fin du quinquennat en matière de régénération et de modernisation ne bénéficie pas d'un plan de financement à ce stade.

Tout laisse à penser - M. Maurey et Mme Carrère-Gée l'ont rappelé dans leur rapport - que la SNCF aura la lourde tâche de trouver les ressources nécessaires. Pire encore, nous n'avons aucune stratégie établie en matière de modernisation du réseau : nous resterons donc les cancres européens sur ce sujet, au même niveau que la Lituanie dans le domaine de la modernisation des infrastructures ferroviaires.

Par ailleurs, j'ai cru comprendre que les crédits du plan d'avenir, des contrats de plan État-région (CPER) et des services express régionaux métropolitains (Serm) ne font qu'un, mais peut-être que mes collègues pourront m'éclairer.

Enfin, vous avez évoqué la nouvelle taxe instituée par l'article 15 du PLF pour 2024, qui permettra à l'Afit France de disposer de nouvelles ressources, ce dont je me félicite en tant qu'administrateur de cet organisme. J'ai cependant pris connaissance d'un amendement du rapporteur général visant à amputer ces ressources potentielles à hauteur de 100 millions d'euros, alors que le modèle économique de l'Afit France est à bout de souffle. Je m'interroge, néanmoins, quant à la solidité juridique du dispositif créé par l'article 15.

En vous remerciant pour votre invitation, je formule le voeu que nos deux commissions travaillent de façon plus étroite et synchronisée pour les prochains PLF, dans l'intérêt exclusif de notre institution.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - S'agissant de la modernisation du réseau ferroviaire, M. Hervé Maurey, qui avait déjà remis un rapport d'information très complet sur le sujet, souligne de nouveau le retard pris dans ce domaine. Je rappelle que la première ligne à grande vitesse (LGV) qui n'a pas été financée en totalité par l'État est la LGV Est, sujet qui fait écho à celui des trains d'équilibre du territoire (TET) : la région Grand Est a en effet proposé récemment, avec d'autres collectivités, de contribuer à hauteur de 50 % aux frais de fonctionnement du rétablissement d'une desserte ferroviaire entre Nancy et Lyon.

Nous devons jouer sur deux tableaux, le second étant celui de la modernisation du réseau routier, aujourd'hui détérioré. Rappelons en effet que certains territoires - c'est le cas de l'Ardèche - sont dépourvus de desserte ferroviaire et que la politique du « tout rail » a ses limites. Si nous souhaitons faire preuve d'équité, nous devrons élaborer, tant pour le réseau routier que pour le réseau ferroviaire, un plan ambitieux sur au moins dix ans, en définissant des priorités et en ne nous bornant pas à parer au plus urgent.

J'ajoute, à propos de la voirie, qu'il faut faire preuve de logique en installant des chaussées drainantes sur les voies dites « vertes » dédiées aux mobilités actives, quitte à ce qu'elles coûtent plus cher et à ce qu'on s'y déplace moins vite. Alors que nous ne sommes déjà pas capables de mettre le bitume approprié sur les voies réservées aux automobilistes, utiliser un fond vert sur les voies dites « vertes » mais bitumées me semble davantage traduire l'adage « tout et son contraire » que la formule « en même temps ».

M. Marc Laménie. - Je remercie l'ensemble des rapporteurs pour leur travail. Le rapport d'information d'Hervé Maurey et de Stéphane Sautarel dédié aux infrastructures ferroviaires a été cité : quelle suite a été donnée aux recommandations issues de cet important travail ?

Concernant la SNCF, je peine à m'y retrouver avec SNCF Réseau, SNCF Voyageurs, Gare & Connexions, etc. Combien d'ETP l'Afit France compte-t-elle ? Ne fait-elle pas doublon avec d'autres organismes ? N'est-il pas envisageable de simplifier la répartition des missions ?

Par ailleurs, existe-t-il un engagement pour les TET ?

J'aimerais aussi obtenir des précisions sur la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance : en quoi consiste-t-elle ? Abondera-t-elle les ressources de l'Afit France ? Comment s'articule-t-elle avec le plan d'investissements de 100 milliards d'euros en faveur du ferroviaire ?

Enfin, sur la partie fluviale, qu'en est-il de la situation de Voies navigables de France (VNF), important opérateur de l'État ? Hormis le tourisme fluvial, plus aucune péniche ne circule dans les Ardennes, qu'il s'agisse de la Meuse ou des canaux.

M. Michel Canévet. - À quoi l'Afit France sert-elle ? Ne serait-il pas temps de la supprimer dans une logique de rationalisation ?

Pour ce qui concerne la SNCF, les opérations de désendettement permettent-elles à l'entreprise de retrouver une meilleure santé financière et de dégager des excédents permettant d'améliorer le réseau, objectif absolument nécessaire ? Cette tendance à renouer avec les excédents pourra-t-elle durer et permettre la remise en état du réseau comme des gares ? Celles-ci ont été affectées par de nombreux dysfonctionnements et doivent faire l'objet d'investissements afin de garantir la fiabilité du réseau.

S'agissant du transport aérien, les liaisons d'aménagement du territoire, aussi nécessaires qu'utiles, pourront-elles être maintenues à l'avenir ? 

M. Bruno Belin. - Qu'est-il prévu dans le PLF 2024 pour soutenir les collectivités locales face au défi que représente l'entretien des ouvrages d'art et des ponts, notamment des ponts orphelins ?

M. Jean-Raymond Hugonet. - Les sujets abordés par les rapporteurs touchent de près mon département, l'Essonne. Nous avons tous en mémoire la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge le 12 juillet 2013, qui n'a fait que démontrer l'absolue nécessité de moderniser le réseau.

De la même manière, la présence de l'aéroport d'Orly, à cheval sur les départements de l'Essonne et du Val-de-Marne, m'amène à souligner le caractère incontournable de la modernisation des instruments d'approche.

Mme Florence Blatrix Contat. - Les rapporteurs ont-ils eu, au cours des auditions, des indications au sujet d'une éventuelle loi de programmation qui permettrait de mieux définir les modalités de mise en oeuvre du plan ferroviaire doté de 100 milliards d'euros ?

Je partage également leurs interrogations et leurs inquiétudes quant au financement par SNCF Voyageurs de la régénération du réseau. Sans ouvrir ici le débat sur la gratuité des transports, il faudrait éviter une augmentation du prix des billets telle qu'elle découragerait les usagers d'emprunter les transports collectifs.

Par ailleurs, je me réjouis de votre position relative à l'enquête de la Commission européenne et à la nécessité d'éviter la mise en concurrence du fret, déjà en grande difficulté.

S'agissant du versement mobilité, pourrait-on envisager un déplafonnement ? Certes, la question des marges des entreprises est cruciale, mais nous pourrions sans doute aller un peu plus loin.

Je déplore, enfin, le manque de vision de l'État : alors que la région Auvergne-Rhône-Alpes est concernée au premier chef par le projet de liaison Lyon-Turin - une infrastructure absolument essentielle -, le Gouvernement n'avance pas et ne nous donne aucune visibilité. La question doit pourtant être tranchée très rapidement : il est exclu de reporter ce projet, qui date déjà de plus de trente ans et qui est essentiel, tant pour nos territoires que pour le fret et la décarbonation des transports.

M. Pascal Savoldelli. - Malgré l'excellent travail du rapporteur spécial sur le contrôle et l'exploitation aériens, le passage sur la reprise des négociations avec les partenaires sociaux n'impacte guère, me semble-t-il, les finances publiques.

Ces remarques n'ont pas lieu d'être dans un rapport financier, d'autant que le rapporteur spécial a exprimé une certaine suspicion par rapport à la logique du « donnant-donnant » et ouvre un débat par trop conflictuel par rapport au droit du travail.

Par ailleurs, la fragilité du modèle économique de l'IGN suscite des inquiétudes. Le rapport se félicite de l'augmentation de la part que prend l'État dans le nouveau modèle de l'Institut, mais celui-ci a transféré des missions de service public au secteur privé.

Où va l'argent public ? Pour bien connaître le périmètre de l'activité de l'IGN, dont le siège se trouve à Saint-Mandé, dans mon département, je nourris de sérieux doutes à l'égard de ce nouveau modèle : plus on accentuera la délégation au privé des pans entiers de l'activité, plus on risque de s'orienter, à terme, vers la privatisation de l'organisme.

M. Stéphane Sautarel. - Je remercie à mon tour les rapporteurs pour leur travail, tout en regrettant la continuité de certaines observations et de limites. En particulier, alors que les constats au sujet de la modernisation et de la régénération du réseau ferroviaire sont unanimes et que les annonces ont été faites, les crédits ne sont toujours pas là, ce qui me semble incroyable dans le cadre de la gestion d'une politique publique majeure. Qui plus est, l'appel à SNCF Voyageurs et non pas à SNCF Réseau est une aberration totale qui pose question une nouvelle fois quant au modèle ferroviaire français.

Concernant les AOM, je me félicite de l'initiative du Sénat et de l'affectation de quotas carbone, qui garantissent un droit de suite à nos observations sur les besoins de financement des AOM, qu'il s'agisse d'Île-de-France Mobilités ou des AOM de province. Sans cette initiative sénatoriale, il me semble que le Gouvernement ne nous aurait apporté aucune réponse dans ce PLF pour 2024 : je demande aux rapporteurs de confirmer ce point.

M. Jean-Baptiste Blanc. - L'augmentation des crédits et des ETP du Cerema serait-elle liée, par hasard, à l'objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN) ? Si oui, comment appréhende-t-il cette nouvelle mission ? Sur le plan de la gouvernance enfin, les élus sont-ils associés à la démarche ? L'impression a pu être donnée que l'intelligence artificielle faisait son entrée au Cerema à des fins de surveillance du sol français.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale. - L'Afit France compte un nombre très limité d'emplois, inférieur à une dizaine. L'objectif de cet établissement consiste à avoir une visibilité de long terme sur le financement des infrastructures, ce qui est absolument nécessaire compte tenu des enjeux de la durée des projets.

Il s'agit également d'être en mesure de flécher les ressources via des fonds de concours, ce qui présente un intérêt budgétaire certain : nous savons bien, pour l'avoir tous expérimenté, que des dépenses noyées dans le budget de l'État ont tendance à se diluer, conduisant à ce que les ressources ne soient pas au rendez-vous pour mener à bien les projets.

Aucun élément nouveau n'est, à ma connaissance, à signaler sur les TET cette année, l'ouverture de nouvelles lignes et le renouvellement du matériel roulant devant se poursuivre, avec 3,5 milliards d'euros dédiés à l'acquisition de rames neuves d'ici à 2025.

Madame Blatrix Contat, je partage votre interrogation sur la loi de programmation : le ministre des transports semble y être favorable et cherche, si l'on peut dire, des voies de passage au Parlement. Aucune annonce n'a été faite en dehors des voeux du ministre, alors même qu'une échéance avait été prévue dans le cadre de la loi d'orientation des mobilités.

Concernant le versement mobilité, il est effectivement possible d'aller plus loin, comme c'est le cas en Île-de-France. Pour le reste des AOM en revanche, la proposition du rapporteur général d'affecter 250 millions d'euros provenant du produit des enchères des quotas carbone va déjà dans la bonne direction, car elle présente l'avantage de ne pas favoriser les AOM disposant des bases fiscales les plus élevées.

Au sujet de VNF, son directeur général nous a confirmé que la période de mise sous tension que l'organisme a traversée, avec des objectifs de réduction d'effectifs de 80 personnes à 100 personnes par an qu'il a lui-même qualifiés de « mordants », cède la place à un contrat d'objectifs et de performance révisé, incluant une stabilisation des effectifs sur trois ans. Sur le plan financier, 300 millions d'euros par an sont également garantis sur la même période. Les perspectives de VNF sont donc bien meilleures pour 2024.

M. Hervé Maurey, rapporteur spécial. - Monsieur Laménie, notre rapport a donné lieu à deux mesures concrètes : d'une part, le fait que les crédits du fonds vert puissent aller davantage vers des actions de mobilité, ce qui n'était pas le cas précédemment ; d'autre part, les 250 millions d'euros issus des ventes de quotas carbone font suite à notre travail. L'ensemble de nos recommandations n'a évidemment pas été retenu, mais l'important est bien d'amorcer des mesures et dispositifs, ce qui est positif compte tenu de l'équilibre général des finances.

Par ailleurs, monsieur Canévet, le Gouvernement affiche sa volonté de faire reposer l'essentiel du financement prévisionnel de la régénération du réseau sur SNCF Mobilités, ce qui ne nous paraît pas très sain. Un prélèvement sur les résultats de cette entité est prévu cette année et atteindrait désormais plus de 1 milliard d'euros, en augmentation de près de 500 millions d'euros par rapport à ce qui était prévu initialement.

Ce mode de financement est préoccupant : comme l'ont exprimé des représentants de la SNCF, cet argent n'est par définition pas consacré au renouvellement du matériel, notamment dans les trains de nuit, ni à la maîtrise du prix du billet, qui est pourtant un aspect essentiel dans la transition écologique et dans le choix de modes de transport alternatifs à l'automobile. Comme nous l'avons déjà souligné par le passé, le mode de financement global du système ferroviaire mériterait donc d'être revu.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. - Monsieur Canévet, ne cachons pas le fait que les perspectives sont plutôt sombres pour les lignes d'aménagement du territoire, dont le déficit naturel est comblé par l'État et par les collectivités - principalement les régions, mais aussi parfois les départements - afin de les maintenir.

Les difficultés de ces lignes sont réelles, avec une augmentation des coûts liée à une baisse du trafic et de la fréquentation, notamment sur les clientèles d'entreprise. Très fortement dégradé, le modèle des lignes d'aménagement du territoire appellera une mobilisation de l'État aux côtés des collectivités, des choix n'étant malheureusement pas à exclure. Ces lignes remplissent pourtant, dans le cas des départements excentrés, une fonction majeure, et le train ne peut pas toujours s'y substituer.

Monsieur Belin, 20 millions d'euros viennent d'être ajoutés via un amendement aux 130 millions d'euros dédiés à l'entretien des ponts, au titre du projet de loi de finances de fin de gestion. Il s'agit d'un programme important pour le Cerema, particulièrement suivi par son directeur général.

Par ailleurs, je tiens à rassurer monsieur Savoldelli, des crédits sont bien prévus pour les protocoles sociaux de la DGAC. Le précédent protocole, sur la période 2016-2019, a coûté 50 millions d'euros au budget annexe, soit un montant non négligeable. Regardons les réalités de ce secteur en face : les métiers liés au contrôle aérien, qu'il s'agisse des contrôleurs eux-mêmes ou des métiers support tels que les électroniciens, sont difficiles, puisqu'il est question d'une mission régalienne de sécurité, qui implique une mobilisation 24 heures sur 24 et une responsabilité considérable.

Pour autant, nous pouvons faire des comparaisons avec nos voisins européens. Certes, les contrôleurs sont moins bien payés qu'ailleurs, mais ils sont également moins productifs, la France étant de plus championne d'Europe en termes de retards et de nombre de jours de grève. Je maintiens que la loi récemment votée vise à améliorer la situation, en respectant à la fois les contrôleurs et le dialogue social.

Lesdits contrôleurs y trouvent aussi une contrepartie avec une meilleure prévisibilité, puisqu'ils ne seront plus réquisitionnés abusivement comme ils l'étaient depuis des années : le service minimum sera ainsi revu en abaissant les niveaux de réquisition. De plus, les contrôleurs seront prévenus bien plus tôt de leur réquisition, à savoir l'avant-veille et non plus quelques heures avant, ce qui me semble être un point d'équilibre.

Cela étant dit, les problématiques d'organisation du transport aérien et d'adaptation au trafic restent posées et doivent être traitées par le dialogue social. Les protocoles sociaux me semblent mériter un examen : je n'ai pas connaissance, dans les autres services de l'État, d'un dispositif en vertu duquel une réorganisation entraîne le versement de primes.

Les moyens de parvenir à un équilibre et à une forme de « donnant-donnant » doivent être identifiés pour moderniser le secteur, sous peine de rencontrer des difficultés à l'avenir. D'autres pays européens ont ainsi décidé de ne pas conserver le contrôle aérien dans le giron public, je souhaite au contraire qu'il y demeure, mais en traitant les problèmes par le dialogue, je pense que les contrôleurs y sont particulièrement attentifs.

Concernant l'IGN, ne nous méprenons pas : je ne me félicite pas du changement de modèle, j'estime plutôt qu'il s'agissait d'une nécessité alors que l'IGN traversait une crise existentielle et que certains plaidaient pour sa disparition. Sa refondation passe par un travail d'investissements visant à lui redonner tout son rôle d'opérateur central de l'État en matière d'information géographique.

Le trou d'activité pressenti pour 2024 se confirme. Nous ne l'avons pas complètement comblé, mais la subvention de 4 millions d'euros votée hier en commission mixte paritaire reflète le soutien du Sénat à l'établissement. S'il faudra suivre la manière dont ce nouveau modèle se déploie, les ministères ne devront pas, pour leur part, lui confier d'autres missions sans actualiser les coûts. Je crois que l'IGN est engagé sur la bonne voie et doit encore affronter une épreuve de vérité budgétaire et financière. Nous avons en tout état de cause besoin d'un opérateur public dans cette matière centrale.

M. Jean-Baptiste Blanc a évoqué, à propos du Cerema, un « effet ZAN » dans le surcroît d'activité de l'organisme. Je ne dispose d'aucun élément en ce sens, mais souligne que le directeur général a mené un important travail de remobilisation des équipes. Le Cerema bénéficie d'une confiance et d'une attractivité nouvelles, y compris auprès des collectivités qui y font leur entrée, dans le cadre du schéma de régie quasi conjointe que nous avons adopté ici même.

En termes de gouvernance, les élus prennent toute leur place au conseil de surveillance et au conseil d'administration du Cerema, dans un nouvel équilibre. Ce type d'établissements a souvent fait office de variable d'ajustement pour l'administration centrale, qui baissait davantage leurs crédits que la diminution qu'elle s'appliquait à elle-même. Nous avons essayé de stabiliser ces établissements, qui sont autant d'outils de l'État utiles au service des collectivités et de la mobilité.

Enfin, M. Hugonet a entièrement raison de plaider en faveur d'une modernisation des systèmes d'approche en région parisienne et autour d'Orly. Des annonces ont été faites au sujet de la descente continue face à l'ouest, enjeu majeur pour les riverains et pour les collectivités voisines puisqu'il s'agit de mieux lutter contre les nuisances sonores aéroportuaires. Le sujet auquel sont confrontés le ministère des transports et la DGAC reste complexe : si l'on choisit de resserrer les faisceaux, le nombre de territoires touchés sera moindre, mais au risque de faire des perdants.

Article 35

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-26 (FINC.1) vise à « réaffecter » la suppression de la réduction de la TICFE en première partie par la création de chèques énergie exceptionnels pour les déciles 1 à 6. Si le montant est à première vue considérable, le dispositif permet, dans sa globalité, de générer 1 milliard d'euros d'économies.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée, rapporteure spéciale. - Le sixième décile correspond à des revenus annuels d'environ 27 000 euros, me semble-t-il.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Il s'agit bien d'une mesure de redistribution ciblant les classes moyennes et populaires. J'ajoute que seuls 25 % des crédits ouverts pour le chèque fioul et le chèque bois ont été consommés.

L'amendement II-26 (FINC.1) est adopté.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-27 (FINC.2) vise à rehausser le montant du fonds Barnier de 30 millions d'euros afin d'engager les travaux permettant de prévenir les futurs épisodes d'inondations.

L'amendement II-27 (FINC.2) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 50

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article acte la réforme de MaPrimeRénov', notamment du renforcement des contrôles et de la lutte contre la fraude.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 50.

Article 50 bis (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Emporté par son élan visant à étendre MaPrimeRénov' à Saint-Pierre-et-Miquelon, le Gouvernement a retenu deux articles très similaires dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale : je vous propose de ne conserver que l'article 50 bis, mieux rédigé.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 50 bis.

Article 50 ter (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-28 (FINC.3) a pour objet la suppression de cet article, quasi identique à l'article 50 bis.

L'amendement II-28 (FINC.3) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat de supprimer l'article 50 ter.

Article 51

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article vise à prolonger le congé de reconversion mis en place dans le cadre de la fermeture des centrales à charbon.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 51.

Article 52

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-29 (FINC.4) vise à supprimer les alinéas relatifs à la révision de la répartition du complément de prix Arenh : en effet, adopter une telle modification au débotté pourrait avoir des effets sur le fonctionnement des marchés qui ne seraient pas nécessairement au bénéfice des consommateurs. Ce point est corroboré par l'analyse de la CRE.

L'amendement II-29 (FINC.4) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 52, sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 52 bis (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article vise à sécuriser le dispositif de leasing social en l'inscrivant dans la loi.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 bis.

Article 52 ter (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article a pour objet d'étendre le fonds Barnier à certaines mesures prises par les agences de la zone des 50 pas géométriques située en outre-mer, c'est-à-dire la zone littorale.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 ter.

Article 52 quater (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'amendement II-30 (FINC.5) vise à garantir que le Gouvernement présente au Parlement un bilan de l'expérimentation « Mieux reconstruire après inondation » (Mirapi) à la date à laquelle le rapport d'évaluation aurait dû être initialement rendu, c'est-à-dire en mars 2024.

L'amendement II-30 (FINC.5) est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 52 quater, sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 52 quinquies (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - L'article vise, sans la nommer, uniquement la centrale biomasse de Gardanne, qui bénéficiait d'un dispositif d'obligation d'achat. Après avoir choisi de le suspendre au regard de l'évolution des prix de l'électricité afin de profiter de la rente fournie par le marché, ce site souhaite de nouveau en bénéficier.

Le Gouvernement lui donne ce droit et vient modifier les clauses du contrat initial en prévoyant désormais une indexation des coûts sur l'inflation. Si ce choix me semble scandaleux, notamment d'un point de vue environnemental, il existe un enjeu social autour des 90 emplois de cette centrale, dénuée de toute pertinence écologique. Avis favorable, mais uniquement sur le volet social.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 quinquies.

Article 52 sexies (nouveau)

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Cet article vise à contrecarrer la décision du Conseil constitutionnel du mois d'octobre dernier et à inscrire dans la loi le déplafonnement intégral et sans condition des contrats de complément de rémunération.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52 sexies.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ».

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Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses décisions.

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