Rapport n° 507 (2021-2022) de Mme Michelle MEUNIER , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 16 février 2022
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L'ESSENTIEL
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EXAMEN DES ARTICLES
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EXAMEN EN COMMISSION
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RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE
L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS, ALINÉA 3,
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES
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LA LOI EN CONSTRUCTION
N° 507
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022
Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 février 2022
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la
proposition de loi
visant à
maintenir
le
versement
de l'
allocation
de
soutien familial
en cas de
nouvelle relation amoureuse
du
parent bénéficiaire
,
Par Mme Michelle MEUNIER,
Sénatrice
(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche , présidente ; Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge , vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Brigitte Devésa, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, M. Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Daphné Ract-Madoux, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Mélanie Vogel .
Voir les numéros :
Sénat : |
64 et 508 (2021-2022) |
L'ESSENTIEL
Réunie le mercredi 16 février 2022 sous la présidence de Catherine Deroche (Les Républicains, Maine-et-Loire), présidente, la commission des affaires sociales a examiné le rapport de Mme Michelle Meunier sur la proposition de loi visant à maintenir le versement de l'allocation de soutien familial en cas de nouvelle relation amoureuse du parent bénéficiaire . La commission n'a pas adopté la proposition de loi.
L'allocation de soutien familial est octroyée pour chaque enfant privé du soutien d'au moins l'un de ses parents. Versée à 815 000 foyers, elle représente une dépense de 1,79 milliard d'euros en 2020. Cette prestation est accordée au parent ayant la charge de l'enfant sous réserve de son isolement ; lorsque le parent titulaire du droit à l'ASF se remet en couple, il perd le bénéfice de la prestation. La proposition de loi entend supprimer cette condition d'isolement.
En 2020, deux millions de familles, soit 24,7 % de l'ensemble des familles, étaient monoparentales contre 953 000 en 1990 (12 % des familles). L'augmentation de la proportion de familles monoparentales et de familles recomposées constitue un fait social auquel les dispositifs socio-fiscaux ont dû s'adapter. De nombreuses prestations prennent dorénavant en considération les parents isolés en les ciblant spécifiquement ou en prévoyant une majoration des montants accordés ou des plafonds de ressources.
L'article 1 er de la proposition de loi propose de revenir sur la condition d'isolement de l'allocation de soutien familial (ASF) afin de permettre à des parents en famille recomposée de recevoir cette allocation aujourd'hui destinée aux seules familles monoparentales. L'article 2 de la proposition de loi vise à demander au Gouvernement un rapport sur la diversité des situations familiales et leur prise en compte par la fiscalité.
I. L'ALLOCATION DE SOUTIEN FAMILIAL : UNE PRESTATION COMPLEXE AU SOUTIEN DES FAMILLES MONOPARENTALES LES PLUS PRÉCAIRES
A. DES CONDITIONS D'OCTROI COMPLEXES
La loi du 22 décembre 1984 a remplacé l'allocation orphelin par une allocation de soutien familial (ASF) dont l'objectif est d'aider à l'éducation d'enfants privés du soutien d'au moins un des parents . Le montant de l'allocation varie selon qu'un seul des parents est défaillant - ASF à taux partiel de 116 € - ou si les deux sont absents - ASF à taux plein de 155 € .
L'allocation est versée, sans condition de ressources, à la personne ayant la charge effective et permanente de l'enfant répondant à une de ces conditions :
- l'enfant est orphelin d'au moins l'un de ses parents ;
- la filiation de l'enfant n'est pas établie à l'égard d'au moins l'un de ses parents ;
- au moins un des parents ne verse pas ou est reconnu comme étant hors d'état de verser la pension alimentaire (parent insolvable). Dans le cas où le parent se soustrait, même partiellement, à ses obligations, l'ASF est versée à titre d'avance au parent créancier , à charge pour la caisse d'allocations familiales (CAF) ou la mutuelle sociale agricole (MSA) de recouvrer la pension alimentaire auprès du parent débiteur ( ASF recouvrable ) ;
- pour l'enfant dont la pension alimentaire est inférieure au montant de l'ASF à taux partiel. Dans ce cas, une ASF différentielle permet de compléter la pension alimentaire.
Source : Commission des affaires sociales, d'après les données transmises par la Cnaf
En raison de la complexité des conditions d'octroi, l'allocation de soutien familial est concernée par un important phénomène de non-recours par manque de connaissance de la prestation auquel s'ajoute un non-recours volontaire . En effet, l'ASF recouvrable est une prestation subsidiaire à la pension alimentaire et au-delà de quatre mois de versement, les bénéficiaires doivent engager une action en justice ou à l'amiable en vue de la fixation d'une pension alimentaire. Or, cette condition peut dissuader certains parents éligibles qui préfèrent ne pas provoquer de litige avec leur ancien conjoint. Près d'un parent isolé sur deux serait éligible à l'ASF mais ne la réclamerait pas .
B. DES BÉNÉFICIAIRES PARMI LES PLUS VULNÉRABLES AU SEIN DES FAMILLES MONOPARENTALES
La situation de monoparentalité concerne à 82 % des femmes et est souvent associée à des facteurs importants de précarité comme un niveau moyen de diplôme plus bas qu'au sein des familles traditionnelles ou un taux d'emploi plus faible. Il en résulte une surexposition à la pauvreté de ces familles.
Toutefois, l'ASF cible en particulier des foyers parmi les plus fragiles au sein des familles monoparentales puisqu'elle est octroyée pour des familles dont le deuxième parent est défaillant à apporter son soutien à l'éducation de son enfant. Cette situation se retrouve davantage chez les familles monoparentales aux ressources les plus modestes ; elles sont donc plus nombreuses à percevoir l'ASF qu'une pension alimentaire. Si 40 % des familles monoparentales appartiennent aux deux déciles les plus bas de la distribution de revenus, cette proportion s'élève à 70 % pour les bénéficiaires de l'allocation de soutien familial (voir graphique ci-dessous).
Source : Direction de la sécurité sociale
II. UNE CONDITION D'ISOLEMENT SOURCE D'INCOHÉRENCES AUX EFFETS NUISIBLES
A. UNE CONDITION D'ISOLEMENT INCOHÉRENTE
Hors le cas où l'enfant, privé du soutien de ses deux parents, est confié à un tiers, l'ASF est une prestation versée sous condition d'isolement du parent bénéficiaire. L'article L. 523-2 du code de la sécurité sociale dispose que l'ASF cesse d'être versée « lorsque le père ou la mère titulaire du droit à l'allocation de soutien familial se marie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en concubinage ».
La rapporteure considère cette situation comme paradoxale dans la mesure où la pension alimentaire continue d'être exigée du parent débiteur solvable lorsque le parent créancier se remet en couple. Les parents bénéficiaires de l'ASF, parmi les plus précaires des familles monoparentales, perdent donc une ressource alors que leur enfant reste privé d'un second soutien parental. La suspension du versement de l'ASF repose sur le postulat que le nouveau conjoint contribue à l'entretien de l'enfant. La rapporteure constate toutefois que cette contribution est loin d'être systématique et qu'elle ne repose sur aucune obligation juridique
La perte de l'ASF n'est en tout état de cause pas souhaitable en ce qu'elle créée une relation de dépendance de la mère envers son nouveau conjoint pour l'éducation de son enfant . Le maintien de l'ASF en cas de remise en couple favoriserait au contraire l'autonomie des mères et oeuvrerait pour une réelle égalité entre les femmes et les hommes.
La loi du 4 août 2014 permettait de maintenir le versement de l'ASF recouvrable pendant une période de six mois après la remise en couple dans le cadre de l'expérimentation dans vingt départements de la garantie contre les impayés de pension alimentaire (Gipa) . Lorsque le mécanisme de la Gipa fut généralisé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, ce maintien du versement ne fut toutefois pas repris.
B. DES EFFETS DE TRAPPES OU DE FRAUDES À L'ISOLEMENT
La rapporteure considère que la condition d'isolement, qui s'applique également à d'autres dispositifs socio-fiscaux en faveur des familles monoparentales, découragent certains parents isolés à envisager une vie commune avec un nouveau conjoint . Les auditions ont confirmé que des mères isolées renoncent à se remettre en couple par craintes des difficultés matérielles qui résulteraient de la perte de l'ASF . Des fraudes à l'isolement sont également constatées par les CAF. En 2019, la fraude à l'isolement concernait ainsi 18 % des fraudes constatées par les CAF toutes prestations confondues.
Or, la monoparentalité est un facteur important de précarité. En permettant la réalisation d'économies d'échelle sur les charges de la vie courante ou en encourageant la reprise d'activité professionnelle grâce à une conciliation facilitée entre vie familiale et vie professionnelle, la remise en couple permet à une mère isolée d'espérer une élévation de son niveau de vie. Le taux de pauvreté des enfants présent dans une famille recomposée (16,6 %) reste bien en-deçà de celui des enfants élevés dans une famille monoparentale. Il convient donc de ne pas dissuader les parents isolés de se mettre en couple.
C. MAINTENIR LE VERSEMENT DE L'ASF DANS L'INTÉRÊT SUPÉRIEUR DES ENFANTS
La restriction du bénéfice de l'ASF aux seuls parents isolés ne se justifie pas du point de vue de l'intérêt supérieur des enfants . Si ces derniers demeurent privés du soutien d'un de leur parent, le statut marital du parent avec lequel ils vivent ne devrait pas conditionner le versement de l'allocation. Au contraire, le bénéfice de l'ASF, laquelle est une prestation octroyée dès le premier enfant à la différence des allocations familiales, permet de lutter efficacement contre la pauvreté des familles. La rapporteure est donc favorable à l'adoption de l'article 1 er visant à supprimer la condition d'isolement du parent pour le versement de l'ASF.
Estimant que l'ASF vise à apporter un soutien
ciblé sur les familles monoparentales en raison de la situation
particulièrement précaire dans laquelle elles se trouvent, la
commission des affaires sociales n'a pas adopté la
proposition de loi.
En conséquence, l'examen en
séance publique portera sur le texte déposé.
EXAMEN DES ARTICLES
Article premier
Maintien
du versement de l'allocation de soutien familial en cas de mise en couple du
parent
Cet article propose de supprimer la condition d'isolement s'appliquant au parent titulaire du droit à l'allocation de soutien familial ouvert au titre d'un enfant privé du soutien du second parent.
La commission n'a pas adopté cet article.
I - Le dispositif proposé
A. L'allocation de soutien familial : une allocation en faveur des enfants privés du soutien d'un parent versée sous condition d'isolement
La loi du 22 décembre 1984 1 ( * ) a remplacé l'allocation orphelin 2 ( * ) par une allocation de soutien familial (ASF) dont l'objectif est d'aider à l'éducation d'enfants privés du soutien d'au moins un des parents . Les conditions d'attribution ont donc été étendues pour englober de nouvelles situations. L'article L. 523-2 du code de la sécurité sociale indique que la prestation est due aux personnes assumant la charge effective et permanente de l'enfant ouvrant droit à l'ASF.
Son montant forfaitaire pour chaque enfant est déterminé en proportion de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) et diffère selon que l'enfant est privé de l'aide d'un de ses parents - ASF à taux partiel d'un montant actualisé au 1 er avril 2021 de 116,69 euros 3 ( * ) ou des deux - ASF à taux plein de 155,55 euros 4 ( * ) . L'ASF a connu une revalorisation de 25 % par la LFSS pour 2015 dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale lancé en 2013.
Les dépenses d'ASF représentaient 1,79 milliard d'euros en 2020 soit 6 % des dépenses de prestations légales de la branche famille. La prestation était versée à 815 000 bénéficiaires (+ 2,5 % par rapport à 2019).
1. L'absence de contribution d'au moins un parent à l'éducation et à l'entretien de l'enfant
L'article L. 523-1 du code de la sécurité social prévoit les conditions d'ouverture de l'ASF. L'allocation est ainsi versée :
- pour l'enfant orphelin d'au moins l'un de ses parents ;
- pour l'enfant dont la filiation n'est pas légalement établie à l'égard d'au moins l'un de ses parents ;
- pour l'enfant dont au moins un des parents se soustrait à son obligation de verser la pension alimentaire ou est reconnu comme étant hors d'état de verser cette créance 5 ( * ) .
Dans le cas où le parent se soustrait, même partiellement, à ses obligations, l'ASF n'est pas une allocation en soi mais est versée à titre d'avance au parent créancier, à charge pour l'organisme débiteur des prestations familiales (ODPF) de recouvrer la pension alimentaire auprès du parent débiteur ( ASF recouvrable ). Dans le cas où la pension alimentaire recouvrée excède le montant de l'ASF, ce surplus est reversé au parent créancier. La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2016 6 ( * ) et la LFSS pour 2017 ont par ailleurs renforcé la garantie des impayés des pensions alimentaires (Gipa) en prévoyant :
- l'allongement de la période au titre de laquelle l'ODPF peut recouvrer les pensions alimentaires impayées . Lorsque l'organisme agit pour le compte du parent créancier, la procédure de paiement direct , qui permet de procéder à une retenue sur le salaire du parent débiteur, peut s'appliquer pour récupérer les sommes dues au titre des vingt-quatre derniers mois 7 ( * ) .
- l'aide au recouvrement des créances peut être menée par les ODPF sans condition d'échec préalable des voies privées d'exécution.
En outre, hors les cas d'orphelins ou de filiations non reconnues, l'ASF n'est accordée que pour une période de quatre mois 8 ( * ) en l'absence de fixation d'une pension alimentaire par la justice ou à l'amiable selon les différents titres exécutoires (voir l'encadré ci-dessous). La prolongation du versement est alors conditionnée à la reconnaissance par l'ODPF du parent débiteur comme étant hors d'état de faire face à la créance alimentaire ou, si le débiteur n'est pas reconnu comme tel à l'issue du contrôle, à l'engagement d'une action en justice par le bénéficiaire.
L'ASF est toutefois accordée de plein droit aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) majoré pour parent isolé 9 ( * ) si l'un des enfants à charge remplit les conditions d'ouverture de l'ASF. Il convient de noter que l'ASF est elle-même prise en compte comme ressource pour le calcul du montant du RSA 10 ( * ) dans la limite de 80 % 11 ( * ) .
La fixation d'une pension alimentaire et la déclaration comme hors d'état
L'article 373-2-2 du code civil définit les titres exécutoires pouvant fixer les modalités de la contribution à l'entretien et à l'éducation (CEEE) , laquelle prend la forme d'une pension alimentaire, versée au parent ou au tiers à qui l'enfant a été confié. Ces titres exécutoires sont :
1°une décision judiciaire ;
2° une convention établie par les deux parents et homologuée par le juge ;
3°une convention de divorce ou de séparation de corps par consentement mutuel contresignée par leurs avocats et déposées au rang des minutes d'un notaire ;
4°un acte reçu en la forme authentique par un notaire ;
5°une convention à laquelle l'organisme débiteur des prestations familiales a donné force exécutoire - depuis le 1 er avril 2018.
En outre, la LFSS pour 2022 a introduit à compter du 1 er mars 2022, un nouvel acte « constatant un accord issu d'une médiation, d'une conciliation ou d'une procédure participative, lorsqu'ils sont contresignés par les avocats de chacune des parties et revêtus de la formule exécutoire par le greffe de la juridiction compétente » 12 ( * ) .
L'article D. 523-2 du code de la sécurité sociale, introduit par le décret n° 2016-842 du 24 juin 2016, énumère les situations dans lesquelles le débiteur de la CEEE est considéré comme étant hors d'état de faire face à son obligation de contribution. Sont entre autres reconnus comme tel, les débiteurs sans adresse connue ou les débiteurs considérés comme insolvables . Répondent notamment à cette seconde catégorie :
- les bénéficiaires du RSA ;
- les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) à taux plein ;
- les parents qui ont des ressources inférieures au montant forfaitaire du RSA ;
- les personnes dont la totalité des revenus sont insaisissables ;
- les personnes incarcérées ;
- les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) ;
- les parents mineurs ;
- les personnes sans domicile fixe et sans ressources.
Enfin, la LFSS pour 2016 a ouvert le droit à une ASF différentielle en permettant le versement d'un montant qui complète la pension alimentaire lorsque celle-ci, bien qu'effectivement versée, s'élève à un montant inférieur à celui de l'ASF.
Le tableau ci-dessous montre la répartition des allocataires selon le type d'ASF reçue :
Conditions d'ouverture |
Nombre d'ASF (au titre de juin 2021) |
ASF à taux plein |
|
Toutes conditions ASF à taux plein |
10 130 |
Enfants orphelins des deux parents |
1 863 |
Enfants sans filiation établie |
1 971 |
Enfants abandonnés par leurs deux parents ou dont les parents sont hors d'état |
6 296 |
ASF à taux partiel |
|
Toutes conditions ASF partielle |
1 278 723 |
Enfants dont le parent non gardien est hors d'état ou sans pension alimentaire fixée |
526 220 |
Enfants dont la filiation n'est pas établie |
345 925 |
Enfants orphelins de l'un des deux parents |
181 902 |
Enfants dont le parent débiteur ne paie pas la pension alimentaire (ASF recouvrable) |
86 970 |
ASF différentielle |
105 338 |
ASF versée pendant le délai de 4 mois avant engagement d'une procédure de fixation d'une pension alimentaire |
32 368 |
Autres cas |
20 979 |
Total ASF versées |
1 309 832 |
Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après les données transmises par la Cnaf à la rapporteure
2. La condition d'isolement
L'ASF est une prestation versée aux parents isolés. L'alinéa 2 de l'article L. 523-2 du code de la sécurité sociale dispose que l'ASF cesse d'être versée « lorsque le père ou la mère titulaire du droit à l'allocation de soutien familial se marie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en concubinage ». Cette condition s'applique même si le concubin n'a pas les moyens de subvenir aux besoins de l'enfant 13 ( * ) . Aux termes de l'article R. 523-5 du même code, « le versement de l'allocation peut être repris si le parent justifie vivre seul à nouveau de façon permanente, à compter du premier jour du mois civil suivant cette justification . »
En revanche, cette condition d'isolement ne concerne pas la personne tierce bénéficiaire d'une ASF au titre de l'enfant qu'elle a recueilli.
L'article 27 de la loi du 4 août 2014 14 ( * ) , laquelle mettait en place l'expérimentation de la Gipa, permettait de maintenir le versement de l'ASF recouvrable pendant une période de six mois après la remise en couple à titre expérimental dans vingt départements. Lorsque le mécanisme de la Gipa fut généralisé par la LFSS pour 2016, ce maintien du versement ne fut pas repris 15 ( * ) .
B. Le droit proposé : la suppression de la condition d'isolement
Le I du présent article 1 er supprime le second alinéa de l'article L. 523-2 du code de la sécurité sociale afin d'ouvrir le versement de l'ASF aux parents bénéficiaires qui reprennent une vie commune avec un nouveau conjoint quel que soit le statut de leur relation : mariage, pacte civil de solidarité (PACS) ou concubinage.
Le II gage cette mesure en créant une taxe additionnelle à la taxe sur les transactions financières (TTF).
II - La position de la rapporteure et de la commission
A. Une allocation essentielle pour soutenir les familles monoparentales mais dont les conditions d'attribution sont complexes et sources d'incohérences
1. La situation de monoparentalité : un fait social de plus en plus présent et à l'origine d'une précarité des familles
Les études de l'Insee rendent compte de l'augmentation continue depuis les années 1970 du nombre de familles monoparentales. En 2020, deux millions de familles, soit 24,7 % des familles, étaient monoparentales contre 953 000 en 1990 (12 % des familles). Cette situation de monoparentalité concerne à 82 % des femmes 16 ( * ) et est souvent associée à des facteurs importants de précarité. Leur niveau de diplôme moyen est inférieur aux mères en couple et l'écart s'est accentué depuis 1990 17 ( * ) tandis que 35,4 % des parents isolés sont sans emploi 18 ( * ) .
De plus, la rupture d'une famille provoque une perte du niveau de vie dont l'ampleur est supérieure pour les femmes. En ciblant les familles devenues monoparentales en 2011 à la suite d'une séparation, une étude de l'Insee montre ainsi que la moitié des mères ont un niveau de vie au moins inférieur de 24 % à leur niveau de vie antérieur à la rupture 19 ( * ) . Aussi une surexposition à la pauvreté des familles monoparentales est-elle observée. En 2018, 40,5 % des enfants vivant chez un parent isolé sont pauvres contre 15,4 % pour les enfants des familles « traditionnelles ».
2. Des aides au soutien des familles monoparentales pour l'éducation et l'entretien de leurs enfants
En raison de la précarité qui y est associée, la monoparentalité a été prise en compte par plusieurs réformes récentes qui ont accru le soutien public à ces familles (revalorisation de l'ASF en 2014, création de la prime d'activité en 2015, majoration du complément de libre choix du mode de garde (CMG) en 2018). Aujourd'hui, plusieurs dispositifs sont mis en oeuvre en faveur des familles monoparentales, sous condition d'isolement du parent, de telle sorte que l es familles monoparentales constituent les ménages pour lesquels les effets redistributifs de la politique socio-fiscale sont les plus élevés comme le souligne un rapport conjoint de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'inspection générale des finances (IGF) de juillet 2021 20 ( * ) .
Dispositifs ciblant les parents isolés |
|
Complément de libre choix du mode de garde |
Majoration de 30 % du montant versé |
Majoration de 40 % des plafonds de ressources |
|
Allocation journalière de présence parentale |
Montant majoré |
Complément familial |
Majoration des plafonds de ressources |
Prime d'activité Revenu de solidarité active |
Montant majoré accordé pendant 12 mois au cours d'une période de 18 mois suivant un fait générateur (naissance, adoption, séparation...) sauf si l'enfant est âgé de moins de trois ans, auquel cas la majoration court jusqu'à ce qu'il atteigne cet âge. Ce montant varie selon le nombre d'enfants à charge |
Aide à la garde d'enfants pour parents isolés (AGEPI) |
Aide ponctuelle accordée par Pôle emploi en cas de reprise d'emploi d'un parent isolé |
Impôt sur le revenu |
Demi-part supplémentaire accordée aux parents isolés ayant la charge exclusive de leurs enfants |
Source : Commission des affaires sociales du Sénat
L'ASF s'intègre donc dans ce dispositif socio-fiscal ciblant les parents isolés. Les dépenses d'ASF ont logiquement suivi la hausse du nombre de familles monoparentales comme le montre le graphique ci-dessous.
Évolution des dépenses liées à l'allocation de soutien familiale et du nombre de ménages en familles monoparentales
Source : Mission IGAS/IGF
L'ASF est accordée sans condition de ressources. Toutefois, par ses critères d'octroi, elle cible en particulier des foyers parmi les plus fragiles au sein des familles monoparentales. Ainsi l es familles monoparentales aux ressources les plus modestes perçoivent-elles davantage l'ASF qu'une pension alimentaire 21 ( * ) . Si 40 % des familles monoparentales appartiennent aux deux déciles de revenus les plus bas, cette proportion s'élève à 70 % pour les bénéficiaires de l'allocation de soutien familial ainsi que le montre le graphique infra .
Source : Direction de la sécurité sociale
3. Une allocation complexe concernée par un important phénomène de non-recours
L'allocation de soutien familial est concernée par un important phénomène de non-recours. Ainsi qu'il a été indiqué supra , l'ASF recouvrable est une prestation subsidiaire à la pension alimentaire . Au-delà de quatre mois de versement, les bénéficiaires doivent engager une action en justice ou à l'amiable pour se voir verser une pension alimentaire. Or, cette condition peut dissuader certains parents éligibles qui ne souhaitent pas reprendre contact ou entrer en litige avec leur ancien conjoint. Il en résulte un taux de non-recours volontaire élevé .
Selon des travaux menés par la Cnaf et cités par la mission des inspections dans leur revue de dépenses, près d'un parent isolé sur deux serait éligible à l'ASF mais ne la réclamerait pas 22 ( * ) . Cette situation peut aussi s'expliquer par le caractère complexe d'une prestation qui répond à plusieurs logiques. L'ASF vise tantôt à se substituer à la pension alimentaire, tantôt à la compléter ou bien à aider à l'éducation d'enfants dont un des parents est absent. Mis en place depuis 2014 par les CAF, les rendez-vous des droits permettent de lutter contre le non-recours en éclairant les allocataires au cours d'un entretien individuel. Les travaux de la Drees montrent qu'à la suite de leur rendez-vous, un quart des personnes déposent une demande d'ASF lorsqu'elles suivent le parcours spécifique ciblant les allocataires ayant connu récemment un évènement fragilisant leur situation financière (naissance, séparation, décès...) 23 ( * ) .
B. Une condition d'isolement sources d'incohérences et d'incompréhensions qu'il conviendrait de supprimer
1. La perte de l'ASF fait naître une relation de dépendance vis-à-vis du nouveau conjoint
La suspension de l'ASF en cas de nouvelle vie commune repose sur le postulat que le conjoint du parent participe aux frais d'éducation de l'enfant. Toutefois, en perdant l'ASF, les parents anciennement isolés risquent de se retrouver dans une situation de dépendance vis-à-vis de leur nouveau conjoint pour l'entretien de leur propre enfant. Les bénéficiaires de l'allocation étant en grande partie des mères appartenant aux plus bas déciles de revenus, la prise en charge de la famille par le nouveau conjoint, pourrait s'apparenter à une image stéréotypée de la famille, ainsi que le souligne la fédération syndicale des familles monoparentales (FSFM) entendue en audition. La rapporteure estime en revanche que le maintien de l'ASF après la remise en couple favoriserait l'autonomie des mères anciennement isolées et par là même l'égalité entre les femmes et les hommes dans la sphère privée.
De plus, cette solidarité intrafamiliale ne repose sur aucune obligation juridique et « est loin d'être systématiquement une réalité » selon les termes de la mission IGAS IGF précitée. Le nouveau conjoint peut refuser de contribuer à l'entretien de l'enfant ou lui-même ne pas être en mesure de le faire. Dès lors, ainsi que le souligne l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), « en l'absence d'un statut juridique clair du beau-parent (qui n'a pas d'obligation d'entretien envers ses beaux enfants), [la] suppression du droit à l'ASF en cas de remise en couple pourrait être revue » 24 ( * ) . Cette même recommandation est formulée par le Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA) dans son rapport de septembre 2021 25 ( * ) .
2. Une incohérence entre le versement des pensions alimentaires et celui de l'ASF au détriment de l'enfant
En outre, la condition d'isolement circonscrivant le versement de l'ASF participe à un système incohérent. L'ASF, chargée de suppléer la pension alimentaire, cesse d'être due lorsque le parent bénéficiaire retrouve un conjoint tandis que la pension alimentaire continue d'être versée par le parent débiteur solvable lorsque le parent créancier se remet en couple. Cette situation peut certes entraîner une révision du montant de la pension. Le juge tient compte des ressources du nouveau conjoint pour apprécier la diminution des charges de la vie courante qui en résulte pour le parent créancier. Néanmoins, en l'absence d'une obligation d'entretien envers l'enfant de la part du nouveau conjoint, il s'abstient de cumuler ses revenus à ceux du parent créancier 26 ( * ) .
Pour la rapporteure, cette différence n'a aucune raison d'être dans la mesure où l'ASF matérialise l'aide de la collectivité à l'entretien et à l'éducation des enfants en cas de défaillance d'un parent. Du point de vue de la situation objective de l'enfant, celui-ci demeure privé du soutien d'un de ses parents et l'ASF devrait être maintenue indépendamment du statut marital ou conjugal du parent. La suppression de la condition d'isolement se justifie dès lors par l'intérêt supérieur de l'enfant.
Par ailleurs, la rapporteure note une seconde incohérence sur laquelle plusieurs rapports se sont récemment penchés 27 ( * ) et qu'une réforme plus globale des prestations sociales et du régime fiscal devrait prendre en compte. Pour les familles monoparentales, le traitement socio-fiscal différencié des pensions alimentaires et de l'allocation de soutien familial rend préférable pour les parents isolés de percevoir l'ASF plutôt qu'une pension. En effet, l'ASF est exclue des bases ressources des allocations logement ainsi que du revenu imposable au titre de l'impôt sur le revenu à la différence des pensions alimentaires. Il en résulte des situations paradoxales dans lesquelles le parent créancier fait face à une perte de revenu disponible lorsque le parent débiteur reprend le versement de la pension et que l'ASF recouvrable cesse d'être versée.
3. La condition d'isolement de l'ASF : une incitation à ne pas sortir de la monoparentalité ou à le masquer
La rapporteure considère que la condition d'isolement de l'ASF, s'appliquant par ailleurs à d'autres dispositifs socio-fiscaux (voir supra ), peut décourager certains parents isolés à envisager une vie commune avec un conjoint par craintes des difficultés matérielles . Cette situation a été confirmée par la fédération syndicale des familles monoparentales (FSFM) qui rapporte des exemples de femmes qui renoncent à se remettre en couple ou échafaudent des stratégies d'évitement d'une véritable vie commune. Des fraudes à l'isolement sont également constatée par les CAF, qui mettent en place des contrôles pouvant être ressentis par les allocataires comme une intrusion dans leur vie privée. En 2019, la fraude à l'isolement concernait ainsi 18 % des fraudes constatées par les CAF toutes prestations confondues.
En cessant d'être versée à une personne remise en couple, cette prestation peut donc contribuer à une sorte de « trappe à l'isolement » des familles monoparentales. Or, la monoparentalité est un facteur important de précarité et ne doit pas être subie pour des considérations financières. Le chercheur Julien Damon dans un entretien à la presse souligne ainsi que « la meilleure solution à la monoparentalité, c'est la biparentalité : il faut qu'on fasse tout pour que ces familles redeviennent des familles recomposées » 28 ( * ) .
La sortie de l'isolement permet de réaliser des économies d'échelle sur les charges de la vie courante ou concilier plus facilement une vie familiale et une vie professionnelle. Par conséquent, une personne sortant de la monoparentalité pour former une famille recomposée présente des chances de voir son niveau de vie s'élever. Selon l'Insee, la moitié des mères qui retrouvent un conjoint un an après s'être séparées du père de leur enfant ont, cette année-là, un niveau de vie plus élevé d'au moins 2,5 % par rapport à celui d'avant la séparation 29 ( * ) . Plus généralement, le taux de pauvreté des enfants présents dans une famille recomposée n'est pas sensiblement inférieur à celui des familles traditionnelles (16,6 % contre 15,4 %) et reste bien en-deçà de celui des enfants élevés dans une famille monoparentale.
Il convient donc de ne pas dissuader les parents isolés de se mettre en couple dans la mesure où la sortie de la monoparentalité constitue un objectif souhaitable pour les politiques publiques qui permettrait, en rendant plus facile la reprise d'une activité professionnelle par exemple, de réduire d'autres transferts redistributifs.
L'estimation budgétaire précise de l'extension de l'ASF prévu par le présent article n'est à ce stade pas identifiable, comme l'a indiqué la DSS, en raison de l'absence de données quant aux potentiels bénéficiaires. Il est en revanche possible d'évaluer à environ 52 millions d'euros la seule dépense annuelle engendrée par la suppression de la condition d'isolement appliquée aux 24 600 familles monoparentales qui ont perdu le bénéficie de l'ASF en raison d'une remise en couple en 2020 30 ( * ) . Il ne s'agit là que d'une borne inférieure de l'estimation budgétaire ; il est davantage raisonnable de penser que le coût pour la branche famille devrait se chiffrer en centaines de millions d'euros , ainsi que le souligne Bertrand Fragonard dans sa contribution écrite adressée à la rapporteure. En tout état de cause, la rapporteure est convaincue que les bénéfices de cet article dépassent son seul coût budgétaire direct pour toutes les raisons mentionnées supra et est donc favorable à son adoption.
La commission a toutefois estimé que l'allocation de soutien familial était conçue comme une prestation à destination des familles monoparentales en raison de la particulière précarité de leur situation. La condition d'isolement permettant ce ciblage, sa suppression, en dehors de toute réforme plus globale des prestations sociales, entraînerait une perte du sens de l'ASF. La commission a dès lors rejeté l'article 1 er .
La commission n'a pas adopté cet article.
Article 2
Demande de rapport
sur la diversité des situations familiales et leurs conséquences
sur la fiscalité
Cet article vise à demander un rapport au Gouvernement sur la diversité des situations familiales et leurs conséquences sur la fiscalité.
La commission n'a pas adopté cet article.
I - Le dispositif proposé
L' article 2 prévoit que le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur « la diversité des façons de faire famille » et leurs conséquences sur la fiscalité dans un délai d'un an suivant la promulgation de la présente proposition de loi.
Aujourd'hui, la famille « traditionnelle » au sens de l'Insee, composée de deux parents et des enfants du couple, constitue toujours le type de famille le plus répandu mais sa part a fortement décru depuis les années 1990 au profit des familles monoparentales (voir tableau dessous).
Répartition des familles selon le type de famille
Proportion de l'ensemble des familles |
||
1999 |
2020 |
|
Familles "traditionnelles" |
75,0 % |
66,30% |
Familles monoparentales |
16,3% |
24,70% |
Familles recomposées |
8,7 % |
9,00% |
Source : Insee
La situation conjugale des couples a également évolué. Alors qu'en 1990 les couples cohabitant étaient 86 % à être mariés, cette proportion était tombée à 76 % en 2011 31 ( * ) . Le statut conjugal des ménages ayant au moins un enfant de moins de 25 ans est donc fortement hétérogène ; en 2018, seuls deux tiers de ces couples étaient mariés.
Répartition des couples avec au moins un enfant âgé de moins 25 ans selon leur situation conjugale
Situation conjugale du couple avec au moins un enfant de moins de 25 ans |
Nombre en millions |
Proportion |
Couple de deux personnes mariées |
4,5 |
66,5 % |
Couple de deux personnes pacsées |
0,8 |
11,7 % |
Couple de deux personnes en concubinage ou union libre |
1,4 |
20,3 % |
Couple de deux personnes ayant un autre statut conjugal |
0,1 |
1,5 % |
Ensemble |
6,8 |
100 % |
Source : Commission des affaires sociales du Sénat, données de l'Insee 32 ( * )
La familiarisation du système fiscal français tente de prendre en compte cette diversité des situations en accordant, par exemple, une demi-part supplémentaire aux parents isolés pour l'application du quotient familial à l'impôt sur le revenu. Toutefois, la rapporteure estime nécessaire qu'une réflexion plus générale puisse s'engager sur la diversité des modèles familiaux et leurs prises en compte par la fiscalité. Elle est donc favorable à l'adoption de cet article.
III - La position de la commission
La commission n'a pas adopté cet article.
La commission n'ayant pas adopté de texte, la discussion en séance publique portera sur le texte initialement déposé.
EXAMEN EN COMMISSION
___________
Réunie le mercredi 16 février 2022, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine le rapport de Mme Michelle Meunier, rapporteure, sur la proposition de loi (n° 64, 2021-2022) visant à maintenir le versement de l'allocation de soutien familial en cas de nouvelle relation amoureuse du parent bénéficiaire.
Mme Michelle Meunier , rapporteure . - Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a inscrit à l'ordre du jour de son espace réservé du 23 février prochain la proposition de loi visant à maintenir le versement de l'allocation de soutien familial en cas de nouvelle relation amoureuse du parent bénéficiaire.
Ce texte, déposé par notre collègue Laurence Rossignol vise à ne plus conditionner le versement de l'allocation de soutien familial à l'isolement du parent bénéficiaire.
Avant toute chose, je dois vous proposer un périmètre pour l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution. Je considère que ce périmètre comprend les dispositions relatives aux conditions d'attribution, de calcul et de versement de l'allocation de soutien familial et à la prise en compte de la situation familiale dans les impositions de toute nature.
En revanche, j'estime que ne présenteraient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé des amendements relatifs aux conditions d'attribution, de calcul et de versement des prestations familiales hors celles relatives à l'allocation de soutien familial, aux autres prestations sociales ou aides en faveur des familles monoparentales, aux congés parentaux. De tels amendements seraient donc déclarés irrecevables par notre commission en application de l'article 45 de la Constitution.
L'allocation de soutien familial (ASF) est une prestation accordée pour l'éducation des enfants privés du soutien d'au moins un parent. Elle est versée à 807 000 familles au bénéfice de 1,3 million d'enfants. Elle représentait en 2020 une dépense de 1,79 milliard d'euros pour la branche famille. Son montant est forfaitaire pour chaque enfant : 116 euros sont accordés si l'enfant est privé de l'aide d'un de ses parents et 155 euros si les deux parents sont absents.
Plusieurs cas de figure ouvrent droit à l'ASF. Cette aide est versée, sans condition de ressources, à la personne ayant la charge de l'enfant si ce dernier est orphelin d'au moins l'un de ses parents, si la filiation de l'enfant n'est pas établie à l'égard d'au moins l'un des parents ou si au moins un des parents ne verse pas ou est reconnu comme étant hors d'état de verser la pension alimentaire - il s'agit principalement de parents insolvables. Dans le cas où le parent se soustrait, même partiellement, à ses obligations, l'ASF est versée à titre d'avance au parent créancier, à charge pour la caisse d'allocations familiales (CAF) de recouvrer la pension alimentaire auprès du parent débiteur. Les réformes engagées depuis 2014 contre les impayés de pensions alimentaires, qui concerneraient 30 % des créances, ont permis une montée en charge de cette ASF recouvrable. La dernière étape qu'a constituée la systématisation de l'intermédiation financière des pensions par la loi du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 permettra de verser effectivement l'ASF recouvrable dès le premier impayé. Enfin, depuis 2016, une ASF différentielle permet de compléter la pension alimentaire si cette dernière est fixée à un montant inférieur à celui de l'ASF.
L'allocation de soutien familial intervient donc pour suppléer le second parent lorsque ce dernier est défaillant ou absent. Pour ces raisons, au-delà de quatre mois de versement, l'ASF n'est maintenue que si le parent bénéficiaire engage des démarches pour recevoir une pension alimentaire. Certains parents renoncent ainsi au bénéfice de la prestation afin de ne pas entrer en conflit avec leur ancien conjoint ; c'est typiquement le cas des femmes victimes de violences conjugales.
La subsidiarité de l'ASF à la pension alimentaire n'est en outre pas parfaite en raison de certaines contradictions. L'ASF et les pensions alimentaires ne sont pas prises en compte de manière égale par les dispositifs sociaux et fiscaux. Les créances alimentaires sont intégrées aux revenus imposables au titre de l'impôt sur le revenu ainsi qu'aux bases ressources de certaines prestations sociales, contrairement à l'ASF. Ces différences rendent paradoxalement préférable de recevoir l'ASF plutôt qu'une pension alimentaire de même montant. Plusieurs rapports des inspections ou du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge proposent des pistes de réforme qui dépassent le cadre de cette proposition de loi, mais sur lesquelles il conviendra d'engager une réflexion.
L'incohérence prioritaire à laquelle la proposition de loi entend remédier concerne le ciblage des bénéficiaires. Hors les cas où les deux parents sont absents et que l'enfant est confié à un tiers, l'ASF ne concerne que les parents isolés. L'allocation cesse d'être versée si le parent se marie, conclut un pacte civil de solidarité (PACS) ou vit en concubinage. Selon la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), environ 24 000 parents auraient ainsi perdu le bénéfice de l'ASF non recouvrable en 2020 en choisissant de se remettre en couple.
Cette condition d'isolement me semble injustifiée pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, la suspension de l'ASF peut décourager certains parents isolés d'envisager une vie commune avec un nouveau conjoint par crainte des difficultés matérielles qui en résulteraient. Cette situation n'est pas qu'hypothétique : 70 % des bénéficiaires de l'ASF se situent sous le deuxième décile de la redistribution des revenus. Il s'agit donc des familles les plus précaires de notre société, pour lesquelles la perte de 116 euros par enfant n'est pas négligeable. Cette situation m'a été confirmée par la Fédération syndicale des familles monoparentales (FSFM), que j'ai entendue en audition. Des parents renoncent à se mettre en couple pour cette raison ou échafaudent des stratégies d'évitement d'une véritable vie commune. Des fraudes à l'isolement sont également constatées par les CAF. Les contrôles dès lors mis en place peuvent être ressentis par les allocataires comme de véritables intrusions dans leur vie privée.
En outre, la perte de l'ASF pour les personnes remises en couple accroît la vulnérabilité de celles-ci en réduisant leur autonomie. Les parents isolés - des mères dans 82 % des cas, rappelons-le - se retrouvent dans une relation de dépendance vis-à-vis de leur nouveau conjoint pour l'éducation et l'entretien de leur propre enfant. Cette situation n'est pas souhaitable, d'autant plus que le nouveau conjoint, qui peut avoir lui-même des enfants, ne contribue pas systématiquement aux frais d'entretien de l'enfant. Aucune obligation juridique ne l'y contraint et ses revenus peuvent d'ailleurs être tout aussi modestes que ceux du parent concerné. L'injustice extrême de cette suspension de l'ASF se réalise lorsque deux bénéficiaires de l'ASF forment une famille recomposée...
Le ciblage de l'ASF sur les seuls parents isolés est donc une fausse bonne idée. Certes, ce sont les familles monoparentales qui sont surexposées à la précarité, puisque 40 % des enfants élevés dans de telles familles sont considérés comme pauvres. Toutefois, ce ciblage provoque une forme de « trappe à isolement » en étant un frein à la remise en couple.
Or la sortie de l'isolement et de la monoparentalité constitue une solution pour ces familles qu'il convient, lorsqu'elle est souhaitée, de ne pas dissuader. En reprenant une vie commune, les parents isolés peuvent réaliser des économies d'échelle sur les charges de la vie courante ou bien concilier plus facilement leurs vies familiale et professionnelle. Les mères isolées peuvent donc être soulagées de certains fardeaux de la monoparentalité, qui sont autant de cofacteurs de précarité. Alors que 35 % des parents isolés sont sans emploi, la remise en couple peut favoriser la reprise d'une activité professionnelle. Ces femmes peuvent ainsi espérer voir, à terme, leur niveau de vie et celui de leurs enfants s'élever.
Enfin, la restriction du bénéfice de l'ASF aux seuls parents isolés ne se justifie pas du point de vue de l'intérêt supérieur des enfants. Si ces derniers demeurent privés du soutien d'un de leur parent, le statut marital du parent avec lequel ils vivent ne devrait pas conditionner le versement de l'allocation. Cette incohérence est d'autant plus flagrante que les pensions alimentaires continuent, quant à elles, d'être versées aux parents créanciers lorsqu'ils se remettent en couple.
Pour toutes ces raisons, je vous propose d'adopter l'article 1 er . Le coût budgétaire de cette mesure n'a pas pu être estimé avec précision en raison du faible nombre de données disponibles, mais il se chiffrerait en centaines de millions d'euros. Il faut aussi tenir compte de l'effet bénéfique à long terme de la mesure, qui pourrait réduire la nécessité d'autres transferts redistributifs si le niveau de vie des parents remis en couple s'élève.
L'article 2 du texte consiste en une demande de rapport au Gouvernement sur la diversité des situations familiales et leur prise en compte par notre régime fiscal. En dépit de notre doctrine sur les demandes de rapport, il me semble que l'importance de ces enjeux justifierait l'adoption de cet article. Un quart des familles françaises sont désormais monoparentales, contre seulement 12 % en 1990 et 9 % sont des familles recomposées. Il convient d'engager une réflexion sur l'adaptation de notre système fiscal à ce fait social.
Vous l'aurez compris, au travers de cette proposition de loi, nous vous proposons d'apporter une réponse à une incohérence précise de l'ASF, sans attendre une réforme d'ampleur des prestations sociales. En maintenant le versement de l'allocation aux parents éligibles qui ne remplissent plus la condition d'isolement, nous pouvons remédier à une situation injuste, source d'incompréhension pour les familles concernées et de précarisation. Je vous demande donc de bien vouloir l'adopter.
Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale . - Je félicite notre rapporteure, Michelle Meunier. Je remercie également Laurence Rossignol, l'auteure de la proposition de loi, qui souligne ainsi les difficultés des familles monoparentales, que nous n'ignorons pas.
Néanmoins, même si la cause défendue au travers de cette proposition de loi nous paraît juste, nous pensons qu'il convient davantage d'avoir une réflexion plus globale sur l'ensemble de notre politique familiale, pour élaborer une réforme de fond. C'est d'ailleurs ce que nous avons commencé à engager lors de l'examen de la proposition de loi sur les allocations familiales d'Olivier Henno en discutant de l'attribution des allocations familiales dès le premier enfant.
Surtout, cette allocation de soutien familial nous semble avoir été détournée au fil du temps de sa logique première. Initialement prévue pour les enfants orphelins ou dont le lien de filiation n'était pas légalement établi avec un parent, elle est progressivement venue compenser les pensions alimentaires non versées. Nous pensons, comme la Cour des comptes, qu'il faut d'abord clarifier les objectifs assignés à cette prestation en la remettant à plat pour la définir et l'attribuer correctement. Or cette proposition de loi ne va pas jusque-là.
En outre, s'est développée depuis quelques années une pratique regrettable : celle qui consiste à faire du « coup par coup » dans les réformes. C'est très ennuyeux, car cela entraîne l'illisibilité et l'incohérence de la loi, donc l'incompréhension de nos concitoyens. Les aides disparates engendrent un certain désordre. Aussi ne nous paraît-il pas judicieux d'adopter une telle proposition de loi. Nous préférons, je le répète, une réforme globale sur les prestations familiales.
Le groupe Union Centriste s'abstiendra sur ce texte.
Mme Chantal Deseyne . - Les conditions de versement de cette pension sont connues : il faut être un parent isolé avec un enfant à charge. Quand on souhaite refaire sa vie, il faut en accepter les contraintes ; quand on se met en couple avec une femme qui a des enfants, on doit l'assumer, on recompose une famille. Il y a de plus en plus de familles recomposées dans lesquelles les nouveaux conjoints s'investissent dans l'éducation des enfants du compagnon ou de la compagne.
Le groupe Les Républicains ne votera pas cette proposition de loi.
Mme Laurence Rossignol , auteure de la proposition de loi . - Je ne comprends pas pourquoi vous ne voterez pas cette proposition de loi.
Le dernier argument soulevé, consistant à dire que le nouveau compagnon doit prendre en charge les enfants de sa compagne ou inversement, a des limites. Souvent, les familles recomposées sont constituées d'une femme avec enfants et attributaire de l'allocation de soutien familial se mettant en couple avec un homme. Or, si celui-ci a des enfants, il paie déjà une pension alimentaire. En outre, nous parlons là de familles précaires ; il y a sans doute des femmes cadres élevant seules leurs enfants, mais je pense qu'elles n'ont même pas l'idée de demander l'ASF... Quoi qu'il en soit, il ne doit pas y avoir une présomption de prise en charge des enfants par le nouveau compagnon. Lui-même a ses propres enfants et en outre, cela met la femme dans une situation de dépendance pour la prise en charge de ses enfants. Ce n'est pas moral, ce n'est pas juste.
Par ailleurs, Mme Doineau, je vous répondrai sur le débat qui oppose les petits ajustements à une grande réforme de la politique familiale. Mon sentiment est que nous ne sommes pas prêts de voir la grande réforme. La politique familiale est une telle institution qu'il est difficile d'y toucher. La mise sous condition de ressources des allocations familiales en 2014 n'était pas une grande réforme de la politique familiale par exemple, c'était un ajustement budgétaire. Depuis 1945, la politique familiale a évolué en permanence, avec des modifications successives. Du reste, vu les équilibres politiques actuels, si une grande réforme de la politique familiale était mise en oeuvre, ni vous ni nous n'en serions satisfaits. Il faut donc réformer la politique familiale chaque fois que l'occasion se présente comme on le fait depuis 1945.
En l'espèce, la suspension du versement de l'ASF en cas de remise en couple constitue une « trappe » à isolement et à pauvreté. Elle n'a pas de fondement du point de vue de l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous pourrions donc voter ensemble cette proposition de loi.
Par ailleurs, l'estimation du coût de la réforme, évalué à quelques centaines de millions d'euros, me laisse perplexe. Est-ce que ce chiffrage provient de la direction de la sécurité sociale qui tend à trouver chaque réforme trop onéreuse ? Pour ma part, j'aimerais bien connaître le nombre d'ASF suspendues chaque année. Du reste, la CNAF, que nous avions entendue en audition, n'est pas opposée à cette réforme.
L'adoption de cette proposition de loi enverrait un bon message pour rediscuter la politique familiale et ajusterait un dispositif qui me semble archaïque.
Mme Michelle Meunier , rapporteure . - Il est toujours intéressant d'avoir à ses côtés l'auteure de la proposition de loi ; merci d'avoir complété mon propos, chère Laurence Rossignol.
Mme Deseyne, permettez-moi d'insister. Le nouveau conjoint du parent allocataire de l'ASF n'est pas juridiquement contraint de contribuer à l'éducation des enfants de sa compagne. Dans les faits, cette contribution n'est donc pas systématique.
Pour ce qui concerne l'élaboration d'une réforme globale, je suis tout à fait d'accord avec Laurence Rossignol ; cette proposition de loi permet de répondre à un point problématique de l'ASF. Elle n'a pas pour ambition de réformer en profondeur la politique familiale.
Il est vrai que le chiffrage budgétaire est imprécis. La direction de la sécurité sociale n'a pas su donner une estimation du coût budgétaire. L'évaluation très large de plusieurs centaines de millions d'euros, peut-être 500 millions, provient de M. Michel Villac, président du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge ainsi que de M. Bertrand Fragonard. La CNAF a indiqué qu'environ 24 000 personnes ont perdu le bénéfice de l'ASF non recouvrable en 2020. Pour ces seules personnes, le coût de la réforme serait donc aux alentours de cinquante millions d'euros mais il ne s'agit là que du flux de personnes se remettant en couple une année donnée. Ce n'est donc qu'une borne inférieure de l'estimation budgétaire.
EXAMEN DES ARTICLES
Les articles 1 er et 2 ne sont pas adoptés.
En conséquence, la proposition de loi n'est pas adoptée.
Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique portera sur le texte initial de la proposition de loi déposée sur le Bureau du Sénat.
Mme Catherine Deroche, présidente. - Ce sujet est plus complexe que ce qu'il peut laisser paraître.
RÈGLES RELATIVES
À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44
BIS, ALINÉA 3,
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT
(« CAVALIERS »)
PROPOSITION DE LOI N° 64 (2021-2022) VISANT À MAINTENIR LE VERSEMENT DE L'ALLOCATION DE SOUTIEN FAMILIAL EN CAS DE NOUVELLE RELATION AMOUREUSE DU PARENT BÉNÉFICIAIRE
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 33 ( * ) .
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du
texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil
constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au
contenu précis des dispositions du texte initial, déposé
sur le bureau de la première assemblée saisie
34
(
*
)
.
Pour les lois ordinaires,
le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte
initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la
navette restant sans effet sur la présence de
« cavaliers » dans le texte
35
(
*
)
.
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires sociales a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 16 février 2022, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 64 (2021-2022) visant à maintenir le versement de l'allocation de soutien familial en cas de nouvelle relation amoureuse du parent bénéficiaire.
Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :
- aux conditions d'attribution, de calcul et de versement de l'allocation de soutien familial ;
- à la prise en compte de la situation familiale dans les impositions de toute nature ;
En revanche, la commission a estimé que ne présentaient pas de lien, même indirect, avec le texte déposé , des amendements relatifs :
- aux conditions d'attribution, de calcul et de versement des prestations familiales hors celles relatives à l'allocation de soutien familial ;
- aux autres prestations sociales en faveur des familles monoparentales ;
- aux congés parentaux.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
ET CONTRIBUTIONS ÉCRITES
___________
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
• Fédération syndicale des familles monoparentales (FSFM)
Nina Ould Ami , présidente
Cathy Ngangué , secrétaire générale
• Direction de la sécurité sociale (DSS)
Marion Muscat, adjointe à la sous-directrice de l'accès aux soins, des prestations familiales et des accidents du travail (SD2)
Anouk Canet, cheffe du bureau des prestations familiales et des aides au logement
Louis Clerc, stagiaire au sein du bureau du bureau des prestations familiales et des aides au logement
CONTRIBUTIONS ÉCRITES
• Caisse nationale des allocations familiales (CNAF)
• Michel Villac, président du Conseil de la famille du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA)
• Bertrand Fragonard, vice-président du Conseil de la famille du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA)
• Union nationale des associations familiales (UNAF)
• Make Mothers Matter France
• Union des familles laïques (UFAL)
• Confédération syndicale des familles (CSF)
LA LOI EN CONSTRUCTION
___________
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl21-064.html
* 1 Loi n° 84-1171 du 22 décembre 1984 relative à l'intervention des organismes débiteurs des prestations familiales pour le recouvrement des créances alimentaires impayées.
* 2 Créée par la loi du 23 décembre 1970.
* 3 28,13 % de la BMAF.
* 4 37,5 % de la BMAF.
* 5 Depuis la loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale, la somme est versée dans la limite du montant de l'ASF et non plus dans celle de la pension alimentaire. Le régime antérieur incitait les juges aux affaires familiales à ne pas fixer de pension alimentaire plutôt que d'établir une pension d'un montant très bas.
* 6 Loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016.
* 7 Article L. 213-4 du code des procédures civiles d'exécution.
* 8 L'article 10 de l'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l'épidémie de covid-19 a permis le versement de l'ASF au-delà de ces quatre mois en raison de la crise sanitaire.
* 9 Tel que prévu à l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles.
* 10 Elle n'est en revanche pas comprise pour le calcul des aides aux logements.
* 11 Article R. 262-10-1 CASF
* 12 Article 100 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022.
* 13 Cour de cassation, chambre sociale, 19 février 1986 : Bull. civ. V, no 24; D. 1986. Somm.375.
* 14 Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.
* 15 L'étude d'impact de la LFSS et le rapport d'évaluation de l'expérimentation de la Cnaf sont silencieux sur les raisons de cette absence de généralisation.
* 16 Insee, Les familles en 2020 : 25% des familles monoparentales, 21 % de familles nombreuses, Insee Focus n° 249
* 17 Acs M., Lhommeau B., Raynaud É., « Les familles monoparentales depuis 1990 », Dossiers Solidarité Santé n° 67, Drees, Juillet 2015.
* 18 Insee, Éclairage Enfants mineurs, quelle égalité ?, France, portrait social, édition 2020
* 19 Insee, De la rupture conjugale à une éventuelle remise en couple : l'évolution des niveaux de vie des familles monoparentales entre 2010 et 2015, France, portrait social, édition 2019.
* 20 IGAS/IGF, Revue des dépenses socio-fiscales en faveur de la politique familiale, juillet 2021.
* 21 L'enquête Revenus fiscaux et sociaux 2014 de l'INSEE montre ainsi que parmi les familles monoparentales dont le niveau de vie est inférieur à 1 330 euros mensuels, 24 % perçoivent une pension alimentaire et 42 % sont bénéficiaires de l'ASF.
* 22 IGAS, IGF, Revue des dépenses, Annexe V, p. 14.
* 23 Drees, Lutte contre le non-recours : 63 % des personnes pouvant bénéficier d'une prestation sociale y accèdent après un rendez-vous des droits, avril 2018, Études et résultats.
* 24 H. Périvier et M. Pucci, Soutenir le niveau de vie des parents isolés ou séparés en adaptant le système socio-fiscal, OFCE Policy brief n° 91, juin 2021.
* 25 HCFEA, Panorama des familles d'aujourd'hui, rapport adopté par le Conseil de la famille le 28 septembre 2021.
* 26 Voir la jurisprudence de la Cour de cassation : Civ. 1re, 22 mars 2005, n o 02-10.153 , P I, no 142 ou Civ. 1 re , 11 juin 2008, n o 07-10.285, NP pour le cas des parents débiteurs.
* 27 Voir ainsi le dossier adopté par le Conseil de la famille du HCFEA le 20 janvier 2020 sur les ruptures de couples avec enfants mineurs.
* 28 B. Lutaud, « Familles monoparentales : « les CAF pourraient créer des sites de rencontre » pour les parents », Le Figaro, 14 septembre 2021.
* 29 Insee, De la rupture conjugale à une éventuelle remise en couple : l'évolution des niveaux de vie des familles monoparentales entre 2010 et 2015, France, portrait social, édition 2019.
* 30 La Cnaf estime comme raisonnable de considérer que 24 600 foyers ont perdu le bénéfice de l'ASF non recouvrable en 2020 en raison d'une remise en couple. En appliquant la moyenne de 1,62 enfant, ce qui constitue une hypothèse forte, 39 915 enfants aurait bénéficié de 108 euros mensuels en moyenne.
* 31 Insee, Couples et familles, édition 2015 - Insee Références.
* 32 Recensement de la population de 2018, exploitation complémentaire.
* 33 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 34 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 35 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.