EXAMEN DE L'ARTICLE
Article unique
Accès des experts forestiers, gestionnaires
forestiers professionnels
et organisations de producteurs aux données
cadastrales relatives aux propriétés en nature de bois et
forêt
Cet article vise à pérenniser une expérimentation d'initiative sénatoriale prévue par la loi d'avenir pour l'agriculture et la forêt de 2014. Il tend à faciliter l'accès de trois catégories de gestionnaires forestiers aux données cadastrales afin de leur permettre d'informer les propriétaires sur les possibilités de valorisation économique de leur parcelle dans le cadre d'une gestion durable. Reprenant le dispositif d'un article qui avait été introduit dans la loi accélération et simplification de l'action publique en 2020, mais censuré par le Conseil constitutionnel en tant que « cavalier législatif », l'article unique de la proposition de loi du député Nicolas Turquois avait déjà été voté en des termes quasi-identiques par le Sénat .
Sur la proposition de la rapporteure, la commission a donc voté le texte conforme.
I. La situation actuelle - L'accès limité aux données cadastrales restreint les possibilités de gérer la petite forêt privée, qui se caractérise par un important morcellement
A. Si des dérogations sont prévues par la loi, le livre des procédures fiscales pose le principe du secret professionnel en matière fiscale afin de protéger les données personnelles
Tenu par l'administration fiscale, le cadastre en tant que représentation graphique du parcellaire est disponible en ligne 5 ( * ) sur un site accessible au public en continu. En revanche, l'accès aux données associées , figurant dans la matrice cadastrale, fait l'objet d'un encadrement plus strict dans la mesure où il s'agit de données personnelles .
Le livre des procédures fiscales pose en effet le principe du secret professionnel en matière fiscale (article L103) même s'il établit ensuite la liste, circonstanciée, des dérogations à cette règle (articles L113 à L167).
Outre les communes, qui ont accès au cadastre de leur propre territoire, certains établissements publics 6 ( * ) , tels que le Cerema, l'IGN, l'ONF ou le CNPF peuvent accéder aux données qui sont nécessaires à l'accomplissement de leur mission, dans le cadre défini par la loi. Les notaires et géomètres-experts, structurés en ordre professionnel, disposent aussi d'un accès au cadastre, pour suivre des mutations ou réaliser des documents d'arpentage 7 ( * ) .
Enfin, toute personne peut « obtenir communication ponctuelle d'informations relatives à un immeuble déterminé » (article L107 A), dans une limite de cinq demandes par semaine . Le caractère ponctuel de cet accès est prévu afin de protéger la vie privée des propriétaires concernés, en évitant notamment la reconstitution, par réitération de demandes, de bases de données.
À ce titre, les experts forestiers, gestionnaires forestiers professionnels et organisations de producteurs peuvent d'ores et déjà obtenir de l'administration fiscale centrale ou déconcentrée (bureau du cadastre de la DGFiP ou réseau des DRFiP et DGFiP), contre une somme modique 8 ( * ) , la communication d'un fichier contenant notamment l'identité et les coordonnées des propriétaires des parcelles dans le périmètre pour lequel ils sont habilités à opérer. En pratique, l'envoi de fichiers est effectué de façon dématérialisée via messagerie sécurisée.
Source : capture d'écran du site cadastre.gouv.fr.
Seulement ces gestionnaires forestiers ne peuvent accéder à ces informations essentielles à la gestion groupée qu'au prix de démarches administratives leur prenant un temps qui serait plus utile s'il était dévolu à la gestion des parcelles, sur le terrain .
B. Le morcellement caractéristique du foncier forestier privé est un frein important à sa gestion
Trois fois plus étendue que la forêt publique, la forêt privée connaît une multiplicité d'acteurs bien plus marquée puisqu'elle est détenue par 3,5 millions de propriétaires.
1 million de parcelles ont une surface comprise entre 1 et 25 hectares, et 2 millions une surface inférieure à 1 hectare. Non soumises à l'obligation de souscrire à des engagements dans le cadre d'un document de gestion durable, ces parcelles de moins de 25 hectares sont de fait très peu gérées car elles n'atteignent pas la taille critique permettant d'entretenir les écosystèmes et de mobiliser du bois .
Un établissement public administratif, le Centre national de la propriété forestière (CNPF), a pour mission de développer cette gestion durable des forêts privées, mais il dispose pour ce faire de peu de moyens comparé à l'ampleur de l'effort d'information et d'animation qui serait nécessaire pour compenser les coûts de coordination induits par le morcellement.
Celui-ci a des explications historiques, liées notamment aux règles de succession, par exemple en montagne, mais est aussi la résultante de choix de politiques publiques .
Ainsi, dans son « Rapport sur une politique forestière » du 18 mai 1945, « M. Leloup [directeur général des Eaux et Forêts,] propose une bipartition de la propriété forestière privée, scindant les obligations en regard de la taille de la propriété . [...] L'objectif est de créer deux secteurs au sein de la forêt privée. D'une part, le secteur de la petite propriété, non aménageable, dédiée aux besoins ruraux domestiques, dont la contribution au marché de bois est jugée négligeable . D'autre part, un secteur dit “contrôlé” qui toucherait environ 80 000 propriétaires détenteurs et 4 300 000 hectares de bois et forêt 9 ( * ) ».
En raison de cette bipartition, la petite propriété forestière n'a pas fait l'objet d'un effort de remembrement aussi systématique que le foncier agricole , malgré quelques velléités que reflètent par exemple un projet de loi de 1963 10 ( * ) portant amélioration de la production et de la structure foncière des forêts françaises ou encore le droit de préférence des propriétaires forestiers voisins, mis en place par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010.
II. Le dispositif envisagé - La pérennisation d'une expérimentation qui tend à favoriser les contacts entre gestionnaires et propriétaires forestiers
A. Le dispositif a déjà été mis en oeuvre à titre expérimental de janvier 2016 à octobre 2017 et, malgré un manque d'évaluation consolidée, a démontré son utilité
Issu d'amendements identiques des sénateurs Bernadette Bourzai (PS) et Marcel Deneux (UDI-UC), l'article 94 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 avait donné la possibilité d'expérimenter, pendant trois ans à compter de la promulgation de la loi, une simplification de l'accès au cadastre pour trois catégories de gestionnaires forestiers.
Contrairement à ce que l'intitulé de la proposition de loi laisse entendre, son dispositif ne concerne pas que les experts forestiers , mais aussi deux autres catégories de gestionnaires forestiers, que sont les organisations de producteurs et les gestionnaires forestiers professionnels .
Pris après avis de la CNIL (délibération n° 2015-365), le décret n° 2016-58 du 28 janvier 2016 11 ( * ) précise le périmètre des données auxquelles les acteurs habilités ont accès : ce sont « les références cadastrales, l'adresse et la surface des terrains classés en nature de bois et forêt ainsi que les nom, prénom, qualité, raison sociale, forme juridique et adresse des personnes inscrites pour ces terrains à la matrice cadastrale ».
Ce décret rappelle la finalité exclusive de la simplification de l'accès aux données cadastrales (« l'information sur les possibilités de valorisation économique des bois et forêts ») , la nécessité d'empêcher leur communication à des personnes non autorisées et l'obligation d'information du maire de la commune où se situe la parcelle concernée.
Entendus par la rapporteure, plusieurs des bénéficiaires de la mesure - Union de la coopération forestière française, Conseil national de l'expertise foncière agricole et forestière - se sont montrés satisfaits de cette mesure technique. Pour le CNEFAF, « ces données sont fondamentales à l'exercice de la profession d'expert, notamment pour vérifier, par exemple, l'appartenance des parcelles qu'ils ont pour mission d'évaluer, connaître l'étendue du patrimoine foncier d'une personne physique ou morale mais aussi parfois pour répondre à des demandes des services fiscaux pour les demandes d'exonération en forêt par exemple. Les experts forestiers sont également amenés à alerter l'administration sur des mises à jour nécessaires des matrices cadastrales à la suite d'expertise, les données cadastrales étant régulièrement erronées en forêt particulièrement sur la nature et la classe ».
Ni l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), ni la CNIL n'ont fait état de plaintes de propriétaires relatives à d'éventuels démarchages commerciaux abusifs, ce que le faible nombre de personnes habilitées (cf. tableau ci-dessous) peut expliquer.
Source : Liste des devis réalisés par
l'administration fiscale
en vue de la communication des données du
cadastre
B. Empruntant cette fois un véhicule législatif ad hoc , le dispositif a déjà été adopté par le Sénat en des termes identiques lors de l'examen de projets de loi
S'il est regrettable que le pouvoir exécutif n'ait pas rendu publique une évaluation des effets de la mesure, le Conseil d'État recommandant régulièrement dans ses avis de systématiser l'évaluation des expérimentations, force est de reconnaître qu' « aucune exigence constitutionnelle n'impose au législateur de déterminer les modalités de l'évaluation consécutive à une expérimentation » (n° 2016-739 DC, 17 novembre 2016).
Des amendements tendant à la pérennisation de l'expérimentation avaient été déposés lors de l'examen du projet de loi dite « PACTE » en 2019. Ils avaient été déclarés irrecevables dès lors qu'ils ne présentaient aucun lien, même indirects, avec le texte transmis.
Réintroduite dans le projet de loi « ASAP » en 2020, la mesure avait été adoptée par les deux assemblées, mais censurée par le Conseil constitutionnel. Le texte de la présente proposition de loi est identique à celui qui avait fait l'objet d'un accord en 2020 - à la différence près que deux amendements ont été adoptés en première lecture de ce texte à l'Assemblée.
Tableau comparatif Code : - en gras : différence entre le présent article et l'article 33 bis AA du PJL « ASAP » - souligné : différence entre le présent article et l'article 94 de la « LAAF » |
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Article 94 de la LAAF (texte promulgué)
I.- Les experts forestiers figurant sur la liste mentionnée à l'article L. 171-1 du code rural et de la pêche maritime, les organisations de producteurs du secteur forestier reconnues par l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article L. 551-1 du même code et les gestionnaires forestiers professionnels satisfaisant aux conditions mentionnées à l'article L. 315-1 du code forestier sont habilités, sans limitation du nombre de demandes et dans des conditions fixées par décret pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, à obtenir communication par voie électronique des données mentionnées à l'article L. 107 A du livre des procédures fiscales relatives aux propriétés inscrites en nature de bois et forêts situées dans le périmètre géographique pour lequel ils sont reconnus. Ils informent le maire des communes concernées de chacune de leurs demandes. Ces données leur sont communiquées afin qu'ils mènent des actions d'information, à destination des propriétaires identifiés, sur les possibilités de valorisation économique de leurs bois et forêts. Les données recueillies ne peuvent être cédées à des tiers. II.-L'habilitation prévue au I est donnée pendant trois ans à compter de l'entrée en vigueur du présent article . |
Article 33 bis AA du projet de loi ASAP (texte de CMP) I. - Le VII de la section II du chapitre III du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales est complété par un 11° ainsi rédigé : « 11° : Activités forestières « Art. L. 166 G. - I. - Les experts forestiers figurant sur la liste mentionnée à l'article L. 171-1 du code rural et de la pêche maritime, les organisations de producteurs du secteur forestier reconnues par l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article L. 551-1 du même code et les gestionnaires forestiers professionnels satisfaisant aux conditions mentionnées à l'article L. 315-1 du code forestier peuvent, sans limitation du nombre de demandes, avoir communication des données cadastrales, notamment les informations mentionnées à l'article L. 107-A du présent livre, relatives aux propriétés inscrites en nature de bois et forêts situées dans le périmètre géographique dans lequel ils sont habilités à exercer leurs missions d'information. Ils informent le maire des communes concernées de chacune de leurs demandes. « Ces données leur sont communiquées afin de leur permettre de mener des actions d'information à destination des propriétaires identifiés sur les possibilités de valorisation économique de leurs bois et forêts. « Les données recueillies ne peuvent être cédées à des tiers. « II. - Un décret précise les conditions d'application du présent article ainsi que la liste des données communiquées. » II. - L'article 94 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt est abrogé. |
Article unique de la présente proposition de loi I. - Le VII de la section II du chapitre III du titre II du livre des procédures fiscales est complété par un 11° ainsi rédigé : « 11° : Activités forestières « Art. L. 166 G . - I. - Les experts forestiers figurant sur la liste mentionnée à l'article L. 171-1 du code rural et de la pêche maritime, les organisations de producteurs du secteur forestier reconnues par l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article L. 551-1 du même code et les gestionnaires forestiers professionnels satisfaisant aux conditions mentionnées à l'article L. 315-1 du code forestier peuvent, sans limitation du nombre de demandes, avoir communication des données cadastrales, notamment des informations mentionnées à l'article L. 107 A du présent livre, relatives aux propriétés inscrites en nature de bois et forêts situées dans le périmètre géographique dans lequel ils sont habilités à exercer leurs missions d'information . Ils informent le maire des communes concernées de chacune de leurs demandes. « Ces données leur sont communiquées afin de leur permettre de mener des actions d'information à destination des propriétaires identifiés sur les possibilités de valorisation économique de leurs bois et forêts. « Les données recueillies ne peuvent être cédées à des tiers. « II. - Un décret publié dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi n° du visant à simplifier l'accès des experts forestiers aux données cadastrales précise les conditions d'application du présent article ainsi que la liste des données communiquées. Ce décret est pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés . » II. - L'article 94 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt est abrogé. |
III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Un encadrement du texte à la marge
À la fois auteur et rapporteur de la proposition de loi, le député Nicolas Turquois (Vienne - MoDem) a présenté deux amendements, adoptés lors de l'examen du texte par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° CE3 prévoit que le décret pour application de la présente loi soit pris dans les six mois suivant sa promulgation . Cela ne devrait pas poser de difficultés particulières à l'administration, le décret de 2016 pris pour application de l'expérimentation de la loi d'avenir pouvant servir de modèle de référence.
L'amendement n° CE4 introduit, lui, un avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) sur le décret d'application de l'article unique. Il s'agit d'un rappel bienvenu de l'obligation de consultation de cette autorité administrative indépendante pour tout texte « relatif à la protection des données à caractère personnel ou au traitement de telles données » (article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978).
Aucun amendement n'a été adopté en séance.
IV. La position de la commission - Un texte qui répond aux enjeux actuels et futurs de la forêt, mais qui implique une responsabilisation accrue de la filière
A. La levée opportune d'un frein juridique parmi d'autres à une gestion plus active de la petite forêt privée
Réaffirmé par la loi « Climat et résilience », l'objectif d'optimisation du rôle de puits de carbone de la forêt ne peut être atteint que si le matériau bois, qui séquestre du carbone, se substitue à des matériaux plus émissifs, ce que prévoit la réglementation environnementale des bâtiments, la « RE2020 ». Cela implique de mobiliser davantage de bois , comme le prévoient les cibles de prélèvement du programme national de la forêt et du bois (PNFB) de 2016 à 2026, d'autant plus dans un contexte de tensions sur l'approvisionnement. Face aux risques amplifiés par le changement climatique, comme les feux de forêt, la gestion permet de limiter la biomasse morte et donc la combustion.
Or, comme le rappelait, dans un rapport 12 ( * ) de mars 2017, la déléguée interministérielle à la forêt et au bois Mme Sylvie Alexandre, « aujourd'hui, c'est en forêt privée (76 % des surfaces de forêt de production) que se situe majoritairement la ressource à mobiliser. Toutefois cette forêt est peu gérée : l'obligation de gestion durable prévue par le Code forestier ne s'applique qu'à 1 ha privé sur 3 ». Seul un tiers de l'accroissement biologique de la petite propriété forestière privée est récolté, deux fois moins qu'en forêt domaniale.
C'est pourquoi les trajectoires de mobilisation accrue du bois s'appuient sur l'hypothèse d'une dynamisation de la gestion de la petite forêt privée, à l'instar du rapport de février 2016 de l'IGN et de l'Ademe, « Disponibilités forestières pour l'énergie et les matériaux à l'horizon 2035 ».
À cette fin, une identification plus simple des propriétaires par les gestionnaires est de nature à favoriser un regroupement de la gestion.
B. La présente proposition de loi ne peut cependant à elle seule prétendre lever tous les obstacles à la gestion de la petite forêt privée
D'après un rapport du CGAAER de 2019, « en moyenne 25 % des propriétaires contactés répondent et [...] une partie seulement envisage une opération de gestion », ce qui permet de relativiser le risque de surexploitation de la forêt que ce dispositif entraînerait . On peut rappeler en effet la persistance de plusieurs autres obstacles à une gestion active de la forêt privé :
• le cadastre fournit une présomption, non une preuve de propriété, et environ un tiers des propriétaires ne sont pas réellement décisionnaires (indivisions, successions non réglées) ;
• d'autres ne souhaitent pas s'engager dans la voie d'une gestion plus active de leur forêt, à cause de leur éloignement ou de craintes pour la pérennité de leur parcelle ;
• par définition, l'accès aux données cadastrales ne règle pas la situation des biens vacants et sans maître ;
• la desserte demeure parfois insuffisante pour accéder à certaines parcelles avec le matériel nécessaire et ensuite procéder au débardage et au transport du bois ;
• la taille des parcelles n'atteint pas toujours le seuil critique pour qu'une opération sylvicole soit rentable, même en cas de gestion regroupée.
C. La nécessité de veiller à la proportionnalité de l'atteinte à la vie privée par rapport à l'objectif d'intérêt général de gestion durable des forêts
La CNIL précisant dans sa délibération n° 2014-241 qu'« un tel accès continu aux données cadastrales ne saurait être accordé aux autres acteurs de la "filière bois" dont les activités ne relèveraient pas d'une mission d'intérêt général », la rapporteure a exprimé son opposition à l'extension de la mesure aux exploitants forestiers et syndicats de propriétaires privés. Étendre le périmètre du dispositif aurait pu fragiliser son équilibre au regard de la proportionnalité, en multipliant notamment le risque de fuites de données. L'ajout des experts fonciers et agricoles dans le champ des bénéficiaires n'est, par ailleurs, pas opportun dans ce texte, puisque leur activité ne relève pas de la gestion forestière.
L'accès au cadastre se ferait via un fichier retraçant les données au moment de la demande. Même si les mutations sont peu fréquentes dans la petite propriété forestière, le fichier connaît donc une obsolescence progressive au fil des ans, qui oblige à terme à renouveler la demande auprès de l'administration fiscale. La mise à disposition d'une base de données consultable à tout moment sur un portail numérique serait la suite logique de cet accès sur demande, mais elle pose des problèmes en matière de proportionnalité.
La rapporteure demande un engagement formel du ministre en séance publique sur l'accompagnement de la filière forêt-bois dans l'élaboration d'un code de bonnes pratiques 13 ( * ) , qui fixerait des limites claires entre information d'intérêt général et démarchage commercial agressif, rappellerait les sanctions encourues en cas de détournement (sanction administrative de la CNIL et sanctions pénales des articles 226-16 à 226-24 du code pénal, loi du 6 juillet 1978) ou de gestion non durable (sanctions ordinales ou administratives).
Dans ce code, qui pourrait s'appuyer sur l'acte d'engagement avec l'administration fiscale, signé aujourd'hui au moment de l'accès aux données par le demandeur, il pourrait être envisagé de préciser dans quel cas certaines personnes sont habilitées et d'autres non à avoir accès aux données au sein d'une même entité, notamment pour des entités ayant des activités allant au-delà de la seule gestion.
La commission a adopté l'article sans modification.
* 5 https://www.cadastre.gouv.fr/scpc/accueil.do
* 6 Cf. BOI-CAD-DIFF-20-20-10-30 § 30 et suivants.
* 7 Article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 relatif à la réforme de la publicité foncière.
* 8 D'après le bureau du cadastre de la DGFiP, environ 30 000 € permettraient d'obtenir communication des données cadastrales de l'ensemble des communes métropolitaines. La moyenne des tarifs pour les données cadastrales par département est de 1 143 €.
* 9 Daniel Perron, La Forêt française. Une histoire politique , 2021, éd. de L'Aube.
* 10 https://archives.assemblee-nationale.fr/2/cri/1962-1963-ordinaire2/042.pdf
* 11 https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000 031 939 569
* 12 https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/174 000 237.pdf
* 13 Recommandation du CGAAER dans son rapport de 2019 précité.