EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 12 janvier 2022, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine le rapport de Mme Laurence Rossignol, rapporteure, sur la proposition de loi (n° 242, 2021-2022), examinée en deuxième lecture, visant à renforcer le droit à l'avortement.
Mme Catherine Deroche , présidente . - Nous allons maintenant examiner le rapport sur la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à renforcer le droit à l'avortement.
Mme Laurence Rossignol , rapporteure . - Mes chers collègues, il y a un an presque jour pour jour, notre commission examinait déjà cette proposition de loi visant à renforcer le droit à l'avortement. Nous avions alors des raisons d'être optimistes, car l'Argentine venait de voter la dépénalisation de l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Nous nous retrouvons aujourd'hui dans un contexte international beaucoup moins encourageant - j'y reviendrai. Je veux d'abord me réjouir que la proposition de loi, après deux examens d'initiative parlementaire à l'Assemblée nationale et un examen d'initiative parlementaire au Sénat - celle du groupe socialiste -, soit, cette fois, mise à l'ordre du jour par le Gouvernement. J'y vois de sa part une volonté à la fois de respecter l'initiative parlementaire et les droits du Parlement et de progresser dans l'égalité d'accès à l'IVG.
Je reviens sur les menaces qui pèsent, au plan international, sur le droit à l'IVG. Au Texas, la législation est extrêmement stricte. D'autres États américains ont adopté des législations restreignant fortement l'avortement et il y a toujours, devant la Cour suprême, des incertitudes sur l'évolution de ce droit aux États-Unis. Enfin, malgré le décès récent d'une femme des suites d'une grossesse, le gouvernement polonais maintient son obstination à promouvoir l'une des législations les plus restrictives au monde, encore corsetée récemment par le tribunal constitutionnel.
Ce contexte nous rappelle que le droit à l'avortement n'est jamais acquis sur cette planète et qu'il faut demeurer extrêmement vigilant compte tenu des menaces qui pèsent sur lui et de l'activisme des anti-IVG. Il est de notre devoir de parlementaires de veiller, en France, à son respect et à sa pleine effectivité.
Cependant, le droit à l'avortement n'est pas simplement une affaire de droit : c'est aussi une affaire d'accès au droit. Lors des précédents examens, les rapports de l'Assemblée nationale et du Sénat - je pense notamment au rapport de notre commission de l'année dernière - ont montré que les inégalités d'accès à l'IVG sur le territoire étaient très importantes, voire qu'elles s'étaient accrues.
Je rappelle que, l'année dernière, le Sénat a rejeté ce texte. L'année 2022 permettra peut-être à sa majorité d'afficher une position plus ouverte...
Les débats s'étaient cristallisés autour de trois sujets : l'allongement de deux semaines du délai légal de recours à l'IVG, jusqu'à la fin de la quatorzième semaine de grossesse ; l'extension aux sages-femmes de la compétence pour la réalisation d'IVG chirurgicales ; la suppression de la clause de conscience spécifique des professionnels de santé en matière d'IVG.
Premièrement, l'allongement du délai légal répond à un nombre de cas relativement limité : on évalue entre 2 000 et 3 000 le nombre de femmes qui partent à l'étranger pour bénéficier d'un avortement parce qu'elles ont dépassé le délai en France.
Pourquoi y a-t-il des dépassements de délai ? Tout d'abord, il ne faut pas sous-estimer les échecs de contraception. Voilà quelques années - les statistiques mériteraient peut-être d'être réévaluées -, on estimait qu'entre deux tiers et trois quarts des IVG concernaient des femmes sous contraception, lesquelles ont une conscience tardive de leur grossesse, puisqu'elles tendent à considérer que leur retard de règles est dû à un dysfonctionnement de leur organisme ou de la contraception. Les très jeunes filles, elles, ne comprennent même pas ce qui leur arrive, ferment les yeux et mettent longtemps à parler de leur retard de règles. Enfin, d'autres femmes peuvent subir une grossesse non désirée à la suite de changements intervenus dans leur situation personnelle, quand certaines taisent leur grossesse plus longtemps du fait d'une détresse psychosociale liée à un viol ou un inceste.
Toutes ces données nous amènent à considérer qu'il est nécessaire que les IVG réalisées dans les deux semaines suivant la fin du délai se déroulent en France plutôt qu'à l'étranger, qu'il est assez hypocrite de compter sur nos voisins pour faire ce que nous ne voulons pas faire et qu'il est par ailleurs très inégalitaire de renvoyer chaque femme à ses propres ressources pour accéder ou non à l'IVG.
Lors de la première lecture, j'ai noté que les arguments utilisés pour s'opposer à l'allongement de douze à quatorze semaines étaient strictement les mêmes que ceux qui avaient été employés quelques années auparavant contre l'allongement de dix à douze semaines. Or, aujourd'hui, personne ne constate que cet allongement a créé des complications médicales ou développé l'eugénisme dans notre pays !
L'avis du Comité consultatif national d'éthique (CCNE) est par ailleurs très clair : il n'y a pas de différence, d'un point de vue éthique, entre un avortement réalisé à douze ou à quatorze semaines de grossesse. Il n'y a donc pas d'objection éthique à l'allongement du délai d'IVG.
Je n'ignore pas que l'acte médical en lui-même n'est pas tout à fait anodin pour le médecin qui le pratique. J'en ai discuté avec des gynécologues, qui connaissent bien cet acte : considérer que l'exercice de la médecine ou de la chirurgie ne conduit pas à ne pratiquer que des gestes agréables et, surtout, que c'est le choix de la femme demandant une IVG qui doit l'emporter, ses raisons étant tout à fait respectables et s'imposant au médecin, est un choix moral.
Deuxièmement, s'agissant des IVG instrumentales, que l'article 1 er bis autorise les sages-femmes à pratiquer à titre pérenne et non plus expérimental, il n'y a aucune raison de différencier ses modalités temporelles d'avec celles applicables aux médecins. Aussi l'Assemblée nationale a-t-elle harmonisé les délais. Cette décision est importante, parce qu'elle reconnaît aussi le rôle central de la filière maïeutique dans l'ensemble de la santé sexuelle et reproductive des femmes, en particulier, en l'espèce, dans la réalisation de l'IVG. Je précise que l'IVG instrumentale ne pourra bien entendu intervenir que dans un établissement de santé et que les exigences préalables de formation et d'expérience seront précisées par décret. Je me félicite de cet alignement, que j'appelais déjà de mes voeux en première lecture au Sénat.
Troisièmement, l'Assemblée nationale a fait le choix de maintenir la clause de conscience spécifique. Pour ma part, je considère que celle-ci n'a aucune utilité réelle, puisque l'ensemble des soignants disposent d'une clause de conscience générale et peuvent, à ce titre, refuser de procéder à tout acte médical ou chirurgical qui leur semblerait contraire à leur éthique, voire à leurs préconisations thérapeutiques. À mon sens, la double clause de conscience a pour seule vocation de faire de l'IVG un acte médical à part.
Pour autant, le sujet est clos : l'Assemblée nationale l'a conservée en deuxième lecture et je ne souhaite pas, par souci du compromis, rouvrir le débat par amendement. Au reste, je sais que, depuis la loi Veil, l'accès des femmes à l'IVG et sa législation ont résulté d'une somme d'avancées, mais aussi d'une somme importante de compromis. Puisque c'en est l'esprit, conservons-le...
Je vous proposerai bien entendu d'adopter le texte transmis par l'Assemblée nationale.
Mme Florence Lassarade . - Ma position sur le sujet est claire : je ne suis pas du tout favorable à l'allongement de la durée du recours à l'IVG.
Comme l'a indiqué récemment le professeur Nisand, le passage du délai de dix à douze semaines a conduit de nombreux médecins à refuser de pratiquer l'IVG : il représentait déjà un saut sur le plan psychologique.
Ne risque-t-on pas, dans quelques années, de nous dire que la modernité serait de passer de quatorze à seize semaines ?
M. Alain Milon . - Le passage de dix à douze semaines de grossesse avait été proposé, à l'époque, par M. le professeur Nisand, lequel est désormais opposé au passage de douze à quatorze semaines.
En termes de semaines d'aménorrhée, passer de quatorze à seize semaines n'est pas du tout anodin : l'amas cellulaire qu'est l'embryon est devenu un foetus, l'ossification et le système nerveux sont en train de se mettre en place et l'avortement se fait non plus par aspiration, mais par un acte chirurgical. Pour les obstétriciens, cet acte est beaucoup plus traumatisant et, pour la femme enceinte, le danger, en particulier de destruction instrumentale de l'utérus, est considérable.
Nous sommes donc extrêmement opposés à ce passage de quatorze à seize semaines d'aménorrhée. Il faut que nous restions à douze semaines de grossesse. J'interviendrai sur ce sujet en séance, au nom de mon groupe.
Mme Laurence Cohen . - Il est extrêmement important que nous puissions examiner cette proposition de loi, qui répond à l'attente d'un certain nombre de femmes et qui est juste par rapport au droit des femmes de pouvoir choisir d'être mère et de maîtriser le fait de porter ou non un bébé.
Je comprends tout à fait que des gynécologues n'acceptent pas de pratiquer cet acte, comme tout acte du reste. Libre à eux !
Pourquoi l'acte d'IVG est-il le seul à être frappé d'une double cause de conscience ? Il faut revenir à l'histoire : au moment où l'IVG est reconnue sur le plan législatif, grâce à la bataille portée magistralement par Mme Veil, au rapport de forces qui se modifie et à la mobilisation des femmes et des féministes, il faut un compromis, dont la double clause de conscience fait partie.
Il convient de réfléchir à cette équation. À l'époque, on constate des inégalités sociales terribles, seules les femmes ayant les moyens de se faire avorter partant à l'étranger - je vous rappelle qu'un certain nombre de procès retentissants ont fait progresser la cause de l'IVG. Mais force est de constater qu'existent, aujourd'hui encore, des blocages importants : en 2022, comme autrefois, certaines femmes sont obligées de se rendre à l'étranger.
Je trouve un peu curieux que, sur ce sujet, on ne compare pas la situation des femmes de notre pays à celle des pays voisins, où le délai est majoritairement beaucoup plus ample. On ne se compare que lorsque cela nous arrange...
Il me semble que, pour donner les mêmes chances et les mêmes droits à toutes les femmes, il est nécessaire de voter le prolongement du délai de l'IVG. Cela me semble un acte d'égalité des droits, de justice et d'émancipation.
Si un travail pédagogique doit effectivement être mené autour des moyens de contraception, n'oublions pas que de nombreuses femmes sous contraceptif recourent aussi à l'avortement.
Toutes ces données nous incitent à voter cette proposition de loi.
Mme Chantal Deseyne . - La question de l'interruption volontaire de grossesse ne se limite pas à un nombre de semaines. Une interruption de grossesse constitue un véritable traumatisme pour la femme concernée comme pour les chirurgiens chargés de procéder à l'intervention. En outre, plus elle est tardive, plus elle est traumatisante.
Si le délai de recours à l'IVG passait de douze à quatorze semaines, nous pouvons légitimement nous demander ce qui empêcherait de l'allonger encore davantage par la suite.
À ce stade de la grossesse, il faut procéder à un démembrement du foetus pour pouvoir l'extraire, ce qui est particulièrement traumatisant. Les femmes ont besoin d'une prise en charge plus précoce pour pouvoir réaliser leur IVG plus tôt.
Pour toutes ces raisons, en grande majorité, le groupe Les Républicains ne votera pas ce texte.
Mme Michelle Meunier . - En définitive, nous en revenons toujours au même débat. L'IVG n'est pas un traumatisme, c'est un droit : le droit pour les femmes de disposer de leur corps, qui, en 2022, est loin d'être acquis.
La double clause de conscience n'est pas nécessaire pour cet acte. Il se présentera d'ailleurs sans doute d'autres propositions de loi visant à la supprimer. Cet acte, qui est un acte médical comme les autres, n'a pas à être abordé sous l'angle suspicieux de l'irresponsabilité des femmes.
Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera cette proposition de loi.
M. Daniel Chasseing . - À quatorze semaines de grossesse, l'embryon est passé au stade du foetus et sa formation neuronale a commencé. De nombreux gynécologues-obstétriciens refuseront de pratiquer l'IVG à ce stade.
À titre personnel et sans me prononcer pour le reste de mon groupe, je ne voterai pas la proposition de loi.
Nous devons faire des efforts en matière pédagogique, notamment au lycée. La prise en charge à 100 % par la sécurité sociale des moyens de contraception pour les jeunes filles, inscrite dans le projet de loi de finances pour 2022, constitue en la matière une avancée importante. Nous devons agir de manière générale par le biais de la prévention.
Je suis favorable à l'IVG, mais défavorable au passage du délai de recours à l'IVG de douze à quatorze semaines.
Mme Pascale Gruny . - L'IVG est un droit, auquel nous ne sommes pas du tout opposés, contrairement à ce que vous laissez entendre. Nous sommes opposés en revanche à l'allongement du délai dans lequel il est possible d'y recourir.
De nombreux gynécologues et sages-femmes m'ont interpellée sur cette question. Sur les huit gynécologues que compte ma circonscription, un seul pourrait accepter de pratiquer une IVG à quatorze semaines de grossesse.
Les délais importants qui sont constatés aujourd'hui tiennent au manque de médecins et de sages-femmes. De la même façon que l'on prend prétexte du manque de soins palliatifs pour proposer de légaliser l'euthanasie, on part du constat de ce manque d'effectifs pour proposer l'allongement du délai de recours à l'IVG.
Or une IVG pratiquée à quatorze semaines de grossesse n'est pas un acte anodin. Les sages-femmes ne sont pas médecins. Elles se retrouveraient seules en ce cas, face à une femme qui risquerait de décéder en cas de problème. Les médecins comme les sages-femmes choisissent en outre leur métier pour la vie. Il s'agit donc pour eux d'un acte compliqué.
Je ne voterai pas ce texte. Si le manque de médecins, notamment gynécologues, est une réalité, nous ne devons pas le pallier en mettant en danger et en traumatisant les femmes ainsi que les médecins et les sages-femmes.
Mme Victoire Jasmin . - Les femmes qui ont les moyens de le faire se rendent à l'étranger pour pratiquer des IVG au-delà de douze semaines de grossesse. Les autres se trouvent parfois en grande détresse, et mettent au monde des enfants non désirés qui sont quelquefois maltraités. Nous devons faire les efforts nécessaires pour répondre à cette situation. Il arrive également que certaines femmes s'endettent pour pouvoir aller avorter à l'étranger.
Des efforts doivent être menés en matière de prévention, notamment auprès des familles et des jeunes adultes - particulièrement les étudiants -, à l'image de ce que font les infirmières scolaires.
Mme Mélanie Vogel . - De même que l'interdiction de l'IVG n'a jamais eu pour conséquence de la faire disparaître, mais seulement d'augmenter le nombre d'IVG dangereuses, il est illusoire de penser que les femmes ne recourront pas à l'IVG après douze semaines de grossesse si ce recours n'est pas autorisé en France. L'IVG est en effet autorisée au Royaume-Uni jusqu'à vingt-quatre semaines, aux Pays-Bas jusqu'à vingt-deux semaines, en Suède jusqu'à dix-huit semaines, en Espagne et en Autriche jusqu'à quatorze semaines.
La seule question qui se pose est celle de savoir si les femmes peuvent avoir accès en France à ce droit librement et dans des conditions acceptables, ou si on les pousse à y recourir dans des conditions difficiles, précaires et douloureuses à l'étranger.
Le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires votera cette proposition de loi.
Mme Émilienne Poumirol . - Cette proposition de loi a été présentée, car 2 000 femmes continuent à se rendre à l'étranger pour pratiquer des IVG. De plus, trois femmes qui avortent sur quatre disposaient d'une contraception avant de tomber enceintes.
Le CCNE a rendu un avis favorable sur cette proposition, en soulignant qu'un avortement à quatorze semaines de grossesse ne présentait pas plus de danger qu'un avortement pratiqué à douze semaines.
Le parcours des femmes est par ailleurs loin d'être facilité en la matière, de nombreux centres ayant fermé. Il est marqué par des inégalités territoriales et sociales. Les femmes ayant recours à des IVG tardives se trouvent ainsi majoritairement dans les classes sociales les plus pauvres. En outre, toutes les femmes n'ont pas les moyens de se rendre à l'étranger pour avorter. Le droit pour les femmes de disposer de leur corps doit être respecté et son accès amélioré.
Un véritable parcours d'éducation sexuelle et reproductive est par ailleurs nécessaire. Un quart des lycées n'en proposent pas, alors qu'il figure parmi les obligations des programmes.
Mme Annie
Delmont-Koropoulis
. - Avant d'arriver à des gestes
traumatisants pour les femmes comme pour les professionnels de santé,
des efforts considérables peuvent être menés en
matière de prévention
- notamment dans les centres de
protection maternelle et infantile (PMI).
Pour avoir rencontré de nombreuses sages-femmes et de nombreux médecins qui pratiquaient l'avortement chirurgical, et pour avoir assisté également à cette opération, je peux témoigner de son caractère traumatisant. On voit sortir en effet du corps de la femme des jambes, des pieds, ou des morceaux de tête. À quatorze semaines de grossesse, nous avons affaire à un foetus. À l'échographie, c'est un bébé qui suce son pouce !
Il faut donc miser sur la prévention, en sachant que, dans les cas extrêmes, il est toujours possible de recourir à l'avortement thérapeutique.
Mme Corinne Imbert . - Le CCNE a dit exactement qu'il considérait qu'il n'y avait « pas d'objection éthique à allonger le délai d'accès à l'IVG de deux semaines ». Il a également souligné que « la pratique d'une IVG ne pouvant être considérée comme un acte médical ordinaire, la clause de conscience spécifique en soulignait la singularité » et s'est dit favorable à son maintien pour les médecins et les sages-femmes. Le CCNE n'a donc pas précisément rendu un avis favorable sur cette proposition de loi...
Mme Catherine Deroche , présidente . - Je rappelle que notre collègue Corinne Imbert représente le Sénat au CCNE.
M. Alain Milon . - Il est un peu facile de se comparer aux autres pays uniquement lorsque le résultat de la comparaison va dans le sens de ce que l'on défend. Si les délais de recours à l'IVG sont plus longs en Grande-Bretagne qu'en France, il faut alors également souligner que la gestation pour autrui, à laquelle certains membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont opposés, est autorisée en Israël pour les couples homosexuels garçons.
Par ailleurs, si nous sommes effectivement au XXI e siècle, le serment d'Hippocrate existe toujours. Les médecins sont chargés de donner et de faciliter la vie, non de donner la mort, c'est pourquoi une clause de conscience spécifique a été inscrite dans la loi Veil.
Enfin, de nombreuses femmes se rendent à l'étranger pour pratiquer des IVG parce qu'elles ont passé le délai de douze semaines. Or ce dépassement tient parfois au délai de réflexion qui leur est imposé, que nous pourrions donc envisager de réduire en cas d'urgence.
Mme Catherine Deroche , présidente . - Sauf erreur de ma part, ce délai est désormais de deux jours.
M. René-Paul Savary . - Dans le communiqué de presse présentant son opinion sur l'allongement du délai légal d'accès à l'IVG, le CCNE précise également qu'il ne saurait cautionner une mesure prise « pour pallier les multiples dysfonctionnements matériels, économiques, juridiques d'une politique de santé publique majeure pour les femmes. »
Mme Laurence Rossignol , rapporteure . - Je précise tout d'abord que 70 % des IVG sont médicamenteuses. L'immense majorité des IVG se fait donc dans un délai restreint. De nombreux médecins préférant les IVG médicamenteuses aux IVG instrumentales incitent d'ailleurs les femmes ayant une conscience précoce de leur grossesse à recourir aux premières.
Entre 2 000 et 3 000 des IVG restantes donnent lieu à des déplacements à l'étranger.
D'autres gynécologues-obstétriciens tout aussi sérieux que le professeur Nisand, et qui sont confrontés à cet acte dans leur pratique, militent pour l'allongement des délais de recours à l'IVG. À l'origine de la proposition de loi que je défends se trouvent en effet des médecins qui, confrontés à des cas difficiles, pratiquent parfois des IVG en marge de la loi ou orientent les femmes concernées vers une interruption médicale de grossesse.
Or cette dernière intervention requiert une procédure longue, nécessitant notamment la réunion d'un comité de médecins, et s'avère particulièrement douloureuse, un accouchement étant provoqué à l'issue du foeticide. L'idée est d'éviter d'avoir à en arriver là.
Il faut tenir compte des propos de tous les gynécologues-obstétriciens, ceux qui pratiquent encore cet acte comme ceux qui ne le pratiquent plus. Je ne les entends pas de la même façon.
Si une IVG pratiquée à quatorze semaines est plus dangereuse pour les femmes, comme vous le pensez, raison de plus pour le faire en France, plutôt que d'envoyer ces femmes à l'étranger où elles s'exposent à de plus grands risques, les centres n'y étant pas soumis aux mêmes règles sanitaires qu'en France.
Par ailleurs, vous dites que l'IVG est un traumatisme pour les femmes. En réalité, il existe en la matière autant de situations que de femmes. Toutes les perceptions sont différentes. Certaines femmes ont été traumatisées par une grossesse non désirée qu'elles ont dû mener à terme, d'autres encore par le viol qu'elles ont subi, plutôt que par l'IVG qui a pu constituer dans ce dernier cas une libération. Il faut en finir avec l'assignation à traumatisme ! Les parcours des femmes sont divers, leurs IVG le sont tout autant.
De nombreux médecins refusent déjà de pratiquer des IVG. Il n'est pas certain que ceux qui acceptent d'en pratiquer s'y refuseront à quatorze semaines de grossesse. Il s'en trouvera de toute façon pour le faire. Les médecins sont en outre confrontés en permanence à la nécessité de prendre des décisions et peuvent mettre en avant leur clause de conscience, générale ou spécifique, pour y répondre. Certains peuvent ainsi hésiter à pratiquer une double mastectomie sur une jeune femme qui redoute un cancer génétique du sein. Et il est difficile pour les femmes d'obtenir une ligature des trompes, de nombreux médecins décidant souvent à leur place ce qui est bon pour elles.
En matière de santé sexuelle et reproductive, je respecte le point de vue des médecins. Leur clause de conscience leur permet de ne pas pratiquer des actes qu'ils jugeraient contraires à leur éthique. Ce sont cependant des droits pour les femmes, qu'il faut faire respecter.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1 er
L'article 1 er n'est pas adopté.
Article 1 er bis
L'article 1 er bis n'est pas adopté.
Article 1 er ter A (supprimé)
L'article 1 er ter A demeure supprimé.
Article 1 er ter
L'article 1 er ter n'est pas adopté.
Article 2
L'article 2 n'est pas adopté.
Article 2 bis A
L'article 2 bis A n'est pas adopté.
Article 2 bis
L'article 2 bis n'est pas adopté.
Article 2 ter
L'article 2 ter n'est pas adopté.
Article 3
L'article 3 n'est pas adopté.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance portera en conséquence sur le texte de la proposition de loi adopté par l'Assemblée nationale.