CHAPITRE III

POURSUIVRE LES ACTIONS DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE

Article 15
Modification du droit de communication bancaire
pour optimiser les investigations

Cet article tend à étendre aux agents des organismes de sécurité sociale la faculté d'exercer le droit de communication par voie dématérialisée.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

I - Le dispositif proposé : l'ouverture aux agents des organismes de sécurité sociale de la possibilité d'exiger la communication de documents par voie électronique

A. Le droit de communication dont disposent les organismes de sécurité sociale se heurte au libre choix du support de transmission des informations par les tiers sollicités

Le droit de communication consacré par le code de la sécurité sociale 287 ( * ) permet d'obtenir, sans que s'y oppose le secret professionnel , les documents et informations nécessaires :

- au contrôle par les agents des organismes de sécurité sociale de la sincérité et de l'exactitude des déclarations souscrites ou de l'authenticité des pièces produites en vue de l'attribution et du paiement des prestations servies par ces organismes ;

- à l'accomplissement des missions de contrôle et de lutte contre le travail dissimulé des agents chargés du contrôle du recouvrement des cotisations du régime général 288 ( * ) (Urssaf 289 ( * ) et CGSS 290 ( * ) ) et des régimes agricoles 291 ( * ) (MSA 292 ( * ) ) ;

- au recouvrement par les agents des organismes de sécurité sociale des prestations versées indûment ou des prestations recouvrables sur la succession .

Ces informations peuvent être sollicitées, entre autres, auprès des établissements bancaires.

Il est prévu que ce droit s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents et peut s'accompagner de la prise immédiate d'extraits et de copies. Les documents et informations sont communiqués à titre gratuit dans les trente jours qui suivent la réception de la demande .

Le droit de communication peut également porter sur des informations relatives à des personnes non identifiées. Les données ainsi obtenues peuvent alors faire l'objet d'une interconnexion avec les données des Urssaf et des CGSS au titre de l'accomplissement de leurs missions de contrôle et de lutte contre le travail dissimulé.

Des pénalités s'appliquent en cas de silence gardé ou de refus de déférer à une demande de communication :

- 1 500 euros par cotisant, assuré ou allocataire concerné lorsque la demande est nominative, sans que le total de la pénalité puisse excéder 10 000 euros ;

- 5 000 euros lorsque la demande n'est pas nominative, cette pénalité s'appliquant pour chaque demande, dès lors que tout ou partie des documents ou informations sollicités n'est pas communiqué ;

- le double de ces montants en cas de récidive de refus ou de silence gardé du tiers dans le délai de cinq ans à compter de l'expiration du délai de trente jours octroyé à celui-ci pour faire droit à la première demande de l'organisme de sécurité sociale.

En outre, l'organisme ayant usé de ce droit de communication est tenu d'informer la personne physique ou morale à l'encontre de laquelle est prise la décision de supprimer le service d'une prestation ou de mettre des sommes en recouvrement de la teneur et de l'origine des informations et documents obtenus auprès de tiers sur lesquels il s'est fondé pour prendre cette décision 293 ( * ) . Une copie de ces documents doit être communiquée avant la mise en recouvrement ou la suppression du service de la prestation à la personne qui en fait la demande.

Or, d'après l'étude d'impact du PLFSS pour 2022, le délai de réponse des tiers aux demandes formulées par les Urssaf, les CGSS et les caisses de MSA est parfois extrêmement long .

D'autre part, compte tenu de la nécessité d'examiner rapidement les informations communiquées, le libre choix du support de transmission des documents laissé aux tiers sollicités, et plus particulièrement le recours par ceux-ci à des documents au format papier, souvent très volumineux et difficiles à exploiter , complique fortement l'accomplissement des missions des agents chargés du contrôle.

En vue de remédier à des difficultés similaires, certains agents publics se sont vu accorder la possibilité d'exercer le droit de communication par voie dématérialisée . Il s'agit notamment :

- depuis 2007 294 ( * ) , des officiers de police judiciaire en cas de réquisition judiciaire 295 ( * ) ;

- depuis 2015 296 ( * ) , des agents de l'administration fiscale en vue de l'établissement de l'assiette, du contrôle et du recouvrement des impôts 297 ( * ) ;

- depuis 2020 298 ( * ) , des agents de Pôle emploi chargés de la prévention des fraudes en vue du contrôle de la sincérité et de l'exactitude des déclarations souscrites et de l'authenticité des pièces produites en vue de l'attribution et du paiement des allocations, des aides ainsi que de toute autre prestation servie par Pôle emploi 299 ( * ) .

Une telle faculté pourrait donc être utilement étendue aux agents des organismes de sécurité sociale afin de faciliter l'exercice de leurs missions de contrôle en réduisant le délai de transmission des documents et informations sollicités et en évitant les erreurs de ressaisie.

B. Le PLFSS pour 2022 vise à octroyer aux agents des organismes de sécurité sociale la faculté d'exiger la communication de documents par voie dématérialisée

• Le I modifie l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale afin d'actualiser la référence aux dispositions du code du travail définissant la mission de lutte contre le travail dissimulé des agents chargés du contrôle du recouvrement des cotisations du régime général et des régimes agricoles, en substituant à la mention de l'article L. 324-12, abrogé en 2008, celle des articles L. 8271-1 et suivants, qui contient depuis lors les dispositions relatives à la lutte contre le travail dissimulé.

• Le II tend à préciser, dans le même article, que la communication des documents et informations sollicités est effectuée par voie dématérialisée sur demande de l'agent chargé du contrôle ou du recouvrement .

D'après l'étude d'impact, le gain d'efficacité pour les organismes de sécurité sociale pourrait être estimé à 0,5 % de leurs résultats de l'année écoulée , soit, en 2022, 1,2 million d'euros pour la branche maladie, 2,5 millions pour la branche famille et 1,4 million pour la branche vieillesse, pour un total de six millions d'euros .

II - Les position de l'Assemblée nationale : une adoption sans modification

Cet article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale.

III - La position de la commission : une mesure nécessaire au renforcement de la lutte contre la fraude

La commission considère que l'attribution aux agents des organismes de sécurité sociale de la possibilité d'exiger la communication de documents par voie électronique, dont disposent déjà d'autres agents publics, devrait permettre d'accroître la performance du recouvrement et d'améliorer l'efficacité de la lutte contre la fraude aux prestations sociales.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.


* 287 Article L. 114-19 du code de la sécurité sociale.

* 288 Article L. 243-7 du code de la sécurité sociale.

* 289 Unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.

* 290 Caisses générales de sécurité sociale. Elles assurent, dans les départements d'outre-mer, la gestion des risques maladie et vieillesse et du recouvrement des cotisations sociales.

* 291 Article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime.

* 292 Mutualité sociale agricole.

* 293 Article L. 114-21 du code de la sécurité sociale.

* 294 Loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, article 69.

* 295 Article 60-1 du code de procédure pénale.

* 296 Loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, article 21.

* 297 Article L. 81 du Livre des procédures fiscales.

* 298 Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, article 268.

* 299 Article L. 5312-13-2 du code du travail.

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