PROPOSITION DE LOI VISANT À
RENFORCER
LA RÉGULATION ENVIRONNEMENTALE DU NUMÉRIQUE PAR
L'AUTORITÉ DE RÉGULATION
DES COMMUNICATIONS
ÉLECTRONIQUES,
DES POSTES ET DE LA DISTRIBUTION DE LA
PRESSE :
EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE
Article unique
Collecte de
données environnementales par l'Arcep
Cet article vise à donner à l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) la capacité de collecter des données relatives à l'impact environnemental du numérique.
La commission a adopté cet article sans modification.
I. Un pouvoir de collecte de données environnementales par l'Arcep, initialement inscrit dans la proposition de loi « REEN »
Pour prévenir l'accroissement de l'impact environnemental du numérique, le rapport de la mission d'information sénatoriale de juin 2020 82 ( * ) avait préconisé la mise en place d'une véritable régulation environnementale du secteur, dont devait être chargée l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). Le rapport proposait notamment de bâtir une « régulation par la donnée » , en mobilisant et en consolidant les connaissances des pouvoirs publics sur le sujet de l'impact environnemental du numérique et en utilisant ces données et connaissances pour les mettre à disposition du public. La « régulation par la donnée » devait également permettre au régulateur de contrôler le respect d'éventuels engagements ou d'éventuelles obligations imposés aux opérateurs et aux fournisseurs de contenus.
L'article 23 bis de la proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France (« REEN »), adoptée en première lecture par le Sénat en janvier 2021, complétant l'article L. 36-6 du code des postes et des communications électroniques, visait ainsi à confier l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) un p ouvoir de recueil des données sur les impacts environnementaux des réseaux, des services de communications électroniques et des services de communication au public. Cet article devait notamment permettre à l'Arcep d'élaborer le baromètre environnemental du secteur du numérique, que la commission avait appelé de ses voeux. Ce dispositif devait également servir de support à l'application des dispositions de la proposition de loi « REEN » , relatives à l'écoconception des services de communication au public en ligne (article 16) et aux engagements environnementaux des opérateurs de réseaux (article 23).
Lors de l'examen du projet de loi « Climat et résilience », l'Assemblée nationale avait adopté un article 5 ter , dont le coeur du dispositif s'inspirait largement de l'article 23 bis de la proposition de loi « REEN », en l'étendant cependant à l'ensemble de la chaîne de valeur numérique, des centres de données aux terminaux en passant par les réseaux. Lors de l'examen en commission de la proposition de loi « REEN » à l'Assemblée nationale, les députés avaient par ailleurs et en conséquence supprimé du texte sénatorial l'article 23 bis .
À l'occasion de l'examen en commission du projet de loi « Climat et résilience », la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat avait regretté que les « amendements afférents à la question de l'empreinte environnementale du numérique n'aient pas été réservés à l'examen concomitant par l'Assemblée nationale de la proposition de loi “ REEN ” ». Au-delà de cette critique d'opportunité politique , le Sénat avait également considéré de nombreux amendements relatifs à l'empreinte environnementale du numérique comme étant contraire à l'article 45 de la Constitution, car n'ayant pas de lien, même indirect, avec le texte initialement déposé.
Maintenu en commission mixte paritaire (CMP) malgré ces critiques, l'article 5 ter - devenu l'article 16 du texte final 83 ( * ) - a finalement été censuré sur le fondement de l'article 45 de la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel du 13 août 2021 84 ( * ) .
II. Un article reprenant à l'identique la disposition censurée par le Conseil constitutionnel dans la loi « Climat et résilience »
Le présent article reprend à l'identique la disposition censurée par le Conseil constitutionnel dans la loi « Climat et résilience ».
Le 1° de l'article unique modifie l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, afin qu'y soient définies les notions de systèmes d'exploitation, de fournisseurs de systèmes d'exploitation, de centres de données et d'opérateurs de centre de données.
Le 2° de l'article unique modifie l'article L. 32-4 du code des postes et des communications électroniques afin d'habiliter l'Arcep à recueillir auprès des services de communication au public en ligne (2° bis de l'article L. 32-4), des fournisseurs de services de communications électroniques au public en ligne, des opérateurs de centre de données, des fabricants d'équipements terminaux, des équipementiers de réseaux et fournisseurs de systèmes d'exploitation (2° ter , nouveau, de l'article L. 32-4), les informations ou documents nécessaires relatifs à l'empreinte environnementale du secteur des communications électroniques ou des secteurs étroitement liés à celui-ci 85 ( * ) . Ces prérogatives doivent permettre à l'Arcep de s'assurer du respect par ces personnes des principes définis à l'article L. 32-1 - article qui lui confie la responsabilité de prendre des mesures raisonnables et proportionnées en vue de remplir divers objectifs à l'instar de l'atteinte d'un niveau élevé de protection de l'environnement - ainsi que des obligations qui pourraient leur être imposées par le code des postes et des communications électroniques ou par les textes pris pour son application.
Le 3° de l'article unique modifie l'article L. 36-6 du code des postes et des communications électroniques afin de permettre à l'Arcep de préciser , après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, les règles concernant les contenus et les modalités de mise à disposition , y compris à des organismes tiers recensés par l'Autorité, d'informations fiables relatives à l'empreinte environnementale des services de communication au public en ligne, des équipements terminaux, des systèmes d'exploitation, des centres de données, des réseaux, notamment des équipements les constituant, et des services de communications électroniques, ainsi que la détermination des indicateurs et des méthodes employés pour la mesurer.
Le 4° de l'article unique modifie l'article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques de manière à intégrer les acteurs mentionnés par le présent article - opérateurs de centre de données, fabricants de terminaux, équipementiers de réseaux, fournisseurs de système d'exploitation - dans le champ du pouvoir de sanction de l'Arcep en plus des exploitants de réseau, des fournisseurs de services de communications électroniques, des fournisseurs de services de communication au public en ligne et des gestionnaires d'infrastructures d'accueil déjà visés par cet article L. 36-11. Les sanctions applicables en cas de méconnaissance des obligations en matière de transmission de données environnementales seraient alors proches de celles par ailleurs prévues par l'article L. 36-11 86 ( * ) .
Le 5° de l'article unique modifie l'article L. 40 du code des postes et des communications électroniques afin de permettre aux fonctionnaires et agents du ministère chargé des communications électroniques, de l'Arcep et de l'Agence nationale des fréquences - habilités par le ministre chargé des communications électroniques et assermentés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État - d'accéder aux locaux, terrains ou moyens de transport à usage professionnel utilisés par les personnes assujetties aux obligations de transmission de données environnementales, en vue de rechercher et de constater les infractions, de demander la communication de tous documents professionnels et d'en prendre copie, de recueillir, sur convocation ou sur place, les renseignements et justifications.
Enfin, le 6° de l'article unique complète le 3° de l'article L. 135 du code des postes et des communications électroniques afin d'intégrer au rapport sur l'état de l'internet de l'Autorité un bilan de l'empreinte environnementale du secteur des communications électroniques, des terminaux et des centres de données.
III. Un texte dédié, indispensable à l'adoption conforme de la proposition de loi « REEN »
La commission regrette le choix fait par l'Assemblée nationale et le Gouvernement d'extraire le sujet de la régulation environnementale du numérique de la proposition de loi « REEN » pour l'inscrire dans le projet de loi « Climat et résilience », cette décision ayant conduit à une censure du Conseil constitutionnel, comme l'avait d'ailleurs craint la commission lors de l'examen du projet de loi.
La commission a toutefois opté pour une adoption conforme de la proposition de loi « REEN », ce qui empêche un rétablissement de l'article 23 bis .
La disposition ne pouvait donc être « sauvée » que dans le cadre d'un texte dédié . Telle est la logique de la proposition de loi à article unique soumise à l'examen des rapporteurs. La commission approuve cette approche et a donc adopté ce texte sans modification.
La commission a adopté l'article unique sans modification.
* 82 Rapport d'information n° 555 (2019-2020) de MM. Guillaume Chevrollier et Jean-Michel Houllegatte, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, Pour une transition numérique écologique.
* 83 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
* 84 Décision n° 2021-825 DC du 13 août 2021 - Loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
* 85 L'Arcep peut d'ores et déjà recueillir de telles données auprès des opérateurs de réseaux sur le fondement du 1° du I de l'article L. 32-4.
* 86 L'article 36-11 prévoit un sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 3 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé par l'entreprise en cause au cours de l'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en oeuvre, taux qui est porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante. À défaut d'activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 €. Ce montant est porté à 375 000 € en cas de nouvelle violation de la même obligation.