N° 21
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022
Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 octobre 2021
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant au gel des matchs de football le 5 mai ,
Par M. Thomas DOSSUS,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon , président ; M. Max Brisson, Mmes Laure Darcos, Catherine Dumas, M. Stéphane Piednoir, Mme Sylvie Robert, MM. David Assouline, Julien Bargeton, Pierre Ouzoulias, Bernard Fialaire, Jean-Pierre Decool, Mme Monique de Marco , vice-présidents ; Mme Céline Boulay-Espéronnier, M. Michel Savin, Mmes Marie-Pierre Monier, Sonia de La Provôté , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, Jérémy Bacchi, Mmes Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, Toine Bourrat, Céline Brulin, Samantha Cazebonne, M. Yan Chantrel, Mme Nathalie Delattre, M. Thomas Dossus, Mmes Sabine Drexler, Béatrice Gosselin, MM. Jacques Grosperrin, Jean Hingray, Jean-Raymond Hugonet, Mme Else Joseph, MM. Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Michel Laugier, Pierre-Antoine Levi, Jean-Jacques Lozach, Jacques-Bernard Magner, Jean Louis Masson, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Damien Regnard, Bruno Retailleau, Mme Elsa Schalck, M. Lucien Stanzione, Mmes Sabine Van Heghe, Anne Ventalon, M. Cédric Vial .
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : |
2547 , 2655 et T.A. 404 |
Sénat : |
318 (2019-2020) et 22 (2021-2022) |
AVANT-PROPOS
La proposition de loi visant au gel des matchs de football le 5 mai a été déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale le 30 décembre 2019 par Michel Castellani et adoptée en séance publique par les députés le 13 février 2020.
Ce texte constitue l'aboutissement d'une démarche conduite par le Collectif des victimes de la catastrophe de Furiani qui a eu lieu le 5 mai 1992.
Si l'intervention du législateur dans le champ mémoriel pose toujours question, il convient de souligner que le Parlement n'a été saisi qu'en dernier recours, après que toutes les initiatives visant à trouver un compromis permettant de commémorer ce drame ont échoué depuis près de trente ans. Le texte qui est proposé circonscrit en outre très précisément la nature du gel des matchs tous les 5 mai de telle sorte qu'un équilibre semble se dessiner entre la nécessité de rendre pleinement hommage aux victimes de cette catastrophe et le respect des compétences de la Fédération française de football (FFF) et de la Ligue de football professionnel (LFP) pour organiser les matchs de football.
La proposition de loi prend acte des échanges infructueux qui ont eu lieu depuis une trentaine d'années entre les responsables du Collectif des victimes du 5 mai 1992 et les autorités en charge du football français. Elle en tire les conséquences en consacrant la nécessité d'arrêter dans la loi des modalités de commémoration à la hauteur du drame qui a eu lieu tout en tenant compte de la nécessité de limiter les contraintes imposées à l'organisation des matchs de football tous les 5 mai .
I. UNE TERRIBLE TRAGÉDIE DONT LE SOUVENIR NE DOIT PAS S'ESTOMPER
La proposition de loi trouve son origine dans une catastrophe qui, près de trente années plus tard, constitue toujours une blessure ressentie douloureusement par de nombreuses familles corses sur l'île comme sur le continent.
A. UNE CATASTROPHE ÉVITABLE SYMBOLE DES DÉRIVES DU SPORT BUSINESS
Le 5 mai 1992 devait se tenir la demi-finale de la Coupe de France au stade Armand-Cesari de Furiani opposant le SC Bastia à l'Olympique de Marseille. Afin de porter la capacité du stade à 18 000 places , une tribune de 750 places a été détruite pour l'occasion et remplacée par une structure métallique temporaire de 9 300 places. Malgré les réserves successives formulées par la commission de sécurité sur la conformité des installations , la tenue du match a été confirmée par les instances du football.
À ce problème de conformité des installations s'est ajouté un second facteur concernant le respect de la jauge puisque l'enquête a révélé qu'une « double billetterie » avait été mise en place avec pour conséquence que le nombre réel de spectateurs ne correspondait pas au nombre de places déclarées. Tous les ingrédients étaient donc réunis pour qu'un drame se produise .
Celui-ci ne tarde pas à arriver puisque si le match devait commencer à 20 h 30, dès 19 h 00 il apparaît que la tribune provisoire commence à vaciller sous l'action des spectateurs. Elle s'effondrera à 20 h 23 précipitant des milliers de personnes dans un immense fracas causant la mort de 19 personnes et en en blessant plus de 2 300.
Les procès en première instance et en appel qui se sont tenus en 1995 ont permis d'établir des responsabilités graves tant de la part des autorités administratives et sportives que des entreprises qui sont intervenues dans l'installation et le contrôle de la tribune. Toutefois la sanction pénale n'a pas permis de répondre pleinement aux attentes des victimes, ce qui explique la persistance depuis lors d'une forte attente de leur part et d'un besoin de reconnaissance du caractère national de ce drame.