N° 289
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021
Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 janvier 2021
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l' accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l' Union monétaire ouest-africaine ,
Par M. Jérôme BASCHER,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal , président ; M. Jean-François Husson , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet , vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel , secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Mme Nadine Bellurot, M. Christian Bilhac, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel .
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : |
2986 , 3602 et T.A. 530 |
Sénat : |
225 et 290 (2020-2021) |
L'ESSENTIEL
I. LA COOPÉRATION MONÉTAIRE ENTRE LA FRANCE ET LES ÉTATS MEMBRES DE L'UNION MONÉTAIRE OUEST-AFRICAINE EST ENCADRÉE PAR L'ACCORD DU 4 DÉCEMBRE 1973
Les accords de coopération monétaire signés par la France en Afrique forment la « Zone franc ». Cette expression peut se révéler trompeuse : la Zone franc regroupe deux zones monétaires distinctes - l'Union monétaire ouest-africaine [UMOA] et la Commission économique et monétaire d'Afrique centrale [Cemac] - ainsi que l'Union des Comores , soit quinze pays. Chaque ensemble dispose de sa propre monnaie (franc CFA de l'Afrique de l'Ouest, franc CFA de l'Afrique centrale, franc comorien) et de sa propre banque centrale (Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest, Banque des États de l'Afrique centrale, Banque centrale des Comores).
La coopération monétaire entre la France et les huit États membres de l'UMOA (Bénin, Burkina Faso, Gambie, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo) est régie par un accord signé le 4 décembre 1973. Il est complété par une convention de compte d'opérations, également signée au mois de décembre 1973 et modifiée à deux reprises (2005 et 2014).
II. LA RÉVISION DE L'ACCORD DE COOPÉRATION MONÉTAIRE MODERNISE SES PRINCIPES DE FONCTIONNEMENT, SANS REVENIR SUR SES CARACTÉRISTIQUES FONDAMENTALES
L'accord de coopération signé le 21 décembre 2019 à Abidjan vise à se substituer à celui conclu entre la France et les États membres de l'UMOA en 1973 , accord qui n'avait fait l'objet d' aucune modification ces quarante-six dernières années . Si cette stabilité témoigne en partie des avantages que procurait cette coopération monétaire pour l'UMOA, une modernisation des règles et des principes en vigueur était nécessaire, notamment au regard des critiques symboliques dont le franc CFA de l'Afrique de l'Ouest fait l'objet. Sur le plan économique, comme l'ont démontré nos collègues Nathalie Goulet et Victorin Lurel dans leur rapport d'information sur la Zone franc, les avantages de cette monnaie commune et de ses principes tendent à l'emporter sur ses inconvénients .
L'accord présenté au Parlement modifie certains paramètres de la coopération monétaire - fin de la présence des représentants français et de l'obligation de centralisation des réserves de change auprès du Trésor, mise en place de mécanismes de remontée d'informations - sans toucher aux piliers de cette coopération , soit la parité fixe avec l'euro et la garantie de convertibilité illimitée et inconditionnelle apportée par la France.
Les dispositions de l'accord de coopération entre la France et l'UMOA
Les grands principes de fonctionnement du franc CFA de l'Afrique de l'Ouest |
Accord de coopération entre la République française et les Républiques membres de l'Union monétaire ouest-africaine (1973) |
Accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l'Union monétaire ouest-africaine (2019) |
La convertibilité illimitée en euros : la France apporte une garantie de convertibilité illimitée et inconditionnelle au franc CFA : elle s'est engagée à répondre à toute demande de conversion des banques centrales de la Zone franc, notamment en cas d'épuisement de ses réserves de change. |
Article 1 er . Les modalités de la garantie d evront être précisées par une convention de compte d'opérations. |
Article 2 : principe inchangé . |
La parité fixe avec l'euro : depuis 1999, un euro vaut 655,957 francs CFA. |
Article 2 |
Article 2 : principe inchangé. |
La centralisation des réserves de change : la BCEAO doit obligatoirement déposer 50 % de ses réserves sur un compte d'opérations ouvert auprès du Trésor français. Ces dépôts sont rémunérés (taux plancher de 0,75 %) et bénéficient d'une garantie de change. |
Article 3. Les conditions seront définies dans la convention de compte d'opérations. |
Suppression de cette disposition. |
La liberté des transactions courantes et des mouvements de capitaux . |
Pas de disposition spécifique |
Pas de disposition spécifique |
La présence de représentants français dans les instances techniques de la BCEAO (conseil d'administration et conseil de politique monétaire) et de l'UMOA (commission bancaire). |
Article 10 : deux administrateurs sont désignés par la France pour participer au conseil d'administration de la BCEAO. |
Article 4 : le comité de politique monétaire de la BCEAO comprend une personnalité indépendante et qualifiée nommée par le Conseil des ministres de l'UMOA en concertation avec la France. Article 8 : la France pourra désigner à titre exceptionnel un représentant avec voix délibérative en cas de risque d'appel en garantie. |
Nouvelle disposition : la transmission d'informations techniques à intervalle régulier. |
Aucune disposition correspondante. |
Article 5 : la BCEAO devra transmettre régulièrement des informations techniques permettant à la France de suivre l'évolution du risque qu'elle couvre. Les parties à l'accord pourront par ailleurs se rencontrer, au niveau technique, en tant que de besoin. |
Nouvelle disposition : l'inscription dans le texte de la possibilité de demander une réunion à un niveau politique. |
Aucune disposition correspondante. |
Article 6 : l'un des signataires peut demander une réunion à un niveau politique, lorsque les conditions le justifient, notamment pour prévenir ou gérer une crise. |
Le rapporteur considère que ces changements, qui répondent à une demande émanant des États membres de l'UMOA, doivent être accompagnés par la France . Ils n'entrainent pas de risque nouveau pour la France et des mécanismes de suivi et « d'urgence » sont prévus en cas de risque d'appel de la garantie. Ainsi, dans le cadre du nouvel accord de coopération monétaire, le rôle de la France sera désormais strictement celui d'un garant financier .
Au regard de ces observations, et considérant qu'il faut soutenir la modernisation du cadre de coopération monétaire entre la France et les États membres de l'Union monétaire ouest-africaine, la commission des finances a adopté le présent projet de loi .