EXAMEN DU RAPPORT EN COMMISSION
(12 NOVEMBRE 2020)
Réunie le jeudi 12 novembre 2020 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2021, tome II du rapport général de M. Jean-François Husson, rapporteur général.
M. Claude Raynal , président . - Nous examinons les amendements du rapporteur général sur les articles de première partie du projet de loi de finances pour 2021, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je vous proposerai ce matin 29 amendements, sur la première partie du projet de loi de finances initiale pour 2021 qui comprend des dispositifs souvent techniques. Je note d'ailleurs que plusieurs articles visent en particulier à assurer la conformité de mesures législatives soit avec des normes européennes, soit avec des décisions jurisprudentielles. Bien sûr, des articles visent aussi à apporter davantage de soutien aux entreprises touchées par les conséquences de la crise sanitaire.
EXAMEN DES ARTICLES
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Avec l'amendement FINC.1, je vous propose de relever le plafond du quotient familial de 1 570 euros à 1 750 euros par demi-part pour l'impôt sur le revenu 2021, afin de redonner du pouvoir d'achat aux familles, dans un contexte particulièrement difficile de crise économique induite par l'épidémie de covid-19. La majorité sénatoriale présente régulièrement cette mesure de pouvoir d'achat.
L'amendement FINC.1 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Avec l'amendement FINC.2, je vous propose de supprimer deux autres « gages », qui n'ont pas été levés au sein de la troisième loi de finances rectificative pour 2020.
L'amendement FINC.2 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.3 amplifie la réduction du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée proposée par le Gouvernement, pour que le secteur industriel bénéficie pleinement de la baisse des impôts de production.
Pour éviter que la baisse d'impôts ne se traduise par un ressaut d'imposition neutralisant une partie du gain, le Gouvernement propose de réduire le taux du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée de 3 % à 2 %. Cette réduction n'est pas suffisante pour neutraliser intégralement le ressaut d'imposition ; c'est pourquoi je vous propose d'abaisser à 1,5 % le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, ce qui neutraliserait complètement le ressaut d'imposition. Nous sommes bien dans la logique poursuivie par la réforme, tout en épargnant les collectivités territoriales, puisque la diminution que nous proposons est neutre pour elles.
Mme Christine Lavarde . - Avec cet amendement, atteindrons-nous bien 10 milliards d'euros de baisse d'impôts de production, ou bien le ressaut de l'impôt sur les sociétés (IS) continuera-t-il de rogner cette baisse ?
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Non, le ressaut de l'IS est maintenu, donc la baisse d'impôts de production se situe plutôt à 8,2 milliards d'euros en rythme de croisière.
M. Claude Raynal , président . - À titre personnel, je suis réservé sur l'impact de cet article.
M. Pascal Savoldelli . - Je doute fort que cet amendement ne dégrade pas le solde des comptes publics...
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Les circonstances sont inédites, je propose d'être le plus juste dans l'engagement des réformes en préservant au mieux les ressources des collectivités territoriales, tout en garantissant l'engagement de l'État vis-à-vis des entreprises.
M. Claude Raynal , président . - Je m'interroge sur l'impact de cet article, car il est entièrement fonction de la répartition entre le montant de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et celui de la cotisation foncière des entreprises (CFE) des établissements industriels. De même, nous ne savons pas bien s'il touchera davantage les petites ou les grandes entreprises, sachant que les premières sont plus sensibles à la CFE, et les secondes à la CVAE...
L'amendement FINC.3 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Cet article autorise le contribuable à générer une moins-value imputable sur les plus-values de même nature lorsque ses titres sont annulés dans le cadre de la réduction totale du capital de la société dont il est associé, pour cause de pertes égales ou supérieures aux capitaux propres.
Avec l'amendement FINC.4, je vous propose d'étendre cette possibilité à l'hypothèse où la réduction du capital de la société n'est que partielle lorsque l'apurement est obligatoire. Cela éviterait que le contribuable n'assume la totalité de la perte dans cette hypothèse, tout en remédiant à l'existence d'un biais en faveur des opérations d'apurement des pertes par réduction de la valeur nominale des titres.
L'amendement FINC.4 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Cet article, introduit contre l'avis du Gouvernement, concerne le mécanisme fiscal incitatif, permettant l'imposition à taux réduit de la plus-value enregistrée par une entreprise lorsqu'elle cède un bien à une société prenant l'engagement d'y réaliser des logements. L'article permet à la société acquéreuse de demander à l'autorité administrative la prolongation du délai de quatre ans dont elle dispose pour transformer le bien, chaque année et de façon renouvelable. Avec l'amendement FINC.5, nous limitons cette possibilité de prolongation à un an renouvelable une fois, ce qui laisse, en tout, six années à l'acquéreur pour réaliser les logements.
L'amendement FINC.5 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Cet article relève de 7,63 millions à 10 millions d'euros le seuil de chiffre d'affaires en deçà duquel une petite et moyenne entreprise applique le taux réduit d'impôt sur les sociétés de 15 % sur une fraction de son bénéfice. Ce niveau ne fait en réalité que tenir compte de l'inflation, puisque ce seuil n'a pas évolué depuis le passage à l'euro en 2002. Avec l'amendement FINC.6, je vous propose de compléter le dispositif afin de relever le montant de la fraction de bénéfices éligible au taux réduit d'impôt sur les sociétés de 38 120 euros à 50 000 euros. L'amendement propose aussi de rehausser de 7,63 millions d'euros à 10 millions d'euros le seuil de chiffre d'affaires en deçà duquel une entreprise n'est pas assujettie à la contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés, ainsi que de porter de 763 000 euros à 1 million d'euros le montant de l'abattement applicable.
M. Claude Raynal , président . - Combien coûtera à l'État le relèvement du seuil pour la contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés ?
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Une trentaine de millions d'euros.
L'amendement FINC.6 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Cet article intègre dans les dépenses de production, éligibles au crédit d'impôt phonographique, les dépenses liées à la réalisation et à la production d'images utiles au développement de la carrière de l'artiste, alors qu'elles figurent actuellement dans la catégorie des dépenses de développement qui sont plafonnées à 350 000 euros par enregistrement phonographique. Cet élargissement est censé faciliter le recours à la production de vidéoclips et soutenir le secteur dans la crise actuelle.
Cette ouverture présente un risque d'effet de bord en assimilant toute dépense liée à la réalisation et à la production d'images autour d'un artiste à celles qui sont nécessaires à la production d'un vidéoclip. Je vous propose donc, avec l'amendement FINC.7, de préciser que les dépenses doivent être associées à l'enregistrement phonographique.
L'amendement FINC.7 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Avec l'amendement FINC.8, je vous propose d'étendre d'un an, soit jusqu'en 2022, le bénéfice du crédit d'impôt au titre des dépenses de rénovation énergétique des bâtiments ou parties de bâtiments à usage tertiaire des petites et moyennes entreprises (PME).
L'amendement FINC.8 est adopté.
L'amendement rédactionnel FINC.9 est adopté.
Articles additionnels après l'article 4
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Avec l'amendement FINC.10, je vous propose d'inciter les entreprises à investir, en majorant à titre temporaire les coefficients appliqués en cas d'amortissement dégressif, ce qui permet de déduire plus rapidement les investissements consentis.
L'amendement FINC.10 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Avec l'amendement FINC.11, je vous propose de relever de 1 à 5 millions d'euros, jusqu'au 31 décembre 2021, le plafond du carry back , c'est-à-dire le montant de déficit reportable en arrière. Le carry back déroge au droit commun, dans lequel les déficits sont reportés en avant. Il n'entraîne toutefois qu'un coût de trésorerie pour l'État, alors qu'il permet aux entreprises d'absorber immédiatement une partie de leurs dettes, donc de repartir plus rapidement : c'est un outil classique de relance de l'activité, utilisé après la crise financière de 2008. Cette année, nous avons proposé d'y recourir dans le troisième collectif budgétaire, le Gouvernement n'en a pas voulu, en nous renvoyant au plan de relance. Or, du fait des pertes très élevées qu'elles ont subies cette année, des entreprises vont pâtir du plafond fixé à 1 million d'euros : il vous est donc proposé, de nouveau, de le relever à 5 millions d'euros jusqu'à la fin de l'année prochaine.
M. Claude Raynal , président . - Je note que vous bordez cette augmentation dans le temps.
M. Pascal Savoldelli . - Comment avez-vous déterminé ce montant de 5 millions d'euros ?
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'idée est de donner suffisamment de souplesse aux entreprises, jusque fin 2021, de desserrer la contrainte pour que les entreprises ne soient pas freinées dans la reprise en permettant une absorption rapide de leurs pertes : le carry back , fonctionne très bien pour cela,et l'Allemagne a prévu le même dispositif temporaire, avec un plafond de 5 millions d'euros. Le mécanisme était totalement déplafonné en 2008, et plafonné depuis à 1 million d'euros ; nous avons fixé ce montant à 5 millions d'euros en recherchant un équilibre.
L'amendement FINC.11 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.12 vise à introduire une contribution exceptionnelle de 1 % sur le chiffre d'affaires réalisé par les grandes entreprises de vente à distance en 2020. Ces entreprises ont bénéficié de conditions exceptionnelles dans la crise sanitaire, car la vente à distance les a placées en situation bien plus favorable que les autres commerces. Dans ces circonstances exceptionnelles, nous leur demandons un effort exceptionnel. Nous bornons le dispositif en l'appliquant aux seules entreprises ayant réalisé un chiffre d'affaire d'au moins 250 millions d'euros : notre objectif n'est pas de viser la prospérité des entreprises, mais bien le surplus que la vente à distance a permis dans les conditions exceptionnelles de la crise sanitaire. Le produit de cette contribution est évalué à 500 millions d'euros, qui seraient orientés vers les acteurs économiques de proximité - en particulier le petit commerce qui est considéré comme « non-essentiel ».
M. Roger Karoutchi . - Une telle taxe n'est pas sans danger parce qu'elle peut frapper indistinctement des entreprises dont la situation n'est pas toujours prospère. Est-ce qu'on pourra distinguer les entreprises de vente à distance classiques, qui ont pu ne pas tirer un surplus de la crise sanitaire, et les plateformes en ligne, qui en ont bénéficié largement ?
M. Philippe Dallier . - J'ai la même question, car des entreprises de vente à distance se portent mal : le seul critère du chiffre d'affaires ne suffit probablement pas.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - J'ai omis un second critère : il faut que l'entreprise réalise au moins la moitié de son chiffre d'affaires dans la vente à distance. Et il y a aussi, donc, le seuil de 250 millions d'euros de chiffre d'affaires.
M. Philippe Dallier . - Même combinés entre eux, ces deux critères risquent de pénaliser des entreprises de vente à distance qui ne sont pas si prospères dans cette période de crise.
M. Roger Karoutchi . - Chacun connait une société issue de l'industrie textile dans le nord de la France, qui ne fait quasiment que de la vente en ligne, sans magasin, et dont le chiffre d'affaires est probablement supérieur à 250 millions d'euros : cette société pourrait être touchée, alors que la crise sanitaire ne lui a pas forcément apporté plus de ventes : la contribution serait alors injuste.
M. Vincent Capo-Canellas . - Je suis sceptique sur l'impact d'une telle contribution. Alors que l'économie est à terre, le secteur de la vente en ligne se porte très bien : on peut être tenté de le taxer. Mais le critère du chiffre d'affaires est très large, le bénéfice serait plus pertinent. D'autres mesures de soutien au petit commerce seraient peut-être plus utiles.
M. Albéric de Montgolfier . - La concurrence des plateformes numériques pose un problème bien plus large - voyez par exemple la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom), que les commerces physiques doivent payer alors que ces plateformes y échappent, nous allons devoir faire quelque chose. Peut-on passer par une taxe sur le profit ? Ce n'est pas pertinent, car les plateformes numériques ne font pas leur bénéfice sur notre territoire - c'est pourquoi la taxe sur le chiffre d'affaires est la seule possibilité qui soit compatible avec notre droit ; on peut d'ailleurs en relever de beaucoup le seuil, afin que la taxe ne concerne plus que quelques grandes plateformes.
Un autre critère est de prendre en compte l'intermédiation, sachant que le chiffre d'affaires des plateformes numériques vient pour beaucoup de la vente par des tiers - on a utilisé ce critère dans la taxe sur les services numériques. J'insiste, la Tascom pose un problème important, en favorisant les commerces qui n'ont pas de surfaces commerciales, les drive par exemple - le groupe Printemps vient d'annoncer la fermeture de sept magasins, avec des conséquences pour les ressources locales.
M. Claude Raynal , président . - Attention à ne pas créer une taxe qui ne viserait plus qu'une entreprise, fût-elle une plateforme numérique - le Conseil constitutionnel ne manquerait pas de sévir...
M. Pascal Savoldelli . - Il me semble possible d'améliorer la rédaction de cet amendement, et nous pourrions le voter. Je note que votre louable sensibilité pour le petit commerce vous conduit à poser des conditions au soutien public - ce que vous ne faites pas pour d'autres secteurs, par exemple en matière de déficits reportables : vous pourriez encore gagner en cohérence...
M. Michel Canevet . - Il faut donner des signes sur la taxation de certains opérateurs, quand les conditions de la concurrence ne sont pas réunies. Il faudrait prendre en compte les intermédiations sur les plateformes numériques, car nous voyons bien qu'elles prospèrent, quand les commerces traditionnels ont les plus grandes difficultés.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Attention, cet amendement ne prétend pas doubler la taxe sur les services numériques ; ce n'est pas son objet. C'est pourquoi nous ne visons pas l'intermédiation, mais bien la vente à distance. Je vous propose de retirer l'amendement pour vous en proposer une nouvelle rédaction en vue de la séance plénière. Il faut trouver une solution, je veux en trouver le chemin, car j'entends les colères, non pas seulement des soignants, mais d'une partie des Français qui trouvent injuste de voir fermer les « petits » commerces et pour qui les « gros » seraient intouchables. La solution sera par nature imparfaite, je l'assume, mais on ne peut rester les mains dans les poches dans la situation actuelle, en s'abritant derrière la liberté du commerce.
M. Albéric de Montgolfier . - Je vous soutiens, on ne saurait rester indifférent. Je vois sur une chaîne d'information en continu que Bruno Le Maire appelle les Français à faire « un geste patriotique dans les commerces de proximité » : encore faut-il qu'ils soient ouverts ! La situation va devenir insupportable. Pour avoir examiné dans le détail les transactions fiscales des grandes plateformes numériques, je peux vous dire qu'elles paient peu d'impôts par rapport aux commerces traditionnels. Qui plus est, l'article 10 du projet de loi de finances repousse encore l'entrée en vigueur des règles modifiant le régime de TVA du commerce électronique ...
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Effectivement, car les États membres et les services des douanes ne sont pas tous prêts pour les appliquer.
M. Albéric de Montgolfier . - Il faudra bien, au moins, percevoir la TVA sur l'intégralité de leurs ventes...
L'amendement FINC.12 est retiré.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Avec l'amendement FINC.13, je vous propose d'instaurer une contribution exceptionnelle de solidarité sur le secteur des assurances de dommages. Nous avons eu un débat vif lors du deuxième collectif budgétaire, une première contribution au fonds de solidarité du secteur assurantiel, de 200 millions d'euros, apparaissant très insuffisant ; elle a été doublée, et Gérald Darmanin avait accepté de nous faire un rapport sur une taxation exceptionnelle. L'étude du gouvernement confirme que, pendant le confinement, les compagnies d'assurance ont eu à couvrir moins de sinistres, du fait en particulier d'une bien moindre circulation automobile. Je vous propose donc de prendre sur ces prestations non versées, en demandant aux compagnies une contribution de 1 % du chiffre d'affaires de leur branche dommages, et ce pour la seule année 2020 - cela représenterait entre 500 et 600 millions d'euros.
M. Vincent Segouin . - Il faudrait s'assurer que cette taxe ne soit pas reportée sur les assurés : est-ce possible ?
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - On ne peut pas le faire dans la loi... Les compagnies d'assurance, en réalité, ne manquent pas d'augmenter les primes : des chefs d'entreprises m'ont dit qu'elles leur annonçaient des augmentations comprises entre 25 et 30 % des primes - et le secteur a annoncé qu'il ne couvrirait pas les pertes d'exploitation liées à la pandémie en 2021, même pour les garanties qui auraient pu être mises en oeuvre. Le secteur de l'assurance va réagir, il y a un débat politique, nous devons en considérer les enjeux économiques et financiers.
M. Roger Karoutchi . - Les conditions d'indemnisation sont fixées d'année en année, en fonction de l'état des risques, des accidents, etc. Or, l'année 2020 sera beaucoup moins lourde du point de vue des remboursements de sinistres que l'année 2019. Je comprends l'interrogation de M. Segouin, mais il faudrait que les compagnies d'assurance s'engagent pour 2021 à ce que leurs cotisations soient fixées avec les mêmes critères qu'en 2019.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - À ma connaissance, les compagnies d'assurance n'annoncent pas de baisses de tarifs généralisées pour l'année prochaine. Elles seront peut-être tentées d'augmenter sans le dire leurs cotisations pour y intégrer cette contribution. Parallèlement, n'oublions pas que le Gouvernement a institué une taxe sur les complémentaires santé dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) au titre des exercices 2020 et 2021, et que le rapporteur général de la commission des affaires sociales a proposé le doublement de celle-ci pour 2021. Lorsque nous l'avons auditionnée, la Fédération française de l'assurance nous a fait part des différentes sommes engagées, et je reconnais que des efforts ont été faits. Toutefois, ceux-ci pourraient être plus importants encore. Si la fédération a pris quelques mesures nouvelles avec le deuxième confinement, un nouvel abondement du fonds de solidarité ne semble pas à l'ordre du jour, arguant du fait que les assurances seraient seules - un argument que j'entends. C'est aujourd'hui le seul secteur d'activité économique à avoir apporté une contribution volontaire ; c'est un point que nous devons prendre en compte dans notre débat.
M. Claude Raynal , président . - Rappelons qu'il s'agit d'une contribution exceptionnelle, uniquement pour 2020. Si les tarifs venaient à augmenter pour en tenir compte, ils devraient logiquement baisser l'année suivante.
L'amendement FINC.13 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.14 vise à reporter d'une année supplémentaire le terme prévu pour la suppression du dispositif de doublement d'assiette applicable dans le cadre du crédit d'impôt recherche, pour les dépenses de recherche sous-traitées auprès d'organismes publics. Pour ne rien vous cacher, un gros opérateur national s'est ému de la situation, et nous avons travaillé sur le sujet avec le rapporteur spécial de la mission « Recherche ». L'idée est de disposer d'un an pour imaginer de nouvelles solutions qui viendraient se substituer à celle qui doit être supprimée.
M. Philippe Dallier . - À la lecture de l'objet, je comprends qu'il est quasiment certain que nous serons condamnés par Bruxelles. Si le dispositif n'est pas conforme au droit européen, pourquoi, dans ce cas, proposer l'allongement d'un an ? Les contentieux de ce genre nous ont déjà coûté très cher par le passé. Vous voulez sécuriser juridiquement le dispositif. Mais s'il n'est pas conforme, il faut plutôt en trouver un autre ! Je ne pense pas que le Gouvernement sera favorable à un dispositif qui nous entraînera à coup sûr vers une condamnation. De combien est l'enjeu financier ?
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Actuellement, une plainte a été déposée auprès de la Commission européenne, et c'est justement pour anticiper que la suppression du dispositif a été proposée par le Gouvernement d'ici 2022. Mais il faut tenir compte de la réaction des organismes. Par exemple, le Commissariat de l'énergie atomique (CEA) est fortement tributaire de ce dispositif dans son fonctionnement et estime que sa suppression diminuera de 60 millions d'euros ses recettes industrielles à compter de 2022. Nous faisons donc le choix de nous donner un peu de temps pour travailler à un nouveau dispositif.
M. Claude Raynal , président . - On peut le considérer comme un amendement d'appel au Gouvernement.
L'amendement FINC.14 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Il est rare que nous demandions un rapport, mais en l'espèce, celui-ci paraît justifié. En effet, l'article 8 quater reprend un dispositif d'abattement sur les plus-values de cessions immobilières instauré par l'article 28 de la loi de finances rectificative pour 2017. Cette loi prévoyait également un rapport d'évaluation, qui n'a jamais été produit.
L'amendement FINC.15 vise l'établissement de ce rapport, afin de voir si le dispositif permet effectivement de répondre à des enjeux importants comme la consommation foncière et l'artificialisation des sols. Pour reprendre les mots du Premier ministre, l'objectif est d'éviter l'artificialisation des sols en dehors des périmètres définis. Dans ce cadre, un véritable diagnostic sur l'état de l'offre foncière permettrait de répondre à l'impératif de « sobriété », c'est-à-dire de réduction de la consommation. Il s'agit de déterminer le foncier disponible, à la fois dans des zones de conversion industrielles qui nécessitent des mutations, mais aussi ailleurs. Malheureusement, la consommation et l'artificialisation continuent, certes à vitesse réduite dans certains départements, mais pas tous. Lorsqu'on évoque la consommation foncière, les citoyens pensent aux entreprises ou à l'habitat. Or, les aménagements d'infrastructures sont aussi fortement consommateurs de sols, et sont parfois demandés par les mêmes que ceux qui souhaiteraient réduire cette consommation. Un bon diagnostic permet de mieux mesurer les choses.
M. Claude Raynal , président . - Il pourrait être intéressant de faire un rappel général au Gouvernement concernant tous ces rapports, prévus par des textes, qui n'ont finalement jamais été produits.
Mme Christine Lavarde . - Finalement, on réécrit ici des éléments qui ont déjà été votés par le Parlement, ce qui ne nous donne aucune garantie de l'efficacité de notre démarche. Ne pourrait-on pas exiger ce rapport par un autre moyen ?
De plus, l'article 8 quater étend un crédit d'impôt déjà voté dans la loi de finances rectificative de 2017, et ce sans aucune évaluation. C'est contradictoire avec l'idée d'évaluation des dépenses fiscales et avec la loi de programmation des finances publiques. Je comprends l'intérêt de la mesure, mais ici, on accepte un dispositif dont l'efficacité n'est pas assurée, pour ensuite l'évaluer a posteriori .
M. Vincent Delahaye . - En France, le régime d'imposition des plus-values de cessions immobilières est particulièrement compliqué et antiéconomique. Avec le groupe de l'Union Centriste, j'ai proposé un amendement visant à simplifier largement cette imposition, qui a été approuvé à plusieurs reprises par le Sénat. Il permettait à la fois de sortir des dispositifs d'abattements, dont il est toujours très compliqué de faire des bilans chiffrés, mais aussi de simplifier ce dispositif pour la rendre beaucoup plus économique. Je ne soutiens donc pas la demande d'un rapport supplémentaire. Au contraire, je pense qu'il faut aller vers la simplification de l'ensemble de l'imposition des plus-values de cessions immobilières, en baissant le taux et en arrêtant avec la dégressivité.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Nous aurions pu proposer de supprimer cet article, mais nous n'aurions probablement pas pu réunir une majorité sur un tel amendement.
Par ailleurs, l'article prévoit d'aller encore plus loin que la prorogation du dispositif, déjà prévu par un précédent texte législatif, puisqu'il s'agit de l'ouvrir sur deux nouveaux types d'opérations que sont les grandes opérations d'urbanisme (GOU) et les opérations de revitalisation de territoire (ORT). A priori , je ne suis pas un adepte des rapports, mais il faut s'assurer que nous adoptons, prolongeons et étendons des dispositifs fiscaux efficaces. Il est dans notre intérêt d'avoir une bonne connaissance des choses pour inciter les opérateurs à intégrer ces dispositifs. Le débat en séance nous conduira probablement à des points de vue complémentaires. Mais quoi qu'il en soit, il y a, avec l'absence d'évaluation, une carence que l'État doit combler.
L'amendement FINC.15 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.16 vise la suppression du présent article, qui concerne l'exonération de droits de mutation à titre gratuit (DMTG) sur les dons et legs reçus par les associations. Cet article n'aurait pas dû se trouver en première partie, il s'agit d'une erreur.
L'amendement FINC.16 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.17 est rédactionnel.
L'amendement FINC.17 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.18 concerne le durcissement du malus automobile sur les émissions de CO2. Le Gouvernement avait proposé d'introduire ce dispositif au 1 er janvier 2021, avec une montée en charge de la taxe sur deux ans. Ce délai est passé à trois ans à l'Assemblée nationale, parallèlement à l'introduction prévue en deuxième partie du malus en fonction du poids des véhicules. Avec cet amendement, je propose de l'étaler sur cinq ans. En effet, mieux vaut une approche graduée, qui puisse permettre aux Français d'entrer progressivement dans une démarche écologique vertueuse, tout en permettant à l'exécutif d'ajuster le dispositif. Il n'y aurait rien de pire que de revenir à une situation telle que le rejet de l'écotaxe par les « bonnets rouges » ou la contestation des « gilets jaunes » avec la hausse de la taxe carbone. Un délai de cinq ans donne de la visibilité aux constructeurs, mais aussi aux Français. Vous le verrez, certains Français se détourneront de l'achat de véhicules neufs au profit des véhicules d'occasion. Il faudra prendre en compte cet effet pour ne pas passer à côté du sujet.
M. Gérard Longuet . - Pénaliser le diesel est une absurdité au regard de l'objectif de réduction des émissions de CO2. Le diesel est un combustible qui permet d'optimiser le moteur thermique, et qui consomme moins pour le même service rendu. Par ailleurs, le diesel a fortement progressé, à la demande des pouvoirs publics et avec le partenariat des entreprises automobiles françaises, notamment via une émission réduite de microparticules et un meilleur contrôle de qualité. Je m'inscris donc contre cette pénalisation. Toutefois, ces cinq ans peuvent être l'occasion d'ouvrir les yeux sur une réalité : dans un pays à faible densité d'automobiles, un système thermique qui progresse est plus sûr qu'un système électrique ou hydrogène qui ne sera pas au rendez-vous immédiatement.
M. Philippe Dallier . - Nous sommes le Parlement, et nous votons la loi. Commencer l'objet par « la Convention citoyenne préconise » et terminer en suivant ses conclusions, cela m'irrite et me perturbe.
Mme Isabelle Briquet . - J'entends la logique de l'amendement. Néanmoins, dans beaucoup de départements, on est encore très loin de pouvoir se passer des déplacements en véhicule automobile, notamment pour les familles les plus modestes. Veillons à ne pas les taxer plus encore. D'où ma très grande réserve sur cet amendement.
M. Vincent Capo-Canellas . - On peut donner crédit au rapporteur général d'avoir su alerter à temps sur ces sujets. Si nous l'avions écouté à l'époque, nous aurions sans doute évité bien des difficultés.
A-t-on des éléments qui permettent de documenter la capacité de l'industrie automobile à s'adapter ? Le délai de trois ans est-il vraiment insurmontable ?
Je comprends qu'il faille atténuer le côté répressif de l'écologie. Cela étant, il faut avancer à bon rythme dans l'objectif de réduction des émissions de CO2. Des propositions du rapporteur général sont-elles de nature incitative ; je pense notamment aux primes de conversion ?
M. Sébastien Meurant . - La moyenne d'âge des véhicules roulant en France ne cesse d'augmenter en raison du pouvoir d'achat. Mais la meilleure façon de réduire les émissions, c'est de moderniser le parc.
Mme Christine Lavarde . - Le sujet sera aussi abordé mercredi prochain dans l'examen du rapport de la mission « Écologie ». Les mécanismes incitatifs me paraissent trop faibles pour rajeunir le parc. Par exemple, les véhicules d'occasion restent autorisés à la marge.
De plus, les représentants du secteur automobile que j'ai auditionnés plaident pour un maintien en 2021 des conditions du malus 2020, afin de donner de la visibilité au consommateur et de permettre au secteur de s'adapter. Cet amendement semble donc répondre à l'impératif écologique, et, dans le même temps, il donne les moyens aux industriels d'adapter leur production.
Mme Sophie Taillé-Polian . - Les familles modestes attendent surtout un rééquilibrage complet de la fiscalité. Ce n'est pas en repoussant dans le temps les éléments de lutte contre le réchauffement climatique qu'on améliorera leur situation. En général, reporter une mesure ne facilite pas sa mise en place.
M. Rémi Féraud . - Ne faisons pas dire à l'amendement le contraire de ce qu'il veut dire. La Convention citoyenne n'est pas citée en objet pour contester la légitimité des parlementaires, mais justement pour dire que l'amendement ne va pas dans le sens de cette dernière. Ce malus ne porte pas sur tous les véhicules, mais seulement sur les plus lourds et les plus polluants, que les particuliers ne sont pas dans l'obligation d'acheter. Au contraire, je pense qu'il ne faut pas reporter dans cinq ans les modalités d'une reprise qui doit être rapide et incitative en matière écologique. Or, cet amendement vise plutôt à donner encore un peu de temps avant d'entamer la transition.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je n'ai aucun état d'âme à expliciter l'origine de cet amendement : l'exécutif a souhaité poser les choses dans le cadre d'une Convention citoyenne, considérant que les élus ne se suffisaient pas à eux-mêmes. Sur les 150 mesures issues de cette Convention, trois ou quatre ont ainsi été « sorties du chapeau » par le Gouvernement.
En 2015, je présidais la commission sur la lutte contre la pollution de l'air. Une des mesures, adoptées à l'unanimité, concernait la conversion du prix essence-diesel en cinq ans. Résultat : une décision ministérielle a fait voler en éclat le dispositif au bout de deux ans et demi, par une décision personnelle du ministre. Pour atteindre les objectifs, il faut donc mieux associer progressivement nos concitoyens, et ce de manière pédagogique. Il faut également aider et accompagner les ménages pour lesquels cette démarche est aujourd'hui financièrement inaccessible. Il est hors de question de les laisser prisonniers d'un dispositif où on les montrerait du doigt parce qu'ils possèdent des véhicules anciens, ou habitent des territoires non urbains. Enfin, concernant la lutte contre le CO2, c'est un moindre mal de rouler au diesel qu'à l'essence. En revanche, s'agissant des particules fines, c'est l'inverse.
M. Claude Raynal , président . - Nous reprendrons cette discussion en séance.
L'amendement FINC.18 est adopté.
M. Claude Raynal , président . - L'amendement FINC.19 vise à apporter une précision rédactionnelle.
L'amendement FINC.19 est adopté.
Articles additionnels après l'article 15
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.20 est relatif au renforcement du dispositif de suramortissement pour l'acquisition de véhicules poids lourds, déjà voté dans le PLFR 3. Il est lié au « verdissement » du parc des camions.
L'amendement FINC.20 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.21 prévoit un mécanisme de suramortissement, mais pour le secteur du transport aérien. Ce dispositif avait également été voté dans le cadre du PLFR 3.
M. Vincent Capo-Canellas . - L'objet de l'amendement indique que le retour à un niveau de trafic d'avant la crise pourrait intervenir dans quatre ou cinq ans. Des prévisions d'Eurocontrol tablent maintenant plutôt sur 2029... L'amendement est positif, car il permet de maintenir l'objectif de transition écologique et à donner du soutien à un moment où le trafic est presque inexistant.
L'amendement FINC.21 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'article 16 tend à supprimer les prélèvements progressifs et complémentaires sur les casinos embarqués au motif que leur rendement serait nul.
En l'absence d'élément en ce sens et dans l'attente d'un examen plus approfondi de la fiscalité de ces casinos, je propose de revenir sur cette abrogation par l'amendement FINC.22.
M. Gérard Longuet . - Il faut distinguer selon les casinos embarqués : sont-ils sur la mer, la mer non territoriale, les lacs, les rivières ? Le sujet mérite d'être approfondi.
M. Claude Raynal , président . - Il existe des casinos embarqués sur le Rhin.
M. Gérard Longuet . - Le Rhin est régi par une convention internationale.
M. Vincent Delahaye . - Je suis, par principe, pour la suppression des petites taxes. Le Gouvernement ne propose pas suffisamment de suppressions de ce type. Il faut simplifier la fiscalité française, je ne voterai donc pas cet amendement.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - J'ai demandé des éléments d'information complémentaire sur cette soi-disant « petite » taxe ; il n'est pas certain qu'elle soit si petite que cela !
L'amendement FINC.22 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Depuis l'adoption de la loi de finances pour 2018, l'Autorité des marchés financiers (AMF) peut percevoir des « contributions volontaires » versées par des associations professionnelles.
À l'époque, nous avions émis des réserves sur cette mesure. La mise en oeuvre du mécanisme a confirmé les craintes de la commission des finances. Dans le cadre d'une convention signée entre l'Association française de gestion financière et l'AMF, les sociétés de gestion ont bénéficié de obtenu en contrepartie d'une baisse de leur cotisation légale.
En outre, la Cour des comptes a, sans surprise, demandé, comme la commission des finances du Sénat, la suppression de ce dispositif.
L'amendement FINC.23 vise donc à abroger le mécanisme de contribution volontaire.
L'amendement FINC.23 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Le mécanisme de minoration des variables d'ajustement est contestable, car il revient à minorer des dotations supposées compenser à l'euro près les collectivités territoriales de précédentes réformes fiscales.
L'amendement FINC.24 a pour effet d'augmenter les prélèvements sur recettes de l'État aux collectivités d'environ 85 milliards d'euros, afin d'assurer une juste compensation et de revenir sur ces nouvelles minorations proposées dans le projet de loi de finances.
L'amendement FINC.24 est adopté.
Article additionnel après l'article 22
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Dans le cadre de la réforme de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) proposée par l'article 3 du présent projet de loi de finances, les régions bénéficient d'une compensation intégrale des pertes de CVAE subie par les régions en 2021.
Dans un souci d'équité entre les collectivités territoriales, l'amendement FINC.25 tend à instaurer un mécanisme de compensation des pertes de CVAE subies par les départements et le bloc communal en 2021 via la création d'un nouveau prélèvement sur recettes.
Le coût de la mesure pourrait, selon le scénario retenu par la mission Cazeneuve, s'élever à 977 millions d'euros, dont 585 millions pour le bloc communal et près de 392 millions d'euros pour les départements.
Le dispositif que nous proposons présente l'avantage de s'ajuster automatiquement à la perte réelle.
L'amendement FINC.25 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.26 tend à supprimer l'article 22 bis , qui a pour objet de modifier les règles de calcul et d'évolution des fractions de TVA attribuées aux collectivités en compensation de la suppression de la taxe d'habitation .
Nous devons avoir un débat sur ce sujet. L'autonomie financière et les marges de manoeuvre des collectivités sont de plus en plus remises en cause. Il faut une gouvernance largement révisée, car, avec des collectivités largement dépendantes du bon vouloir de l'État, la République dite « décentralisée » ne durera pas longtemps.
M. Vincent Delahaye . - Le Gouvernement annonce des baisses d'impôts, qui impactent en réalité les collectivités locales : on aboutit à une perte d'autonomie complète de ces dernières, qui vont finir par devenir de simples gestionnaires des dotations de l'État. Les compensations prévues sont toujours bien ficelées au départ, mais cela ne dure jamais longtemps...
Le dispositif proposé aujourd'hui par le Gouvernement sera sans doute remis en cause demain par d'autres gouvernements. Nous ne pouvons être à la merci de décisions pénalisantes pour les collectivités.
L'article 22 bis tend à corriger un effet d'aubaine, lié aux modalités de calcul, pour 2021. Le groupe Union centriste y est favorable, même si nous n'approuvons pas la façon de faire du Gouvernement. À titre personnel, j'irai plus loin : on ne devrait réduire les impôts que si l'on baisse la dépense publique ; sinon, ce n'est que de la poudre aux yeux et des impôts différés !
Mme Christine Lavarde . - Cet amendement permet d'avoir un débat en séance sur la crédibilité de la parole de l'État. On change une règle du jeu adoptée l'année dernière alors que, dans le même temps, le Gouvernement nous demande de modifier des impôts des collectivités, pour passer de la fixation d'un taux à une compensation. Il faut mettre le Gouvernement face à ses responsabilités. Quand les collectivités décident du taux d'une imposition, elles savent ce qu'elles font ; quand elles ne touchent plus qu'une compensation, dont le montant peut être modifié d'une année sur l'autre, ce n'est plus la même chose.
M. Pascal Savoldelli . - J'approuve cet amendement. Je ne souhaite pas que l'on nous incite à ne pas le voter sous prétexte que le problème sera réglé avec la loi 3D. Nous ne devrions pas nous « laisser rouler dans la farine » !
M. Charles Guené . - L'effet d'aubaine est trop beau pour les collectivités. Nous savons très bien que cette disposition ne sera pas conservée en l'état.
Il faut ouvrir le débat sur le remplacement des impôts territorialisés par des parts d'impôts nationaux. Le système ne peut plus fonctionner avec la seule garantie de l'article 72-2 de la Constitution. Comme l'a dit le rapporteur général, nous devons mettre en place une nouvelle gouvernance du système.
L'État propose, les collectivités discutent avec le Gouvernement des modalités, et le Parlement, qui devrait normalement décider, n'est plus là que pour compter les points. Si l'on ne fait rien, nous ne servirons plus à grand-chose !
M. Vincent Capo-Canellas . - L'amendement FINC.25 porte sur 1 milliard d'euros ; l'amendement FINC.26, sur 1,3 milliard d'euros. Pour ma part, je préfère le premier.
M. Didier Rambaud . - Si cet amendement nous permet de provoquer un débat, tant mieux ! Mais il ne faut pas dire qu'il y a eu un manquement à la parole donnée. À la suite de la suppression de la taxe d'habitation, la compensation pour les communes a consisté en un transfert de la part départementale de la taxe foncière des départements vers les communes. Il me semble qu'il y a eu un accord politique entre le Gouvernement et l'Assemblée des départements de France. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, cet accord est respecté.
On constate un effet d'aubaine. Cela ne me choque pas que l'État veuille reprendre la main sur une recette d'État : la TVA.
M. Claude Raynal , président . - Sur le respect de la parole donnée, votre position est assez osée ! La chute du rendement de la TVA en 2020 n'avait tout simplement pas été envisagée.
M. Didier Rambaud . - Quand je parle de respect de la parole donnée, c'est par rapport aux départements. La part départementale de la taxe foncière, qui est donnée aux communes, est compensée !
M. Claude Raynal , président . - Ce n'est pas vraiment le sujet.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Le débat aura toute sa place. Je suis heureux qu'il ait lieu au Sénat. Lorsqu'un accord est passé entre l'État et les régions, le Parlement est contourné. Mais il ne doit pas être uniquement un notaire !
L'an dernier, Albéric de Montgolfier avait expliqué qu'il n'était pas écrit dans le marbre que la TVA serait toujours un impôt dynamique.
M. Jérôme Bascher . - Je suis surpris par la remarque de Didier Rambaud. L'État veut reprendre d'une main ce qu'il a pris de l'autre. Quand on fait ce genre de calculs, on sait qu'il peut y avoir des effets d'aubaine : il faut les assumer. Les dépenses supplémentaires en matière de revenu de solidarité active (RSA) devraient s'élever à 1 milliard d'euros. Que les collectivités locales bénéficient d'un effet d'aubaine de 1 milliard n'est pas forcément scandaleux...
M. Claude Raynal , président . - Cela me rappelle que quand le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) augmentait trop, on le limitait ; quand il baissait, on n'y touchait pas.
Je suis d'accord avec Charles Guené. Nous avons du mal à mettre en place un « serpent » : il faudrait prévoir une fourchette pour les augmentations afin d'éviter les « effets de yo-yo ».
M. Albéric de Montgolfier . - J'ai parfaitement en tête les débats du projet de loi de finances pour 2020, que le rapporteur général vient d'évoquer. Le Gouvernement nous avait vanté son mécanisme en indiquant que la TVA était un impôt dynamique, dont les collectivités auraient le bénéfice. À l'époque, j'avais rappelé que la TVA avait baissé en 2009, après la crise de 2008.
Nous revenons ici sur les engagements qui avaient été pris. Nous n'aurions pas cet amendement et ce débat si nous avions souscrit à la proposition votée par le Sénat de décaler d'un an l'entrée en vigueur de la réforme.
La relation État-collectivités est infantilisante, contrairement à ce qui se passe en Allemagne. Si les Länder ont, par exemple, moins de pouvoir d'emprunt, ils discutent néanmoins d'égal à égal avec le gouvernement fédéral. En France, si les collectivités ont de bons résultats, on leur reprend, alors même que les départements doivent faire face à une augmentation des dépenses de RSA.
M. Bernard Delcros . - Il faut bien distinguer deux sujets : les modalités de compensation de la perte de la taxe sur le foncier bâti pour les départements ainsi que la perte de la taxe d'habitation pour les intercommunalités et l'augmentation des coûts des allocations telles que le RSA. Il importe de mettre en place un dispositif pérenne de compensation qui soit juste pour les départements et les intercommunalités. La taxe sur le foncier bâti pour les départements et la taxe d'habitation pour les intercommunalités étaient des recettes assurées, revalorisées chaque année, avec la revalorisation générale des bases et l'augmentation des bases physiques. On aurait intérêt à sécuriser ces collectivités, avec des recettes dynamiques quelles que soient les crises et les variations de recettes de TVA pour l'État. Un dispositif aligné sur l'évolution de l'inflation me semble être un bon système.
Il faut certes traiter la question de l'augmentation du RSA, mais on n'a pas intérêt à la lier au premier sujet. Lors du vote de la réforme fiscale dans le PLF 2020, on avait évoqué un système de cliquet qui permettrait aux départements de conserver leur niveau de recettes.
L'amendement FINC 26 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.27 tire les conséquences de l'adoption d'amendements que nous venons d'adopter.
L'amendement FINC.27 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.28 vise à maintenir l'affectation à Action Logement Services d'une fraction de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance portant sur les contrats d'assurance décès, le Gouvernement tentant de revenir sur l'engagement pris dans la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte).
M. Philippe Dallier . - L'attitude de l'État envers Action Logement Services est la même qu'envers les collectivités : l'État, tout d'un coup, supprime une recette, compense et change les règles du jeu. Dans le cas d'Action Logement, il a créé une taxe supplémentaire, il en garde le produit et supprime la compensation. C'est la caricature de ce qui ne devrait pas être fait. L'inspection générale des finances dénonce d'ailleurs dans un rapport la gouvernance de cet organisme. Cette année, le Gouvernement prélève 1 milliard d'euros dans les caisses d'Action Logement pour le flécher vers le financement des aides personnelles au logement (APL).
La seule bonne nouvelle, c'est que le Gouvernement a finalement renoncé à légiférer par ordonnances sur l'avenir d'Action Logement. Le recours aux ordonnances aurait constitué un casus belli .
Il n'est pas acceptable de laisser l'État récupérer la somme actuellement affectée à Action Logement. Dans la loi Pacte, on a choisi d'exonérer les entreprises jusqu'à 50 salariés. La perte de recettes devait être compensée pour Action Logement, elle doit continuer à l'être, quelles que soient les décisions qui seront prises ultérieurement.
L'amendement FINC.28 est adopté.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - L'amendement FINC.29 vise à supprimer l'article 24 bis , qui prévoit à un horizon de six ans un taux unique de taxe pour frais des chambres d'agriculture dans les régions. Le problème, c'est davantage l'assiette que le taux. Or travailler sur l'assiette est un exercice difficile. Il n'y a pas d'accord dans la profession agricole sur le projet du Gouvernement, qui semble résulter d'ailleurs de l'entêtement de certains hauts fonctionnaires.
L'amendement FINC.29 est adopté.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter la première partie du projet de loi de finances pour 2021, telle que modifiée par les amendements qu'elle a adoptés.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
TABLEAU DES SORTS
Article liminaire
|
|||
Article 1
er
|
|||
Article 2
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 1 |
Relèvement du plafond du quotient familial de 1 570 euros à 1 750 euros |
Adopté |
Article 2
bis (nouveau)
|
|||
Article 2
ter (nouveau)
|
|||
Article 2
quater (nouveau)
|
|||
Article 2
quinquies (nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 2 |
Suppression de gages oubliés |
Adopté |
Article 3
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 3 |
Abaissement à 1,5 % du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée |
Adopté |
Article 3
bis
(nouveau)
|
|||
Article 3
ter
(nouveau)
|
|||
Article 3
quater
(nouveau)
|
|||
Article 3
quinquies
(nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 4 |
Extension de la possibilité de générer une moins-value en cas d'apurement obligatoire des pertes à l'hypothèse où la réduction du capital de la société n'est que partielle |
Adopté |
Article 3
sexies
(nouveau)
|
|||
Article 3
septies
(nouveau)
|
Article 3
octies
(nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC 5 |
Conditions de prorogation du délai de l'engagement de réalisation des logements en contrepartie d'un mécanisme fiscal incitatif |
Adopté |
Article 3
nonies
(nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC 6 |
Seuils d'assujettissement au taux réduit d'impôt sur les sociétés pour les petites et moyennes entreprises |
Adopté |
Article 3
decies
(nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC 7 |
Précision sur la nature des dépenses liées à la réalisation et à la production d'images pouvant être considérées comme des dépenses de production au sein du crédit d'impôt sur la production phonographique |
Adopté |
Article 3
undecies
(nouveau)
|
|||
Article 3
duodecies
(nouveau)
|
|||
Article 3
terdecies
(nouveau)
|
|||
Article 3
quaterdecies
(nouveau)
|
Article 3
quindecies
(nouveau)
|
|||
Article 3
sexdecies
(nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC 8 |
Prolongation d'un an (2022) du crédit d'impôt au titre des dépenses de rénovation énergétique des bâtiments à usage tertiaire des PME |
Adopté |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC 9 |
Amendement rédactionnel |
Adopté |
Article 3
septdecies
(nouveau)
|
|||
Article 4
|
|||
Article additionnel après l'article 4 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 10 |
Majoration temporaire des coefficients d'amortissement dégressif |
Adopté |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 11 |
Renforcement temporaire des capacités de report en arrière des déficits (?« carry back »?) |
Adopté |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 12 |
Introduction d'une contribution exceptionnelle sur le chiffre d'affaires réalisé en 2020 par les grandes entreprises établies de la vente à distance |
Retiré |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 13 |
Contribution exceptionnelle de solidarité des assureurs en raison de la baisse de la sinistralité résultant de l'épidémie de covid-19 |
Adopté |
Article 5
|
|||
Article 6
|
|||
Article 7
|
|||
Article 8
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 14 |
Report à 2023 de la suppression du doublement d'assiette en cas de sous-traitance publique applicable dans le cadre du crédit d'impôt recherche |
Adopté |
Article 8
bis
(nouveau)
|
|||
Article 8
ter
(nouveau)
|
|||
Article 8
quater
(nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 15 |
Demande d'un rapport d'évaluation |
Adopté |
Article 8
quinquies
(nouveau)
|
|||
Article 8
sexies
(nouveau)
|
Article 8
septies
(nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 16 |
Suppression d'article |
Adopté |
Article 8
octies
(nouveau)
|
|||
Article 9
|
|||
Article 9
bis
(nouveau)
|
|||
Article 9
ter
(nouveau)
|
|||
Article 9
quater
(nouveau)
|
|||
Article 10
|
|||
Article 11
|
|||
Article 12
|
|||
Article 13
|
Article 14
|
||||||||||||
|
||||||||||||
Article 14
bis (nouveau)
|
||||||||||||
Article 14
ter (nouveau)
|
||||||||||||
Article 15
|
||||||||||||
|
||||||||||||
Article additionnel après l'article 15 |
||||||||||||
|
||||||||||||
Article 15
bis (nouveau)
|
Article 15
ter (nouveau)
|
|||
Article 15
quater
(nouveau)
|
|||
Article 15
quinquies (nouveau)
|
|||
Article 16
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 22 |
Maintien des prélèvements progressif et complémentaire sur les casinos embarqués |
Adopté |
Article 16
bis (nouveau)
|
|||
Article 17
|
|||
Article 18
|
|||
Article 19
(supprimé)
|
|||
Article 20
|
|||
Article 21
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 23 |
Suppression pour l'avenir du mécanisme de contribution volontaire à l'Autorité des marchés financiers |
Adopté |
Article 21
bis (nouveau)
|
|||||||||||
Article 22
|
|||||||||||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
||||||||
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 24 |
Suppression de la minoration des variables d'ajustement en 2021 |
Adopté |
||||||||
Article additionnel après l'article 22 |
|||||||||||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
||||||||
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 25 |
Compensation des pertes de CVAE subies par les départements et le bloc communal en 2021 |
Adopté |
||||||||
Article 22
bis (nouveau)
|
|||||||||||
|
|||||||||||
Article 22
ter (nouveau)
|
Article 23
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 27 |
Modification du montant des prélèvements sur recettes à destination des collectivités territoriales |
Adopté |
Article 23
bis (nouveau)
|
|||
Article 23
ter (nouveau)
|
|||
Article 24
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 28 |
Maintien de l'affectation à Action Logement Services d'une fraction de taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA) portant sur les contrats d'assurance-décès |
Adopté |
Article 24
bis (nouveau)
|
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
M. Jean-François HUSSON, rapporteur général |
FINC. 29 |
Suppression d'article |
Adopté |
Article 24
ter (nouveau)
|
Article 25
|
Article 26
|
Article 27
|
Article 28
|
Article 29
|
Article 30
|
Article 31
|
Article 32
|