II. LA MISE À GRAND GABARIT DE LA LYS MITOYENNE
A. LE FRUIT D'UNE COOPÉRATION FRANCO-BELGE DENSE EN MATIÈRE DE TRANSPORT FLUVIAL
La mise au gabarit actuel de la Lys mitoyenne avait déjà fait l'objet d'une convention internationale entre la France et la Belgique au sujet de l'amélioration de la Lys mitoyenne entre Deûlémont et Menin, signée à Bruxelles, le 3 février 1982. Il s'agissait d'aménager la Lys mitoyenne afin de permettre la navigation de bateaux ou de convois de 1 350 tonnes - la classe de gabarit européen CEMT IV - et de faciliter l'évacuation des eaux de crue.
À cette fin, la convention de 1982 décrivait les travaux, la répartition des travaux et des opérations ainsi que de l'entretien et de l'exploitation des ouvrages entre les deux États. Pour le reste, la convention avait trait au règlement des dommages et avait institué une commission franco-belge en vue de suivre l'exécution des travaux et de veiller à la bonne application de cette convention.
La présente convention internationale d'aménagement de la Lys est d'ailleurs destinée à se substituer à la convention de 1982, à l'exception des quatre articles de cette dernière qui entrent dans le champ de compétence fédérale. Ces articles traitent respectivement de la remise à l'autre État des biens immobiliers pour les travaux dont ce dernier a la charge (article 3.3), des questions douanières et fiscales (article 7), des droits d'accès sur les chantiers et ouvrages sur le territoire de l'autre État (article 8) - ces deux articles apparaissant par ailleurs datés compte tenu de la poursuite de la construction européenne intervenue depuis pour mettre en oeuvre la liberté de circulation des personnes et des biens - et enfin des mesures afin de sauvegarder les intérêts des riverains (article 10).
La coopération transfrontalière fonctionne à deux niveaux dans la mesure où le transport fluvial et l'exploitation des voies navigables sont des compétences décentralisées en Belgique.
Au niveau institutionnel, la coopération entre le Gouvernement français et les Gouvernements des régions de Flandre et de Wallonie, se fait dans le cadre de la Commission intergouvernementale pour la préparation de la réalisation du projet Seine-Escaut, (« CIG Seine-Escaut ») instituée par l'accord international signé à Paris le 10 mars 2009, à Jambes le 7 avril 2009 et à Willebroek le 17 avril 2009.
Au niveau des quatre gestionnaires d'infrastructures et maîtres d'ouvrage, soit entre Voies navigables de France et la Société du Canal Seine-Nord Europe pour la France, le service public de Wallonie et les voies navigables flamandes (De Vlaamse Waterweg), la coopération se fait via le Groupement européen d'intérêt économique (GEIE) « Seine-Escaut », créé le 26 mars 2010, en vue de permettre la coordination effective de la préparation et de la réalisation du projet, sous le contrôle du CIG Seine-Escaut.
Outre la coordination du programme d'investissements lié au projet Seine-Escaut, les compétences de ces structures s'étendent aux questions d'harmonisation de la tarification et de la gestion du trafic.
Selon les informations transmises par les services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) 1 ( * ) , la CIG Seine-Escaut se réunit généralement quatre fois par an, en alternance entre la France et la Belgique. La délégation française est composée de quatre membres représentant les ministères en charge des transports, des affaires européennes et du budget. La région flamande est représentée par trois membres pour son Gouvernement et la région wallonne également par trois membres pour son Gouvernement. La présidence est assurée à tour de rôle par chaque délégation pour une durée d'un an. Les gestionnaires d'infrastructures et maîtres d'ouvrage sont systématiquement présents aux réunions, dont le GEIE Seine-Escaut assure le secrétariat. Le GEIE se réunit quant à lui une dizaine de fois par an.
La préparation de l'opération d'aménagement de la Lys mitoyenne, objet de la présente convention internationale, est un exemple des effets de la coopération transfrontalière au sein de ces différents organes, puisque la répartition des procédures, des travaux et de l'exploitation future a fait l'objet d'un travail très précis dans ce cadre. Une des tâches principales du GEIE Seine-Escaut, sous la supervision de la CIG, réside également dans la préparation et le suivi des appels à projets européens. Ainsi, en 2015, ces organes ont préparé la candidature commune de la France, de la Wallonie et de la Flandre du projet Seine-Escaut, qui a été retenu par l'Europe pour un montant de subventions total de 980 M€ sur la période 2014-2020. La convention de financement signée par la suite avec l'Union européenne nécessite un reporting très précis des dépenses encourues au titre du projet : c'est également le GEIE qui en assure la coordination.
Par ailleurs, la présente convention internationale étend les missions de la CIG Seine-Escaut pour lui confier le suivi de la réalisation de l'opération de la Lys mitoyenne (article 17). Ce choix apparaît évident dans la mesure où cette CIG est l'organe de référence pour la coopération entre les trois territoires intéressés en matière d'infrastructures de voies navigables et qu'elle implique de manière très étroite les gestionnaires d'infrastructures concernés. Cette mission de supervision ne remplacera pas les échanges directs et opérationnels qui se tiendront, tout au long de l'opération, entre les trois gestionnaires, dans le cadre qui sera défini par la convention d'exécution prévue à l'article 15.
* 1 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.