III. LE PROGRAMME 164 : « COUR DES COMPTES ET AUTRES JURIDICTIONS FINANCIÈRES »

Observations principales sur le programme

- Pour 2020, les crédits demandés s'élèvent à 220,36 millions d'euros en CP , à la suite d'une modeste hausse de 0,2 % par rapport à 2019. Celle-ci s'explique par une augmentation des dépenses de personnel, destinée à financer le recrutement de 5 emplois supplémentaires .

- Le schéma d'emploi sur le triennal 2020-2022 est revu à la baiss e, prévoyant la création de 30 ETPT sur la période en lieu et place des 50 ETPT initialement prévus.

- Les juridictions financières poursuivent à moyens constants leurs activités de contrôle, dont les plus récentes : l'expérimentation de la certification des comptes des collectivités territoriales , et le contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) et des établissements de santé privés.

- Le programme 164 devrait à nouveau bénéficier de l' exonération de la mise en réserve de ses crédits en début d'année, pour favoriser son « indépendance fonctionnelle » dans la gestion de ses crédits.

Le programme 164 retrace les crédits de la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) , ces dernières regroupant 18 chambres régionales des comptes (CRC), dont 5 en outre-mer et 5 chambres territoriales des comptes (CTC), situées en outre-mer 12 ( * ) .

A. UN BUDGET INFÉRIEURE À LA TRAJECTOIRE DÉFINIE PAR LA LOI DE PROGRAMMATION PLURIANNUELLE

1. Un budget quasiment constant par rapport à l'année dernière

Pour 2020, les crédits du programme 164 s'élèvent à 220,4 millions d'euros en CP et 224,4 millions d'euros en AE . Si le niveau de CP progresse très légèrement par rapport 2019 (+ 0,2 %), le plafond des AE diminue de 3,4 %.

Évolution des crédits par action du programme 164

(en millions d'euros)

LFI 2019

PLF 2020

Évolution PLF 2020 / LFI 2019 (volume)

Évolution PLF 2020 / LFI 2019 (%)

FDC et ADP attendus en 2020

Action 21

Examen des comptes publics

AE

41,7

41,2

- 0,5

- 1,3 %

0,6

CP

41,7

41,0

- 0,7

- 1,8 %

0,6

Action 22

Contrôle des finances publiques

AE

16,5

16,6

+ 0,1

+ 0,6 %

0,0

CP

16,5

16,6

+ 0,1

+ 0,6 %

0,0

Action 23

Contrôle des gestions publiques

AE

62,5

62,6

+ 0,1

+ 0,2 %

0,0

CP

62,5

62,6

+ 0,1

+ 0,2 %

0,0

Action 24

Évaluation des politiques publiques

AE

36,1

36,4

+ 0,3

+ 0,8 %

0,0

CP

36,1

36,4

+ 0,3

+ 0,8 %

0,0

Action 25

Information des citoyens

AE

7,5

7,5

- 0,0

- 0,6 %

0,0

CP

7,5

7,5

- 0,0

- 0,6 %

0,0

Action 26

Mise en jeu de la responsabilité des comptables publics et des gestionnaires publics

AE

4,9

4,9

- 0,0

- 0,0 %

0,0

CP

4,9

4,9

- 0,0

- 0,0 %

0,0

Action 27

Pilotage et soutien des juridictions financières

AE

63,0

55,2

- 7,8

- 12,3 %

0,1

CP

50,7

51,4

+ 0,7

+ 1,4 %

0,1

Total programme 164

AE

232,2

224,4

- 7,8

- 3,4 %

0,6

CP

219,9

220,4

+ 0,4

+ 0,2 %

0,6

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le niveau de crédits du programme 164 pour 2020 poursuit donc une trajectoire relativement stable quoiqu' inférieure à la programmation pluriannuelle .

Programmation pluriannuelle des crédits du programme 164

(crédits de paiement, en millions d'euros)

Années (par défaut, programmation)

2018

LFI 2018

2019

LFI 2019

2020

PLF 2020

2021

2022

Dépenses de titre 2

192,07

192,37

195,07

195,08

197,35

195,52

198,63

199,27

dont hors CAS « Pensions »

143,41

144,1

145,5

146,28

146,38

146,71

147,35

147,82

dont CAS « Pensions »

48,66

48,27

49,57

48,8

50,97

48,81

51,29

51,45

Dépenses hors titre 2

25,3

25,3

25,3

24,84

25,3

24,84

25,3

25,3

Total

217,37

217,67

220,37

219,92

222,65

220,36

223,93

224,57

Source : commission des finances, d'après les réponses de la Cour des comptes au questionnaire budgétaire

En effet, si les crédits hors titre 2 sont conformes à la trajectoire définie en loi de programmation, l'évolution des crédits du titre 2 s'en écarte sensiblement, afin de tenir compte de la modification du schéma d'emplois pour les années 2020 à 2022 .

2. Une progression modeste des dépenses de personnel, dans un contexte marqué par une extension des missions confiées à la Cour
a) Un schéma d'emploi revu à la baisse, entrainant une progression des dépenses de personnel moindre que prévue...

En 2020, les dépenses de personnel connaissent une hausse plus modeste que prévue, progressant de 0,43 million d'euros (+ 0,2 %), contre une augmentation de 2,28 millions d'euros (+ 1,2 %) initialement annoncée en loi de programmation.

Cette évolution résulte de la remise en cause du schéma d'emploi fixé en 2017, permettant la création de 50 emplois supplémentaires pour atteindre le plafond « historique » du programme, fixé à 1 840 ETPT . La lettre plafond du 26 juillet 2019 revient en effet sur l'augmentation des effectifs, limitant la hausse des emplois à 30 ETPT sur la période 2019-2022.

Évolution du schéma d'emplois

(en ETPT)

2019

2020

2021

2022

Total

Lettre plafond de 2017

+ 15

+ 15

+ 10

+ 10

+ 50

Lettre plafond de 2019

+ 15

+ 5

+ 5

+ 5

+ 30

Écart 2017 / 2019

0

- 10

- 5

- 5

- 20

Source : commission des finances, d'après les réponses de la Cour des comptes au questionnaire budgétaire

Le schéma d'emploi pour 2020 prévoit ainsi 5 ETPT supplémentaires , en lieu et place des 15 ETPT initialement annoncés.

Par conséquent, le plafond d'emplois, qui doit désormais être actualisé chaque année afin de prendre en compte l'article 11 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 13 ( * ) , est fixé à 1 802 ETPT pour 2020, contre 1 796 ETPT en 2019 .

Plafond d'autorisation d'emplois rémunérés par l'État

(en ETPT)

Réalisation 2018

2019

Situation au 31/07/2019

Situation prévisionnelle pour l'année 2019

PLF 2020

Catégorie A

1 286

1 277

1 313

1 314

1 307

Catégorie B

276

292

262

264

281

Catégorie C

210

227

204

200

214

Total

1 772

1 796 14 ( * )

1 779

1 778

1 802

Source : commission des finances, d'après les réponses de la Cour des comptes au questionnaire budgétaire

Votre rapporteur spécial relève qu'en tout état de cause, le plafond d'emploi historique du programme, fixé à 1 840 ETPT, n'a jamais été atteint, malgré une consommation quasi-intégrale des crédits alloués à la masse salariale.

Plusieurs facteurs expliqueraient cette sous-consommation récurrente du plafond d'emplois sur la période récente :

- l'insuffisance des crédits de masse salariale , dont le montant n'a jamais atteint le niveau nécessaire pour assurer le financement du plafond de 1 840 emplois ;

- la nécessité de conserver un volant de sécurité d'ETPT pour assurer l'éventuelle réintégration des magistrats à l'extérieur des juridictions financières ;

- le nombre réduit de magistrats recrutés à la sortie de l'ENA , si on le rapporte aux magistrats qui quittent les juridictions financières (retraites, mobilités, disponibilités, etc.)

- un nombre élevé de sorties en 2018 : 208, soit près de 12 % de l'effectif en fonction dans les juridictions financières.

Si la révision à la baisse du plafond d'emplois devrait contribuer à résorber l'écart constaté entre ce plafond et les emplois réellement consommés, force est de constater qu'en 2019, la consommation d'emplois s'annonce inférieure de 18 ETPT au plafond prévu en loi de finances .

b) ... malgré une extension des missions confiées aux juridictions financières

Les dépenses de titre 2 représentent toujours la quasi-totalité des crédits du programme (89 % en 2020) , à la suite d'une hausse progressive de ces mêmes dépenses entre 2016 et 2020 (+ 5,4 % en AE et CP) conjuguée à une baisse globale des autres dépenses ces dernières années (- 7,5 % en AE et - 11,3 % en CP).

En effet, au cours des dernières années, plusieurs facteurs ont justifié une augmentation des dépenses de personnel de la Cour, à commencer par l'élargissement des compétences des juridictions financières et la technicité croissante de leurs missions, tandis que le développement du numérique a suscité des besoins nouveaux en termes de profils et de compétences.

En pratique, la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a élargi les compétences de contrôle des juridictions financières à l'ensemble des établissements et services sociaux et médico-sociaux , y compris de droit privé, alors que leur intervention était jusqu'alors limitée au seul secteur public ou associatif financé par le biais de subventions publiques. Selon les informations transmises à votre rapporteur spécial, ce nouveau champ de compétences, qui porterait sur près de 38 000 établissements supplémentaires à contrôler représentant 47 milliards d'euros d'argent public, supposerait une montée en compétences significative des équipes de contrôle sur un secteur et des pratiques encore peu connues de celles-ci.

En parallèle, depuis 2017, les juridictions financières sont impliquées dans l'expérimentation de la certification des comptes locaux , introduite par la loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite loi NOTRe). Cette expérimentation est menée en deux phases, la première, entre 2017 et 2020 portant sur un accompagnement des collectivités par les juridictions financières dans l'évaluation de la fiabilité de leurs comptes ; la seconde, entre 2021 et 2023, étant réservée à la réalisation de certifications préparatoires.

Le diagnostic d'entrée global réalisé en 2017 et début 2018 a ainsi nourri l'élaboration du bilan intermédiaire qui a été publié le 19 juin 2019 et a permis d'identifier plusieurs chantiers conséquents pour assurer le succès d'une fiabilisation des comptes locaux , à commencer par l'élaboration d'un recueil de normes comptables applicables au secteur public local ou la perspective du compte financier unique. L'année 2020 sera ainsi consacrée au développement d'examens ciblés par les équipes mixtes associant la Cour et les chambres régionales des comptes, sous l'égide de la formation commune dédiée et avec l'aide de l'équipe centrale.

Enfin, et en sus de leurs missions historiques (à savoir le contrôle de la régularité des comptes et du bon accomplissement par les comptables des obligations qui leurs incombent), les juridictions financières sont depuis peu impliquées dans le développement de contrôles communs entre la Cour et les chambres régionales , et demeurent régulièrement sollicitées par le Gouvernement et le Parlement pour des missions de conseil et d'appui. Le nombre d'auditions par le Parlement a ainsi doublé en 2018 et en 2019, notamment à la suite des nouvelles demandes formulées par l'Assemblée nationale, dans le cadre du « printemps de l'évaluation ».

3. Des redéploiements internes parmi les dépenses hors frais de personnel, permettant d'afficher une stabilité d'ensemble

En 2020, les dépenses hors titre 2 sont globalement stables en CP , même si elles diminuent légèrement en AE (- 8,29 millions d'euros) ; cette évolution à la baisse s'expliquerait par les renouvellements de baux immobiliers et de marchés pluriannuels intervenus en 2019 et qui ne se reproduisent pas en 2020.

En pratique, le budget 2020 se caractérise cependant par plusieurs redéploiements, permettant d'accroître l'effort budgétaire en faveur du développement informatique et de la formation du personnel. Ainsi, les dépenses immobilières qui représentent 41 % des crédits portés par le titre 3, enregistrent une diminution de 7,6 % en CP en 2020, tandis que les crédits destinés au développement des technologies numériques progressent de 11,2 % en CP par rapport à 2019 .

Par conséquent, plus de 80 % des dépenses d'investissement , soit 0,75 million d'euros, seront consacrés au renouvellement de matériels et à la poursuite de projets stratégiques informatiques.

En parallèle, les dépenses de fonctionnement courant, liées aux activités de contrôle (frais de déplacement, marchés d'expertise dans le cadre des missions de certification des comptes de l'État, du régime général de la sécurité sociale et des comptes locaux, travaux d'impression, frais postaux, actions de communication externe et archives) subissent une nouvelle baisse (- 2,7 % en CP), au profit du budget alloué aux ressources humaines qui progresse de 14,5 % en CP.

Votre rapporteur spécial note que cette stabilité d'ensemble rompt avec plusieurs années marquées par une attrition des crédits de fonctionnement et d'investissement ; en tout état de cause, le niveau atteint aujourd'hui semble constituer un plancher, la plupart des économies structurelles envisageables ayant d'ores et déjà été réalisées.


* 12 Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre et Miquelon.

* 13 L'article 11 de la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoit qu' « à compter de l'exercice 2019, le plafond des autorisations d'emplois prévu en loi de finances initiale, spécialisé par ministère, (...) ne peut excéder de plus de 1 % la consommation d'emplois constatée dans la dernière loi de règlement, corrigée de l'incidence des schémas d'emplois, des mesures de transfert et des mesures de périmètre intervenus ou prévus ».

* 14 En loi de finances rectificatives pour 2019, le plafond d'emploi a été diminué de - 44 ETPT pour le programme 164

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