II. UN RÉSEAU PRÉFECTORAL CONFRONTÉ À UNE RÉDUCTION CONTINUE DE SES MOYENS
Les suppressions d'emplois prévues sur le programme 354 (voir supra ), qui toucheront particulièrement le périmètre couvert par l'ancien programme 307 prolongeront une attrition des effectifs du réseau préfectoral continue depuis de nombreuses années.
A. LA BAISSE DES EFFECTIFS DU RÉSEAU PRÉFECTORAL, LE PROLONGEMENT D'UNE TENDANCE BIEN INSTALLÉE
L'évolution du plafond d'emplois en 2020 doit être resituée dans une tendance installée de baisse continue des effectifs du réseau préfectoral, qui a conduit à réduire ses missions et son déploiement sur le territoire avec des effets peu probants sur la qualité de l'action de l'État.
On rappelle qu'au total, au cours de la décennie écoulée entre 2007 et 2017, le plafond d'emplois du programme d'administration territoriale aura rétrogradé de 3 357 ETPT soit un repli de 11 % des effectifs .
Une partie de cette diminution d'effectifs est due à des transferts vers d'autres administrations dans le cadre de la délégation des compétences de gestion du FEDER aux régions (- 211 ETPT en 2016) et du transfert des services interministériels départementaux des systèmes d'information et de communication (SIDSIC) du fait de la mutualisation mise en oeuvre en 2016 (- 679 ETPT).
Mais, une fois pris en compte ces mouvements, le constat d'une nette réduction des effectifs de l'administration de l'État dans les territoires demeure.
1. Des suppressions d'emplois depuis 2009
Il n'en reste pas moins que les effectifs du réseau préfectoral ont subi dès avant la mise en oeuvre du « plan préfectures nouvelle génération » (PPNG) des réductions de personnel répétées détaillées dans l'encadré ci-après.
Chronique des réductions d'emploi du
réseau préfectoral
Les réductions d'effectifs du réseau préfectoral ont découlé successivement des « mandats » des révisions générales des politiques publiques - RGPP1 (de 2009 à 2011) et RGPP2 (définis initialement pour la période de 2012 à 2013 mais appliqués uniquement en 2012) - puis, à compter de 2013, du cadre d'action du plan ministériel de modernisation et de simplification (PMMS) et, enfin, pour la période 2016-2018, de la mise en oeuvre du « plan préfectures nouvelle génération » (PPNG). 1- Les mandats RGPP1 : une cible de réduction d'emplois de 2 107 ETPT pour 2009 à 2011 Rappel des cibles RGPP 1 Une économie de 2 107 ETPT devait être réalisée sur 3 ans, de 2009 à 2011 , répartie comme suit : - contrôle de légalité : 450 ETPT ; - système d'immatriculation des véhicules (SIV) : 339 ETPT ; - carte nationale d'identité, passeport : 260 ETPT ; - Fonctions support : 1 058 ETPT. B) Réalisation des mandats RGPP 1 Globalement, les objectifs ont été atteints. Le ministère suggère cependant que, dans le détail, les réductions d'emplois ont pu différer de celles qui avaient été programmées. Dans sa présentation du bilan de la RGPP 1, il fait valoir que les « résultats doivent être par ailleurs appréciés en fonction des obstacles rencontrés et notamment : - les difficultés initiales du SIV (calendrier différé, problèmes techniques lors de l'installation de l'application) ; - la fréquentation des usagers aux guichets des préfectures n'a pas enregistré la baisse escomptée ; - le report de la mise en place de la carte nationale d'identité électronique (CNIe) ; - la réduction limitée des actes transmissibles au titre du contrôle de légalité ». En bref, d'autres missions que celles initialement prévues pour receler des gains de productivité ont dû compenser une plus grande rigidité des emplois mobilisés par ces missions . 2- Les mandats RGPP 2 : une cible de réduction d'emplois de 475 ETPT en 2012 Rappel de la cible En 2012, les mesures RGPP 2 relatives au programme 307 « Administration territoriale » prévoyaient la suppression de 475 ETPT qui se répartissaient comme suit : - rationalisation de la délivrance des titres : 200 ETPT ; - contrôle de légalité et de la réglementation : 225 ETPT ; - rationalisation des fonctions support et de la représentation de l'État : 50 ETPT. |
Réalisation : - 385 ETPT La réduction d'effectifs liée au schéma d'emplois (- 380 ETP) a été inférieure à la baisse du plafond d'emplois (- 475 ETPT). Le programme 307 a réalisé un schéma d'emplois de - 383 ETP en 2012. En effet, un renfort de + 110 ETP a bénéficié au programme 307 par « atténuation » du schéma d'emplois ainsi ramené à - 365 ETP, afin de renforcer les équipes dans le cadre du déploiement du logiciel dit « Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France » (AGDREF). En gestion, l'objectif a été durci de 15 ETP et porté à - 380 ETP pour contribuer à la réalisation du schéma d'emplois du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ». L'effort final a été très majoritairement porté sur les missions suivantes : - rationalisation de la délivrance des titres : 142 ETP ; - contrôle de légalité et de la réglementation : 108 ETP ; - rationalisation des fonctions support et de la représentation de l'État : 133 ETP. 3- Les réductions d'effectifs en 2013 : une cible de réduction d'emplois de 53 ETPT En loi de finances initiale pour 2013, le schéma d'emplois pour 2013 tablait sur la suppression de 450 ETP et se trouvait compatible avec une baisse du plafond de 53 ETPT, compte tenu des évolutions observées l'année précédente. Cet effort de réduction correspondait à un taux de non-remplacement de 46 % des départs en retraite prévisionnels, contre 42 % en 2012. Les réductions d'effectifs liées à l'application du schéma d'emplois ont porté prioritairement sur les fonctions support (ex : la gestion budgétaire, les emplois de résidence et le nettoyage), les effectifs affectés au contrôle de légalité et au contrôle budgétaire, qui avaient fortement diminué entre 2009 et 2012, étant à peu près préservés. 4- Les réductions d'effectifs en 2014 : une cible de réduction d'emplois de 398 ETPT En loi de finances initiale pour 2014, la baisse du plafond d'emplois s'est à nouveau accusée avec - 398 ETPT. Le schéma d'emplois pour 2014 a été fixé à - 550 ETP correspondant à une amplification du taux de non-remplacement porté à 56 % des départs en retraite prévisionnels, contre 46 % en 2013. Ces réductions d'effectifs étaient, pour partie, explicitées par le plan ministériel de modernisation et de simplification, qui les justifiait notamment par des opérations de mutualisation et d'externalisation déjà engagées (exemple : fonctions supports et gestion budgétaire). Les suppressions d'emplois ont majoritairement porté sur les missions suivantes : - les emplois de résidence ; - les fonctions de nettoyage ; - la gestion budgétaire (régionalisation des plateformes Chorus) ; - la sécurité ; - les naturalisations ; - l'asile ; - le contentieux ; - les élections. 5- Les réductions d'effectifs en 2015 : une cible de réduction d'emplois de 262 ETPT Pour 2015, le schéma d'emplois a été fixé à - 180 ETP pour une baisse du plafond de 262 ETPT. Les gains d'effectifs à réaliser ont été justifiés comme suit : - régionalisation de la fonction financière et mise en place des services facturiers : - 40 ETP ; - création des plateformes régionales pour l'instruction des passeports : - 60 ETP ; - création des plateformes régionales d'instruction des demandes d'acquisition de la nationalité française par décret et par mariage : - 80 ETP. Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial |
Évolution des effectifs (ETP) portés par le programme 307 (2010-2019)
Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial
2. De nouvelles suppressions d'emplois dans le cadre du PPNG
La mise en oeuvre du plan préfectures nouvelle génération a prolongé ces réductions d'emplois au cours de la période 2016 à 2018, mais les effets attendus sur le plafond d'emplois paraissent avoir été contrariés.
Dans le cadre du PPNG, 1 300 ETP étaient appelés à être supprimés au cours de la période de 2016 à 2018.
En réalité, le nombre d'agents concernés par le plan était supérieur (4 000 emplois) puisqu'étaient prévus des redéploiements de moyens concernant 2 700 emplois.
La composante quantitative du plan a été menée à son terme selon la chronique suivante.
Suppressions d'emplois liées au PPNG
2016 |
2017 |
2018 |
Total |
|
Emplois supprimés |
200 |
685 |
415 |
1 300 |
Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial
Mais, même s'il a été très significatif, le repli du plafond d'emplois du programme entre 2015 et 2018 n'a été que de 733 ETPT, traduisant les effets de besoins non prévus, du fait des difficultés rencontrées dans la dématérialisation de certaines prestations, des flux migratoires et des menaces sur la sécurité.
Évolution des emplois du programme à périmètre courant (2011-2019)
Source : commission des finances du sénat d'après les données des documents budgétaires
Ces mêmes besoins ont freiné les redéploiements vers les missions identifiées comme prioritaires, qui devaient provenir de la restructuration touchant les services de titres sécurisés en place dans les préfectures. À ce jour, elles n'ont pu être complètement mises en oeuvre.