II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL
L'exécution des crédits est conforme aux prévisions réalisées en loi de finances initiale pour 2018, traduisant pour chaque programme une budgétisation sincère, à l'exception du programme 340 « Haut Conseil des finances publiques » pour lequel 30 % des crédits inscrits n'ont pas été consommés, contre 20 % en 2017.
A. LE PROGRAMME 165 « CONSEIL D'ÉTAT ET AUTRES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES »
1. En dépit du renforcement de ses effectifs, la Cour nationale du droit d'asile présente un bilan dégradé par rapport à 2017
Dans son rapport sur le projet de loi de règlement pour 2017, votre rapporteur spécial se faisait l'écho des inquiétudes émises par le responsable du programme, qui redoutait un risque de prolongation des délais de jugement devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) en 2018 .
En effet, après une hausse exceptionnelle en 2017 (+ 34 %), le nombre de recours enregistrés auprès de la Cour a continué de progresser en 2018 , pour atteindre 58 671 recours (+ 9,5 %). Pour faire face à cet afflux de demandes, la loi de finances initiale pour 2018 a autorisé la création de 102 emplois supplémentaires et prévu une enveloppe de deux millions d'euros destinée à l'extension des locaux de la Cour et l'installation de nouvelles salles d'audience.
Malgré cette augmentation conséquente des moyens alloués à la Cour, force est de constater que les appréhensions de votre rapporteur spécial se sont révélées parfaitement justifiées . Ainsi, en 2018, le stock d'affaires a progressé de 47 %, passant de 25 511 à la fin de l'année 2017 à 36 868 à la fin de l'année 2018, ce qui s'est traduit par une dégradation du délai moyen constaté de jugement des affaires 90 ( * ) , augmentant de 39 jours (+ 17 %), pour atteindre six mois et 15 jours.
Évolution du délai moyen constaté
de jugement des affaires
à la Cour nationale du droit
d'asile
(en jours)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
En pratique, tandis que le délai pour traiter les recours en procédure normale a été fixé à cinq mois par le législateur 91 ( * ) , le délai moyen constaté atteint huit mois et quatre jours en 2018, contre six mois et 17 jours en 2017 , soit un accroissement de 48 jours.
Le bilan est tout aussi alarmant concernant les recours en procédure accélérée , qui représentent une part croissante des décisions rendues par la Cour (43 % des décisions en 2018, contre 40 % en 2017 et 16,5 % en 2016) : le délai moyen constaté progresse de 42 jours entre 2017 et 2018 (+ 46 %), passant de deux mois et 28 jours à quatre mois et 11 jours, contre une cible initiale de cinq semaines.
Si ces résultats peu engageants résultent en très grande partie de la hausse spectaculaire du nombre de recours enregistré, votre rapporteur spécial relève que les nombreux mouvements sociaux ayant affecté le fonctionnement de la Cour en 2018 ont également contribué à la progression des délais, en multipliant le nombre de renvois. Il importe donc que les créations de poste prévues en loi de finances pour 2019 se traduisent par une amélioration des conditions de travail à la Cour et s'accompagnent d'une diminution des affaires en stock.
2. Malgré une hausse du contentieux, les juridictions administratives affichent une bonne maîtrise des délais de jugement
Les objectifs du principal indicateur de performance du programme ont globalement été respectés en 2018 .
Si la durée moyenne de jugement devant le Conseil d'État augmente de quinze jours par rapport à 2017, pour atteindre sept mois et 27 jours en 2018, elle demeure inférieure à l'objectif fixé ainsi qu'à la prévision réalisée dans le projet annuel de performance pour 2018, s'élevant à neuf mois.
Les délais demeurent maîtrisés tant du côté des tribunaux administratifs que des cours administratives d'appel, malgré une hausse exceptionnellement forte du contentieux (+ 8 % en 2018). Tandis que le délai moyen constaté s'améliore dans les tribunaux administratifs (- 12 jours rapport à 2017), il progresse très faiblement dans les cours administratives d'appel (+ 3 jours).
Cette maîtrise des délais s'accompagne d'un travail de rajeunissement des stocks en première instance, le stock de dossiers de plus de deux ans diminuant de plus de 13 %, ce dont votre rapporteur spécial se félicite .
* 90 Indicateur 1.1 de l'objectif n°1 du programme, « Réduire les délais de jugement ».
* 91 Loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 portant réforme du droit d'asile.