III. PRINCIPALES OBSERVATIONS SUR LES PROGRAMMES 112 « IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE » ET 162 « INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT » (RAPPORTEUR SPÉCIAL : M. BERNARD DELCROS)

A. LE PROGRAMME 112, UN PROGRAMME EN PERTE DE VITESSE

1. Les dépenses fiscales associées au programme 112 ont un rôle essentiel pour maintenir l'égalité entre les territoires

Dix-huit dépenses fiscales sont rattachées au programme 112 pour un coût total de 464 millions d'euros en 2018 . En hausse de 5 millions d'euros par rapport à 2017, les dépenses fiscales représentent près du double du montant des crédits de paiement du programme.

Principales dépenses fiscales du programme 112

(en millions d'euros)

Les dispositifs d'exonération sur les bénéfices dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) représentent moins de la moitié des dépenses fiscales du programme 112. Elles constituent un atout pour l'attractivité des territoires ruraux et c'est la raison pour laquelle votre rapporteur spécial mène une mission de contrôle à laquelle ont été associés la sénatrice Frédérique Espagnac et le sénateur Rémy Pointereau en tant que co-rapporteurs.

2. La baisse très marquée du niveau des autorisations d'engagement risque de conduire à moyen terme à une réduction de l'enveloppe accordée au programme 112

Après une hausse marquée des autorisations d'engagement en 2017 afin de permettre la mise en oeuvre des contrats de ruralité (212 millions d'euros d'autorisations d'engagement en 2017) et des pactes État-métropoles (30 millions d'euros), l'année 2018 se caractérise par une forte réduction du niveau des autorisations d'engagement .

Évolution des autorisations d'engagement
entre 2017 et 2018

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

La diminution des autorisations d'engagement et l'augmentation concomitante des crédits de paiement conduisent à faire diminuer les restes à payer du programme. Cette évolution témoigne d'une perte de dynamisme et de la diminution globale des crédits alloués aux nouveaux contrats territoriaux pour le programme 112 .

Les dépenses du programme relèvent pour l'essentiel d'une logique de contractualisation pluriannuelle. Ainsi, 64% des CP du programme couvrent des engagements souscrits avant 2018. Les contrats de plan État-région (CPER pour 108,5 millions d'euros en CP), les contrats de ruralité (41,5 millions d'euros) et les pactes État-métropole (2,9 millions d'euros) représentent plus des deux tiers de la consommation des crédits de paiement du programme . La baisse du niveau global des autorisations d'engagement, si elle est satisfaisante du point de vue de la liquidation des restes à payer, montre un désengagement progressif de l'État et la diminution à moyen terme des crédits consacrés à la contractualisation avec les collectivités territoriales .

3. Le transfert des contrats de ruralité vers le programme 119 en 2018 a conduit à la disparition de toute enveloppe dédiée

La loi de finances pour 2018 a transféré le financement des nouveaux contrats de ruralité du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » vers le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements ». Les crédits de paiement prévus sur le programme 112 jusqu'en 2020 servent uniquement à couvrir les restes à payer des engagements pris en 2017. Le Pacte État-métropole a également été transféré vers le programme 119.

Votre rapporteur avait déjà souligné à l'occasion de la loi de finances initiale pour 2018 le manque de cohérence d'un tel transfert. La mission Cohésion des territoires est en effet la mieux indiquée pour offrir un financement spécifique aux différents types de contrats conclus par l'État avec les collectivités et en assurer le suivi et l'évaluation . De plus, le transfert vers le programme 119 masque en réalité une diminution globale des crédits : si la DSIL a bien été augmentée de 45 millions d'euros en 2018, elle a diminué de ce même montant en 2019. Il en résulte une diminution des moyens accordés en particulier aux territoires ruraux .

De plus, les crédits la DSIL ne font pas l'objet d'affectation a priori . La sortie du programme 112 a donc eu pour conséquence la suppression de tout fléchage des financements vers les contrats de ruralité, ce qui marque à l'évidence un recul de la ruralité dans le spectre des priorités nationales.

4. La consommation des autorisations et des crédits du programme 112 s'est beaucoup éloignée des montants votés en loi de finances initiale

(en millions d'euros)

Niveau de consommation des crédits

LFI 2018

Exécution 2018

Pourcentage d'exécution

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Engagements territoriaux FNADT -CPER

121

102

121,1

108,5

100,08%

106,37%

FNADT hors CPER et hors services publics

9,8

20,7

7

18

71,43%

86,96%

PAT

15

20,7

14,4

19

96,00%

91,79%

Contrats de ruralité

0

44,2

0

41,5

/

93,89%

Pacte État-métropoles

0

15,2

0

2,9

/

19,08%

Services au public dont MSAP

10,7

12,3

17,4

18,5

162,62%

150,41%

Source : commission des finances du Sénat d'après la note d'analyse d'exécution budgétaire de la Cour des comptes

L'exécution des crédits a été très inégale entre les différentes actions du programme. Après une année 2017 largement perturbée par les annulations de crédit, les annulations pour 2018 se sont pour l'essentiel limitées aux réserves de précaution, soit 5,24 millions d'euros en autorisations d'engagement et 7,01 millions en crédits de paiement.

La sous-consommation des crédits est cependant préoccupante . En effet, seulement 78,31 % des autorisations d'engagements et 70,00 % des crédits de paiement ont été consommés . Ces taux très faibles s'expliquent en partie par les difficultés de gestion et de pilotage pluriannuel de la dépense. Ils trahissent surtout une mauvaise estimation des besoins de financement par les gestionnaires .

La sous-consommation des crédits des contrats de ruralité et du pacte État-métropoles s'explique également en partie par le transfert des nouvelles autorisations et crédits vers le programme 119 et par une mauvaise appréciation des restes à liquider en 2018 .

A l'inverse, les crédits en faveur des maisons de services au public (MSAP) du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) ont fait l'objet d'une très forte surconsommation de 162,6% en AE et de 150,4% des CP . L'objectif de 1000 MSAP a été largement atteint ( 1350 MSAP ) mais au prix d'un financement qui n'est plus paritaire. L'État, qui devait intervenir à parité avec les opérateurs pour financer la moitié des investissements avec les porteurs de projet, a finalement financé plus de la moitié du coût total des MSAP.

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