C. LA PROPOSITION DE LOI VISE À IMPOSER L'INSTITUTION D'UN MÉDIATEUR TERRITORIAL POUR CERTAINES COLLECTIVITÉS OU INTERCOMMUNALITÉS ET À CRÉER UN CADRE JURIDIQUE PROPRE À CETTE CATÉGORIE DE MÉDIATION
Faisant le constat de plusieurs dizaines de médiateurs déjà institués dans tous les niveaux de collectivités territoriales et d'une attente renouvelée de proximité de la part de nos concitoyens, la proposition de loi déposée par notre collègue Nathalie Delattre vise à encourager le développement de ce mode alternatif de règlement des litiges. Elle poursuit pour cela deux objectifs.
Insérant un nouveau chapitre II bis portant création de l'article L. 1112-24 au sein du titre unique du livre I er de la première partie du code général des collectivités territoriales, l' article 1 er de la proposition de loi vise, d'une part, à instituer un médiateur territorial dans certaines collectivités territoriales ou intercommunalités et, d'autre part, à créer un cadre juridique propre à cette catégorie de médiation.
Cet article impose tout d'abord « sans préjudice des compétences du Défenseur des droits », l'institution d'un médiateur territorial dans les communes de plus de 60 000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants, les conseils départementaux et les conseils régionaux. Il rend sa création facultative pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre n'excédant pas ces seuils 34 ( * ) .
Il fixe ensuite le champ de compétences du médiateur territorial, dont la mission serait de « faciliter la résolution à l'amiable des différends portés à sa connaissance, par voie de médiation, entre la collectivité ou l'établissement et les citoyens [et de] formuler des propositions visant à améliorer le service rendu par la collectivité ou l'établissement aux citoyens ».
Son champ de compétences s'étendrait à l'égard des personnes chargées par la collectivité ou l'établissement dans lequel est institué le médiateur de l'exécution d'une mission de service public. Les modalités d'action du médiateur territorial devraient être déterminées avec l'accord de toutes les collectivités ou établissements concernés en cas de mise à disposition, de regroupement de services ou de services communs. Seraient en revanche exclus les litiges entre les collectivités ou établissements et leurs agents.
L' article 1 er de la proposition de loi détermine également les modalités de désignation du médiateur territorial. Il serait désigné pour une durée de cinq ans, renouvelable une fois, et ne pourrait être révoqué par son autorité de nomination qu'en « cas de manquement grave à ses obligations légales ou d'incapacité définitive à exercer son mandat ». Il prévoit un régime d'incompatibilités avec les fonctions de fonctionnaire territorial ou d'élu au sein de la même autorité de nomination. Il formalise aussi le principe déontologique selon lequel le médiateur « exerce ses fonctions en toute indépendance », ce qui a pour conséquence que « dans la limite de ses attributions, il ne reçoit aucune instruction de la collectivité ou de l'établissement » qui l'a désigné.
Il encadre la procédure de saisine du médiateur territorial, en permettant à toute personne physique ou morale « qui s'estime lésée par le fonctionnement » d'une administration entant dans son champ de compétence de le saisir gratuitement. Ledit médiateur pourrait aussi se saisir d'office « d'une situation qui serait portée à sa connaissance » dans son champ de compétence. Le médiateur ne pourrait en revanche être saisi d'un différend dès lors que le litige est portée devant une juridiction, ni ne pourrait remettre en cause une décision juridictionnelle.
Enfin, l' article 1 er de la proposition de loi donne au médiateur territorial les moyens de son fonctionnement : la collectivité territoriale ou l'établissement de rattachement devrait mettre à sa disposition « les moyens humains et matériels nécessaires à l'exercice de ses fonctions ». En outre, afin de faciliter la connaissance du médiateur par les administrés susceptibles de le saisir, elle serait tenue d'informer les usagers de son existence. Le médiateur territorial, afin de rendre compte de son activité, lui remettrait chaque année un rapport.
Les modalités d'application de l'article seraient renvoyées au pouvoir réglementaire par décret en Conseil d'État.
L' article 2 de la proposition de loi prévoit son entrée en vigueur différée au 1 er janvier 2021, et son article 3 applique ses dispositions en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. L' article 4 de la proposition de loi compense ses conséquences financières par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, la création d'une taxe additionnelle sur le tabac pour compenser la perte de recettes en résultant pour l'État, ainsi qu'une majoration de la fraction de la taxe sur la valeur ajoutée affectée aux régions.
* 34 Dans cette hypothèse, le médiateur territorial serait institué par voie de délibération de l'organe délibérant.