B. DES GRANDS PROJETS NOMBREUX
Le montant des autorisations d'engagement du programme « Patrimoines » est en nette augmentation en 2019. Cette augmentation est portée par les grands projets de restauration de monuments historiques. Ainsi, 115 millions d'euros seront ouverts au titre du financement de deux de ces grands projets : le Grand Palais et le Château de Villers-Cotterêts.
1. Le Grand Palais, un projet d'ampleur mais nécessaire et cadré
Le projet de rénovation du Grand Palais ayant fait l'objet de récentes discussions concernant la maîtrise des coûts et l'opportunité de sa réalisation, vos rapporteurs spéciaux ont choisi d'en exposer dans le présent rapport les grandes lignes. Il ressort de cette analyse que le projet, dont le montant total est incontestablement élevé , présente de sérieuses garanties quant à la maîtrise des coûts et du calendrier, sans qu'il existe par ailleurs de véritable alternative à la rénovation du site telle qu'elle est proposée par la Réunion des musées nationaux - Grand Palais (Rmn-GP).
Construit en seulement trois années de 1897 à 1900 afin d'être achevé pour l'exposition universelle de 1900, le Grand Palais n'a pas connu, depuis cette date, de véritable rénovation d'ampleur, à l'exception des travaux réalisés sur la verrière au début des années 2000. Le projet actuel présente plusieurs ambitions, parmi lesquelles :
- remettre le bâtiment aux normes techniques , d'importantes surfaces n'étant actuellement pas ouvertes au public en raison des carences en termes de normes de sécurité ;
- mieux accueillir le public en créant une zone logistique sous le Grand Palais pour permettre l'installation des événements qui s'y déroulent ;
- doubler la jauge d'accueil en créant de nouvelles issues de secours, les 13 000 mètres carrés de la nef ne pouvant accueillir actuellement que 5 000 visiteurs ;
- élargir l'offre culturelle , en réunissant le Grand Palais et le Palais de la découverte, qui disposeront à l'avenir d'une entrée commune.
Le chiffrage du projet s'élève à 466 millions d'euros :
- 137 millions d'euros HT au titre de la restauration du monument historique ;
- 255 millions d'euros HT au titre de l'aménagement du Grand Palais ;
- 44 millions d'euros pour la réalisation d'une nouvelle muséographie pour le Palais de la découverte, dont la maîtrise d'ouvrage sera assurée par Universcience ;
- 30 millions d'euros pour les intérêts intercalaires et la compensation des pertes d'exploitation pendant la fermeture.
Cette évaluation est celle arrêtée à la fin de l'année 2015, au moment où le périmètre du projet de rénovation a été défini. Il s'agit en effet d'un programme plus global que la simple rénovation, initialement chiffrée à 238 millions d'euros. Le choix de ce projet découle notamment de la nécessité de donner au Grand Palais davantage de moyens pour que l'établissement public présente les garanties nécessaires pour emprunter ou encore attirer du mécénat.
Vos rapporteurs spéciaux observent que le chiffrage de 466 millions d'euros est constant depuis la présentation du projet actuel. Le budget qui lui est consacré se décompose de la façon suivante :
- 150 millions d'euros d'emprunt, celui-ci ayant d'ores et déjà été contracté par la Rmn-GP ;
- 25 millions d'euros de mécénat exceptionnel versé par la société Chanel ;
- 8 millions d'euros par les partenariats et les ressources propres d'Universcience ;
- 160 millions d'euros de subvention au titre des investissements d'avenir (PIA 3) ;
- 118 millions d'euros de crédits budgétaires , qui s'imputent à hauteur de 26 millions d'euros sur le programme « Recherche culturelle et culture scientifique » 8 ( * ) et 97 millions d'euros sur le programme « Patrimoines ». Ces crédits sont répartis sur 9 ans, ce qui représente environ 10 millions d'euros par an. Vos rapporteurs spéciaux soulignent que cet étalement permet de ne pas remettre en cause l'effort consacré par la mission « Culture » à l'entretien et à la restauration des monuments historiques.
D'importantes contraintes de calendrier pèsent sur le projet. En effet, celui-ci doit être achevé au plus tard pour accueillir, en août 2024, les compétitions de taekwondo et d'escrime dans le cadre des Jeux olympiques. Pour parvenir à respecter cette échéance, le Grand Palais devra être fermé au public à compter de décembre 2020 et jusqu'à la mi-2023. Afin de préserver le lien entre la Rmn-GP et les grands clients habituels et maintenir une offre équivalente pendant cette fermeture de deux ans et demi, un Grand Palais éphémère va être créé sur le Champ de mars. Ce projet a été réalisé en partenariat avec Paris 2024, afin de partager les coûts. La structure sera donc reprise en 2023 par le comité d'organisation afin d'accueillir les compétitions de judo et de lutte. Le montant de la part de financement de la Rmn-GP correspond à la somme des redevances versées par les clients qui se sont engagés à suivre le Grand Palais dans cet espace temporaire pendant la période des travaux. De plus, afin de limiter les risques financiers éventuels liés à l'exploitation du site, un concessionnaire sera choisi au premier semestre 2019. Enfin, la convention d'occupation du domaine public a d'ores et déjà été signée avec la Ville de Paris.
Par ailleurs, les terrains aux abords du Grand Palais seront cédés par la Ville de Paris à l'État, qui en affectera l'utilisation à la Rmn-GP. À cette fin, deux amendements ont été présentés par le Gouvernement à l'Assemblée nationale lors de l'examen du présent projet de loi de finances. Le premier, créant un article 74 bis rattaché à la mission, autorise cette cession. Le second tire les conséquences de l'opération sur le budget de la mission « Culture » et propose d'augmenter les crédits du programme « Patrimoines » de 1,6 million d'euros en 2019, ce montant s'imputant sur l'enveloppe de crédits budgétaires allouée au projet du Grand Palais. Vos rapporteurs spéciaux sont favorables à cette opération .
2. La rénovation du Château de Villers-Cotterêts dans le cadre du projet de laboratoire de la francophonie
Malgré les remarques sur l'incertaine soutenabilité du vaste programme immobilier du ministère de la culture, formulées non seulement par vos rapporteurs spéciaux, mais également par la Cour des comptes notamment, un nouveau projet d'envergure a été lancé au début de l'année 2018.
Le Président de la République a ainsi choisi le château de Villers-Cotterêts afin de créer un lieu dédié à la francophonie. Le site sera restauré et revalorisé et a vocation à devenir à la fois un site patrimonial attractif ouvert à la visite et un laboratoire de rencontre, d'expression et d'expérimentation autour de la francophonie et de l'avenir de la langue française. La rénovation du Château doit également s'insérer dans un projet de développement territorial à partir de la culture.
Le coût de la première tranche du projet est évalué à 110 millions d'euros , dont 55 millions de crédits budgétaires, 30 millions d'euros de grand emprunt et 25 millions d'euros de mécénat, avec un objectif de réalisation pour le printemps 2022.
Ce nouveau chantier se traduit dans le projet de loi de finances pour 2019 par une augmentation de 55 millions d'euros du montant des autorisations d'engagement et de 10 millions d'euros des crédits de paiement. Ces crédits devraient être délégués au Centre des monuments nationaux en cours de gestion. En effet, le monument a été mis à la disposition du CMN, pour la mise en oeuvre du projet, par convention d'utilisation en date du 14 avril 2018.
* 8 Ce programme est rattaché à la mission « Recherche et enseignement supérieur ».