C. LA DÉLICATE QUESTION DE L'INCLUSION DE LA « GESTION DES EAUX PLUVIALES URBAINES » AU SEIN DE LA COMPÉTENCE « ASSAINISSEMENT »
Le périmètre couvert par la compétence « eau » n'a pas connu d'évolution et ne soulève pas de difficulté particulière ; elle comprend deux missions : d'une part, la distribution de l'eau potable aux usagers et, d'autre part, la production, le transport et le stockage de l'eau potable en amont de sa distribution.
Ce n'est pas le cas, en revanche, de la compétence « assainissement ». Depuis la loi NOTRe, cette compétence est considérée comme une compétence globale, insécable, incluant, tant pour les communautés d'agglomération que pour les communautés de communes, non seulement l'assainissement collectif et non collectif mais également, selon l'interprétation de la direction générale des collectivités locales, la gestion des eaux pluviales.
Le service public de « gestion des eaux pluviales urbaines » est défini à l'article L. 2226-1 du code général des collectivités territoriales : il correspond à la collecte, au transport, au stockage et au traitement des eaux pluviales des aires urbaines. Il constitue un service public administratif relevant des communes. Il n'existe toutefois aucune définition d'une « aire urbaine ».
Avant la loi NOTRe, seul l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales relatif aux compétences des communautés d'agglomération faisait référence de manière explicite à la gestion des eaux pluviales au sein de la compétence « assainissement ». Pour les autres catégories juridiques d'EPCI à fiscalité propre (communautés de communes, communautés urbaines et métropoles), rien n'était prévu dans la loi.
La loi NOTRe a supprimé cette référence à la gestion des eaux pluviales pour les communautés d'agglomération, ce qui est à l'origine d'une interrogation sur le point de savoir si elle était intégrée de fait à l'assainissement et devait donc être transférée aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération à compter du 1 er janvier 2020.
Pour la direction générale des collectivités locales, le transfert de la « gestion des eaux pluviales urbaines » aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération est lié à celui de l'« assainissement » dont elle ne serait qu'une composante.
Cette analyse se fonde sur une jurisprudence constante du Conseil d'État 5 ( * ) selon laquelle le transfert des compétences « eau » et « assainissement » à une communauté urbaine entraîne nécessairement la prise en charge, par cette dernière, de la gestion des eaux pluviales, étant précisé qu'il s'agit pour les communautés urbaines d'une seule compétence « eau et assainissement » qui est transférée de manière globale et non de deux compétences distinctes comme pour les communautés d'agglomération et les communautés de communes.
C'est d'ailleurs sur cette analyse que reposent les deux circulaires de la direction générale des collectivités locales des 13 juillet 2016 6 ( * ) et 18 septembre 2017 7 ( * ) qui indiquent que « le transfert, à titre obligatoire, de la compétence « assainissement » aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération entraînera également celui de la gestion des eaux pluviales urbaines à compter du 1 er janvier 2020. Avant cette date, la prise de compétence « assainissement » en tant que compétence optionnelle implique également le transfert de la gestion des eaux pluviales, que les réseaux soient unitaires, ou séparatifs ».
Ainsi, les communautés de communes qui existaient déjà à la date de publication de la loi NOTRe et n'exerçaient pas la compétence « assainissement » sont tenues, depuis le 1 er janvier 2018, d'assumer les deux volets « traditionnels » de la compétence « assainissement » (collectif et non collectif) ainsi que la « gestion des eaux pluviales » en tant que compétence optionnelle.
Toutefois, cette interprétation n'allait pas de soi, comme l'a indiqué notre collègue députée Émilie Chalas, rapporteure de la présente proposition de loi au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, puisque : « la définition légale du service public administratif de la gestion des eaux pluviales et de ruissellement, intervenue postérieurement à cette décision [du Conseil d'État du 4 décembre 2013] ne prévoit pas cette inclusion au sein de la compétence de l'assainissement 8 ( * ) . »
Les mesures transitoires prévues à l'article 68 de la loi NOTRe La compétence « assainissement » étant auparavant sécable, l'article 68 de la loi NOTRe a prévu des mesures transitoires pour les communautés de communes qui ne l'exerçaient pas dans sa globalité avant sa publication. Deux cas sont à distinguer : 1. Les communautés de communes existant à la date de publication de cette loi mais n'exerçant qu'une partie de la compétence « assainissement » (c'est-à-dire soit l'assainissement collectif, soit l'assainissement non collectif) ont pu, jusqu'au 1 er janvier 2018 9 ( * ) , la comptabiliser comme l'une des trois compétences optionnelles devant être exercées par une communauté de communes, alors même qu'elles n'exerçaient pas la totalité de cette compétence. Depuis le 1 er janvier 2018, les communautés de communes qui n'ont pas pris la totalité de la compétence « assainissement » (c'est-à-dire l'assainissement collectif, l'assainissement non collectif et, selon la direction générale des collectivités locales, la gestion des eaux pluviales urbaines) ne sont plus autorisées à la comptabiliser comme une compétence optionnelle ce qui emporte deux conséquences : - soit cette non comptabilisation a pour conséquence de faire passer le nombre de compétences optionnelles exercées par la communauté de communes sous le seuil minimal de trois prévu par la loi : dans ce cas, le préfet, en application du deuxième alinéa du I de l'article 68 de la loi NOTRe, doit procéder dans les six mois (donc au plus tard au 1 er juillet 2018) à la modification des statuts de la communauté de communes afin qu'elle exerce l'ensemble des neuf compétences optionnelles mentionnées à l'article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales ; - soit cette non comptabilisation est sans conséquence sur le nombre minimal de trois compétences optionnelles devant être exercées par la communauté de communes : celle-ci peut alors continuer à l'exercer partiellement, en tant que compétence facultative (par définition, une compétence exercée à titre facultatif par un EPCI à fiscalité propre, quelle que soit sa catégorie juridique, n'est encadrée par aucun texte, ce qui autorise sa sécabilité, ainsi que l'a rappelé la direction générale des collectivités locales à votre rapporteur). 2. En revanche, les communautés de communes issues d'une création ou d'une fusion intervenue après la date de publication de la loi NOTRe doivent, dès leur création, exercer la totalité de la compétence « assainissement » si elles souhaitent la comptabiliser comme une compétence optionnelle. Dans ce cas, les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article 68 de la loi NOTRe ne s'appliquent pas. |
* 5 CE, 6 avril 1979, communauté urbaine de Lyon, n° 05464 ; CE, 26 février 1988, communauté urbaine de Bordeaux, n° 59452 ; CE, 11 juillet 1988, communauté urbaine de Bordeaux, n° 65376 ; CE, 4 décembre 2013, communauté urbaine Marseille Provence Métropole, n° 349614.
* 6 Note d'information du 13 juillet 2016 relative aux incidences de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République sur l'exercice des compétences « eau » et « assainissement » par les établissements publics de coopération intercommunale. NOR : ARCB1619996N.
* 7 Note d'information du 18 septembre 2017 relative à l'exercice des compétences « eau » et « assainissement » par les établissements publics de coopération intercommunale. NOR : INTB1718472N.
* 8 Rapport n° 581 (XVe législature) de Mme Émilie CHALAS, fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 janvier 2018. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :
http://www.assemblee-nationale.fr/15/rapports/r0581.asp
* 9 I de l'article 68 de la loi NOTRe.