SIXIÈME PARTIE
BRANCHE FAMILLE
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I. APRÈS UNE PÉRIODE DE DÉFICITS RÉCURRENTS, LA BRANCHE FAMILLE RENOUE AVEC UNE SITUATION NETTEMENT EXCÉDENTAIRE
A. L'ÉVOLUTION DU SOLDE DE LA BRANCHE AU COURS DE LA PÉRIODE RÉCENTE
1. Le déficit apparu à partir de 2008 a été résorbé progressivement grâce à des mesures de réduction des dépenses
a) L'apparition d'un déficit suite à la crise économique
La dynamique des dépenses de la branche famille est principalement déterminée par l'évolution des prestations légales indexées sur l'inflation alors que ses recettes, principalement composées de cotisations sociales, évoluent avec la masse salariale. Par conséquent, le solde de la branche tend généralement vers l'équilibre. Néanmoins, la forte dégradation de la conjoncture économique à partir de 2008 a provoqué l'apparition d'un déficit qui a culminé à 3,2 milliards d'euros en 2013.
b) La résorption progressive du déficit
Si l'amélioration de la conjoncture économique a permis aux recettes de croître à nouveau plus rapidement que les dépenses, la réduction du déficit de la branche famille résulte en grande partie de mesures de maîtrise des dépenses ainsi que d'une évolution de son périmètre.
Le plafond de l'avantage fiscal résultant de l'application du quotient familial pour le calcul de l'impôt sur le revenu a été abaissé par deux fois en 2013 et en 2014 81 ( * ) pour être porté à 1 500 euros. Le surplus de recettes du second abaissement, proche de 1 milliard d'euros par an, a été transféré à la branche famille par le biais de l'affectation de recettes fiscales.
Alors que le second abaissement du plafond du quotient familial avait été présenté comme une alternative à la remise en cause de l'universalité des allocations familiales, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a prévu la modulation de cette prestation en fonction du revenu. Cette mesure représente une économie pour la branche de l'ordre de 800 millions d'euros par an.
Plusieurs mesures touchant les barèmes ou les modalités de revalorisation des différentes prestations familiales ont également entraîné des économies substantielles pour la branche famille. La modification du système de plafonds de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) et la modulation de l'allocation de base, prévues par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2014, représentent par exemple une économie de 290 millions d'euros en 2017.
A l'inverse, plusieurs mesures de revalorisation de prestations ciblées sur les familles modestes ont été mises en oeuvre. Dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, une revalorisation progressive du complément familial (CF) majoré et de l'allocation de soutien familial (ASF), qui doit achever sa montée en charge en 2018, a ainsi été décidée, pour un coût estimé en 2017 à 590 millions d'euros.
Dans l'ensemble, l'effet des mesures d'économie portant sur les prestations familiales et le quotient familial est nettement supérieur à l'ampleur des augmentations de prestations ciblées sur les familles modestes. L'effet net pour la branche est une économie de 1,48 milliard d'euros en 2017, selon les données contenues dans les réponses au questionnaire budgétaire adressé par votre rapporteur au Gouvernement.
La réforme du congé parental à la suite de la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, qui a transformé le complément de libre choix d'activité (CLCA) en prestation partagée d'éducation de l'enfant (Préparee) a eu un impact significatif sur les dépenses de la branche famille. Cette réforme a réduit à 2 ans au lieu de trois la durée maximale du congé, une année supplémentaire pouvant être prise par le second parent 82 ( * ) . Dans un contexte de baisse tendancielle du nombre de naissance, cette réforme a accéléré la baisse du recours au congé parental, les pères ne faisant qu'extrêmement rarement valoir leur droit. Ainsi, la création de la Préparee s'est traduite par une économie qui était estimée à 290 millions d'euros au terme de sa montée en charge.
Enfin, la branche famille a bénéficié de l'évolution de son périmètre résultant de la mise en oeuvre du pacte de responsabilité et de solidarité. En effet, les réductions de cotisations sociales familiales sur les salaires inférieurs à 3,5 Smic, intervenues entre 2015 et 2016 ont été plus que compensées par le transfert vers le budget de l'État de la part des allocations logement qui était à la charge de la branche famille. L'effet net du pacte de responsabilité et des transferts de charges serait au bénéfice de la branche à hauteur de plus de 500 millions d'euros en 2017.
2. La branche famille renoue avec l'excédent en 2017 pour la première fois depuis dix ans.
Alors que le déficit était encore de 1 milliard d'euros en 2016, la branche famille devrait enregistrer un excédent en 2017 pour la première fois depuis 10 ans. Selon les hypothèses retenues par le projet de loi, le solde de la branche s'élèverait ainsi à + 300 millions d'euros.
a) Les recettes en 2017
L'effet en année pleine de la seconde phase du pacte de responsabilité contient la progression des cotisations sociales (+ 0,6 %) malgré le dynamisme de la masse salariale (+ 3,3 %). La LFSS pour 2017 a néanmoins prévu la compensation par l'État de mesures d'exonération qui n'étaient pas compensées, ce qui représente un surplus de recettes de 300 millions d'euros.
L'agrégat de recettes fiscales affectées à la branche croît de 10,9 % par rapport à 2016 en raison notamment de l'évolution de la répartition des impôts et taxes affectés entre les différentes branches de la sécurité sociale.
Les recettes de la branche s'élèveraient ainsi à 49,9 milliards d'euros en 2017, contre 48,6 milliards d'euros en 2016 (+ 2,7 %).
b) Les dépenses en 2017
Les transferts de charges à l'État prévus dans le cadre du pacte de responsabilité étant achevés, la progression des dépenses de la branche est à nouveau influencée essentiellement par l'évolution des prestations qu'elle verse.
Les prestations légales diminueraient légèrement (- 0,3 %) du fait de la faible progression des prestations indexées sur l'inflation et de la baisse des dépenses de prestations liés à l'accueil du jeune enfant.
Les dépenses au titre de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) ont en effet connu une nette baisse (- 3,6 %), du fait de la baisse du nombre de naissances, de la montée en charge de la modification du système de plafonds de l'allocation de base adoptée en 2014 et de la réduction drastique du recours au congé parental (- 19,8 %) suite à sa réforme entrée en vigueur en 2015.
Les prestations extra-légales, essentiellement liées au financement des établissements d'accueil du jeune enfant (EAJE), progressent elles de 3,8 %.
Enfin, les transferts vers les autres branches de la sécurité sociale fléchissent légèrement (- 0,7 %), notamment en raison du lien mécanique entre le recours au congé parental et les dépenses au titre de l'allocation vieillesse des parents au foyer (AVPF).
Les dépenses de la branche s'élèveraient ainsi à 49,6 milliards d'euros en 2017, comme en 2016.
c) Un excédent supérieur aux prévisions mais minoré par le PLFSS 2018
Le PLFSS pour 2017 fixait un objectif de solde très légèrement positif en 2017 (30 millions d'euros). La CCSS de septembre 2017 a fortement réévalué cet objectif, prévoyant un excédent de 489 millions d'euros, les dépenses étant moins dynamiques que prévu (49,6 milliards d'euros au lieu de 49,9 milliards d'euros), notamment en raison de la faiblesse de l'inflation, et les recettes plus importantes (50,1 milliards d'euros au lieu de 49,9 milliards d'euros).
L'excédent devrait toutefois être inférieur aux prévisions de la CCSS, du fait des mesures du PLFSS pour 2018 dont l'effet s'impute en 2017, et notamment de l'absence de compensation du crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires (article 4 bis du PLFSS 83 ( * ) ).
Évolution des prévisions de dépenses, de recettes et de solde pour 2017
Dépenses |
Recettes |
Soldes |
|
PLFSS 2017 |
49,9 |
49,9 |
0 |
CCSS septembre 2017 |
49,6 |
50,1 |
0,5 |
PLFSS 2018 |
49,6 |
49,9 |
0,3 |
* 81 Loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 et loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.
* 82 Au moment des débats sur le projet de loi relatif à l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, il était question de prévoir un congé de 30 mois pour le premier parent et 6 pour le second. La publication des décrets d'application coïncidant avec l'examen du PLFSS pour 2015, un partage 24 mois-12 mois a finalement été retenu et présenté comme une mesure d'économie.
* 83 Cette mesure était initialement prévue à l'article 18 du texte initial.