B. UNE AMÉLIORATION DE LA DÉFINITION DES NOUVELLES INCRIMINATIONS TERRORISTES PRÉVUES PAR LE PROJET DE LOI
Vos rapporteurs ont estimé qu'extraire de la loi du 29 juillet 1881 l'apologie et la provocation au terrorisme comme le prévoit l'article 4 présentait certains inconvénients.
En effet, certaines manifestations de l'apologie et la provocation au terrorisme restent bien des abus de la liberté d'expression. En outre, la modification proposée risque de constituer un précédent qui s'étendra à d'autres cas que l'on peut considérer comme également graves (provocation à l'assassinat, aux crimes racistes). De plus, le fait de placer la nouvelle infraction dans les dispositions relatives aux actes terroristes dans le code pénal implique la possibilité de recourir aux techniques spéciales d'enquête, dont le conseil constitutionnel a rappelé qu'elles ne devaient être mises en oeuvre que pour des infractions très graves et complexes.
Dès lors, vos rapporteurs ont estimé qu'il était préférable de mieux délimiter les faits d'apologie et de provocation au terrorisme qui doivent relever du code pénal. Ils ont donc proposé un amendement , adopté par votre commission, ayant pour objet de n'introduire dans le code pénal que l'apologie publique et la provocation au terrorisme utilisant internet . L'utilisation du réseau web présente en effet des caractéristiques objectives qui rendent des moyens d'enquête plus intrusifs légitimes : accessibilité et possibilité d'ajouter des contenus universelles, possibilité de messages plus complexes (vidéos, modes d'emplois d'engins explosifs, etc), possibilité d'une prise de contact interactive avec des personnes, etc.
Une telle incrimination engloberait notamment l'administration ou l'animation d'un site internet comportant des messages d'apologie ou de provocation au terrorisme, ce qui correspond aux besoins actuels de l'autorité judiciaire.
Enfin, ces faits resteraient punis de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende comme dans le projet de loi initial.
Par coordination, votre commission a adopté un amendement modifiant l'article 6 afin d'exclure la garde à vue prolongée, la prescription de vingt ans et les perquisitions nocturnes des dispositions procédurales qui s'appliqueront au nouveau délit d'apologie publique et de provocation au terrorisme sur internet.
Votre commission a également adopté des amendements de vos rapporteurs ayant pour objet de préciser la définition de la nouvelle infraction d'entreprise individuelle terroriste prévue par l'article 5 . Elle a ainsi prévu que les renseignements recueillis sur des personnes ou des lieux 12 ( * ) devraient avoir une dimension opérationnelle. En outre, parmi les faits matériels alternatifs pouvant contribuer à la constitution de l'infraction, elle a ajouté le fait d'effectuer des préparatifs logistiques permettant de mettre en oeuvre les moyens de destruction évoqués par le même article 5. En revanche, elle a supprimé la mention des déplacements dans une zone où sont commis des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité. En effet, selon vos rapporteurs, une telle mention introduit une certaine confusion dans la définition d'une infraction qui est censée viser des faits de nature terroriste.
Par ailleurs, votre commission a adopté un amendement supprimant l'article 5 bis . En effet, l'article 227-24 du code pénal, qui réprime la diffusion de certains types de messages lorsqu'ils sont susceptibles d'être vus ou perçus par des mineurs, mentionne déjà les messages « violents » comme relevant de ce délit, ce qui répond à l'intention de l'amendement dont est issu cet article (incriminer les messages « relatifs à un acte terroriste réel ou simulé »).
De même, votre commission a adopté un amendement supprimant l'article 15 quater. En effet, les articles 35 et 40, qui permettent à l'administration pénitentiaire de retirer des permis de visite ou de contrôler le courrier des détenus, prévoit déjà des motifs de « prévention des infractions » et de « maintien du bon ordre » . Ceux-ci sont suffisants pour appréhender les phénomènes mentionnés par l'article 15 quater , à savoir « le prosélytisme avéré en faveur de mouvements ou d'actions tendant à favoriser la violence ou le terrorisme ».
* 12 Ce recueil de renseignements constitue l'un des éléments alternatifs qui doivent s'ajouter à la recherche ou la détention de substances dangereuses et à l'intention terroriste pour constituer le nouveau délit.