III. RENFORCER LA DIMENSION SOCIALE DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE

Les politiques sociales et de l'emploi relevant pour l'essentiel de la compétence nationale des Etats membres, la dimension sociale de la construction européenne demeure marginale.

Toutefois, comme le souligne notre collègue Dominique Bailly dans son rapport d'information 22 ( * ) sur l'approfondissement de l'Union économique et monétaire (UEM) accompagnant la présente proposition de résolution, des arguments à la fois économiques et politiques plaident aujourd'hui en faveur d'une meilleure prise en compte des questions sociales dans la gouvernance de l'Union et, a fortiori , de la zone euro.

Au vu de la dégradation de la situation sociale et de l'emploi observée en Europe depuis le début de la crise, le développement de la dimension sociale de l'UEM, définie par la Commission européenne comme « la capacité des mécanismes de gouvernance économique et des moyens d'intervention à repérer, prendre en compte et surmonter les difficultés et les évolutions problématiques liées aux politiques mises en place dans l'UEM sur le plan social et en matière d'emploi » 23 ( * ) , constitue en effet une étape indispensable dans l'approfondissement de l'UEM.

A. UNE SITUATION SOCIALE ET DE L'EMPLOI DÉGRADÉE ET CONTRASTÉE

1. La forte progression du chômage et de la pauvreté

Selon les données recueillies par la Commission européenne, en juillet 2013, 26,6 millions de personnes étaient sans emploi dans l'Union européenne (UE-28), dont 19,2 millions dans la zone euro. Près d'un quart des jeunes actifs européens étaient au chômage, tandis que le nombre de chômeurs de longue durée a presque doublé depuis 2008.

Le nombre de citoyens européens soumis à un risque de pauvreté ou d'exclusion sociale a quant à lui augmenté de 7,4 millions entre 2008 et 2012, pour atteindre le quart de la population (125 millions de personnes). L'augmentation de la pauvreté est particulièrement importante dans la population en âge de travailler. En outre, la Commission européenne souligne que la diminution progressive des taux de chômage pourrait ne pas suffire pour inverser cette tendance en raison de l'augmentation du travail précaire ou à temps partiel.

2. Le creusement des écarts entre Etats membres

Dans son rapport annuel sur l'évolution de l'emploi et de la situation sociale en Europe 24 ( * ) , la Commission européenne fait état de l'accroissement des divergences socio-économiques au sein de l'UE, et plus particulièrement de la zone euro, depuis 2008. Elle observe notamment que :

- le taux de chômage dans les pays du sud et de la périphérie de la zone euro 25 ( * ) s'élève à 17 % en moyenne contre 7 % dans les pays du nord et du centre de la zone euro 26 ( * ) ;

- le risque de pauvreté a augmenté plus fortement dans les pays du sud et de la périphérie, où il concerne près de 19 % de la population entre 18 et 64 ans et 13,5 % dans les pays du nord et du centre de la zone euro.

Les divergences socio-économiques croissantes entre Etats membres sont d'autant plus préoccupantes qu'elles tendent à remettre en cause la viabilité de l'UEM. Selon la théorie des zones monétaires optimales , le bon fonctionnement d'une zone partageant la même monnaie exige en effet un certain degré de convergence réelle des économies, de façon à réduire le risque de choc asymétrique et à empêcher les effets de débordement ( spill over effects ) d'un Etat membre à l'autre. Dans le cas de l'Union européenne, le creusement des écarts observé depuis 2008 en matière économique et sociale - après une période de convergence entre 1999 et 2007 - discrédite la thèse de la « convergence endogène », selon laquelle les économies des pays participant à une zone monétaire tendent automatiquement à se rapprocher. L'ensemble de ces éléments milite donc en faveur du développement de la dimension sociale de l'UEM.


* 22 Cf. Rapport d'information n° 228 (2013-2014) fait par Dominique Bailly au nom de la commission des affaires européennes du Sénat.

* 23 Communication de la Commission européenne du 2 octobre 2013 intitulée « Renforcer la dimension sociale de l'Union économique et monétaire » (COM(2013) 690 final).

* 24 Commission européenne, « Employment and social developements in Europe 2013 », janvier 2014.

* 25 Sont classés dans la catégorie des pays du sud et de la périphérie de la zone euro : l'Estonie, la Grèce, l'Espagne, l'Irlande, l'Italie, Chypre, Malte, le Portugal, la Slovénie et la Slovaquie.

* 26 Sont classés dans la catégorie des pays du nord et du centre de la zone euro : l'Autriche, la Belgique, l'Allemagne, la Finlande, la France, le Luxembourg et les Pays-Bas.

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