EXAMEN EN COMMISSION
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - La proposition de loi que j'ai eu l'honneur de déposer, avec les membres du groupe socialiste et apparentés, modifie la loi du 30 octobre 2007 instituant le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Son inscription à l'ordre du jour du Sénat est une nouvelle marque de l'attention particulière que notre assemblée accorde à la situation des personnes privées de liberté et de notre attachement à l'existence d'une autorité de contrôle indépendante chargée de veiller au respect de leurs droits fondamentaux. Le Sénat avait voté dès avril 2001 une proposition de loi de M. Jean-Jacques Hyest instaurant un Contrôle général des prisons. Il y a trois ans, lors du débat sur le Défenseur des droits, le Sénat s'est opposé à l'absorption du Contrôleur général des lieux de privation de liberté dans la nouvelle institution. M. Patrice Gélard, rapporteur de ce texte, avait fait valoir que les missions étaient différentes, et qu'il convenait de dresser le bilan de l'action du Contrôleur général avant toute nouvelle évolution institutionnelle.
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a été créé par la loi du 30 octobre 2007. M. Jean-Marie Delarue a été nommé à cette fonction le 13 juin 2008 et l'institution a commencé à fonctionner en septembre 2008. Pour respecter nos engagements internationaux, sa compétence n'est pas limitée aux seuls établissements pénitentiaires mais a été étendue à l'ensemble des lieux susceptibles d'accueillir des personnes privées de liberté par décision d'une autorité publique : locaux de garde à vue, centres de rétention administrative, hôpitaux psychiatriques accueillant des malades hospitalisés sans leur consentement, etc... Aux termes de la loi, il est compétent pour veiller au respect de l'ensemble des droits fondamentaux des personnes, et pas seulement pour éviter les risques de torture, comme le prévoient nos engagements internationaux. Il bénéficie de garanties d'indépendance, peut être saisi très largement, et peut également s'autosaisir. Il dispose de larges prérogatives, comme la faculté de procéder à des visites d'établissements, y compris de façon inopinée.
Après cinq ans et demi, le bilan est remarquable : plus de 800 établissements visités - conformément à l'engagement pris par M. Delarue d'effectuer 150 visites par an - dont la quasi-totalité des établissements pénitentiaires d'ici cet été. Malgré des moyens budgétaires modestes, le Contrôleur s'est rendu à plusieurs reprises dans des départements et collectivités d'outre-mer, où certains établissements fonctionnent dans des conditions bien dégradées - c'est un euphémisme - comme notre commission s'en est souvent émue.
Le Contrôleur général peut être saisi par toute personne intéressée. Dans le silence de la loi, Jean-Marie Delarue a pris la décision de répondre à tout courrier qui lui était adressé et, le cas échéant, d'envisager les suites à leur donner en effectuant des enquêtes et en vérifiant, sur place, la réalité des allégations. Les saisines représentent depuis 2012 environ 4 000 courriers par an : il s'agit d'une charge de travail très importante.
Enfin, le Contrôleur général a pleinement fait usage de la faculté de publier des avis ou des recommandations, ce qui a parfois été mal ressenti par les membres de l'administration pénitentiaire, qui y ont vu une remise en cause de leur travail, comme aux Baumettes. Ces personnels exercent leurs fonctions dans des conditions difficiles et sont confrontés à des manques de moyens. On peut toutefois se réjouir de cette publicité qui a contribué à porter dans le débat public des questions rarement évoquées auparavant. Son expertise a en outre été utile au législateur, par exemple lors de la réforme de la garde à vue.
Ce bilan très positif est largement à mettre au crédit de la personnalité de Jean-Marie Delarue. En 2007, le rapporteur Jean-Jacques Hyest estimait que le premier titulaire des fonctions de Contrôleur général « devrait réunir la compétence et l'expérience nécessaires pour bénéficier d'un crédit incontestable auprès de l'opinion publique tout en suscitant la confiance des administrations et des responsables des lieux soumis à son contrôle ». M. Delarue a pleinement répondu à cette feuille de route, alliant une intransigeance sur les principes et un souci permanent de l'écoute et du dialogue, en particulier avec les responsables et le personnel. Il a su donner à la loi du 30 octobre 2007 toute sa portée. Il a mis en place, dans le silence de la loi, des pratiques conformes à une conception exigeante et ambitieuse de sa mission. Son mandat arrivera à son terme en juin 2014 et n'est pas renouvelable. L'examen de cette proposition de loi est l'occasion de réaffirmer notre attachement au principe d'une autorité autonome. En pratique, les missions du Défenseur des droits, qui recherche des solutions à des litiges particuliers, et du Contrôleur général, de contrôle et de prévention, sont complémentaires.
Cette proposition de loi comporte diverses mesures
destinées à protéger les interlocuteurs du
Contrôleur général. Jean-Marie Delarue a souvent
souligné la qualité du dialogue instauré avec les
responsables des lieux de privation de liberté ; dans la grande
majorité des cas, ses équipes ont pu accéder aux documents
dont ils avaient besoin. Des difficultés ponctuelles se sont toutefois
présentées, notamment pour l'accès à des images de
vidéosurveillance à l'occasion d'enquêtes portant sur des
faits précis par exemple. Le principal obstacle réside dans les
risques de « représailles » dont peuvent faire
l'objet ceux
- détenus ou membres du personnel - qui s'adressent
au Contrôleur général ou acceptent de s'entretenir avec ses
équipes. De tels comportements sont des initiatives individuelles
ignorées des responsables d'établissements ou des
représentants du personnel. Ils n'en sont pas moins inacceptables. La
proposition de loi crée un délit d'entrave à l'action du
Contrôleur général
- comme il en existe pour le
Défenseur des droits ou pour la CNIL - et renforce, sous peine de
sanctions pénales, les dispositions de la loi pénitentiaire sur
le secret des correspondances entre les personnes détenues et le
Contrôleur général.
M. Jean-Marie Delarue insiste sur le fait que l'efficacité de son action est liée au nombre et à la qualité des informations qui lui parviennent. Il se heurte encore maintenant à un certain nombre de restrictions, légales ou pratiques, en particulier lorsque ses enquêtes portent sur des faits précis. C'est pourquoi le texte lève, de façon encadrée, l'interdiction d'accéder à des informations couvertes par le secret médical, lequel limite en pratique la portée de son contrôle, s'agissant par exemple d'allégations de mauvais traitements ou d'abus de mesures de contention en hôpital psychiatrique. Comme le Défenseur des droits, le Contrôleur général pourra y accéder à la demande expresse de la personne concernée ou lorsque les faits concernent des sévices commis sur un mineur ou une personne incapable de se protéger. Le Contrôleur général pourra prendre connaissance des procès-verbaux de déroulement de garde à vue, à l'exception des auditions des personnes, bien sûr, couvertes par le secret de l'instruction. Il pourra mettre en demeure les intéressés de lui répondre dans un délai fixé.
La procédure applicable aux enquêtes est précisée, afin de lever tout risque d'ambiguïté : les ministres devront désormais répondre systématiquement aux observations dans le délai posé par le Contrôleur ; celui-ci devra être informé des suites données à ses démarches auprès du procureur de la République ou de l'autorité chargée du pouvoir disciplinaire ; enfin, ses avis seront systématiquement publiés, ce qui consacre dans la loi la pratique à l'oeuvre depuis 2008.
En ma qualité de rapporteure, au terme des auditions, je vous proposerai quatre amendements. L'un d'entre eux élargit la compétence du Contrôleur général aux mesures d'éloignement forcé d'étrangers en situation irrégulière. La directive « retour » de 2008 nous impose en effet de prévoir « un système efficace de contrôle du retour forcé », incluant l'ensemble des phases de transfert, y compris le voyage en avion, jusqu'à la remise de l'intéressé aux autorités du pays de destination. Il m'a paru nécessaire de donner une traduction législative à cette obligation et de la confier au Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Le ministère de l'Intérieur y est favorable. Dans un souci de cohérence juridique, j'ai souhaité que cette extension de compétence comprenne les éloignements vers les États membres de l'Union européenne comme vers les pays tiers.
Le secret médical est un sujet très sensible pour une partie des professionnels de santé, qui jouent un rôle essentiel dans les lieux de privation de liberté. J'avais pris initialement le parti de me caler sur les dispositions applicables au Défenseur des droits, qui s'appuient sur le consentement exprès de la personne. Une autre option, qui m'a été suggérée lors des auditions, aurait été de s'inspirer de la loi Kouchner de mars 2002, concernant les contrôles de l'IGAS : un accès non conditionné au consentement de la personne mais réservé aux seuls membres de l'inspection titulaires d'un diplôme de médecin. Je vous propose une solution intermédiaire. Le peu de temps qui nous est imparti nous empêche de procéder à des consultations approfondies des représentants du corps médical. Il me semble délicat de passer outre le consentement de l'intéressé. Je vous propose en revanche d'en assouplir les modalités et d'exiger son accord, non sa demande expresse, afin de ne pas attirer inutilement l'attention sur les démarches entreprises par une personne privée de liberté... Pour apaiser les craintes du corps médical, je vous propose de prévoir que seuls les collaborateurs médecins du Contrôleur général pourront prendre connaissance d'informations couvertes par le secret médical, à charge pour eux d'en extraire les informations utiles au contrôle. Jean-Marie Delarue, dont l'équipe comprend trois praticiens hospitaliers, serait prêt à se rallier à cette solution.
Deux remarques conclusives : j'ai pu mesurer l'amertume du personnel et des directeurs de l'administration pénitentiaire après certaines recommandations du Contrôleur général. Très largement favorables à l'existence d'un contrôle, ils ressentent toutefois les critiques sur le fonctionnement d'un établissement comme une mise en cause de leur travail. Ce sentiment ne doit pas être négligé, car le bon fonctionnement des établissements repose avant tout sur le personnel, dont une grande majorité s'acquitte de ses fonctions avec conscience professionnelle et probité.
Il me paraît par ailleurs essentiel de mieux faire connaître les fonctions du Contrôleur général, en particulier auprès des auxiliaires de justice. Les saisines émanant d'avocats, d'associations ou d'autres autorités administratives indépendantes sont peu nombreuses, alors que ces différents acteurs pourraient sans doute faire parvenir au Contrôleur des éléments fort utiles à l'exercice de sa mission.
Je vous propose d'adopter la proposition de loi, sous réserve de ces quatre amendements ; Mme Benbassa en a en outre déposé un quasiment identique à l'un des miens.
Mme Cécile Cukierman . - Je salue le travail de la rapporteure sur cette proposition de loi qui donne plus de moyens au Contrôleur général. Nous la soutenons et nos amendements suivront la même logique. Il est bon d'inscrire dans la loi des pratiques qui ne sont pour l'instant que des habitudes.
M. Nicolas Alfonsi . - Rendons hommage au Contrôleur général. Aucun doute ne peut subsister sur le bien-fondé de la séparation entre cette institution et le Défenseur des droits... Ce texte tire les conséquences d'un bilan, au lieu de déterminer des règles in abstracto . Nous y sommes très favorables.
M. Jean-René Lecerf . - Je salue l'esprit dans lequel a travaillé la rapporteure sur cette proposition de loi que je souhaiterais consensuelle - j'aurais souhaité qu'elle fût cosignée par tous les groupes composant notre commission. Rappelons que le Contrôleur général a été mis en place par l'ancienne législature et que le choix de Jean-Marie Delarue a été fait par le président de la République d'alors.
M. Jean-Jacques Hyest . - Avec notre avis favorable unanime.
M. Jean-René Lecerf . - C'était un excellent choix : M. Delarue a donné sa dimension à l'institution.
Cette proposition de loi est aussi une manière de prendre parti contre l'intégration du Contrôleur général dans l'institution du Défenseur des droits. Le vote initial en faveur de l'autonomie était conçu comme provisoire, mais les problèmes du milieu carcéral sont loin d'être réglés : la surpopulation carcérale n'a jamais été aussi importante qu'aujourd'hui. Les fonctions de médiation et de contrôle sont de toutes façons très différentes. Les dispositions sur le secret médical sont indispensables, l'expérience l'a montré, d'autant plus qu'en prison, les cellules sont de plus en plus souvent partagées, en dépit du principe de l'encellulement individuel. Se pose aussi le problème de la maladie mentale: le détenu qui, à Bonne-Nouvelle, la maison d'arrêt de Rouen, a tué son codétenu et s'est livré à des actes de cannibalisme n'avait rien à faire en prison.
Je serai plus sévère que la rapporteure sur l'administration pénitentiaire : 90 % de ses agents exercent leur travail de façon remarquable, mais elle souffre d'une opacité qui persiste quels que soient les gouvernements. La redoutable puissance des syndicats du personnel de surveillance bat en brèche l'autorité de la direction. Avec Nicole Borvo Cohen-Seat, notre ancienne collègue, nous avons entendu des remarques inadmissibles sur les fouilles corporelles et la mise à nu ; certains agents les jugeaient indispensables pour exprimer le rapport de force entre les surveillants et les détenus ; et ils rejetaient les scanners comme menaçant leur autorité. L'univers carcéral, si particulier, requiert de la chancellerie et des directeurs une fermeté qui fait souvent défaut aujourd'hui.
Mme Virginie Klès . - Saluons le travail complet de notre rapporteure, qui a choisi sur le secret médical un compromis intelligent et efficace. La personnalité hors normes de Jean-Marie Delarue a construit le Contrôleur général, autorité administrative indépendante aujourd'hui incontestable, mais dont il importe de conforter le rôle et les missions en inscrivant dans la loi ses pratiques, pour qu'elles demeurent après le mandat de M. Delarue.
Mme Hélène Lipietz . - Notre groupe est favorable au texte. Je rends hommage aux encadrants des centres de détention, en perpétuelle tension entre ce que la société, les détenus et les surveillants attendent d'eux. Le Contrôleur général ne doit pas être pour eux un ennemi, mais un appui face à l'administration centrale, pour exiger la rénovation des locaux, l'assainissement des cours de promenade... En dénonçant ce qui se passe, le Contrôleur fait progresser la qualité et l'intérêt du travail dans l'administration pénitentiaire.
M. Jean-Pierre Michel . - Je félicite moi aussi Mme Tasca qui est à la fois l'auteure et la rapporteure de cette proposition de loi - cet exemple confirme que nous pouvons faire nôtre une pratique usuelle à l'Assemblée nationale mais qui n'a pas cours ici.
Sur le fond, j'aurai une réserve concernant l'article 4, qui fait de la publication des rapports du Contrôleur général la règle. Je ne suis pas certain que cela soit pertinent : les agents de l'administration pénitentiaire n'ont pas la possibilité de remplir leurs missions comme ils le souhaiteraient. L'automne dernier, deux rapports ont été publiés concernant des centres éducatifs fermés qui avaient été contrôlés un an auparavant, l'un géré par une association dans le centre de la France et l'autre, public, relevant de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), près de Bayonne. Un grand journal du soir a consacré une pleine page à ces deux rapports. Le journaliste en profitait pour critiquer tous les centres éducatifs fermés. Or les dysfonctionnements relevés avaient été corrigés après le contrôle. Pour avoir visité de nombreux centres éducatifs fermés, je puis dire qu'ils sont souvent de grande qualité. La publication systématique des rapports peut s'avérer totalement contreproductive. Le Contrôleur général doit prendre garde aux commentaires plus ou moins bienveillants auxquels elle peut donner lieu.
M. Jean-Jacques Hyest . - Le rapport de Mme Tasca est prudent, je l'en félicite. Lorsque nous avons créé le Contrôleur général, sur le modèle britannique, notre but était de faire évoluer les pratiques. Nous ne voulons pas d'une fusion avec le Défenseur des droits, surtout dans le but de faire des économies ! Les membres du personnel des établissements pénitentiaires et des hôpitaux psychiatriques exercent des métiers extrêmement difficiles : évitons de les stigmatiser, car de grands progrès ont été accomplis. La publication n'a de sens qu'en cas de blocages, de refus, certainement pas quand les dysfonctionnements sont réparés. C'est pourquoi je ne suis pas persuadé de l'utilité de l'article 4. Je suis dubitatif également sur l'amendement concernant l'éloignement forcé des étrangers. Je me demande s'il répond vraiment à ce qu'exige la directive européenne.
M. Michel Mercier . - Merci à notre rapporteure qui connait parfaitement bien le sujet. Je veux rendre hommage au Contrôleur général, avec lequel j'ai travaillé.
Je ne suis pas non plus favorable à la publication systématique des rapports. Il faut laisser le temps au dialogue de produire ses effets. Le Contrôleur général est en contact permanent avec le ministère et l'administration pénitentiaire, laquelle a fait, soit dit en passant, de considérables progrès ces dernières décennies, notamment pour la prévention des suicides. L'École nationale d'administration pénitentiaire d'Agen a aussi contribué à améliorer la situation. N'accablons pas cette administration qui doit gérer la surpopulation carcérale. N'en déplaise à certains, nous devons continuer à rénover et construire des prisons.
Si le ministre de l'intérieur est d'accord avec l'amendement n° 2 concernant l'éloignement des étrangers, tant mieux, mais votre rédaction va plus loin que la directive retour puisqu'elle concerne aussi les ressortissants de l'Union européenne.
Même si certains points sont perfectibles, nous voterons cette proposition de loi.
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - Je remercie les orateurs pour leur approbation globale. M. Alfonsi rend, à juste titre, hommage au travail de M. Jean-Marie Delarue qui, depuis la création du Contrôleur général, a incarné cette fonction de façon irréprochable. Souhaitons que la suite soit à la hauteur de cette première expérience.
M. Lecerf est plus sévère que moi à l'égard de l'administration pénitentiaire : il rappelle à juste raison les positions parfois contestables de certains représentants du personnel. Mon rapport est néanmoins mesuré car nous devons soutenir et encourager l'administration pénitentiaire, non l'accabler. Ma prudence est également due aux récentes agressions sur des agents pénitentiaires, qui ont aiguisé, dans l'administration et dans l'opinion publique, la sensibilité à ces questions. Soyons plus modérés que ne le sont certains médias ou certains syndicats.
Quant à la publication systématique des rapports, l'article 4 ne concerne que les avis, les propositions et les recommandations, non les rapports de visite ou les résultats d'enquêtes ponctuelles. Le Contrôle général n'est pas astreint à rendre publics les rapports sur de telles enquêtes, il en a la faculté, comme le prévoit l'article 1 er de la proposition de loi. En outre, l'article 5 de la loi d'octobre 2007 impose le secret professionnel au personnel chargé des contrôles, qui a également l'interdiction de divulguer des éléments permettant d'identifier des personnes.
En raison des faibles moyens matériels à la disposition du Contrôleur général, la publication de ses rapports intervient souvent longtemps après les visites. L'article 3 de la proposition de loi prévoit que le Contrôleur général, dans son rapport, tient compte des évolutions intervenues depuis sa visite, quitte à en effectuer une deuxième.
Enfin, l'amendement n° 2 sur la procédure de retour est approuvé par le ministère de l'intérieur. Cette extension est-elle opportune ? J'ai souhaité viser l'ensemble des pays, non seulement les pays extérieurs à l'Union européenne, par cohérence intellectuelle. Le Contrôleur a déjà compétence sur les transfèrements de détenus. Les voyages vers le pays d'origine peuvent y être assimilés.
Les interventions du Contrôleur général visent non à sanctionner mais à prévenir et à améliorer. Mon rapport insiste sur les difficultés rencontrées par les agents de l'administration pénitentiaire et les personnels de santé : les moyens mis à leur disposition sont encore bien éloignés du strict nécessaire.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article additionnel avant l'article 1 er
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - L'amendement n° 2 étend le champ de compétence du Contrôleur général au déroulement de l'ensemble des procédures d'éloignement d'étrangers jusqu'à leur remise aux autorités de l'État de destination.
L'amendement n° 2 est adopté et devient l'article 1 er A.
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - Les amendements identiques n os 3 et 1 rectifié suppriment la mention dans la loi des « chargés d'enquête » auxquels le Contrôleur général confie le soin de répondre aux saisines. Si la loi du 30 octobre 2007 mentionne l'existence de « contrôleurs » et de « collaborateurs », les modalités d'organisation interne des services du Contrôleur général, le statut des agents, leurs obligations et leur rémunération sont définis par le décret du 12 mars 2008 ainsi que par un règlement intérieur. La mention dans le texte de « contrôleurs » et de « chargés d'enquête » laisserait penser que leur statut et leurs prérogatives peuvent être différents. Enfin, cette distinction pourrait rendre rigide le fonctionnement du contrôle général. Renvoyons au pouvoir règlementaire le soin de préciser, le cas échéant, les missions respectives.
M. Jean-René Lecerf . - L'ensemble du personnel relevant du contrôle général a donc qualité de contrôleur.
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - Tout à fait.
Les amendements identiques n°s 3 et 1 rectifié sont adoptés.
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - L'amendement n° 4 traite de la difficile question du secret médical. Je propose de limiter l'accès aux dossiers médicaux aux seuls collaborateurs du Contrôleur général titulaires d'un diplôme de médecin, ainsi le corps médical sera rassuré.
Par ailleurs, mon amendement remplace la demande expresse de la personne concernée par son accord, dans un souci de pragmatisme.
M. Jean-Pierre Michel . - Je le comprends, s'agissant du cas où le Contrôleur est saisi par une personne incarcérée et souhaite avoir accès à son dossier médical. Mais comment obtenir l'accord d'un malade hospitalisé sous contrainte ? Il est pourtant essentiel d'avoir accès à son dossier médical pour vérifier la régularité et le bien-fondé de l'internement.
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - Les visites et les saisines répondent partout aux mêmes critères : c'est pourquoi nous devons mentionner l'accord de la personne concernée, sauf s'il s'agit d'un mineur ou d'une personne irresponsable. C'est une solution de compromis, pour faire accepter au corps médical des dispositions novatrices.
M. Alain Richard . - M. Michel parle ici de personnes internées à la suite d'une décision administrative. Dans l'intervalle de temps qui nous sépare de la séance publique, il serait bon d'approfondir la question des contrôles opérés sur ce type de décisions.
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - Les médecins de l'IGAS, comme ceux de l'ARS, ont accès au dossier médical sans le consentement de la personne, mais ils abordent cette question sous un tout autre angle.
M. Jean-Jacques Hyest . - Les hospitalisations sous contrainte posent bien des questions. Mais ce n'est pas au Contrôleur général de vérifier la légalité des décisions d'internement. Il veille à ce que les patients en milieu psychiatrique fermé soient traités humainement.
Le Contrôleur général aurait dû se garder d'évoquer un élargissement de ses missions aux établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Cette proposition m'a causé un certain malaise - je l'ai dit à M. Delarue.
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - La proposition de loi n'aborde pas cette question.
M. Jean-Jacques Hyest . - Certes et c'est tant mieux, mais je me devais de l'évoquer : les Ehpad ne sont pas des lieux de privation de liberté !
Mme Catherine Tasca , rapporteure . - Il serait grave d'assimiler les personnes vivant en Ehpad à des personnes privées de liberté.
M. Jean-Pierre Michel . - Je retire ce que j'ai dit : depuis la loi de 2011, les personnes hospitalisées d'office sont, dans les dix jours, présentées au juge des libertés, qui a accès au dossier médical. Il y a donc bien un contrôle sur ces décisions.
L'amendement n° 4 est adopté.
L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 7
M. Jean-Pierre Sueur, président . - L'amendement n° 5 est rituel : il s'agit de l'application de la loi dans les collectivités d'outre-mer soumises au principe de spécialité législative.
L'amendement n° 5 est adopté et devient l'article 8.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Article additionnel avant l'article
1
er
|
|||
Mme TASCA, rapporteure |
2 |
Compétence du CGLPL pour contrôler le déroulement des mesures d'éloignement d'étrangers |
Adopté |
Article 1
er
|
|||
Mme TASCA, rapporteure |
3 |
Suppression de la référence aux
|
Adopté |
Mme BENBASSA |
1 |
Suppression de la référence aux
|
Adopté |
Mme TASCA, rapporteure |
4 |
Conditions d'accès du CGLPL à certaines informations couvertes par le secret médical |
Adopté |
Article additionnel après l'article
7
|
|||
Mme TASCA, rapporteure |
5 |
Application outre-mer |
Adopté |