B. UNE CONTRIBUTION DES OPÉRATEURS CONCENTRÉE SUR LES GRANDS ÉTABLISSEMENTS PUBLICS SOUS TUTELLE DU MINISTÈRE
1. Une baisse des subventions pour charges de service public concentrée sur les grands opérateurs
La mission « Culture » est caractérisée par le grand nombre de ses opérateurs, surtout en comparaison du montant - relativement faible dans le total des dépenses publiques - des crédits de la mission. En 2014 comme en 2013, ceux-ci subiront l'effet de la politique de maîtrise des dépenses publiques, pour un montant d'une vingtaine de millions d'euros, soit un effort global de l'ordre de 1,7 %. Outre une réfaction appliquée à la subvention pour charges de service public, égale à 1 % ou 2,5 % selon les établissements, certains devront également supporter une « baisse supplémentaire non pérenne ». Cette dernière contribution sera concentrée sur les grands établissements publics.
L'effort sera principalement réalisé par les opérateurs cumulant trois caractéristiques :
- une structure étendue, pouvant présenter des marges en termes d'économies ;
- un fonds de roulement élevé ;
- des marges de manoeuvre en termes de développement des ressources propres.
S'agissant du programme 175, la compensation de la mesure de gratuité des 18-25 ans dans les musées sera fortement réduite 2 ( * ) . En 2014, le montant global associé à cette dépense s'élèvera à 10,9 millions d'euros (AE=CP) contre 18 millions d'euros en 2013, soit une baisse de 65,14 % . Les établissements les plus affectés seront le Centre des monuments nationaux (CMN) ; le musée du Louvre ; le musée d'Orsay et de l'Orangerie ; le musée du Quai Branly et le Centre national d'art et de culture Georges Pompidou.
Si les arbitrages réalisés distinguent une part pérenne d'économies et une part exceptionnelle non-reconductible liée au niveau de fonds de roulement des établissements, les évolutions les plus significatives réalisées en 2014 relèvent de la part exceptionnelle (par exemple, 1 million d'euros pour le musée d'Orsay et de l'Orangerie et 2 millions d'euros pour le Centre des monuments nationaux), ce qui amène à nuancer la portée des économies réalisées, qui ne sont pas de nature pérenne .
S'agissant du programme 131 « Création », l'effort de maîtrise des dépenses se concentrera en 2014 sur les grands opérateurs que sont l'Opéra national de Paris (- 6,6 millions d'euros, dont 2,6 millions d'euros pérennes), l'établissement public du parc et de la grande halle de la Villette (EPPGHV) (- 3,4 %) et la Cité de la musique (- 3,1 %).
A l'inverse, les subventions pour charges de service public des opérateurs nationaux du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation culturelle » seront stabilisés ou légèrement renforcés, en lien avec la priorité accordée par le Gouvernement à l'éducation artistique et culturelle. Le Centre national de la cinématographie et de l'image animée (CNC) subira quant à lui un prélèvement exceptionnel de 90 millions d'euros sur son fond de roulement , après un prélèvement de 150 millions d'euros en 2013 (article 33 du projet de loi de finances pour 2014). Là encore, il ne s'agit pas d'une mesure d'économies pérenne.
Au total, les subventions pour charges de service public des opérateurs du programme 175 « Patrimoines » diminuent de 5,8 millions d'euros (contre plus de 10 millions l'an dernier), soit - 1,6 % par rapport à 2013. La baisse de ceux qui relèvent du programme 131 « Création » s'élève à 8,4 millions d'euros (contre 8,6 millions l'an dernier), soit - 2,8 % par rapport à 2013. A l'inverse, les subventions pour charges de service public sur les opérateurs de la mission 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » augmentent de 5,5 millions (+ 3,6 %).
2. Un plafond d'emploi stabilisé, et une forte hausse des emplois hors plafond
Le plafond des emplois 3 ( * ) rémunérés par les opérateurs (titre 3) s'élèvera à 18 952 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2014 avant transferts et mesures de périmètre . Cette évolution résulte d'une diminution nette de 113 ETPT avant transferts et mesures de périmètre par rapport à 2013, ce qui représente un effort de maîtrise des effectifs allégés par rapport à la prévision du budget triennal . Compte tenu de la création de 38 postes (transférés sur le titre 2) pour permettre la prise en charge sur emplois d'État d'une partie des fonctions d'accueil et de surveillance du musée Picasso qui ouvrira fin 2014, et de 75 ETPT destinés à résorber la précarité des emplois d'enseignants vacataires des écoles d'architecture , le volume total d'emploi des opérateurs sera maintenu en 2014 . Après transferts (moins 37 emplois) et mesures de périmètre (dont la sortie du périmètre des opérateurs de l'État du musée Rodin pour 100 emplois), le plafond d'emploi des opérateurs sur titre 3 s'élèvera à 18 877 équivalents temps plein (ETP) .
Par ailleurs, vos rapporteurs spéciaux observent une forte hausse des emplois hors plafonds 4 ( * ) , en particulier sur le programme 175 « Patrimoines ». D'après le projet annuel de performances de la mission « Culture » annexé au projet de loi de finances pour 2014, « la progression importante des emplois hors plafond entre la loi de finances initiale pour 2013 et le projet de loi de finances pour 2014 s'explique en très grande partie par le développement des contrats aidés dans les opérateurs du programme, qui correspondent notamment à des emplois d'avenir ». Il n'en demeure pas moins que les opérateurs sont donc la source d'une importante création d'emplois publics .
3. L'impact de la loi « Sauvadet »
La loi n° 2012-247 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, dite loi Sauvadet , aura un impact financier significatif . A ce titre, 4,1 millions d'euros seront nécessaires au paiement par les opérateurs du Programme 175 « Patrimoines » des contributions consécutives à la titularisation d'agents contractuels dans le cadre de la mise en oeuvre de cette loi. Les opérateurs du programme 131 « Création » sont également concernés (pour un montant plus marginal), tout comme les opérateurs du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » (3,2 millions d'euros).
Le projet annuel de performances de la mission « Culture » annexé au projet de loi de finances pour 2014 indique que les crédits prévus à ce titre « seront délégués en gestion et alloués aux opérateurs en fonction des besoins en cours d'année ». Vos rapporteurs spéciaux s'étonnent de cette méthode de gestion budgétaire qui semble peu rigoureuse.
4. Une proportion encore très insuffisante d'opérateurs dotés d'un contrat d'objectifs et de performance
D'après les informations transmises à vos rapporteurs spéciaux, à ce jour, seuls 23 opérateurs sont dotés d'un contrat de performance, et 16 documents stratégiques sont en cours de préparation, sur un total de 81 opérateurs .
Le nombre de contrats signés représente donc de l'ordre de 28,4 % des établissements. En ajoutant les contrats en cours de préparation, 48,2 % des opérateurs seront dotés d'un contrat de performance. Ce pourcentage reste encore bien faible et ne répond pas aux critiques plusieurs fois formulées, dans le cadre de rapports parlementaires ou d'inspection, sur l'insuffisance de la tutelle exercée par le ministère de la culture et de la communication sur ses opérateurs.
Les établissements non couverts par un tel document sont principalement :
- les écoles d'architecture. D'après les informations figurant dans les documents budgétaires, « un diagnostic commun doit être réalisé 5 ( * ) ».
- le CNC, car « la priorité a été donnée à la réforme du modèle de la gouvernance 6 ( * ) ». Toutefois, une réflexion est en cours pour l'élaboration d'un contrat d'objectifs et de performance.
- les établissements dont le dirigeant a été récemment nommé, tels que l'Ecole nationale supérieure de céramique industrielle et l'Opéra national de Paris ;
- le musée national Picasso, dont les espaces d'exposition ouvriront courant 2014 ;
- le MuCEM, inauguré au printemps 2013.
Vos rapporteurs spéciaux ne peuvent donc que vivement regretter le manque de réactivité du ministère de la culture et de la communication malgré la récurrence des critiques sur ce point, et réitérer leur souhait de voir augmenter, dès 2014, le nombre d'opérateurs disposant d'un contrat d'objectifs et de performance .
* 2 A noter que si la compensation des pertes de recettes associées à la gratuité pour les 18-25 ans dans les musées est inscrite dans la subvention pour charges de service public des opérateurs concernés sur le programme 175 « Patrimoines » depuis la loi de finances initiale pour 2013, la compensation des pertes de recettes associées à la gratuité pour les enseignants reste, pour sa part, comme en 2012 et 2013, compensée en gestion, par transfert de crédits depuis le budget du ministère de l'Éducation nationale .
* 3 Les emplois sous plafond sont les emplois financés en tout ou partie par des ressources de l'État.
* 4 Emplois non permanents intégralement financés par des ressources propres.
* 5 Source : réponses au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux.
* 6 Source : réponses au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux.