Rapport n° 437 (2012-2013) de M. Jean-Pierre MICHEL , fait au nom de la commission des lois, déposé le 20 mars 2013
Disponible au format PDF (1,2 Moctet)
Tableau comparatif au format PDF (355 Koctets)
-
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
-
EXPOSÉ GÉNÉRAL
-
I. OUVRIR LE MARIAGE AUX COUPLES DE PERSONNES DE
MÊME SEXE : UNE DEMANDE LÉGITIME D'ÉGALITÉ DES
DROITS
-
II. UNE RÉFORME DÉBATTUE, MAIS UNE
AVANCÉE NÉCESSAIRE
-
A. DES INTERROGATIONS À ENTENDRE, MAIS QUI
NE PARAISSENT PAS DEVOIR ÊTRE RETENUES
-
B. UNE AVANCÉE SOCIALE CONFORME AUX
ÉVOLUTIONS DE LA FAMILLE ET DE LA SOCIÉTÉ
-
A. DES INTERROGATIONS À ENTENDRE, MAIS QUI
NE PARAISSENT PAS DEVOIR ÊTRE RETENUES
-
III. UNE RÉFORME IMPORTANTE, QUI DOIT
ÊTRE CONFORTÉE
-
A. LE PROJET DE LOI DU GOUVERNEMENT
-
B. LES APPORTS DE L'ASSEMBLÉE
NATIONALE : UN TEXTE CONFORTÉ ET ENRICHI POUR RÉPONDRE AUX
DIFFICULTÉS RENCONTRÉES PAR LES FAMILLES HOMOPARENTALES
-
1. La prise en compte des difficultés
auxquelles pourraient être confrontés les époux ou les
parents adoptifs de même sexe
-
2. L'extension aux parents par le sang de la
règle d'égalité entre les père et mère pour
l'attribution du nom de famille
-
3. Le remplacement des coordinations terme
à terme par un dispositif balai
-
4. Des précisions apportées sur la
célébration des mariages et la reconnaissance ou la protection
des homosexuels
-
1. La prise en compte des difficultés
auxquelles pourraient être confrontés les époux ou les
parents adoptifs de même sexe
-
C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION :
RESPECTER LES LIMITES INITIALES DU TEXTE ET CONSACRER L'ÉGALITÉ
ENTRE LES ÉPOUX OU LES PARENTS DE MÊME SEXE ET CEUX DE SEXE
DIFFÉRENT
-
1. Le maintien du périmètre initial
du texte
-
2. La consécration d'un principe
d'égalité entre les époux ou parents de même sexe et
ceux de sexe différent
-
3. La recherche d'un équilibre pour la
dévolution du nom de famille
-
4. L'apport de nouvelles garanties pour les
dispositions relatives à la filiation adoptive et au maintien des liens
avec l'enfant
-
5. Des clarifications des dispositifs
proposés pour la célébration des mariages
-
1. Le maintien du périmètre initial
du texte
-
A. LE PROJET DE LOI DU GOUVERNEMENT
-
I. OUVRIR LE MARIAGE AUX COUPLES DE PERSONNES DE
MÊME SEXE : UNE DEMANDE LÉGITIME D'ÉGALITÉ DES
DROITS
-
EXAMEN DES ARTICLES
-
Article 1er - (art. 143, 144, 162 à 164 et
chapitre IV bis [nouveau] du code civil) - Ouverture du mariage et de
l'adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe et
règles de conflit de lois
-
Article 1er bis A (art. 34-1 [nouveau] du code
civil) - Contrôle et surveillance par le ministère public de
l'établissement des actes d'état civil
-
Article 1er bis B (art. 74 et 165 du code civil)
- Assouplissement des règles relatives à la détermination
de la mairie compétente pour célébrer un mariage
-
Article 1er bis CA (nouveau) (art. 75 du code
civil) - Suppression de la lecture de l'article 220 du code civil relatif
à la solidarité des dettes entre époux lors de la
célébration du mariage
-
Article 1er bis C (art. 165 du code civil) -
Caractère républicain de la célébration du
mariage
-
Article 1er bis D (art. 167 du code civil) -
Célébration impossible du mariage à l'étranger des
Français établis hors de France
-
Article 1er - (art. 143, 144, 162 à 164 et
chapitre IV bis [nouveau] du code civil) - Ouverture du mariage et de
l'adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe et
règles de conflit de lois
-
CHAPITRE IER BIS - DISPOSITIONS RELATIVES
À LA FILIATION ADOPTIVE ET AU MAINTIEN DES LIENS AVEC L'ENFANT
-
Article 1er bis (art. 345-1 du code civil) -
Autorisation de l'adoption plénière de l'enfant du conjoint,
antérieurement adopté par lui
-
Article 1er ter (art. 360 du code civil) -
Autorisation de l'adoption simple de l'enfant du conjoint,
antérieurement adopté par lui
-
Article 1er quater (supprimé) (art. 365 du
code civil) - Principe de l'exercice en commun de l'autorité parentale
en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint
-
Article 1er quinquies (art. 353-2, 371-4 et 373-3
du code civil et L. 351-4 du code de la sécurité sociale) -
Maintien des liens de l'enfant, en cas de séparation, avec le tiers qui
a résidé avec lui et l'un de ses parents et participé
à son éducation
-
Article 1er bis (art. 345-1 du code civil) -
Autorisation de l'adoption plénière de l'enfant du conjoint,
antérieurement adopté par lui
-
CHAPITRE II - DISPOSITIONS RELATIVES AU NOM DE
FAMILLE
-
Article 2 A (nouveau) (art. 225-1 [nouveau] du
code civil) - Possibilité d'usage, par l'un des époux, du nom de
l'autre époux
-
Article 2 (art. 311-21, 311-23, 357 et 357-1 du
code civil) - Dévolution du nom de famille en cas de filiation
légalement établie et d'adoption plénière
-
Article 3 (art. 361 et 363 du code civil) -
Dévolution du nom de famille en cas d'adoption simple
-
Article 2 A (nouveau) (art. 225-1 [nouveau] du
code civil) - Possibilité d'usage, par l'un des époux, du nom de
l'autre époux
-
CHAPITRE III - DISPOSITIONS DE
COORDINATION
-
Articles 4 et 4 bis(art. 6-1 [nouveau], 34, 75,
108, 206, 371-1, 601, 718 [rétabli] et 757-1 du code civil) -
Égalité de traitement entre les époux ou parents de
même sexe et ceux de sexe différent - Habilitation du Gouvernement
pour procéder aux coordinations nécessaires, hors code
civil
-
Article 4 ter (art. L. 211-1 du code de l'action
sociale et des familles) - Critères d'éligibilité au
statut d'association familiale
-
Articles 5 à 13 (suppression maintenue) -
Coordinations dans divers codes
-
Article 13 bis (art. L. 732-10, L. 732-10-1
[nouveau], L. 732-11, L. 732-12 et L. 732-12-1 du code rural et de la
pêche maritime) - Ouverture du congé d'adoption du régime
des exploitants agricoles
-
Article 14 (art. L. 331-7, L. 351-4, L. 613-19
à L. 613-19-2, L. 722-8 à L. 722-8-3 du code de la
sécurité sociale) - Coordinations dans le code de la
sécurité sociale
-
Articles 15 et 16 (suppression maintenue) -
Coordinations dans les codes des transports et du travail
-
Article 16 bis (art. L. 1132-3-2 [nouveau] du
code du travail) - Protection du salarié homosexuel refusant une
mutation dans un pays incriminant l'homosexualité
-
Articles 17 à 20 (suppression maintenue) -
Coordinations dans les lois relatives aux fonctions publiques et dans
l'ordonnance relative à l'enfance délinquante
-
Article 21 (art. 6 de l'ordonnance
n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et
la généralisation des prestations familiales et à la
protection sociale dans la collectivité départementale de
Mayotte) - Coordinations dans la législation relative aux prestations
familiales à Mayotte
-
Articles 4 et 4 bis(art. 6-1 [nouveau], 34, 75,
108, 206, 371-1, 601, 718 [rétabli] et 757-1 du code civil) -
Égalité de traitement entre les époux ou parents de
même sexe et ceux de sexe différent - Habilitation du Gouvernement
pour procéder aux coordinations nécessaires, hors code
civil
-
CHAPITRE IV - DISPOSITIONS DIVERSES, TRANSITOIRES
ET FINALES
-
EXAMEN EN COMMISSION
-
ANNEXE 1 - LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LA
COMMISSION
-
ANNEXE 2 - LISTE DES AUDITIONS
COMPLÉMENTAIRES DU RAPPORTEUR
-
ANNEXE 3 - ÉTUDE DE
LÉGISLATION COMPARÉE
N° 437
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013
Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 mars 2013 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe ,
Par M. Jean-Pierre MICHEL,
Sénateur
Tome 1 : Rapport
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Sueur , président ; MM. Jean-Pierre Michel, Patrice Gélard, Mme Catherine Tasca, M. Bernard Saugey, Mme Esther Benbassa, MM. François Pillet, Yves Détraigne, Mme Éliane Assassi, M. Nicolas Alfonsi, Mlle Sophie Joissains , vice-présidents ; Mme Nicole Bonnefoy, MM. Christian Cointat, Christophe-André Frassa, Mme Virginie Klès , secrétaires ; MM. Alain Anziani, Philippe Bas, Christophe Béchu, François-Noël Buffet, Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Mme Cécile Cukierman, MM. Michel Delebarre, Félix Desplan, Christian Favier, Louis-Constant Fleming, René Garrec, Gaëtan Gorce, Mme Jacqueline Gourault, MM. Jean-Jacques Hyest, Philippe Kaltenbach, Jean-René Lecerf, Jean-Yves Leconte, Antoine Lefèvre, Mme Hélène Lipietz, MM. Roger Madec, Jean Louis Masson, Michel Mercier, Jacques Mézard, Thani Mohamed Soilihi, Hugues Portelli, André Reichardt, Alain Richard, Simon Sutour, Mme Catherine Troendle, MM. René Vandierendonck, Jean-Pierre Vial, François Zocchetto . |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : |
344 , 581 , 628 et T.A. 84 |
|
Sénat : |
349 , 435 et 438 (2012-2013) |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOISRéunie le mercredi 20 mars 2013, sous la présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président , la commission des lois a examiné le rapport de M. Jean-Pierre Michel et établi son texte sur le projet de loi n° 349 (2012-2013), ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe . Après avoir rappelé les nombreuses auditions conduites par la commission et s'être félicité du climat serein dans lequel ses travaux s'étaient déroulés, M. Jean-Pierre Michel, rapporteur, a jugé que l'ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux couples homosexuels répondait à une triple exigence : la reconnaissance sociale des couples homosexuels et des familles homoparentales, l'égalité des droits et des devoirs avec les autres familles et la protection que l'État doit leur assurer, comme à chacun. Il a proposé à la commission de conserver le texte dans son périmètre initial, renvoyant le débat sur une réforme plus globale de l'adoption et de la filiation au projet de loi relatif à la famille annoncé par le Gouvernement. La commission a adopté treize amendements , dont dix de son rapporteur, ainsi qu'un de notre collègue Cécile Cukierman sur le port, à titre d'usage, du nom de l'époux, un, de suppression -identique à celui du rapporteur, de notre collègue François Zocchetto, et un du Gouvernement. À l'initiative de M. Jean-Pierre Michel, rapporteur, elle a ainsi consacré, en tête du code civil, un principe d'égal traitement entre les couples de même sexe et ceux de sexe différent, pour ce qui concerne les droits et obligations relatifs au mariage ou à la filiation adoptive. Elle a adopté parallèlement un amendement du Gouvernement sollicitant une habilitation pour procéder, par ordonnance, aux coordinations rendues nécessaires pour garantir la conformité des lois - hors code civil - avec cette égalité de traitement. La commission a par ailleurs rétabli la règle traditionnelle de dévolution du nom de famille pour les enfants reconnus par leurs deux parents : en l'absence de choix commun des intéressés, l'enfant reçoit le nom du père. Toutefois, dans l'hypothèse d'un désaccord entre les parents, elle a prévu que le nom du père ne prévale pas sur celui de la mère, et que l'enfant les reçoive tous les deux, accolés dans l'ordre alphabétique. De nouvelles garanties ont été apportées par la commission en matière d'adoption, afin d'interdire que des adoptions successives ne conduisent à des pluri-parentalités. La commission a adopté un amendement de son rapporteur confortant les droits des parents « sociaux » ou des beaux-parents qui ont élevé un enfant, en le prémunissant contre tout risque d'éviction par le nouveau conjoint du parent légal, si cette éviction est contraire à l'intérêt de l'enfant. Enfin, elle a adopté plusieurs amendements de simplification ou de clarification des règles relatives à la célébration des mariages. La commission a adopté le projet de loi ainsi modifié. |
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi en première lecture du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe 1 ( * ) , adopté par l'Assemblée nationale le 12 février 2013.
Ce texte concrétise un engagement du président de la République présenté devant les Français, lors de l'élection présidentielle.
En offrant aux couples homosexuels la faculté d'accéder, à l'égal des couples hétérosexuels, au mariage, aux droits et devoirs qui en découlent, ainsi qu'à l'adoption conjointe, le présent projet de loi consacre l'exigence d'égalité entre les couples, sans distinction de sexe ni d'orientation sexuelle.
La préparation de ce texte et son examen par l'Assemblée nationale ont nourri un important débat auquel ont pris part, en séance, dans les médias, et même dans la rue, les partisans et les opposants de la réforme.
À l'initiative conjointe de son président, M. Jean-Pierre Sueur, et de votre rapporteur, la commission des lois a souhaité contribuer à ce débat, en organisant près d'une quarantaine d'heures d'auditions ouvertes à l'ensemble des sénateurs et publiques 2 ( * ) .
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice et Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille ont ainsi pu présenter le projet de loi et répondre aux questions de l'ensemble de nos collègues.
La parole a par ailleurs été donnée, de manière équilibrée, aux représentants des associations familiales, des associations de défense des droits des homosexuels, des associations de protection de l'enfance ou des associations compétentes en matière d'adoption.
Les principales sensibilités religieuses ont été entendues, ainsi que de nombreuses personnalités qualifiées dans les disciplines juridique, anthropologique, philosophique, sociologique, psychiatrique ou psychanalytique.
Le Défenseur des droits, le conseil supérieur de l'adoption, l'agence française de l'adoption, l'assemblée des départements de France et l'association des maires de France ont présenté leur analyse de la réforme engagée.
Votre commission a enfin entendu les représentants des professions juridiques - notaires, avocats - qui accompagnent les familles, ainsi que des représentants des juges des enfants et des juges aux affaires familiales 3 ( * ) .
Les différents autorités et personnalités entendues se sont félicitées, dans leur ensemble, du temps d'écoute qui leur avait été réservé.
Ces auditions se sont déroulées dans un climat serein et attentif, conforme à la dignité et l'importance des questions soulevées. Les échanges auxquels elles ont donné lieu ont révélé combien cette réforme lève d'espoirs et de craintes. Votre rapporteur a pris la mesure des unes comme des autres.
Conscient de l'importance du changement symbolique qu'engage l'ouverture du droit de se marier aux couples de personnes de même sexe, il est aussi convaincu de sa nécessité, au nom d'une triple exigence : la reconnaissance sociale des couples homosexuels et des familles homoparentales, l'égalité des droits et des devoirs avec les autres familles et la protection que l'État doit leur assurer, comme à chacun.
D'autres questions se posent que celles traitées par le présent projet de loi. Le Gouvernement a annoncé le dépôt d'ici la fin de l'année d'un texte consacré à la famille. Il a engagé des consultations et notamment saisi le comité consultatif national d'éthique de l'assistance médicale à la procréation. Les auditions de votre commission ont confirmé la nécessité d'une réforme globale de l'adoption, qui concernerait tous les couples et tous les enfants candidats à l'adoption. Ces sujets sont toutefois hors du champ du projet de loi qui vous est proposé : il convient de ne pas lui faire porter le poids de choix que le législateur examinera en leur temps.
La commission des affaires sociales s'est saisie pour avis du texte et a désigné comme rapporteure notre collègue Michelle Meunier, qui a participé aux travaux de votre commission.
I. OUVRIR LE MARIAGE AUX COUPLES DE PERSONNES DE MÊME SEXE : UNE DEMANDE LÉGITIME D'ÉGALITÉ DES DROITS
L'égalité est le maître mot de la réforme : une égalité de droits et de devoirs qu'autorise l'accès au statut protecteur du mariage, au même titre que les couples de personnes de sexe différents.
Elle se décline sous deux aspects : une demande légitime et constante d'égalité exprimée, depuis longtemps déjà, par des couples de personnes de même sexe et les associations qui défendent leurs droits ; le refus d'un statut à part, qui maintiendrait les couples de personnes de même sexe et leurs enfants hors de la loi commune.
Ce choix d'égalité n'appartient qu'au législateur : le texte présenté par le Gouvernement l'en saisit.
A. UNE DEMANDE CONSTANTE POUR L'ÉGALITÉ DES DROITS
Présentant, lors de son audition par votre commission, le présent projet de loi, Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice a rappelé que « le projet de loi est marqué du sceau de l'égalité, comme l'ont très clairement souligné le Président de la République et le Premier ministre ».
Ses propos font échos à ceux de plusieurs représentants de la société civile, et notamment, des associations de défense des droits des homosexuels ou des transsexuels ou de certaines associations familiales.
M. Nicolas Gougain, porte-parole de l'interassociative Inter-LGBT, a ainsi salué, devant votre commission, l'examen par le Parlement du projet de loi : « aujourd'hui, nous y sommes, la France marche vers l'égalité des droits » ; ce qu'à son tour, M. Dominique Boren, co-président de l'association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL), a souligné en des termes voisins : « le 2 février 2013, jour de l'adoption du premier article du projet de loi par l'Assemblée nationale, l'égalité républicaine s'est remise en marche, pour donner des droits à des citoyens qui en étaient privés à raison de leur seule orientation sexuelle ».
L'union des familles laïques (UFAL) a apporté son soutien au projet de loi, qui, pour son président, M. Michel Canet, « constitue une étape vers l'égalité entre les différentes formes de couples ». M. Jean-Marie Bonnemayre, président de la Confédération nationale des associations familiales laïques (CNAFAL) a dénoncé toute discrimination en cette matière. Mme Marie-Françoise Martin, présidente de la confédération syndicale des familles (CSF) a, pour sa part, rappelé que cette association était « très attachée à l'égalité des droits », et, pour cette raison, favorable au mariage pour tous.
Présentant devant votre commission l'avis majoritaire adopté par commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), sa présidente, Mme Christine Lazerges a quant à elle estimé que « le texte enrichi[ssait] le mariage en l'offrant à des personnes qui en étaient exclues. Au demeurant, la CNCDH, qui lutte depuis la fin de la deuxième guerre mondiale contre les discriminations, estime que nous devons aux personnes homosexuelles la reconnaissance sociale et la justice. [...] Il s'agit ici d'égalité recherchée dans la reconnaissance sociale ».
Les auditions conduites par votre rapporteur ont confirmé cette volonté de reconnaissance des couples homosexuels et d'égalité des droits avec les couples hétérosexuels, qu'il s'agisse des représentants d'associations particulières de défense des droits des homosexuels, comme l'association des familles homoparentales (ADFH), le Refuge, la fédération Total respect, ou l'Autre maman ; des représentants d'associations politiques, comme Homosexualité et socialisme et Gay lib ; ou encore des représentants d'associations ou de courants religieux minoritaires au sein des grandes églises, qui promeuvent un modèle de foi qui n'établit pas de distinction entre les uns et les autres, comme l'association David et Jonathan, le carrefour des chrétiens inclusifs, l'association Beit Haverim et celle des musulmans progressistes de France.
Ce voeu d'égalité , déjà formulé lors de l'adoption de la loi instituant le pacte civil de solidarité 4 ( * ) , est conforme aux principes qui fondent notre République .
Il a cependant été dénoncé à plusieurs reprises lors des auditions : certaines des personnes entendues ont fait valoir que l'égalité n'est pas l'identité, et qu'elle n'impose de traiter également que des personnes placées strictement dans la même situation.
Développant ce raisonnement, M. André Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, président de la conférence des évêques de France s'est interrogé : « la différence sexuelle est-elle une inégalité ? L'intention déclarée du projet de loi d'établir davantage d'égalité est-elle fondée ? Chacune de nos existences est marquée par des différences factuelles qui n'impliquent pas d'inégalités juridiques ; laisser croire qu'une décision législative va pouvoir effacer les effets de la différence sexuelle ne peut que conduire à une insatisfaction. La confusion repose sur le fait que le respect de la dignité qui doit être égal pour tous est identifié à une identité de statut juridique ».
L'argument mérite d'être entendu : l'égalité n'est pas identité. Pour autant, s'applique-t-il vraiment à la situation visée par le présent projet de loi ?
En effet, le texte écarte toute assimilation des couples homosexuels aux couples hétérosexuels pour ce qui regarde la filiation biologique.
Hors de ce cas, lorsqu'il s'agit de protection mutuelle, fondée sur l'amour que l'on se porte, quelle différence entre un couple homosexuel et un couple hétérosexuel ? Lorsqu'il s'agit de la protection d'un enfant par la reconnaissance juridique des liens qui l'unissent à ceux qui l'éduquent et l'élèvent, quelle différence entre l'enfant de parents de même sexe et celui de parents de sexe différents ?
Pourquoi réserver aux uns le mariage et ses effets, et tenir les autres à l'écart de ce statut protecteur ? L'exigence d'égalité commande d'en ouvrir l'accès aux couples de personnes de même sexe, simplement parce que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » 5 ( * ) .
Pour la même raison, elle exclut qu'un statut à part leur soit réservé.
B. LE REFUS D'UN STATUT À PART
L'idée est souvent avancée, par ceux qui s'opposent au mariage des couples de personnes de même sexe, que l'égalité des droits pourrait être assurée par un statut spécifique, distinct du mariage, et propre aux couples homosexuels.
M. François Fondard, président de l'Union nationale des associations familiales s'est ainsi interrogé, devant votre commission lors de son audition : « Comment ouvrir de nouveaux droits aux personnes homosexuelles ? Choisir le mariage, c'est choisir la filiation, car le mariage est un tout. Pour nous, la réponse n'est ni dans le mariage ni dans le Pacs. Elle réside dans l'union civile, qui permet l'ouverture de droits sociaux et patrimoniaux et l'officialisation de l'union en mairie. Celle-ci, à notre grand regret, a été évacuée en quelques lignes dans l'étude d'impact, qui indique même que les associations familiales se sont montrées « résolument opposées » à ce dispositif. Nous avions dit le contraire ! Pourtant, c'est la solution appliquée en Allemagne où a été créé un « partenariat de vie » qui confère des droits sans assimilation au mariage ; seule l'adoption de l'enfant biologique du partenaire est possible, permettant aux deux membres du couple d'exercer conjointement l'autorité parentale sur l'enfant ».
Cette union civile s'ajouterait au pacte civil de solidarité (Pacs), ou s'y substituerait, les droits et les obligations ouverts par ce dernier étant alors renforcés.
Une telle proposition ne peut être retenue, car elle contredit l'esprit qui anime la présente réforme, en perpétuant l'inégalité ou la différence de traitement infligée à des situations pourtant identiques .
En effet, soit l'union civile offre aux couples homosexuels exactement les mêmes droits et les mêmes garanties que le mariage. Mais quel serait alors l'intérêt de créer un doublon du mariage, sauf à vouloir priver les couples de personnes de même sexe d'une reconnaissance sociale symbolique, en réservant la dénomination « mariage » à l'union d'un homme et d'une femme ?
Soit l'union civile est en retrait par rapport au mariage. Mais, dans ce cas, comment justifier qu'on prive les couples homosexuels de droits - en dehors de ceux relatifs à la filiation biologique - reconnus aux couples hétérosexuels ?
Un statut à part cantonnerait les homosexuels à une place à part dans notre société, ce qui ne correspond pas aux fondements de l'universalisme républicain.
C'est d'ailleurs ce que M. Dominique Boren, co-président de l'association des parents et futurs parents gays et lesbiens a dénoncé, affirmant : « Nous demandons simplement les mêmes droits et les mêmes devoirs pour tous. Nous ne voulons pas d'un statut à part, d'un statut spécifique qui ferait des personnes LGBT une sous-catégorie de citoyens ».
Défendant la même position, la présidente de la commission nationale consultative des droits de l'homme, Mme Christine Lazerges a estimé qu'« une union civile, telle que certains ont pu l'imaginer n'aurait été qu'un mariage bis pour une catégorie de citoyens, reportant la question de l'égalité ».
Maître Jacques Combret, s'exprimant devant votre commission pour le conseil supérieur du notariat a d'ailleurs écarté en ces termes la possibilité de régimes juridiques spécifiques : « Les associations familiales ont demandé pourquoi on n'avait pas choisi un partenariat enregistré pour les couples homosexuels. Mais l'on ne pouvait guère revenir en arrière pour établir un Pacs à géométrie variable selon l'orientation sexuelle des contractants ; si le Pacs reçoit les mêmes avantages que le mariage, à quoi bon conserver deux institutions ? [...] Enfin, il serait compliqué de juxtaposer mariage entre personnes de sexe opposé, contrat pour les personnes de même sexe, Pacs et concubinage ».
C. UN CHOIX QUI RELÈVE DU SEUL LÉGISLATEUR
Aucune norme constitutionnelle ni conventionnelle ne proscrit le mariage de deux personnes de même sexe, ni l'adoption par un célibataire ou un couple homosexuel. Au contraire, le principe d'égalité et le droit à une vie familiale et personnelle peuvent fonder l'accès des intéressés à ces deux institutions.
En la matière toutefois, la décision ne peut venir que du législateur.
Saisie de l'annulation du mariage célébré à Bègles, en Gironde, entre deux hommes, la Cour de cassation a rappelé que selon la loi française en vigueur, le mariage était l'union d'un homme et d'une femme, et « que ce principe n'est contredit par aucune des dispositions de la convention européenne des droits de l'homme et de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui n'a pas en France de force obligatoire » 6 ( * ) .
Le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, défendue par deux femmes qui souhaitaient se marier, a confirmé que la loi française n'est pas contraire à la Constitution, du seul fait qu'elle réservait le mariage à deux personnes de sexe différent.
Il a ainsi déclaré que le droit le droit de mener une vie familiale normale, qui résulte du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, n'implique pas le droit de se marier pour les couples de même sexe, qui peuvent vivre en concubinage ou bénéficier du cadre juridique du pacte civil de solidarité.
Pour autant, après avoir constaté qu'en maintenant jusqu'à présent le principe selon lequel le mariage est l'union d'un homme et d'une femme, le législateur a considéré que la différence de situation entre les couples de même sexe et les couples de sexe différent peut justifier une différence de traitement quant aux règles du droit de la famille, le Conseil constitutionnel a rappelé qu'il ne lui appartenait pas « de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, de cette différence de situation » 7 ( * ) .
Cette dernière mention correspond, dans la jurisprudence constitutionnelle, à la limite que la Haute instance donne à son propre contrôle, et à la marge d'appréciation discrétionnaire qui relève de la compétence souveraine du législateur .
Ce faisant, le Conseil reconnaît que le choix d'ouvrir ou non le mariage aux couples de personnes de même sexe n'appartient qu'au législateur et qu'aucune norme constitutionnelle ne s'y oppose 8 ( * ) .
Les engagements internationaux de la France ne présentent pas plus un obstacle à la décision du législateur en la matière.
La Cour européenne des droits de l'homme a en effet estimé que, bien que l'article 12 de la convention européenne des droits de l'homme, relatif reconnaisse à l'homme et la femme nubiles le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois régissant l'exercice de droit, il ne s'opposait pas, contrairement à ce qu'une lecture a contrario aurait pu suggérer, au mariage des personnes de même sexe, la référence exclusive à l'homme et à la femme devant se comprendre dans le contexte historique de la rédaction du texte.
La charte des droits fondamentaux de l'Union européenne consacre, en son article 9, le droit de se marier et de fonder une famille, sans référence aucune au sexe des époux, renvoyant la décision en cette matière aux « lois nationales qui en régissent l'exercice ».
Enfin, les exemples d'États étrangers qui ont autorisé les mariages homosexuels prouvent que ni la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, ni le pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations unies, adopté le 16 décembre 1966, dont les articles 16 pour le premier et 23 pour le second, établissent le droit de se marier pour l'homme et la femme, n'interdisent aux États signataires de reconnaître le même droit pour deux hommes ou deux femmes.
Aucune norme supérieure ne s'oppose donc à ce que la loi ouvre le mariage aux couples de personnes de même sexe.
Certains des principes qui les inspirent peuvent au contraire utilement guider le législateur dans son choix : la liberté, l'égalité et le droit de mener une vie familiale normale. Chacun plaide pour que le droit dont bénéficient aujourd'hui les couples hétérosexuels soit ouvert aux couples homosexuels.
Sous cette lumière, la décision peut être débattue, mais l'avancée sociale apparaît plus que jamais nécessaire.
II. UNE RÉFORME DÉBATTUE, MAIS UNE AVANCÉE NÉCESSAIRE
Les auditions conduites par votre commission et votre rapporteur rendent compte du débat que suscite, au sein de la société française, la reconnaissance, au profit des homosexuels, du droit se marier et d'adopter ensemble.
Les inquiétudes ou les observations suscitées par cette réforme doivent être entendues, lorsqu'elles restent respectueuses de chacun, parce qu'elles rendent compte de conceptions partagées par nombre de nos concitoyens.
Toutefois, les réserves qu'elles expriment ne paraissent pas devoir être retenues : compte tenu du périmètre limité de la réforme, le bouleversement symbolique allégué n'est pas avéré, et l'exemple de plusieurs États voisins montre que cette évolution ne produit pas les heurts redoutés.
Surtout, cette réforme constitue une avancée aussi nécessaire qu'utile et conforme aux réalités de notre société, diverse dans ses conjugalités, comme dans ses familles.
A. DES INTERROGATIONS À ENTENDRE, MAIS QUI NE PARAISSENT PAS DEVOIR ÊTRE RETENUES
1. Une réforme au périmètre limité, qui n'engage pas le bouleversement symbolique parfois allégué
Nombre des réserves ou des oppositions formulées contre la réforme engagée lui font porter le poids d'évolutions sociales ou psychologiques qu'elles contestent.
Or, de tels arguments ne peuvent être reçus à son encontre : l'ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe ne crée ni la conjugalité homosexuelle, ni l'homoparentalité.
Au contraire, ces familles se sont constituées librement, comme les autres, et elles lui préexistent.
Le projet de loi n'a d'autre vocation que de leur offrir le cadre légal et protecteur auquel elles peuvent légitimement prétendre.
a) Une réforme qui ne remet pas en cause la situation des couples ou des parents hétérosexuels
L'ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux personnes de même sexe est parfois dénoncée à raison de ses conséquences pour le mariage traditionnel.
Lors de son audition par votre commission, M. Antoine Renard, président de la confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC) a ainsi marqué en ces termes sa « forte hostilité », au texte présenté : « Dès 2001, nous disions qu'il n'existait plus de consensus sur ce qu'est le mariage civil républicain. Il aurait fallu répondre à cette question, se demander si le mariage est la bonne réponse aux vraies questions posées par les couples de même sexe, avant d'adopter cette solution bancale, choquante et qui nous heurte pour deux raisons majeures.
« D'abord, on entame une partie de notre pacte républicain. Avec ce texte, il ne s'agit pas seulement d'étendre le mariage mais de le modifier en profondeur, d'en changer la nature même ; on le dilue, on en change la nature, quand tant de jeunes aspirent encore au mariage.
« Ensuite, l'ouverture à l'adoption plénière conséquence automatique du mariage privera les enfants de l'accès aux conditions de leur naissance. Comment l'accepter ? »
L'argument ne peut être reçu, compte tenu du champ limité du présent projet de loi.
Les couples homosexuels accéderaient à l'adoption conjointe et au mariage sans en changer les règles, en dehors de la dévolution du nom de famille pour l'adoption 9 ( * ) .
Rien n'est ôté au mariage que connaissent aujourd'hui les couples hétérosexuels . Les règles et les effets de la filiation biologiques demeurent inchangés. La présomption de paternité du mari est maintenue et elle ne concernerait pas les époux de même sexe. Aucune modification n'est apportée aux principes régissant l'autorité parentale. Le régime juridique de l'adoption plénière et de l'adoption simple resterait le même s'agissant de la possibilité pour l'enfant de maintenir une filiation pré-établie ou d'accéder à ses origines personnelles.
Chaque forme de famille conserverait ainsi la place que lui fait le droit dans la société, et une nouvelle serait admise à leur côté, ce que M. Nicolas Gougain, porte-parole de l'inter-LGBT a rappelé, lors de son audition par votre commission, en indiquant que « le projet de loi ne vise pas à remplacer un modèle par un autre, il est inclusif. Il ne s'agit pas d'imposer un modèle, mais d'en reconnaître un autre en ajoutant à la diversité. Vous n'enlèverez rien aux familles hétérosexuelles en donnant aux familles homosexuelles le droit de vivre leur histoire comme elles l'entendent - que ce soit par le Pacs ou le mariage ».
b) Des réserves d'ordre psychologique ou anthropologique qui ne sont pas avérées
Plusieurs des intervenants entendus par votre commission se sont inquiétés des conséquences psychologiques ou symboliques de la réforme proposée sur l'ordre social ainsi que sur les enfants des familles homoparentales.
M. Claude Baty, président de la fédération protestante de France, a jugé que « le mariage n'est pas la fête de l'amour, la mise en scène de sentiments, mais une organisation sociale. Il est le lieu où se construit la distinction entre les sexes et les générations, entre ceux qu'on peut et ceux qu'on n'a pas le droit d'épouser ». Il a craint que l'ouverture du mariage aux couples homosexuels ne le prive de cette dimension.
M. André Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, président de la conférence des évêques de France, a pour sa part fait valoir « la dimension symbolique de la relation au père et à la mère. Nier la différence sexuelle au profit d'une parentalité élective occulte la charge symbolique pour l'enfant lui-même des relations de fait entre les deux sexes. Cet oubli, cette occultation de la dimension symbolique de la différence sexuelle se répercute sur la manière d'aborder la question de l'enfan t ».
Examinant la question sous l'angle de l'élaboration psychique de la filiation, M. Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre et psychanalyste a estimé que « remettre en cause la notion de père et mère affectera tous les enfants et emportera une véritable déqualification parentale. La filiation unisexe aurait la même valeur pour tout le monde ? Cela discrimine les enfants adoptés par rapport aux autres, nés sous la couette : ils ne re-naîtront plus dans une scène originaire fantasmée. [...] Cela discrimine également les enfants adoptés entre eux : quand ils auront un père et une mère, ils auront les moyens de reconstruire quelque chose ; avec deux pères ou deux mères, ils n'auront qu'un seul type d'identification. L'État aura décidé qu'on peut les priver de père ou de mère. Les sociologues ont banalisé les histoires de vie, en oubliant les souffrances, la surmorbidité psychiatrique des enfants dans des situations atypiques. Non, un enfant ne peut tout traverser ». Des réserves similaires ont été exprimées par les psychanalystes Daniel Sibony et Jean-Pierre Winter.
Ces affirmations ont toutefois été contredites à plusieurs reprises dans la suite des auditions conduites par votre commission et votre rapporteur.
Rappelant les conclusions de la thèse clinique qu'il avait consacrée à la question de l'homoparentalité, M. Stéphane Nadaud, pédopsychiatre, a indiqué « qu'il n'était pas sérieux d'incriminer ce qui serait de l'ordre de l'homosexualité des parents dans le développement de l'enfant. Certes, il peut y avoir des répercussions, car la famille est atypique - qu'est-ce qu'une famille typique ? -, mais cela s'arrête là ». Il a ajouté que, pour ce qui touche à la référence aux deux sexes, « la question pragmatique est de savoir si elle doit se réaliser dans la famille nucléaire ou dans la famille élargie. Il est spécieux d'imaginer qu'elle doit être dans la tête des parents. Mais la famille élargie ? Nous avons tous ici des oncles et des tantes. Mme Héritier l'a bien montré, les parents biologiques ne recoupent pas forcément les vrais parents. Sinon, il n'y aurait pas besoin de fiction juridique, ni de société ».
Mme Élisabeth Roudinesco, historienne de la psychanalyse, directrice de recherche à l'Université de Paris VII, a partagé cette conclusion : « Pour ma part, après avoir écrit un livre sur la famille, qui montre, entre autres, que les enfants d'homosexuels ne sont pas différents des autres familles, j'en ai conclu qu'on ne doit pas expertiser l'existence humaine comme on vérifie la solidité d'un pont ».
La présidente de l'Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille, Mme Marie-Pierre Hourcade, a quant à elle observé, après avoir consulté ses collègues, que les juges des enfants, qui sont saisis des signalements sur les mineurs en danger, ne font pas état de signalements portant sur des enfants qui seraient en danger en raison de l'homosexualité de l'un de leurs parents : « Nous n'avons jamais été saisis de telles situations, car le danger ne résulte pas en soi du choix sexuel d'un parent. Nous n'avons pas non plus connaissance de situations où le fait d'avoir un parent homosexuel serait une cause d'aggravation d'un danger. Autrement dit, nous n'avons aucun signalement portant directement sur l'homosexualité d'un parent et nous ne pouvons pas non plus déduire que le fait d'avoir un parent homosexuel aggrave le danger ».
Le risque allégué, qu'il soit psychologique ou social, n'est pas démontré. Les enfants élevés par des parents de même sexe ne le sont ni mieux ni moins bien que ceux élevés par des parents de sexe différent.
Votre rapporteur souligne, en outre, que le droit actuel autorise, sans discrimination, les homosexuels à adopter un enfant, en tant que célibataire : la question n'est pas savoir s'il faut autoriser l'homoparentalité. Celle-ci existe déjà dans les faits et nul n'a d'ailleurs contesté au cours des auditions la capacité des parents homosexuels à élever un enfant aussi bien qu'un couple de parents hétérosexuel.
La question est d'admettre ou non l'adoption conjointe pour les couples de même sexe et d'établir ainsi la parenté effective sur une filiation juridique reconnue.
Ce faisant, le débat est biaisé lorsque des arguments psychologiques sont mobilisés pour contester la reconnaissance juridique complète de l'homoparentalité, alors même que le droit établit la possibilité d'une filiation qui ne repose pas sur le modèle hétérosexuel du père et de la mère et que le fait consacre l'existence de ces familles.
Plaçant le débat actuel dans le temps long de l'anthropologie, Mme Françoise Héritier, professeur honoraire au collège de France, a d'ailleurs nié qu'on puisse invoquer une « vérité anthropologique » pour refuser le mariage aux couples homosexuels. Rappelant que, malgré la prééminence de l'hétérosexualité, les unions homosexuées ont toujours existé dans la pratique, elle a fait valoir que : « les grands bouleversements de notre paysage mental ont déjà eu lieu. Le propre de l'humain est de réfléchir à son sort et de mettre la main à son évolution. Il n'a aucune raison de refuser des transformations dans l'ordre social au seul motif que ses ancêtres ne vivaient pas ainsi il y a plusieurs millions d'années. Il accepte bien les innovations technologiques, il les recherche même. Pourquoi repousser celles ayant trait à l'organisation de la société ? Le mariage, cadre à forte charge symbolique, est devenu pensable et émotionnellement concevable comme ouvert à tous, ce qui correspond aux exigences comme aux possibilités du monde contemporain, donc de notre caractère d'être humain ».
c) La crainte infondée d'un engrenage
À plusieurs reprises au cours des auditions a été évoquée la crainte que la présente réforme ouvre la voie à d'autres qui engageraient notre société sur une pente dangereuse.
Ainsi, M. Thierry Vidor, directeur général de Familles de France, a déclaré que « le problème, c'est que le mariage en France ouvre des droits, dont le droit à l'adoption, ce qui bouleversera notre rapport à l'enfant. C'est ouvrir la boîte de Pandore : dire à des couples de même sexe qu'ils ont droit à l'enfant, c'est introduire un biais dans notre pacte républicain. Des couples gays ou lesbiens diront « J'ai droit à un enfant ». Résultat, on ouvrira la voie à la marchandisation du corps - les greffes d'utérus existent déjà - et à la marchandisation de l'enfant, que l'on observe déjà dans certains pays européens ».
M. André Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, président de la conférence des évêques de France, a considéré que le ressort de cet engrenage serait la revendication d'égalité : « il découlera de la logique de ce projet de loi le glissement inévitable entre adoption, PMA et GPA puisque le principe fondateur du projet de loi est le principe d'égalité ». Répondant à la question posée par notre collègue Esther Benbassa, il a précisé sa pensée en s'interrogeant sur la possibilité de « gérer la « discrimination » entre couples masculins et féminins » : « Peut-être le législateur pourra-t-il empêcher ce dynamisme d'aboutir... mais dans les pays où l'adoption a été ouverte au mariage homosexuel, inéluctablement, en raison de la pénurie d'enfants adoptables et du désir - ou du droit ? - à l'enfant, on en est venu à la GPA ».
Examinant le principe qui permettrait de décider s'il convient ou non d'autoriser l'accès à une technique procréative pour les couples de même sexe, M. le philosophe Thibaud Collin, a considéré qu'une fois congédié le référent naturel hétérosexuel du mariage, il ne resterait plus que « la volonté contractuelle des individus, quelle que soit leur orientation sexuelle ». Or, selon lui, « si la volonté devient le principe premier de l'articulation entre conjugalité et filiation, pourquoi conserver les autres conditions, par exemple, la monogamie ? Les polygames ont été discriminés. Si la volonté devient à elle-même sa propre boussole, n'est-ce pas le rôle du législateur que de limiter les prétentions des volontés ? Certes, mais selon quels critères ? Si tout référent non construit par les hommes est congédié comme non démocratique, que reste-t-il à la raison pour déterminer ce qui est juste ? Rien ».
L'argument avancé de l'inexorabilité d'une évolution mue par la revendication d'égalité, à laquelle plus aucun principe ne pourrait être opposé repose sur une prémisse contestable : la revendication d'égalité serait sans freins, parce qu'elle serait sans guide.
Or, il appartient au législateur de décider, conformément à l'idéal républicain, sous quel rapport, la différence de situation qui existe entre deux individus justifie au non qu'ils soient traités différemment. La différence entre un couple constitué d'un homme et d'une femme, et un couple constitué de deux hommes ou de deux femmes peut ainsi être jugée pertinente pour ce qui intéresse la filiation biologique, mais sans effet pour ce qui concerne l'exercice des droits parentaux ou l'établissement d'une filiation adoptive conjointe.
En outre, il revient au législateur de concilier le principe d'égalité avec les autres droits et principes constitutionnels avec lesquels il pourrait, sur une question précise, entrer en conflit.
D'ailleurs, d'ores et déjà, s'agissant des techniques de procréation médicalement assistée, le législateur a pu réserver leur accès aux couples constitués d'un homme et une femme dans le seul cas d'une infertilité médicalement constituée, sans l'ouvrir à ceux qui ne présentent pas cette infertilité. Même parmi les couples infertiles, il a opéré une distinction entre ceux dont l'infertilité pouvait faire l'objet d'un traitement procréatif qu'il a autorisé, et ceux dont l'infertilité, due à une impossibilité pour la femme à porter l'enfant, ne pouvait trouver un remède que dans la gestation pour autrui, qu'il a prohibé.
Quelle que soit la position personnelle que chacun peut adopter sur ces questions, il est ainsi faux de dire que le législateur ne peut fixer de limite aux demandes qui lui sont faites.
Le Gouvernement a annoncé un projet de loi consacré à la famille, qui abordera des questions non traitées par le présent projet de loi, s'agissant notamment de l'adoption et de la filiation.
Il reviendra au législateur de se prononcer sur ces sujets. Préjuger aujourd'hui de ces choix, en tirant argument d'une évolution irrémédiable engagée, dès à présent, par le texte qui vous est soumis, est méconnaître le pouvoir souverain de la loi.
D'ailleurs, l'observation des pays européens qui ont autorisé le mariage homosexuel montre la palette des solutions retenues par chacun. Elle prouve, surtout, qu'aussi important que soit le débat qui a précédé ces réformes, celles-ci se déroulent sans heurts et sont assimilées sans difficulté par la société.
2. L'exemple d'évolutions apaisées en Europe
L'exemple français du pacte civil de solidarité enseigne que le temps est l'allié le plus précieux des réformes de société .
Le débat qui a précédé l'adoption de la loi du 15 novembre 1999 fut particulièrement vif, et les craintes alors exprimées les mêmes que celles formulées aujourd'hui.
Pourtant le succès de cette législation ne se dément pas 10 ( * ) , auprès des couples homosexuels, comme auprès des couples hétérosexuels, qui constituent la plus grande part des partenariats enregistrés 11 ( * ) .
Le dispositif est prisé au point d'être salué par ceux qui s'opposent au mariage des personnes de même sexe et souhaitent désormais la mise en place d'un Pacs amélioré ou d'une union civile conçue sur son modèle.
L'histoire du Pacs est-elle prémonitoire de celle du mariage homosexuel ? Les exemples des États européens qui l'ont autorisé peuvent conduire à le penser.
L'étude de législation comparée réalisée à la demande du président de votre commission, M. Jean-Pierre Sueur et jointe en annexe au présent rapport, montre que six États européens ont ouvert le mariage aux personnes de même sexe. Il s'agit, dans l'ordre chronologique, des Pays-Bas (2001), de la Belgique (2003), de l'Espagne (2005), de la Suède (2009), et du Portugal (2009). L'Angleterre s'est depuis engagée dans cette voie 12 ( * ) .
À l'exception du Portugal, l'ensemble de ces pays ont ouvert l'adoption conjointe aux époux de même sexe, ainsi que l'accès à la procréation médicalement assistée. Seule l'Espagne reconnaît une présomption de parentalité au profit des deux conjoints. La gestation pour autrui n'est autorisée qu'aux Pays-Bas et en Belgique, et interdite ailleurs.
Aucun de ces six pays n'a depuis remis en cause l'ouverture du mariage aux couples homosexuels, en dépit des alternances politiques, ce qui manifeste l'enracinement progressif de cette réforme.
B. UNE AVANCÉE SOCIALE CONFORME AUX ÉVOLUTIONS DE LA FAMILLE ET DE LA SOCIÉTÉ
L'ouverture du mariage aux couples homosexuels n'est pas seulement légitime, possible et souhaitable. Elle est aussi nécessaire, pour deux raisons.
Elle rend enfin le droit qui organise notre société conforme aux évolutions que celle-ci a connues.
Elle garantit aux familles homoparentales la même protection et la même reconnaissance sociale que la loi accorde aujourd'hui aux familles constituée autour d'un père et d'une mère.
1. Le sens du mariage a évolué
Ainsi qu'on l'a vu précédemment, le projet de loi est parfois dénoncé, par ses opposants, en raison de la dénaturation de l'institution du mariage qu'il réaliserait.
Mais, n'est-ce pas renverser l'ordre des choses ? Car, le texte proposé sanctionne plutôt l'évolution de l'institution elle-même, qui s'est abstraite du modèle cristallisé pendant plusieurs siècles sur lequel elle reposait, pour revenir aux principes de liberté et d'universalité qui la caractérisaient à l'origine, incarnant plus la protection que se donnent les deux époux, que le seul modèle de filiation possible.
a) Une institution qui a évolué avec notre société
« Une affirmation de la liberté de l'homme, dans la formation comme dans la dissolution du lien matrimonial, c'est, pour l'ordre terrestre, l'essentiel du message français », rappelait le doyen Jean Carbonnier dans un célèbre article, « Terre et Ciel dans le droit français du mariage » 13 ( * ) .
Cette affirmation, qui renoue avec l'esprit consensualiste du droit romain du mariage, s'est trouvée confirmée par l'article 7 de la Constitution du 3 septembre 1791, qui disposait : « La loi ne considère le mariage que comme contrat civil ». L'article 146 du code civil, inchangé depuis 1804, en porte encore aujourd'hui la marque, puisqu'il établit qu'« il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement ».
Cet esprit de liberté s'appuie sur l'universalisme de l'accès au mariage : tout citoyen majeur peut y prétendre. La Révolution a ici opéré une rupture avec le mariage religieux de l'Ancien régime 14 ( * ) et confirmé l'égalité de tous devant le mariage.
En consacrant la liberté de mariage et en la rattachant à la liberté personnelle découlant des articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789 15 ( * ) , le Conseil constitutionnel manifeste qu'elle a partie lié avec l'universalisme républicain.
L'évolution du mariage vers plus de liberté et d'égalité s'est poursuivie au dix-neuvième siècle, puis au vingtième.
Cette évolution est passée, pour le divorce, de son abrogation 16 ( * ) à son rétablissement 17 ( * ) , jusqu'aux lois de 1975 et de 2004 ouvrant plus largement les possibilités de divorce.
Surtout, elle s'est manifestée dans la fin du monopole du mariage pour l'établissement de la filiation. La loi du 3 janvier 1972, inspirée par le doyen Carbonnier, a engagé l'abolition de la distinction entre les enfants légitimes, adultérins et naturels, qui s'est achevée avec l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation.
Parallèlement, les formes de conjugalité ont évoluées : s'il reste une référence majoritaire, le mariage n'est plus la seule union possible. Une étude de l'Insee montre qu'en 2011, en France métropolitaine, sur 32 millions de personnes majeures déclarant être en couple, 72 % (23,2 millions) sont mariées et partagent la même résidence que leur conjoint, 22,6 % (7,2 millions) sont en union libre et 4,3 % (1,4 million) sont pacsées 18 ( * ) .
Cette évolution des conjugalités s'est répercutée sur les filiations : depuis 2006, il naît plus d'enfants hors mariage qu'au sein du mariage. Selon des chiffres provisoires, les naissances hors mariages représenteraient, en 2012, 56,6 % des naissances totales 19 ( * ) .
Lors de son audition par votre commission, Mme Irène Théry, sociologue, directrice d'études à l'école des hautes études en sciences sociales a retracé ces évolutions du droit de la filiation, faisant valoir que « le modèle matrimonial de filiation a été remis en cause par le principe d'égalité des enfants, qui efface l'opposition entre filiation légitime et naturelle, entre honneur et honte, qui organisait le paysage social ; mais aussi par le principe de codirection masculine-féminine, et par le développement des droits des enfants ». Elle en a conclu que, « dans ce contexte, on comprend les nouvelles revendications des parents homosexuels [...] Désormais, se dessine un droit commun de la filiation, devant lequel tous les enfants sont égaux, quels que soient leurs parents. Cette unicité du droit de la filiation n'empêche pas la pluralité des sources de la filiation ».
Il n'est dès lors plus possible, pour l'ensemble de ces raisons, de considérer le mariage comme l'unique institution de la filiation, indissociable de la filiation biologique .
Dès 1950, le doyen Carbonnier, estimait d'ailleurs, dans son article précité que « n otre droit matrimonial n'est pas biologique, il est psychologique, et il est conséquent avec lui-même en persistant, malgré l'exemple pressant du droit fiscal ou social, à ne pas faire du mariage sans enfant un mariage de seconde zone. [...] Le mariage puise tellement sa fin en lui-même, et en dehors du ciment charnel des enfants, que la loi n'a pas vu de contradiction à faire de lui le fondement de cette filiation purement psychologique qu'est la légitimation adoptive 20 ( * ) . La légitimation adoptive est une spiritualisation de plus du mariage ». Et le doyen concluait son développement en affirmant : « notre droit matrimonial ne se dément pas : son génie, son démon, c'est la liberté ».
Le sens du mariage a évolué, exprimant avec plus d'intensité ses ressorts libéraux et égalitaires. Le texte qui vous est soumis s'inscrit dans cette dynamique, qu'il accompagne plus qu'il ne l'engage. L'institution du mariage a ainsi sensiblement changé de sens et de but : elle n'est plus un mécanisme de légitimation sociale des familles, mais la garantie de leur protection.
b) La forme la plus élevée de protection que peuvent s'accorder deux personnes qui s'aiment
Chacun investit le mariage d'une signification qui lui est propre et emprunte à ses convictions religieuses, philosophiques ou civiles.
Mais quelle que soit le sens qu'on lui donne, le mariage n'est jamais moins que le plus haut degré de protection juridique que peuvent se vouer librement deux personnes qui s'aiment .
Cette protection transparaît à chaque moment du mariage : lors de sa célébration, par la garantie contre les vices du consentement ; lors de la vie commune, à travers les droits et devoirs des époux, notamment ceux d'assistance et de respect ; à son terme, soit par la protection apportée au conjoint survivant, soit par l'assurance qu'un juge examinera les conditions du divorce et garantira un traitement équitable de chacun.
Surtout, cette protection dont profitent les époux est aussi celle dont bénéficieront les enfants, car il est de leur intérêt que chacun de leurs parents soit suffisamment protégé. Elle se manifestera, notamment, par le fait qu'un juge se prononcera obligatoirement, en cas de séparation, sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale.
Ainsi compris, rien ne peut justifier de tenir encore à l'écart de la protection de la loi, les familles homoparentales qui souhaiteraient se placer sous son égide.
2. La reconnaissance et la protection nécessaire des couples et des familles homoparentales
La demande formulée par les couples de même sexe est légitime, parce qu'il s'agit d'une demande de reconnaissance et de protection juridique, à l'égal des autres.
La réforme proposée parachèverait une évolution engagée depuis plusieurs années, d'acceptation sociale de l'homosexualité et d'affirmation en parallèle des familles homoparentales.
Dans cette perspective, l'intérêt de l'enfant élevé par deux hommes ou deux femmes est alors de bénéficier, comme un autre, de la protection que lui garantira l'établissement de sa filiation vis-à-vis de ceux qui l'élèvent.
a) L'évolution de la législation relative à l'homosexualité : du refus à l'acceptation
Le projet de loi sur le mariage ne doit pas faire oublier, qu'avant même que se posent les questions de reconnaissance civile des couples homosexuels, la première victoire a été celle de l'abrogation de toute prohibition pénale de l'homosexualité.
Dans un article publié dans l'ouvrage collectif Homosexualité et droit , M. Jean Danet, distingue à cet égard trois politiques successives, de 1942 à 1982 : le combat, l'ignorance et l'acceptation 21 ( * ) .
De la Révolution française, qui s'est honorée à rompre sur ce point avec l'ancien droit, jusqu'au régime de Vichy, la loi ne punissait pas spécifiquement la sodomie. Si, progressivement, une législation relative à l'attentat à la pudeur sans violence fut mise en place, la loi française ne connaîtra pas, jusqu'à la loi du 6 août 1942, de répression pénale de l'homosexualité, contrairement à de très nombreux autres pays. D'illustres exemples, comme celui d'Oscar Wilde, rappellent que Paris, au début du siècle, fut parfois un refuge pour des homosexuels poursuivis dans leur pays.
Sans doute faut-il se garder d'idéaliser cette période : à défaut de répression pénale, la réprobation sociale restait très forte et c'est sur ce terreau, entre autres, que la loi de 1942 a prospéré.
Le premier âge a été celui du combat : 1942, 1945 et 1960. Les deux premières lois réprime les relations sexuelles entre individus de même sexe, la dernière punit plus sévèrement l'outrage public à la pudeur réalisé par un homosexuel. Avec le recul, Jean Danet estime que « le combat fut mené avec une détermination toute relative et en tout cas de plus en plus chancelante. Les statistiques en terme de nombre de condamnations comme de quantum de peine sont là pour en convaincre, ce qui n'exclut évidemment pas les drames ».
Pour Jean Danet, les années 70 et 80 sont celles de la tentation de l'ignorance : la question du couple homosexuel n'est pas examinée en droit civil, et la Cour de cassation refuse en 1989 de reconnaître le concubinage homosexuel, calquant paradoxalement la définition du concubinage sur le modèle hétérosexuel du mariage 22 ( * ) . Ce faisant elle place les couples homosexuels dans une situation de grande insécurité juridique et leurs dénie les droits qu'elle a reconnu aux concubins de sexe différent. En 1996 le Conseil d'État considère qu'un refus d'agrément à adoption peut être opposé à un célibataire homosexuel, en raison de son orientation sexuelle, car celle-ci ne présenterait pas de garanties suffisantes sur les plans familial, éducatif et psychologique pour accueillir un enfant adopté 23 ( * ) . La France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour cette décision 24 ( * ) .
On peut considérer, avec l'auteur, que les chemins de l'acceptation s'ouvrent le 27 juillet 1982, avec l'abrogation des délits spécifiques d'homosexualité. Le combat se déplace alors du plan pénal au plan civil, de l'acceptation à la reconnaissance civile. Il ne s'agit plus seulement de permettre à des individus de vivre leur sexualité librement, il s'agit de reconnaître, à égalité avec les autres, les couples et les familles qu'ils forment.
Mais comment organiser cette reconnaissance, alors que les résistances sociales restaient encore très fortes ? Fallait-il se limiter à reconnaître le concubinage homosexuel et maintenir les concubins dans une zone de non-droit ? Fallait-il créer une union civile d'un nouveau type spécifiquement dédiée aux homosexuels, l'ouvrir à tous ou aller jusqu'au mariage ?
L'histoire récente est connue. Furent successivement proposés, à partir des années 1990, après le drame de l'épidémie du sida, le contrat de partenariat civil 25 ( * ) , le contrat d'union civile 26 ( * ) , puis le contrat d'union civile et sociale, qui a donné lieu à pas moins de 7 propositions de lois.
Après des débats parlementaires animés, dont les arguments rappellent ceux avancés aujourd'hui, la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (Pacs), que votre rapporteur s'honore d'avoir déposée avec plusieurs de ses collègues députés socialistes, a été adoptée le 13 octobre 1999, en lecture définitive de l'Assemblée nationale.
Le Pacs présente deux particularités : tout d'abord, il est ouvert à tous les couples, ce qui évite d'enfermer les couples homosexuels dans un statut à part. D'ailleurs, comme on l'a vu précédemment, son succès auprès des couples hétérosexuels ne se dément pas, ce qui prouve que tous profitent d'un progrès qu'on pensait, à l'origine, réservé à quelques uns.
Deuxième spécificité, il se limite à des effets patrimoniaux. En particulier, il ne confère aucun droit en matière de filiation ni même d'autorité parentale. Ce faisant, il facilite la vie des couples, mais pas celle des familles.
Une étape sépare encore les familles homoparentales de l'égalité avec les familles des parents hétérosexuels. Le texte proposé engage à la franchir.
b) Des familles qui doivent être aujourd'hui reconnues, à l'égal des autres
Au nombre des évolutions sociales de la famille précédemment évoquée compte notamment l'existence des familles homoparentales : le fait qu'elles n'aient pas d'existence juridique, puisque la filiation n'est établie qu'à l'égard d'un seul des deux parents, n'empêche pas qu'elles existent réellement.
Les estimations fournies par les associations qui les représentent font état d'entre 100 000 à 400 000 enfants vivant aujourd'hui dans des familles homoparentales. Le calcul repose sur une extrapolation de l'évaluation du nombre de personnes homosexuelles en France (de l'ordre de 1 à 4 % de la population totale) et du pourcentage de parents parmi ces derniers (évaluée à 15 %).
L'étude la plus récente de l'Insee 27 ( * ) propose des évaluations moindres : 200 000 personnes se déclareraient en couple de même sexe, et environ une personne en couple de même sexe sur dix indiquerait vivre avec au moins un enfant (contre 53 % dans le cas des personnes en couple de sexe différent). Ceci permettrait d'évaluer, avec une plus grande fiabilité, entre 20 000 et 40 000 le nombre d'enfants vivant dans une famille homoparentale .
Au-delà des divergences d'estimations, les chiffres parlent d'eux-mêmes : il ne s'agit pas de quelques cas particuliers, mais de dizaines de milliers d'enfants et de plusieurs centaines de milliers d'adultes, qui ne profitent pas de la reconnaissance légale à laquelle ils pourraient prétendre par le mariage.
c) Des enfants dont l'intérêt supérieur est de bénéficier, comme les autres, de la protection de la loi
À plusieurs reprises au cours des auditions, la question de l'intérêt supérieur de l'enfant a été évoquée, parfois pour s'étonner, comme M. Dominique Baudis, Défenseur des droits, qu'elle n'ait pas été plus présente dans l'étude d'impact qui a accompagné le projet de loi, plus souvent pour souligner qu'il était de son intérêt de voir ses filiations juridiques et sociales correspondre.
Ainsi, Mme Marie-Anne Chapdelaine, présidente du conseil supérieur de l'adoption, a rappelé que si une partie des membres de son organisation s'est interrogé sur les conséquences d'une remise en cause de l'altérité sexuelle de la filiation, l'autre partie a jugé qu'« ouvrir la possibilité de l'adoption de l'enfant d'un conjoint du même sexe peut aller dans le sens de l'intérêt de l'enfant : dans les familles homoparentales déjà constituées, elle lui apporte la stabilité juridique et la continuité nécessaires à son développement ».
L'argument est majeur, parce qu'il vise notamment, la procédure d'adoption intrafamiliale de l'enfant du conjoint.
L'approche doit être pragmatique : ces familles et ces enfants ont droit à la protection de la loi. Or, elles sont fragilisées par le fait que l'un des deux parents n'a aucun lien juridique avec l'enfant qu'il élève pourtant aussi bien qu'un autre parent.
Pour remédier à cette insécurité juridique, il est nécessaire d'autoriser l'adoption de l'enfant de l'autre parent. Or l'adoption de l'enfant du conjoint n'est possible que dans le mariage. Ouvrir le mariage aux couples de même sexe est ainsi permettre à leurs enfants de profiter de la protection que leur garantira cette adoption.
Cette protection, d'ailleurs, s'étend au-delà du simple lien de filiation, pour atteindre la protection mutuelle des époux, car il est de l'intérêt des enfants que leurs parents voient leur propre situation assurée face aux accidents de la vie ou du sentiment.
L'avancée qu'engagerait le présent projet de loi est autant utile que nécessaire. Réforme importante, elle doit aujourd'hui être confortée.
III. UNE RÉFORME IMPORTANTE, QUI DOIT ÊTRE CONFORTÉE
A. LE PROJET DE LOI DU GOUVERNEMENT
1. Un périmètre limité : l'ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe
Dans sa version initiale, le projet de loi du Gouvernement tient tout entier dans son article 1 er , qui autorise le mariage des personnes de même sexe.
L'accès des époux homosexuels à l'adoption conjointe en découle, puisque le droit actuel ne distingue pas selon le sexe des conjoints.
Le périmètre du texte est, ce faisant, limité : tout le mariage, rien que le mariage ; toute la filiation adoptive, rien que la filiation adoptive, puisque la filiation biologique et la présomption de paternité du mari restent réservés aux seuls père et mère de l'enfant.
Le même article adapte en conséquence les règles prohibant l'inceste et organise les règles de conflits de loi, afin d'écarter la loi personnelle du futur époux qui, épousant un Français en serait sinon empêché.
2. Le choix de coordinations textuelles exhaustives
Les articles 2 et 3 du projet de loi initial du Gouvernement tiraient les conséquences pour la dévolution du nom de famille de l'adoption conjointe d'un enfant par deux personnes de même sexe. En effet, la règle par défaut selon laquelle, le nom serait celui du père ne pouvait s'appliquer. Une nouvelle règle totalement égalitaire a été proposée qui prévoyait d'accoler les deux noms dans la limite du premier de nom de famille pour chacun.
Les articles suivants, 4 à 21 , procédaient aux coordinations terminologiques rendus nécessaires pour substituer aux termes « père et mère » ceux de parents ainsi qu'à ceux de « mari et femme », dans le code civil ( article 4 ) et l'ensemble des autres codes reconnaissant des droits sociaux aux intéressés. Les substitutions n'intervenaient que lorsqu'elles étaient indispensables pour garantir l'égalité entre les époux ou parents de même sexe et ceux de sexe différent.
L' article 22 visait à garantir la reconnaissance en France des mariages entre personnes de même sexe légalement contractés à l'étranger avant l'adoption du présent texte.
B. LES APPORTS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UN TEXTE CONFORTÉ ET ENRICHI POUR RÉPONDRE AUX DIFFICULTÉS RENCONTRÉES PAR LES FAMILLES HOMOPARENTALES
À l'initiative du rapporteur de la commission des lois, M. Erwann Binet, et de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Mme Marie-Françoise Clergeau, l'Assemblée nationale a conforté juridiquement le texte. Sans étendre son périmètre à de nouvelles questions, elle l'a aussi enrichi de dispositions qui permettront de répondre aux difficultés que pourraient rencontrer les familles homoparentales.
1. La prise en compte des difficultés auxquelles pourraient être confrontés les époux ou les parents adoptifs de même sexe
En adoptant, à l'initiative de sa commission des lois, un nouveau chapitre I er bis spécifiquement consacré aux dispositions relatives à la filiation adoptive et au maintien des liens avec l'enfant, la l'Assemblée nationale a souhaité apporter une plus grande sécurité juridique à la régularisation qu'autorisera la loi de la situation de certaines familles homoparentales.
Les articles 1 er bis et 1 er ter visent ainsi à garantir que le conjoint de celui qui aura adopté l'enfant en tant que célibataire, puisse l'adopter lui aussi.
L'article 1 er quater inverse la règle selon laquelle, en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint, le parent d'origine conserve l'exercice de l'autorité parentale, sauf déclaration conjointe d'exercice en commun. Cet exercice en commun deviendrait la norme, et la réserve d'exercice, l'exception.
L'article 1 er quinquies a pour objet d'inviter le juge à examiner l'opportunité, si tel est l'intérêt de l'enfant, de maintenir des relations personnelles avec le parent social ou le beau-parent qui l'a élevé au côté de son parent légal.
2. L'extension aux parents par le sang de la règle d'égalité entre les père et mère pour l'attribution du nom de famille
À l'initiative de Mme la députée Corinne Narassiguin, l'Assemblée nationale a étendu à l'ensemble des filiations, la nouvelle règle de dévolution du nom de famille selon laquelle, à défaut de choix commun des adoptants, l'enfant reçoit leurs deux noms accolés dans l'ordre alphabétique, dans la limite du premier nom pour chacun ( article 2 ).
Cet article, adopté au nom de l'égalité entre les sexes, supprime donc pour les couples hétérosexuels, le privilège donné au nom du père, en l'absence de choix commun des parents.
3. Le remplacement des coordinations terme à terme par un dispositif balai
À l'initiative de la commission des lois et de la commission des affaires sociales, les députés ont supprimés les substitutions de termes auxquels procédaient les articles 4 à 21 .
Ils y ont substitué, à l'article 4 , pour le code civil, et dans un nouvel article 4 bis , pour l'ensemble de la législation, deux dispositifs interprétatifs, qui imposent d'appliquer aux époux ou parents de même sexe, les dispositions applicables aux mari et femme ainsi qu'aux père et mère.
N'ont été maintenues, ou ajoutées que les coordinations terminologiques qui, ne visant précisément qu'un seul des membres des couples, en particulier les femmes pour certains congés d'adoption, n'entraient pas dans le champ des deux dispositions balais des articles 4 et 4 bis ( articles 13 bis , 14 et 21 ).
4. Des précisions apportées sur la célébration des mariages et la reconnaissance ou la protection des homosexuels
Les nouveaux articles 1 er bis A à 1 er bis D adoptés par les députés apportent quelques précisions en matière de célébration de mariage : responsabilité des officiers d'état civil, sous le contrôle du procureur de la République, pour l'établissement des actes d'état civil ( article 1 er bis A ), possibilité de se marier dans la commune de résidence des parents des époux ( article 1 er bis B ), célébration républicaine du mariage ( article 1 er bis C ) et faculté offerte aux Français établis à l'étranger qui ne pourraient se marier avec une personne de même sexe, dans leur pays de résidence, de se marier en France, dans leur commune de naissance ou de dernière résidence, ou celle de leurs parents ou grands-parents, ou enfin, à défaut, la commune de leur choix ( article 1 er bis D ).
L'article 4 ter , issu d'un amendement de Mme la députée Marie-Georges Buffet vise à faciliter l'adhésion des associations représentant les familles homoparentales aux unions départementales et nationale d'associations familiales.
L'article 16 bis , adopté à l'initiative de la commission des affaires sociale de l'Assemblée nationale, a pour objet de protéger les salariés mariés ou liés par un pacte civil de solidarité avec une personne de même sexe qui refuseraient une mutation dans un pays incriminant l'homosexualité.
C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : RESPECTER LES LIMITES INITIALES DU TEXTE ET CONSACRER L'ÉGALITÉ ENTRE LES ÉPOUX OU LES PARENTS DE MÊME SEXE ET CEUX DE SEXE DIFFÉRENT
1. Le maintien du périmètre initial du texte
À l'initiative de son rapporteur, votre commission n'a pas souhaité étendre le champ couvert par le présent texte à d'autres questions que celles initialement traitées par le projet de loi gouvernemental.
Elle a notamment repoussé les amendements relatifs à la procréation médicalement assistée et à l'extension des possibilités d'adoption.
Le Gouvernement a en effet annoncé le dépôt d'un projet de loi consacré à la famille d'ici à la fin de l'année et engagé des consultations en ce sens. Les sujets évoqués trouveront dans ce texte leur juste place.
2. La consécration d'un principe d'égalité entre les époux ou parents de même sexe et ceux de sexe différent
À l'article 4 , votre commission a supprimé la disposition balai adoptée par l'Assemblée nationale. Elle y a substitué, à l'initiative de son rapporteur, un nouvel article 6-1, porté à la fin du titre liminaire du code civil, qui consacre un principe général d'égal traitement, pour tous les effets, droits et obligations reconnus par les lois en vertu du mariage ou de la filiation adoptive, entre les époux ou parents de même sexe et ceux de sexe différent .
Le champ couvert par ce principe est celui de toute la législation, à l'exception des dispositions relatives à la filiation biologique.
Ce dispositif s'article avec l'habilitation demandée par le Gouvernement pour procéder par ordonnance aux coordinations souhaitables, à droit constant et en dehors du code civil, compte tenu du principe général ainsi proclamé ( article 4 bis ).
3. La recherche d'un équilibre pour la dévolution du nom de famille
Constatant combien, en dépit de l'exigence légitime d'égalité entre les sexes, la pratique observée par nos concitoyens pour décider du nom de famille de leurs enfants se satisfait de la règle traditionnelle selon laquelle, en l'absence de choix explicite, l'enfant porte le nom du père, votre rapporteur a cherché à trouver un équilibre entre cette réalité et le dispositif adopté par les députés.
Il a proposé à votre commission un amendement à l'article 2 , qu'elle a adopté, qui distingue, dans l'absence de choix, le désaccord de l'inertie. Si la seconde peut légitimement s'interpréter comme un accord implicite avec la règle traditionnelle, le premier ne saurait autoriser un sexe à prévaloir sur l'autre.
Votre commission a par conséquent rétabli la règle actuelle, pour les filiations biologiques, et confirmé, en cas de désaccord signifié, par l'un des parents, à l'officier d'état, le cas échéant avant la naissance, l'octroi à l'enfant du nom de chacun, accolé dans l'ordre alphabétique.
Elle a par ailleurs adopté un amendement de notre collègue Cécile Cukierman, précisant les possibilités d'usage, par l'un des époux, du nom de l'autre ( article 2 A ).
4. L'apport de nouvelles garanties pour les dispositions relatives à la filiation adoptive et au maintien des liens avec l'enfant
À l'initiative de votre rapporteur, la commission a conservé la définition proposée par l'Assemblée nationale du parent social ou du beau-parent qui ont élevé l'enfant, en la plaçant plus opportunément à l'article 371-4 du code civil qui porte justement sur les pouvoirs du juge aux familiales pour maintenir les liens entre l'enfant et les tiers qui s'en sont occupés.
L'amendement qu'elle a adopté garantit par ailleurs, la possibilité pour celui qui se serait vu reconnaître par le juge aux affaires familiales le droit de conserver des liens avec l'enfant, d'attaquer en tierce opposition, le jugement d'adoption de l'enfant qui risquerait de rendre impossible le maintien de ses liens. Il s'agit, par cette procédure, d'empêcher l'éviction par le nouveau conjoint du parent légal, soit du parent social, soit de tout tiers, parent ou non, qui auraient de forts liens avec l'enfant ( article 1 er quinquies ).
Votre commission a par ailleurs limité la possibilité des adoptions successives aux seuls cas où l'enfant n'a sa filiation établie qu'à l'égard du conjoint du candidat à l'adoption, afin d'éviter que puisse s'organiser sur la tête d'un seul enfant, un nombre trop élevé de liens de filiations ( articles 1 er bis et 1 er ter ).
Elle a, enfin, rétabli la règle selon laquelle, sauf déclaration conjointe contraire, celui qui adopte l'enfant de son conjoint en la forme simple, n'est pas titulaire de l'exercice de l'autorité parentale. En effet, cette règle est conforme à la pratique quasi unanime ( article 1 er quater ).
5. Des clarifications des dispositifs proposés pour la célébration des mariages
À l'initiative de votre rapporteur, votre commission a adopté plusieurs amendements de clarification des dispositions relatives à la célébration des mariages, et supprimant, notamment, l'obligation de lecture par l'officier d'état civil des articles du code civil relatifs à la solidarité des époux concernant les dettes contractées pour l'entretien du ménage.
*
* *
Au bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission a adopté le projet de loi ainsi modifié .
EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE IER - DISPOSITIONS RELATIVES AU MARIAGE
Article 1er - (art. 143, 144, 162 à 164 et chapitre IV bis [nouveau] du code civil) - Ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe et règles de conflit de lois
Cet article ouvre la possibilité aux personnes de même sexe de contracter mariage, ce que le code civil réservait jusque-là, explicitement, à deux personnes de sexe différent. Il ouvre par conséquent l'accès à l'adoption conjointe aux époux de même sexe.
Il fixe enfin les règles de conflit de lois applicables
1. L'ouverture du mariage aux personnes de même sexe
a) L'aboutissement d'un long processus entamé en 1999 avec le Pacs
En l'état actuel du droit, le titre V « Du mariage » du livre premier du code civil s'ouvre sur l' article 144 qui dispose que « l'homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus ». Conformément à l'esprit du code civil de 1804, il ressort de la rédaction de cet article que le caractère monogame du mariage et la différence de sexe des époux sont considérés comme des conditions allant de soi pour se marier.
Cet article, créé par une loi du 27 mars 1803, est resté inchangé pendant plus de deux siècles . La seule modification résulte de la loi du 4 avril 2006 28 ( * ) , qui a relevé l'âge légal de mariage des femmes de quinze ans à dix-huit ans révolus, s'alignant ainsi sur l'âge prévu pour les hommes, en application du principe d'égalité devant la loi.
Quelques tentatives de mariages de personnes de même sexe étaient demeurées infructueuses, comme le très médiatique mariage célébré par le député-maire de Bègles le 5 juin 2004, qui avait été annulé et avait donné lieu, à un arrêt du 13 mars 2007, dans lequel la Cour de cassation 29 ( * ) avait jugé « que, selon la loi française, le mariage est l'union d'un homme et d'une femme ».
À la suite de cette affaire, le Conseil constitutionnel avait été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité. Dans une décision du 28 janvier 2011 30 ( * ) , il avait estimé que seul le législateur , en application de l'article 34 de la Constitution qui prévoit que la loi fixe les règles concernant « l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités », était compétent pour adopter des dispositions nouvelles sur la question du mariage des personnes de même sexe.
L'affirmation de la compétence exclusive du législateur découle également de l'article 9 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, en vigueur depuis 2009, qui prévoit expressément que « le droit de se marier et le droit de fonder une famille sont garantis selon les lois nationales qui en régissent l'exercice. »
Dès lors, le 1° du I du présent article rétablit l' article 143 du code civil 31 ( * ) , en ces termes : « le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe », consacrant ainsi, en tête du titre cinquième « Du mariage », une nouvelle conception de l'institution .
Le choix est fait de conserver la force symbolique qui s'attache au mariage, puisqu'il demeure abordé par ses conditions de formation, sans qu'il soit besoin de le définir, contrairement aux autres formes de conjugalité que sont le pacte civil de solidarité (Pacs) ou le concubinage 32 ( * ) .
La rédaction retenue pour l'article 143 inverse la logique passée du code civil, en introduisant une autorisation - le mariage « est contracté » -, là où le droit positif n'énumérait que des interdictions (articles 144, 146, 147, 148...). L'ouverture du mariage aux personnes de même sexe ne découle donc pas d'une interprétation a contrario d'une interdiction, mais bien d'une consécration positive.
Le présent texte s'inscrit dans le sens de l'histoire du mariage, vers la reconnaissance d'une égalité des droits conjugaux accordée à tous les couples, initiée par le législateur en 1999 avec l'adoption de la loi relative au pacte civil de solidarité 33 ( * ) . Cette loi a également introduit dans le code civil une reconnaissance explicite du concubinage 34 ( * ) qu'il soit hétérosexuel ou homosexuel, alors même que, de jurisprudence constante de la Cour de cassation le réservait clairement aux couples constitués d'un homme et d'une femme 35 ( * ) .
Puis, progressivement, le régime du Pacs s'est rapproché de celui du mariage, jusqu'à sa refonte en profondeur, par la loi du 23 juin 2006 36 ( * ) .
Le pacte civil de solidarité en quelques grands traits Le Pacs est un statut contractuel, créé par la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité, ouvert aux couples homosexuels et hétérosexuels. L'article 515-1 du code civil définit le pacte civil de solidarité comme « un contrat conclu pas deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune ». Il s'agit d'un contrat « spécifique » pour reprendre le terme employé par le Conseil constitutionnel 37 ( * ) puisqu'il n'est pas placé dans le code civil parmi les contrats, mais bien dans le livre I er du code civil consacré aux personnes. De plus, si la conclusion d'un Pacs suppose que les conditions de formation classiques d'un contrat 38 ( * ) soient réunies, elle est également subordonnée à une obligation particulière d'enregistrement au greffe du tribunal d'instance, ce qui lui donne une certaine solennité, ainsi qu'à des conditions d'ordre moral et social inspirées du mariage (empêchements liés à la prohibition de l'inceste et de la bigamie 39 ( * ) ). Le code civil prévoit également l'application aux Pacsés d'un quasi-régime primaire incluant des obligations minimales d'ordre personnel et pécuniaire dans les rapports mutuels des partenaires (vie commune et aide matérielle) 40 ( * ) . En matière fiscale, certaines règles, initialement réservées aux époux, s'appliquent désormais aux partenaires. Par exemple, ils sont soumis à une imposition commune au titre de l'impôt sur le revenu 41 ( * ) . Enfin, les partenaires pacsés bénéficient également de certains droits sociaux identiques à ceux des époux (aides personnalisées au logement, allocation de logement social). La loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a étendu le bénéfice du congé de paternité accordé jusque là au conjoint de la mère de l'enfant, à la personne vivant maritalement avec elle ou ayant conclu un Pacs avec elle 42 ( * ) . Il a été transformé en congé de paternité et d'accueil de l'enfant, permettant ainsi aux couples homosexuels féminins au sein desquels l'une des deux partenaires a donné naissance à un enfant d'en bénéficier. |
Cependant de nombreuses différences entre les deux régimes demeurent.
Les effets personnels du Pacs sont par exemple limités , puisque son enregistrement n'affecte pas le nom des partenaires ou leur nationalité .
En matière de filiation, ensuite, le Pacs ne produit aucun effet particulier sur la filiation des enfants nés d'un partenaire pacsé. Les personnes pacsées ne peuvent non plus adopter conjointement un enfant.
Quant à la protection des partenaires au contrat, le Pacs est loin d'apporter un niveau de protection équivalent à celui offert par le mariage , ce qu'a souligné Mme Annick Batteur, professeur à la faculté de droit de Caen, lors de son audition par votre rapporteur, concluant que le pacte civil n'a de « solidarité » que le nom.
Ainsi, en l'état actuel de la législation, le partenaire survivant ne peut prétendre à la réversion de la pension de retraite accordée au conjoint survivant dans le mariage.
De même, en matière patrimoniale, le partenaire survivant d'un Pacs ne bénéficie pas de dispositions aussi favorables que le conjoint survivant en droit des successions .
Enfin, si les partenaires et les époux sont tenus à des obligations personnelles assez voisines, ils n'encourent cependant pas les mêmes sanctions en cas de violation de l'une d'entre elles. Dans le mariage, l'époux victime peut demander le divorce pour faute, alors que la rupture du Pacs obéit à un formalisme très allégé puisque le contrat peut être rompu, par signification de l'un de partenaires à l'autre 43 ( * ) et n'emporte que peu d'effets protecteurs des partenaires, même si la loi de 2006 a, tant bien que mal, amélioré leur situation 44 ( * ) .
Or, comme l'ont exprimé les représentants du conseil supérieur du notariat, entendus par votre commission, « nos concitoyens, qui ne sont pas des juristes avertis, découvrent les effets de ces différentes formes de vie en couple en cas de catastrophe ».
Ce qui est vrai pour le Pacs l'est d'ailleurs également pour le concubinage, comme l'a relevé Maître Poivey-Leclercq, lors de son audition par votre commission : « J e vois dans ma clientèle, des concubins de vingt ans qui ne comprennent pas, au moment de la séparation, ce qui leur arrive : ils ne s'étaient pas avisés qu'ils n'avaient aucun droit » .
Votre rapporteur estime donc nécessaire d'aller au bout de la logique engagée en 1999 et d' ouvrir l'institution protectrice du mariage aux personnes de même sexe , permettant ainsi à tous les couples d'organiser leur vie commune selon le mode de conjugalité de leur choix, allant, par gradation du degré d'engagement et corrélativement de protection, du concubinage au mariage, en passant par le Pacs.
D'ailleurs, dans son principe même, l'idée d'un alignement des droits des couples homosexuels sur ceux reconnus aux couples hétérosexuels, en matière de conjugalité, est apparue relativement consensuelle chez l'ensemble des personnes entendues par votre commission.
Ainsi, le Défenseur des droits, M. Dominique Baudis, a salué les avancées apportées par le présent texte sur cette question, mettant fin à des discriminations dénoncées en son temps par la Haute autorité de lutte contre les discriminations et l'égalité, puis par le Défenseur des droits lui ayant succédé.
Cependant, s'agissant de la forme choisie pour atteindre cette égalité des droits, votre commission n'a pas retenu la proposition parfois avancée de créer une sorte de mariage bis , un Pacs « amélioré » ou autre « union civile », réservée aux couples de personnes de même sexe .
Comme l'a relevé Maître Jacques Combret, membre du conseil supérieur du notariat par votre commission, créer une autre forme d'union à côté du mariage conduirait à une juxtaposition complexe de régimes qui nuirait à la lisibilité des différentes options offertes aux couples pour organiser leur vie commune.
En effet, dès lors qu'il n'est pas envisagé de faire disparaître le Pacs, dispositif très largement plébiscité par les couples de sexe différent qui représentent plus de 95 % des contrats conclus 45 ( * ) , quatre régimes différents seraient amenés à cohabiter : une union libre produisant néanmoins certains effets juridiques (le concubinage), le Pacs dans sa forme actuelle pour tous les couples, un Pacs « amélioré », sorte de mariage bis pour les couples de personnes de même sexe, et un mariage pour les couples de personnes de sexe différent. Un tel choix aurait abouti à maintenir un statut spécifique pour les couples de personnes de même sexe, allant à l'encontre de la volonté d'assurer l'égalité entre les couples qui anime le présent texte.
b) L'ouverture de l'institution du mariage aux personnes de même sexe dans toutes ses composantes
M. Nicolas Gougain, porte parole de l'inter-LGBT a salué en ces termes, lors de son audition publique par votre commission, le dépôt du projet de loi par le Gouvernement : « aujourd'hui, nous y sommes, la France marche vers l'égalité des droits ».
Cette exigence d'égalité des droits a imprégné tous les débats qui se sont tenus lors des auditions organisées par votre commission, certains l'invoquant pour s'opposer au texte, d'autres pour le soutenir.
À cet égard, votre rapporteur tient à rappeler qu' « égalité » ne veut pas dire « identité ». Les homosexuels revendiquent un droit à la différence et le droit à ne pas faire l'objet de discriminations en raison de leur orientation sexuelle.
Le présent texte entend donc assurer une égalité de traitement à tous les couples, qu'ils soient de même sexe ou de sexe différent, en leur offrant le bénéfice d'une institution qui produit des droits et des devoirs entre époux, mais également des effets à l'égard de la société.
•
Des conditions de formation du mariage
identiques pour tous les couples
La garde des sceaux a rappelé lors de son audition par votre commission, que l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe se faisait à droit constant, « c'est-à-dire dans les mêmes conditions de consentement et d'âge, et avec les mêmes prohibition ».
L'âge légal minimum pour contracter mariage reste fixé par l'article 144 du code civil à dix-huit ans révolus , sauf dispense accordée par le procureur de la République pour des motifs graves (article 145). Jusqu'à la loi du 4 avril 2006 46 ( * ) , il était fixé à quinze ans révolus pour les femmes.
Cependant, par coordination avec l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe, prévue au nouvel article 143 du code civil, le 2° de l'article 1 er du présent texte modifie l'article 144, pour substituer à la formulation actuelle : « l'homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus », une rédaction non sexuée : « le mariage ne peut être contracté avant dix-huit ans révolus ».
La condition liée au consentement des époux , prévue à l'article 146 du code civil, ne nécessite pas d'intervention du législateur, car elle est déjà formulée en termes neutres : « il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a pas de consentement ».
Il en est de même de la règle fixant l' empêchement à mariage pour cause de bigamie , l'article 147 du code prévoyant simplement qu'« on ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier ».
En revanche, le texte ajuste certaines dispositions relatives aux empêchements à mariage liés à la parenté ou l'alliance pour étendre l'interdiction de l'inceste aux couples de personnes de même sexe.
Concernant les parents en ligne directe 47 ( * ) , l'article 161 du code civil reste inchangé. « Le mariage est prohibé entre tous les ascendants et descendants et les alliés 48 ( * ) dans la même ligne » : un père ne pourra épouser son fils ; un grand-père, son petit-fils ; une belle-mère, sa belle-fille.
L'article 164 prévoit cependant que le Président de la République peut, « pour des causes graves », lever la prohibition à mariage « entre alliés en ligne directe, lorsque la personne qui a créé l'alliance est décédée ». Cette disposition n'est pas non plus modifiée par le projet de loi.
En ligne collatérale 49 ( * ) , des ajustements sont apportés. L'article 162 dans sa rédaction en vigueur prévoit que « le mariage est prohibé entre le frère et la soeur », c'est à dire au deuxième degré . Le 3° du I de l'article 1 er étend, par coordination, cette interdiction aux mariages « entre frères et entre soeurs ».
L'article 163 est, quant à lui, réécrit par le 4° de l'article 1 er , pour prévoir que l'interdiction de mariage s'applique non seulement entre « l'oncle et la nièce, la tante et le neveu » ( au troisième degré ), mais aussi entre l'oncle et le neveu, ainsi qu'entre la tante et la nièce.
L'article 164 prévoit, comme pour les alliés, que le Président de la République peut lever cette interdiction pour causes graves. Le 5° du I de l'article 1 er du présent texte modifie cet article du code civil, par coordination avec la modification de l'article 163, pour permettre au Président de la République de lever également l'interdiction à mariage entre l'oncle et le neveu, ainsi qu'entre la tante et la nièce.
•
Des formalités relatives
à la célébration du mariage
inchangées
Le code civil prévoit, aux articles 63 à 73, un certains nombre de formalités préalables à la célébration du mariage . Elles ont une double finalité.
En premier lieu, la publication des bans, par voie d'affichage par l'officier d'état civil à la porte de la mairie pendant dix jours a pour objectif de permettre à ceux qui connaissent des empêchements de faire opposition . Le mariage ne peut être célébré avant expiration de ce délai.
En second lieu, elles permettent à l'officier d'état civil de vérifier que les futurs époux remplissent les conditions de fond requises pour se marier. À cet effet, ils doivent lui fournir un certain nombre de documents (copie de l'acte de naissance, justificatif d'identité...), et se soumettre à une audition au cours de laquelle l'officier vérifie la réalité du consentement.
Quant aux formalités relatives à la célébration du mariage elles-mêmes, elles sont prévues aux articles 74 et 75 du code civil (titre II « Des actes de l'état civil ») et aux articles 165 à 171 (titre V « Du mariage »).
L'article 74 du code civil prévoit le mariage est célébré dans la commune où l'un des deux époux a son domicile 50 ( * ) ou sa résidence 51 ( * ) établie par un mois au moins d'habitation continue.
Cependant, le nouvel article 1 er bis B, introduit en séance à l'Assemblée nationale, ouvre la possibilité aux futurs époux de demander à célébrer leur mariage dans la commune du domicile ou de la résidence de l'un de leurs parents ( cf. infra ).
En application de l'article 75, le jour désigné par les parties , l'officier d'état civil, lors d'une célébration publique à la mairie , en présence d'au moins deux témoins , ou de quatre au plus, fait lecture aux futurs époux des textes suivants :
- l'article 212 : « les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance . » ;
- l'article 213 : « les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l'éducation des enfants et préparent leur avenir. » ;
- le premier alinéa de l'article 214 : « si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives. » ;
- le premier alinéa de l'article 215 : « les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie. » ;
- l'article 220 relatif à la solidarité entre époux des dettes contractée pour l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants ;
- l'article 371-1 relatif à l'exercice de l'autorité parentale.
L'officier d'état civil reçoit ensuite de chaque partie, l'une après l'autre, la déclaration qu'elles veulent se prendre pour époux . Il prononce alors, au nom de la loi, qu'elles sont unies par le mariage, et il en dresse l'acte.
•
Le bénéfice de tous les
effets du mariage pendant sa durée
Sur le plan personnel , le mariage produit des effets importants qui bénéficieront désormais à tous les couples mariés.
Chaque époux, tout en conservant son propre nom, qui lui est indéfectiblement attaché acquiert, par le mariage, le droit d'user du nom de son conjoint .
Le mariage peut également avoir une incidence sur la nationalité de l'un des époux. En effet, si l'article 21-1 du code civil dispose que « le mariage n'exerce de plein droit aucun effet sur la nationalité », l'article 21-2 prévoit que le conjoint étranger ou apatride d'un français, peut acquérir la nationalité française par déclaration après un délai de quatre ans à compter du mariage, à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint demandeur justifie d'une connaissance suffisante de la langue française.
Même s'il ne devient pas français, l'époux étranger pourra se voir délivrer, de plein droit, une carte de séjour, sauf dans certains cas particuliers, car le droit au regroupement familial est reconnu au titre du droit fondamental de mener une vie familiale normale.
Parallèlement, l'article 23-5 prévoit qu'un Français qui épouse un étranger peut répudier sa nationalité française à condition qu'il ait acquis la nationalité étrangère de son conjoint et que la résidence habituelle du ménage ait été fixée à l'étranger.
Sur le plan administratif , les époux constituent désormais un foyer. À ce titre, ils bénéficient de certains dispositifs fiscaux (comme la déclaration commune d'impôts sur le revenu) et sociaux (le versement d'une pension de réversion au conjoint survivant en cas de décès de l'un des époux).
Enfin, les liens créés par le mariage sont à l'origine de droits et de devoirs réciproques entre époux. Ce sont les droits et devoirs que l'officier d'état civil a lu aux futurs époux au moment de la célébration du mariage.
La loi en énumère cinq : le respect, la fidélité, le secours (matériel) et l'assistance (morale) à l'article 212, et la communauté de vie à l'article 215 auxquels s'ajoute la sauvegarde des intérêts familiaux, c'est à dire la codirection de la famille (article 213) et ses conséquences en cas de manquement (articles 220-1 à 220-3).
De ces droits et devoirs découlent un certain nombre de conséquences patrimoniales pour les époux :
- l'obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants (article 203) ;
- le devoir de secours (article 212) et la contribution aux charges du mariage (article 214) 52 ( * ) .
- la solidarité pour les dettes ménagères (article 220) 53 ( * ) .
Au-delà du statut matrimonial de base, applicable à tous les ménages, les rapports pécuniaires des époux sont réglés par le régime matrimonial qu'ils ont choisi par contrat de mariage : communauté universelle, séparation de biens, communauté réduite aux acquêts.
À défaut de choix, le régime de droit commun applicable aux époux sera le régime de la communauté réduite aux acquêts.
Enfin, les articles 204 et suivants prévoient une obligation alimentaire réciproque entre ascendants et descendants dans le besoin, voire entre beaux-parents et gendres ou belles-filles. Les représentants du conseil supérieur du notariat ont d'ailleurs signalé à votre commission, lors de leur audition, que, compte-tenu du contexte économique actuel, les demandes d'aliments de la part des enfants vis-à-vis de leurs ascendants étaient de plus en plus fréquentes.
•
Effets protecteurs lors de la
dissolution du lien conjugal
En premier lieu, la dissolution des liens du mariage peut résulter d'un divorce .
Contrairement au Pacs, qui peut être dissout à l'initiative d'un seul des deux partenaires par simple signification à l'autre partenaire, les liens du mariage ne peuvent être rompus que par l'intervention du juge.
Pour les couples de personnes de même sexe, comme pour les couples de personnes de sexe différent, le divorce pourra être prononcé, sur le fondement de l'article 229 du code civil, dans quatre cas : consentement mutuel, acceptation du principe de la rupture du mariage, altération définitive du lien conjugal ou faute.
Le divorce produira les mêmes effets pour tous les couples. Ils se traduisent d'abord par la disparition du mariage et de ses conséquences.
Cependant, certains effets du mariage peuvent perdurer .
Le logement des époux, par exemple, est soumis à un régime particulier 54 ( * ) .
De plus, si l'article 270 du code civil dispose expressément que « le divorce met fin au devoir de secours entre époux », le juge peut prévoir le versement d' une prestation compensatoire par l'un des époux à l'autre, destinée à atténuer autant que possible les disparités que la fin du mariage créé dans les conditions de vie respective des époux. « Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ».
À côté de la prestation compensatoire, à certaines conditions, l'article 266 prévoit que « des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux, en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage ». Cela peut couvrir par exemple, la perte des avantages liés à la vie conjugale, pour la part non couverte par la prestation compensatoire ou, sur le plan moral, du désarroi lié à la solitude.
Quant aux enfants , il reviendra au juge de se prononcer sur l'exercice de l'autorité parentale : la protection apportée par le mariage aux époux, est une protection assurée aux enfants .
En second lieu, la dissolution des liens du mariage peut résulter du décès de l'un des époux .
Les couples de personne de même sexe bénéficieraient désormais de la protection accordée au conjoint survivant 55 ( * ) .
La situation du conjoint survivant Elle s'est nettement améliorée avec la loi du 3 décembre 2001 56 ( * ) , une loi « équilibrée, à l'efficacité reconnue » pour reprendre les termes du rapport d'information de MM. Dominique de Legge et Jacques Mézard, fait au nom de la commission des lois en 2011 57 ( * ) . Elle a modifié les articles 756 à 767 du code civil, qui s'appliquent en l'absence de testatment : - en présence d'enfants qui sont tous communs aux époux, le conjoint survivant peut choisir entre l'usufruit de toute la succession ou le quart de la pleine propriété ; - en présence d'enfants dont certains ne sont pas communs, il recueille le quart de la pleine propriété de la succession ; - en présence des deux parents du défunt, il recueille la moitié de la succession ; - en présence d'un seul des parents du défunt il recueille les trois-quarts de la succession ; - dans les autres cas, il hérite de la totalité. La situation du conjoint survivant reste néanmoins fragile, car il n'est pas héritier réservataire si le défunt laisse des descendants (il en était de même en présence d'ascendants jusqu'à la réforme du 23 juin 2006 58 ( * ) ). Le défunt peut, dans ce cas, avoir pris des dispositions contraires dans son testament et l'avoir déshérité ou avoir vidé sa succession par des donations. Enfin, le droit fiscal est favorable aux personnes mariées. Ils bénéficient du même tarif progressif pour les transmissions que celui appliqué aux enfants. Un sort particulier est fait au logement des époux, permettant au conjoint survivant d'y demeurer la première année après le décès de son époux, que le logement soit la propriété des époux ou qu'il soit assuré par un bail 59 ( * ) . Au-delà de cette période, le conjoint survivant reçoit un droit d'habitation et d'usage du logement et de son mobilier jusqu'à son propre décès lorsque le logement était la propriété du couple 60 ( * ) et se voit transférer le droit au bail, lorsque le couple était locataire 61 ( * ) . Enfin, en application de l'article 767 du code civil, le conjoint survivant dans le besoin dispose d'une créance alimentaire contre la succession du conjoint décédé, si cette succession ne lui revient pas et, en vertu de l'article 206, d'un droit alimentaire contre ses anciens beaux-parents lorsque des enfants sont issus du mariage. |
2. L'accès des couples de même sexe à la filiation adoptive conjointe
Si, en matière patrimoniale et extrapatrimoniale le bénéfice de l'ensemble des droits et obligations inhérents au mariage est ouvert aux couples de même sexe par le seul accès au mariage, en matière de filiation, ce bénéfice est circonscrit à la seule filiation adoptive conjointe, à l'exclusion des autres modes d'établissement de la filiation maternelle ou paternelle.
•
Seulement l'adoption
conjointe...
Le code civil consacre en effet deux titres du livre premier à la filiation. Le titre VII, intitulé « De la filiation » et le titre VIII, intitulé « De la filiation adoptive ».
Or, si le second ne mentionne que les époux, les conjoints ou les adoptants, sans référence à leur sexe 62 ( * ) , ce qui rend ses dispositions applicables aux conjoints homosexuels, le premier vise particulièrement les père ou mère, fermant, de ce fait, l'établissement conjoint de la filiation à des personnes de même sexe.
L'article 310-1 du code civil précise en effet que « la filiation est légalement établie, [...], par l'effet de la loi, par la reconnaissance volontaire ou par la possession d'état constatée par un acte de notoriété ».
Le premier mode d'établissement de la filiation, par l'effet de la loi, correspond d'une part à la règle de l'article 311-25 selon laquelle la filiation maternelle s'établit par la désignation de celle-ci dans l'acte de naissance et d'autre part à la présomption de paternité de l'article 312 du même code, selon laquelle l'enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari.
L'article 320 du même code disposant que, « tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à l'établissement d'une autre filiation qui la contredirait », deux personnes de même sexe ne pourraient demander à bénéficier cumulativement de l'une de ces deux règles, qui distribuent la filiation selon le sexe de l'auteur.
La reconnaissance de paternité ou de maternité, faite avant ou après la naissance constitue le second mode d'établissement de la filiation légale.
Or, pour la même raison que précédemment, la filiation d'un enfant ne peut être établie sur ce fondement, à l'égard de deux personnes de même sexe, car il y aurait contradiction au sens de l'article 320 du code civil : la première reconnaissance effectué par un homme ou une femme interdit à toute personne du même sexe d'en effectuer une à son tour. La seule voie ouverte reste alors celle d'une contestation de la première reconnaissance en justice.
Le dernier mode d'établissement de la filiation est la possession d'état, judiciairement constatée, qui se fonde sur une réunion suffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir (art. 311-1 du code civil) : l'usage d'un nom en commun, le fait d'être traité par ses prétendus parents comme leur enfant et de les traiter tels, et le fait d'avoir cette situation aux yeux de la société ou de la famille.
La possession d'état doit être continue, paisible, publique et non équivoque (art. 311-2 du même code). Or, la filiation non-adoptive ne pouvant être établie pour deux personnes de même sexe, l'apparence ne peut jouer en leur faveur, ni la possession publique et non équivoque de cet état être constatée par le juge.
Votre rapporteur souligne, à cet égard, que la reconnaissance, demain, de doubles filiations maternelles ou paternelles, établies en vertu d'une adoption, n'autorisera pas plus à recourir à la possession d'état pour faire reconnaître la filiation d'un enfant vis-à-vis d'un second parent de même sexe que le premier. En effet, l'article 311-2 du code civil impose que la filiation apparente soit établie à l'égard de ceux dont on dit l'enfant « issu », ce qui correspond à une filiation biologique et non à une filiation adoptive.
Enfin, votre rapporteur rappelle que l'assistance médicale à la procréation 63 ( * ) , qui ne constitue pas un mode d'établissement de la filiation, demeure exclue du champ d'application de la présente loi. En effet, l'article L. 2141-2 du code de la santé publique, qui n'est pas modifié par le présent projet de loi, la réserve aux couples - mariés ou non - qui présentent une infertilité dont le caractère pathologique est médicalement constaté, ce qui exclut les couples de personnes de même sexe.
•
...Toute l'adoption
conjointe
L'article 343 du code civil ouvre aux époux non séparés de corps, mariés depuis plus de deux ans et âgés l'un et l'autre de plus de vingt-huit ans, l'adoption plénière et l'adoption simple 64 ( * ) .
Le bénéfice de cette disposition repose exclusivement sur le lien matrimonial, sans référence au sexe des époux.
En autorisant le mariage des couples de personnes de même sexe, le présent article les place donc sur le même pied que les époux de sexe différent, puisqu'ils pourront :
- adopter conjointement, en la forme simple ou plénière, un enfant ;
- adopter, pour l'un des deux, en la forme simple ou plénière, l'enfant de l'autre conjoint. Il s'agit alors d'une adoption intrafamiliale.
Les régimes juridiques de l'adoption plénière et de l'adoption simple
Son objet est de conférer à l'enfant adopté une filiation avec l'adoptant, qui se substitue totalement à sa filiation d'origine : il cesse d'appartenir à sa famille par le sang et acquiert, dans la famille de l'adoptant, les mêmes droits et obligations qu'un enfant dont la filiation a été légalement établie 65 ( * ) . Les père et mère de l'enfant doivent consentir à l'adoption 66 ( * ) . Elle procède ainsi d'une assimilation complète avec une filiation par le sang : l'acte de naissance d'origine de l'enfant est annulé, le jugement d'adoption est retranscrit sur les registres d'état civil du lieu de naissance de l'intéressé, et cette retranscription ne doit contenir aucune indication relative à sa filiation réelle 67 ( * ) . L'adopté prend le nom de l'adoptant 68 ( * ) . L'adoption de l'enfant du conjoint laisse toutefois subsister sa filiation d'origine à l'égard de ce conjoint et de sa famille 69 ( * ) . L'adoption plénière n'a pas d'effet rétroactif et elle est irrévocable 70 ( * ) .
Elle se distingue de la précédente par des effets moins absolus sur la filiation d'origine de l'adopté, puisqu'elle se limite à créer un nouveau lien de filiation entre l'intéressé et sa famille d'adoption, sans rompre celui qui l'unit à sa famille d'origine. Comme l'adoption plénière, elle suppose le consentement des parents à l'égard desquels sa filiation est déjà établie. Ce faisant, l'enfant adopté conserve, dans sa famille par le sang, l'intégralité de ses droits, notamment héréditaires 71 ( * ) , et acquiert les mêmes dans sa famille d'adoption. Le nom de l'adoptant est adjoint à celui de l'adopté, et s'y substitue, par décision du tribunal, à la demande de l'adoptant 72 ( * ) . En revanche, l'adoptant est seul investi à l'égard de l'adopté de tous les droits de l'autorité parentale, sauf en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint. Les deux époux possèdent alors en commun cette autorité, l'exercice en étant toutefois conservé par le parent d'origine, à moins d'une déclaration conjointe d'exercice en commun de cette autorité 73 ( * ) . L'adoption simple est révocable pour motif grave, sous certaines conditions 74 ( * ) . |
La possibilité d'adoption par une personne seule 75 ( * ) qui elle aussi est indifférente au sexe et à l'orientation sexuelle de l'intéressé 76 ( * ) , demeure inchangée, sauf sur un point.
En effet, lorsque l'adoptant, bien que souhaitant adopter seul, est marié et non séparé de corps, il doit recueillir le consentement de son conjoint. Cette condition, qui ne concernait jusqu'à présent, par définition, que les époux de sexe différents, s'appliquerait demain aussi aux époux de même sexe.
Votre rapporteur souligne l'avancée qu'autorise, en matière d'adoption, le présent article : pour la première fois au sein des couples de même sexe, la filiation d'un enfant pourra être établie à l'égard des deux parents qui s'occupent effectivement de lui et l'éduquent. Sera ainsi assurée à l'enfant, aux parents et à toutes ces familles, la protection supérieure que seule garantit la filiation dans notre droit .
Cette protection se concrétise dans l'assimilation complète, à l'article 358 du code civil, entre les enfants adoptés plénièrement et ceux dont la filiation a été établie par déclaration, reconnaissance ou possession d'état : elle assure une parfaite égalité entre les uns et les autres.
Toutefois, votre rapporteur note aussi que l'avancée réalisée jouera essentiellement en faveur des familles homoparentales au sein desquelles l'enfant a sa filiation déjà établie à l'égard d'un des deux membres du couple . Le mécanisme sollicité sera alors celui de l'adoption simple ou plénière de l'enfant du conjoint.
En effet, comme l'ont rappelé lors de leur audition, tant les représentants des associations compétentes en matière d'adoption, que ceux de l'agence française de l'adoption et de la fédération française des organismes autorisés pour l'adoption, fort peu de pays étrangers acceptent de confier des enfants, pour adoption, à des couples homosexuels 77 ( * ) . Aucune adoption internationale par un couple de personnes de même sexe n'a ainsi eu lieu en Belgique depuis l'ouverture de ce droit, il y a six ans.
Or, celle-ci représente en France près des deux tiers des adoptions : en 2011, l'adoption internationale a concerné 1995 enfants, et l'adoption nationale 800.
En outre, le nombre de couples candidats à l'adoption est près de neuf fois supérieur à celui des enfants susceptibles d'être adoptés chaque année (27 000 candidats à l'adoption en 2011) : on ne peut exclure, comme l'a relevé le docteur Pierre Levy-Soussan au cours de son audition, et bien que toute discrimination exclusivement fondée sur l'orientation sexuelle des candidats à l'adoption soit illégale , que ce déséquilibre joue en défaveur des couples homosexuels.
•
Un accès à l'adoption
conjointe conforme aux exigences de la convention européenne des droits
de l'homme
Votre rapporteur souligne qu'en refusant de dissocier l'accès au mariage de celui à l'adoption conjointe, le Gouvernement s'est non seulement conformé au droit en vigueur, qui lie les deux sans référence aucune au sexe des adoptants, mais il a garanti, par anticipation, la conformité du texte de loi à la convention européenne des droits de l'homme .
En effet, la Cour européenne des droits de l'homme a récemment étendu sa jurisprudence relative à la discrimination en raison de l'orientation sexuelle, en matière d'accès à une vie famille normale.
Dans sa décision en date du 15 mars 2012, Gas et Dubois contre France 78 ( * ) , la Cour avait conclu à l'absence de différence de traitement fondée sur l'orientation sexuelle entre les couples hétérosexuels non mariés et les couples homosexuels, au motif qu'en droit français l'interdiction de l'adoption conjointe frappe les premiers, comme les seconds, sans distinction.
Sans remettre en cause cette première jurisprudence, qui valide implicitement le choix de réserver aux couples mariés l'adoption conjointe et qu'elle a au contraire confirmée à l'unanimité, la Cour de Strasbourg s'est prononcée, le 19 février 2013 79 ( * ) , sur la discrimination établie entre les couples hétérosexuels et homosexuels placés dans la même situation conjugale, pour l'accès à l'adoption.
Elle a jugé que le droit autrichien, qui réservait aux seuls couples hétérosexuel l'adoption conjointe, indépendamment du fait qu'ils soient mariés ou non, opérait une différence de traitement contraire aux articles 8 et 14 de la convention européenne des droits de l'homme, car fondé sur l'orientation sexuelle des intéressés.
S'il est donc possible de limiter l'adoption conjointe aux seuls époux, il serait contraire au droit conventionnel européen de refuser à des époux homosexuels le bénéfice d'une adoption conjointe dont profitent les époux hétérosexuels .
3. Les règles de conflit de lois applicables au mariage de personnes de même sexe
Les règles de conflit de lois ont vocation à déterminer la règle de droit applicable en présence d'un élément d'extranéité, c'est-à-dire lorsque le mariage est célébré sur un territoire étranger ou lorsque le mariage concerne un étranger.
Le II du présent article insère dans le code civil un chapitre IV bis « Des règles de conflit de lois », composé de deux articles.
a) La possibilité d'écarter la loi personnelle d'un ressortissant étranger lorsqu'elle interdit le mariage de personnes de même sexe
Le droit positif prévoit que les conditions de fond du mariage (l'âge légal, le consentement, les empêchements...) sont régies par la loi personnelle de chacun des époux. Cette règle est fixée, pour les Français, à l'article 3 du code civil qui dispose que : « les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étranger ».
De jurisprudence constante, lorsque le mariage est contracté entre un Français et le ressortissant d'un État étranger, le juge apprécie que les conditions essentielles à la validité du mariage sont remplies, distributivement, selon la loi personnelle de chacun des époux.
Or, le maintien de cette règle aurait pour conséquence de rendre impossible :
- la célébration du mariage de couples d'étrangers résidant en France, lorsque leur loi personnelle l'interdit ;
- la célébration du mariage de couples constitués d'un Français et d'un étranger, lorsque sa loi personnelle ne l'y autorise pas.
Par exemple, un maire ne pourrait marier un Français et un Allemand résidant ensemble en France depuis de longues années, car la loi allemande n'autorise pas le mariage de personnes de même sexe.
Le nouvel article 202-1 du code civil rappelle dans, son premier alinéa, le principe général applicable, à savoir que : « les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle ».
Par exception, afin de permettre l'application des nouvelles règles aux couples de personnes de même sexe dont l'une au moins n'a pas la nationalité française , le deuxième alinéa du nouvel article 202-1, dans la rédaction initiale du projet de loi, prévoyait que « la loi personnelle d'un époux est écartée, sous réserve des engagements internationaux de la France, en tant qu'elle fait obstacle au mariage de deux personnes de même sexe, lorsque la loi de l'État sur le territoire duquel est célébré le mariage le permet » .
La commission des lois de l'Assemblée nationale a réécrit cette disposition dérogatoire à l'application de la loi personnelle des époux, en s'inspirant de la règle prévue par le droit belge.
Au lieu de prévoir, comme c'était le cas dans le texte initial, que la loi personnelle est écartée au profit de la loi de l'État de célébration du mariage, la nouvelle règle issue des travaux de l'Assemblée nationale, davantage conforme aux règles du droit international privé, prévoit que le mariage peut être célébré dès lors que, pour au moins l'un des époux, soit sa loi personnelle, soit la loi de l'État sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet .
Elle a également supprimé la référence à la réserve diplomatique que contenait le deuxième alinéa de l'article 202-1, estimant qu'elle était inutile. Le mariage ne pourra être célébré si une convention internationale s'y oppose, conformément à l'article 55 de la constitution, qui fait prévaloir les engagements internationaux de la France sur la loi nationale.
L'étude d'impact annexée au présent texte présente une liste de conventions bilatérales liant la France et soumettant expressément les conditions de fond du mariage à la loi nationale (conventions avec la Pologne, le Maroc, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, la Serbie, la Slovénie et le Vietnam), ainsi que les conventions rattachant le statut personnel à la loi nationale (conventions avec Madagascar, le Cambodge, le Laos, la Tunisie et l'Algérie).
Dès lors, si la loi nationale du Maroc ou du Vietnam, par exemple, n'autorise pas le mariage des personnes de même sexe, les ressortissants de ces États ne pourront pas se marier en France, y compris avec un Français.
Votre rapporteur approuve pleinement la nécessité de prévoir cette règle de conflit de lois , sans laquelle le présent texte ne serait pas applicable aux Français qui choisissent d'épouser un étranger dont la loi personnelle n'autorise pas une telle union.
Des observations ont néanmoins été formulées à l'encontre de ce dispositif, lors des auditions organisées par votre rapporteur, par M. Hugues Fulchiron, professeur de droit à l'université Lyon 3 et par les représentants du conseil supérieur du notariat, concernant le choix des notions de « domicile » ou de « résidence ».
En effet, généralement, en droit international privé les termes utilisés sont ceux de « résidence habituelle », qui permet de qualifier un lien étroit et stable avec l'État concerné. Ces termes sont d'ailleurs mentionnés à plusieurs reprises dans le code civil, par exemple aux articles 21-7 et suivants relatifs aux règles d'octroi de la nationalité française ou 311-15 relatif à la possession d'état en matière de filiation.
C'est d'ailleurs cette notion qui est utilisée dans la règle belge, dont est pourtant inspiré le nouvel article 202-1, pour justifier l'éviction d'une loi personnelle qui prohibe le mariage de personnes de même sexe.
Ces observations ne paraissent toutefois pas dirimantes, car les notions de « domicile » 80 ( * ) ou « résidence » 81 ( * ) sont justement celles utilisées par le droit commun français du mariage. L'article 74 du code civil 82 ( * ) prévoit que la célébration du mariage a lieu, au choix des époux, dans la commune où l'un des époux, ou l'un de leurs parents, a son domicile ou sa résidence établie par un mois au moins d'occupation à la date de la publication des bans.
Dès lors, comme c'est déjà le cas pour les couples hétérosexuels, deux étrangers homosexuels qui ont une résidence secondaire en France pourront s'y marier, si cette résidence est établie dans les conditions prévues à l'article 74.
Votre rapporteur estime que la crainte d'un « tourisme nuptial » est quelque peu infondée. En effet, si les mariages ainsi célébrés sont valables en France et dans les pays ayant adopté la même politique législative, ils n'auront pas d'effets dans les pays prohibant le mariage de personnes de même sexe, à commencer par l'État d'origine des ressortissants étrangers dont la loi personnelle a été écartée pour permettre la célébration du mariage.
b) La validité du mariage subordonnée au respect de la loi de l'État de célébration du mariage
En droit positif, l'article 171-1 du code civil dispose que la loi applicable pour apprécier la validité des conditions de forme du mariage (publications, formalités préalables, autorité compétente pour célébrer le mariage...), est celle du lieu de célébration du mariage. Cet article ne concerne que le cas des mariages de Français à l'étranger.
Le projet de loi introduit dans le code civil un nouvel article 202-2, qui n'a pas été modifié par l'Assemblée nationale. Celui-ci a vocation à s'appliquer aux mariages célébrés en France lorsqu'un étranger au moins est concerné.
S'inspirant de l'article 171-1, il prévoit que « le mariage est valablement célébré s'il l'a été conformément aux formalités prévues par la loi de l'État sur le territoire duquel la célébration a eu lieu. »
Au bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission a adopté l'article 1 er sans modification .
Article 1er bis A (art. 34-1 [nouveau] du code civil) - Contrôle et surveillance par le ministère public de l'établissement des actes d'état civil
Cet article, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale par un amendement de M. Alain Tourret et plusieurs de ses collègues, insère dans le code civil un article 34-1, qui consacre expressément un pouvoir de contrôle et de surveillance du procureur de la République sur les officiers de l'état civil dans l'exercice de leurs fonctions.
Le maire, en tant qu'officier de l'état civil, a la charge des actes de l'état civil.
Cependant, dans la mesure où ces actes relève du service public de la justice et sont faits au nom de l'État, le pouvoir décisionnel appartient au procureur de la République 83 ( * ) .
Le code civil prévoit donc, déjà, un certain nombre de cas dans lesquels le ministère public est appelé à intervenir.
En application de dispositions spécifiques, le procureur de la République peut intervenir de son propre chef, puisqu'il exerce son autorité , au nom de l'État, sur les officiers de l'état civil .
Il vérifie par exemple les registres d'état civil lors de leur dépôt au greffe du tribunal de grande instance (article 53). Il peut donner des instructions à l'officier de l'état civil aux fins de rectification d'erreur matérielle (article 99 du code civil), ou de faire procéder à la publicité de décisions modifiant l'état civil 84 ( * ) .
Concernant plus spécifiquement le mariage, le procureur peut dispenser les époux, pour motifs graves, de publication des bans (article 169). Il peut également former opposition pour les cas où il pourrait demander la nullité du mariage (article 175-1).
Dans la mesure où les matières dans lesquelles les officiers de l'état civil interviennent sont de plus en plus techniques, le code civil prévoit qu'ils peuvent interroger les parquets au quotidien.
En application des articles 171-4 et 175-2, l'officier d'état civil peut saisir le procureur lorsqu'il existe des indices sérieux laissant présumer que le mariage envisagé est susceptible d'être annulé pour défaut de consentement (en cas de suspicion de mariages blancs ou de mariages arrangés par exemple). Ainsi informé, le procureur de la République peut décider d'engager l'action du ministère public s'il l'estime justifiée.
Toutefois, aucune règle générale de compétence des procureurs de la République n'existe au niveau législatif ou réglementaire. Seul le paragraphe n° 16 de l'instruction générale relative à l'état civil (IGREC) prévoit une telle disposition 85 ( * ) .
Le nouvel article 34-1, inséré dans le code civil par l'article 1 er bis A, consacre donc opportunément cette compétence générale de surveillance et de contrôle des actes de l'état civil par le procureur de la République. Il veillera ainsi à ce que la loi soit appliquée partout sur le territoire de la même manière.
Votre commission a adopté l'article 1 er bis A sans modification .
Article 1er bis B (art. 74 et 165 du code civil) - Assouplissement des règles relatives à la détermination de la mairie compétente pour célébrer un mariage
Cet article prévoit la possibilité pour un couple de choisir la commune où ses parents ont leur domicile ou leur résidence pour se marier .
L'article 74 du code civil, dans sa rédaction actuelle, issue d'une loi du 21 juin 1907, limite le choix du lieu de célébration d'un mariage à la commune de résidence ou de domicile de l'un des deux époux.
Tirant les conséquences du fait que de nombreux futurs époux souhaitent célébrer, pour des raisons sentimentales et pratiques, leur union dans la commune où résident leurs parents, M. Jacques Pélissard, député, président de l'association des maires de France (AMF) a déposé, avec plusieurs de ses collègues, un amendement en ce sens, examiné en séance à l'Assemblée nationale.
Cet amendement était très largement inspiré de celui déposé en 2011 au Sénat par M. Michel Mercier, alors garde des sceaux, au cours de l'examen du projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles. Après avoir été adoptée conforme par les deux chambres, cette disposition avait été censurée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 8 décembre 2011 86 ( * ) , au motif qu'il s'agissait d'un cavalier législatif.
Le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, M. Erwann Binet, de même que la garde des sceaux, Mme Christiane Taubira ont estimé que dans la rédaction proposée, cet amendement comportait une incertitude quant à la personne autorisée à demander que le mariage soit célébré dans la commune de résidence ou de domicile des parents des futurs époux.
Ils craignaient qu'une telle disposition permette aux maires qui le souhaiteraient de se libérer de leur obligation de marier les époux résidant dans leur commune en les renvoyant au maire de la commune de résidence ou de domicile de leurs parents.
Pour écarter cette difficulté d'interprétation, le rapporteur de la commission des lois a déposé un sous-amendement, précisant que la demande de mariage dans la commune de résidence ou de domicile des parents devait émaner, exclusivement, de l'un des futurs époux.
L'amendement, ainsi sous-amendé, a été adopté à l'unanimité des suffrages exprimés.
Lors de son audition par votre commission des lois, M. Jacques Pélissard, en sa qualité de président de l'Association des maires de France a souhaité que le Sénat conserve cet article.
Votre rapporteur est tout à fait favorable à cette disposition , qui confère aux futurs époux une plus grande liberté de choix du lieu de célébration de leur union, répondant ainsi à une réelle demande.
En outre, la concentration urbaine des lieux d'activités conduit à réduire peu à peu les mairies de célébration de mariage, de sorte que certaines petites communes, qui auraient pu accueillir des unions et ainsi bénéficier de certaines retombées touristiques et économiques, se voient progressivement privées de celles-ci.
Par ailleurs, dans les faits, comme cela l'a été rappelé lors des débats à l'Assemblée nationale, il arrive souvent que les maires acceptent de marier les époux chez leurs parents en indiquant qu'il s'agit d'une adresse de résidence.
En tout état de cause, l'article 166 du code civil prévoit que la publication des bans est faite à la mairie du lieu du mariage et à celle du lieu où chacun des futurs époux a son domicile ou, à défaut, sa résidence. Ainsi, toute personne qui y a intérêt peut être informée de la célébration.
Votre rapporteur estime donc que l'adoption de cet article garantit une plus grande égalité de traitement entre les couples, en ne laissant plus à la libre appréciation des maires l'opportunité d'appliquer souplement ou non la règle posée par l'article 74 du code civil.
Cependant, la rédaction proposée pour l'article 74 du code civil demeure quelque peu imprécise , puisqu'elle pourrait laisser entendre que ce ne sont pas les époux, mais les parents des époux, qui peuvent demander à ce que l'union soit célébrée dans leur commune de résidence.
C'est pourquoi, votre rapporteur a déposé un amendement de clarification rédactionnelle, adopté par votre commission.
Cet amendement modifie également, par coordination, l'article 165 du chapitre II du code civil : « Des formalités relatives à la célébration du mariage », tirant les conséquences de cet assouplissement des règles de choix du lieu de célébration du mariage.
Votre commission a adopté l'article 1 er bis B ainsi modifié .
Article 1er bis CA (nouveau) (art. 75 du code civil) - Suppression de la lecture de l'article 220 du code civil relatif à la solidarité des dettes entre époux lors de la célébration du mariage
Cet article supprime de la liste des articles du code civil dont l'officier d'état civil doit donner lecture lors de la célébration du mariage, l'article 220 relatif à la solidarité des époux concernant les dettes contractées pour l'entretien du ménage. Cette liste est prévue au premier alinéa de l'article 75 du code civil 87 ( * ) .
Cette disposition avait été introduite en séance publique au Sénat, dans la proposition de loi relative à la simplification du fonctionnement des collectivités territoriales 88 ( * ) . Or, elle a été supprimée en séance à l'Assemblée nationale, par un amendement du Gouvernement, ayant reçu un avis défavorable de la commission, au motif que « les modifications à apporter au code civil [avaient] vocation à emprunter un vecteur plus adapté » qu'une loi qui concerne le code général des collectivités territoriales.
L'obligation pour les officier d'état civil de donner lecture de l'article 220 est récente. Elle est issue de la loi du 1 er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation 89 ( * ) .
Or, les maires ont été de plus en plus nombreux à considérer que la lecture de cet article était longue, fastidieuse et peu adaptée à la cérémonie du mariage.
Dès 2011, la question de sa suppression a été posée par notre collègue Patrice Gélard, qui a déposé, avec plusieurs de ces collègues, une proposition de loi 90 ( * ) en ce sens.
Votre rapporteur estime que le présent texte est le vecteur adapté pour procéder à la suppression de la lecture de cet article lors des cérémonies matrimoniales. Il a donc déposé un amendement tendant à insérer un article additionnel ayant cet objet.
Cet amendement apporte également des modifications tendant à clarifier la rédaction du premier alinéa de l'article 75.
Votre commission a adopté l'article additionnel 1 er bis CA ainsi rédigé .
Article 1er bis C (art. 165 du code civil) - Caractère républicain de la célébration du mariage
Cet article, issu d'un amendement de M. Alain Tourret et plusieurs de ses collègues, adopté en séance publique à l'Assemblée nationale, introduit à l'article 165 du code civil, l'affirmation du caractère républicain du mariage prononcé par l'officier de l'état civil, alors que dans sa rédaction actuelle, il ne prévoit que son caractère public.
Votre rapporteur s'interroge sur la portée normative de la consécration du caractère républicain de la célébration, le mariage civil revêtant déjà les caractères d'un rite républicain, bien distinct du rite religieux.
En effet, depuis le Révolution française, le mariage est une institution laïque. Il est célébré dans la « maison commune », portes ouvertes, par l'officier d'état civil ceint de l'écharpe tricolore, sous l'oeil vigilant de Marianne, symbole de la République et de la laïcité, et du Président de la République. À la fin de la cérémonie, les époux sont mariés « au nom de la loi ».
À cet égard, les services de la Chancellerie ont fait savoir à votre rapporteur, qu'ils n'avaient pas été alertés de situations où le caractère républicain de la célébration du mariage aurait été mis en cause.
Cependant, dans la mesure où une telle mention permet de distinguer encore davantage le mariage civil et républicain, qui est le seul à produire en France des effets juridiques, du mariage religieux, et puisque le caractère républicain du mariage n'est pas consacré explicitement dans le code civil, votre rapporteur approuve l'esprit de cet article, bien que cette disposition à caractère symbolique ait été introduite à l'article 165, au sein d'un chapitre consacré aux formalités relatives à la célébration du mariage.
Enfin, comme l'a souligné la garde des sceaux, lors des débats en séance publique à l'Assemblée nationale, cet article ajoute une certaine solennité républicaine à la célébration, « non pas vis-à-vis des maires, mais vis-à-vis des couples » 91 ( * ) .
Dès lors, votre rapporteur a invité votre commission à maintenir cette disposition.
Votre commission a adopté l'article 1 er bis C sans modification .
Article 1er bis D (art. 167 du code civil) - Célébration impossible du mariage à l'étranger des Français établis hors de France
Cet article vise à permettre aux couples de personnes de même sexe, dont l'une au moins est française, résidant dans des pays où leur union est interdite et où les autorités diplomatiques et consulaires ne peuvent la célébrer, de se marier sur le territoire français.
Les règles de célébration des mariages de Français établis hors de France Lorsque le mariage est célébré à l'étranger, l'article 171-1 du code civil distingue deux hypothèses. Mais dans ces deux cas, le ou les Français concernés sont tenus de respecter les conditions de fond prévues au chapitre I er « Des qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage. » du titre V « Du mariage » du livre premier du code civil. Le mariage contracté en pays étranger entre français, ou entre un français et un étranger, est valable s'il a été célébré dans les formes usitées dans le pays de célébration. Le mariage entre Français ou entre un Français et un étranger peut également être célébré par les autorités diplomatiques et consulaires françaises, conformément aux lois françaises. Toutefois, s'agissant du mariage entre un Français et un étranger, ces autorités ne peuvent procéder à la célébration que dans les pays désignés par décret 92 ( * ) . |
Le mariage serait alors célébré par l'officier d'état civil de la commune de naissance ou de dernière résidence de l'un des époux ou de l'un de ses parents ou de ses grands-parents, ou, à défaut, de la commune de leur choix.
Introduite à l'initiative de Mme Corinne Narassiguin et certains de ses collègues en séance publique à l'Assemblée nationale 93 ( * ) , cette disposition avait été sous-amendée par Mme Claudine Schmid, pour en élargir le champ.
Elle a été adoptée après avoir reçu un avis favorable de la commission des lois de l'Assemblée nationale et du Gouvernement.
Le dispositif ainsi créé s'inspire partiellement de l'article L. 12 du code électoral, qui fixe les conditions d'inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France 94 ( * ) .
Votre rapporteur approuve pleinement l'esprit de cette disposition, qui permet à tous les Français de se marier, y compris lorsqu'ils sont établis dans un pays étranger qui n'admet pas l'union des personnes de même sexe. Il regrette cependant la complexité de la rédaction retenue.
Si le rattachement des Français établis hors de France à la commune avec laquelle ils présentent un lien, même ténu, se justifie pleinement s'agissant de l'inscription sur les listes électorales, puisqu'il est question d'élections locales notamment 95 ( * ) , la logique n'est pas la même en matière matrimoniale.
De plus, cet article ne devrait concerner qu'un nombre limité d'unions. En effet, en 2010, les unions homosexuelles ne représentaient que 9 143 PACS, soit 2 % du total des unions 96 ( * ) . A fortiori , les unions de personnes de même sexe, dont l'une au moins est française, établies hors de France, seront encore moindre. Il n'y aurait donc pas réellement de risque pour une petite commune touristique d'être submergée par des demandes de célébration de mariage, si le choix était plus largement ouvert aux époux.
Dès lors, pour alléger cet article, votre rapporteur propose d'apporter quelques améliorations rédactionnelles et de supprimer la référence à la commune de résidence des grands-parents.
Prioritairement, les futurs époux demanderont à être mariés dans la commune de naissance ou de dernière résidence de l'un d'eux ou de l'un de leurs parents. Le parallélisme avec les dispositions prévues aux articles 74 et 165 du code civil, modifiés par le présent texte, est ainsi respecté.
À défaut, si le lien avec les communes citées ne peut être établi, ils pourront se marier dans la commune de leur choix, qui pourra être celle de résidence de leurs grands-parents si telle est leur volonté.
Une intervention du pouvoir réglementaire sera également nécessaire pour fixer les modalités de mise en oeuvre d'un tel dispositif. En effet, avant de pouvoir se marier dans la commune de leur choix, les époux auront à apporter la preuve que la célébration n'est pas possible dans la commune de naissance ou de dernière résidence de l'un d'eux ou de l'un de leurs parents.
Enfin, votre rapporteur s'est également interrogé sur le choix de l'introduction d'une telle règle au sein du chapitre II « Des formalités relatives à la célébration du mariage », alors même qu'il existe un chapitre II bis consacré au mariage des Français à l'étranger.
Dès lors que ce nouvel article vise justement à prévoir une exception aux règles applicables en matière de célébration de mariages de Français, en raison de l'impossibilité de les célébrer à l'étranger, il devrait plus opportunément être placé à la fin du chapitre II bis .
Tel est le sens de l' amendement déposé par votre rapporteur et adopté par votre commission.
Votre commission a adopté l'article 1 er bis D ainsi modifié .
CHAPITRE IER BIS - DISPOSITIONS RELATIVES À LA FILIATION ADOPTIVE ET AU MAINTIEN DES LIENS AVEC L'ENFANT
L'Assemblée nationale a introduit cette nouvelle division et trois des articles qu'elle contient à l'initiative de sa commission des lois, le dernier résultant d'un amendement du rapporteur adopté en séance publique.
Bien que consacré aux dispositions relatives à la filiation adoptive et au maintien des liens avec l'enfant, ce nouveau chapitre n'inclut pas d'article ouvrant expressément l'accès à l'adoption conjointe aux époux de même sexe. En effet, comme on l'a vu précédemment, cet accès découle implicitement, mais nécessairement, de l'article 1 er , au même titre que tous les autres droits et obligations afférents au mariage 97 ( * ) .
Article 1er bis (art. 345-1 du code civil) - Autorisation de l'adoption plénière de l'enfant du conjoint, antérieurement adopté par lui
Cet article, introduit en commission des lois à l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, M. Erwann Binet, vise à autoriser l'adoption plénière de l'enfant du conjoint, lorsqu'il a déjà fait l'objet d'une adoption plénière par ce dernier.
L'adoption plénière de l'enfant du conjoint n'est en effet permise que dans trois cas, afin d'éviter de priver l'enfant d'une filiation antérieure, sauf circonstance qui le justifient :
- lorsque l'enfant n'a de filiation légalement établie qu'à l'égard de ce conjoint ;
- lorsque l'autre parent que le conjoint s'est vu retirer totalement l'autorité parentale ;
- lorsque l'autre parent que le conjoint est décédé et n'a pas laissé d'ascendants au premier degré ou lorsque ceux-ci se sont manifestement désintéressés de l'enfant.
En outre, afin d'éviter de soumettre l'enfant à des adoptions plénières successives ou multiples, l'article 359 du code civil rend l'adoption plénière irrévocable et l'article 346 interdit qu'un enfant puisse être adopté par plusieurs personnes, exception faite de deux époux.
Appliquée strictement, cette règle interdirait au conjoint d'une personne qui aurait précédemment adopté un enfant, en la forme plénière, de l'adopter à son tour.
Or, une telle situation se trouvera fréquemment au sein des familles homoparentales actuelles, puisque jusqu'à présent, seule la voie de l'adoption par un célibataire leur ouverte pour accueillir un enfant dans leur famille. La régularisation de leur situation filiative passe alors par l'adoption de cet enfant par l'autre conjoint : il est nécessaire d'en réserver la possibilité.
La circulaire du 28 octobre 2011 relative aux règles particulières à divers actes de l'état civil relatifs à la naissance et à la filiation 98 ( * ) propose, à cet égard, une interprétation souple de la règle.
Elle défend que, dans la mesure où l'article 343 du code civil ne précise pas que l'adoption conjointe par deux époux soit effectuée simultanément, elle autorise implicitement que l'adoption par les conjoints puisse avoir lieu successivement. À l'appui de cette interprétation, le ministère de la justice fait valoir que, dans le cas de l'adoption par le conjoint, il n'y a pas infraction à la règle de l'irrévocabilité de l'adoption plénière, puisque la filiation à l'égard du conjoint s'ajoute à la filiation antérieure.
Cette interprétation libérale ne paraît toutefois pas conforme à la jurisprudence plus restrictive de la Cour de cassation 99 ( * ) .
Sans remettre en cause la pertinence de l'argumentation de la Chancellerie, les commissaires des lois de l'Assemblée nationale ont d'ailleurs préféré, à l'invitation du rapporteur, M. Erwann Binet, poser une règle explicite, en ajoutant, aux trois cas dans lesquels l'adoption de l'enfant du conjoint est autorisée, un cas supplémentaire : lorsque l'enfant a fait l'objet d'une adoption plénière par ce seul conjoint.
Votre rapporteur partage la préoccupation exprimée par les députés, et juge comme eux souhaitable que la règle soit rendue plus explicite : il s'agit de prémunir les familles homoparentales, qui seront nombreuses dans ce cas, de tout risque d'interprétation divergente par les tribunaux.
Toutefois, le dispositif proposé par l'Assemblée nationale pose une difficulté. Son effet dépasse le strict objet qui le motive, puisqu'en ne précisant pas que la filiation de l'enfant doit être établie à l'égard du seul conjoint l'ayant adopté la première fois, il autoriserait une adoption par l'autre conjoint d'un enfant ayant déjà un autre parent par le sang.
Le cas serait par exemple celui d'un enfant à la filiation biologique établie à l'égard d'un seul parent, qui serait une première fois adopté par le conjoint de ce dernier, puis, une seconde fois, après la séparation du premier couple, par le nouveau conjoint du parent adoptif.
Il n'est pas acquis que l'article 346 du code civil, selon lequel, nul ne peut être adopté par plusieurs personnes, si ce n'est deux époux, serait susceptible, sur ce point, de tenir en échec la règle spéciale ainsi ajoutée à l'article 345-1 du même code, puisque la seconde adoption serait bien une adoption entre époux.
Certes cette seconde adoption ne serait possible qu'avec le consentement du parent biologique évincé 100 ( * ) , mais elle s'écarte du droit en vigueur, qui n'autorise une telle adoption que si le parent biologique s'est vu retiré l'autorité parentale ou s'il est décédé et n'a pas laissé d'ascendants au premier degré ou que ceux-ci se sont manifestement désintéressés de l'enfant. Le dispositif ainsi adopté en 1993, puis en 1996, l'avait justement été pour remédier à des cas difficiles d'éviction de la famille par le sang 101 ( * ) .
Afin de préserver l'état actuel du droit, notamment pour les couples de sexe différent, et circonscrire la règle ainsi posé aux cas où il n'y a pas de filiation concurrente, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur inspiré du deuxième alinéa de l'article 346 du code civil 102 ( * ) , qui autorise expressément une nouvelle adoption plénière de l'enfant du conjoint, lorsque ce dernier a fait l'objet d'une adoption plénière par ce seul conjoint, et qu'il n'a de filiation établie qu'à son égard.
Votre commission a adopté l'article 1 er bis ainsi modifié .
Article 1er ter (art. 360 du code civil) - Autorisation de l'adoption simple de l'enfant du conjoint, antérieurement adopté par lui
Cet article, introduit en commission, à l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des lois et de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, tend à autoriser l'adoption simple de l'enfant du conjoint, lorsqu'il a déjà fait l'objet d'une adoption simple ou d'une adoption plénière.
Il répond à la même préoccupation que l'article précédent : rendre possible des adoptions intrafamiliales, au sein de familles homoparentales dans lesquelles la filiation des enfants n'est établie, par la voie de l'adoption, qu'à l'égard de l'un des parents.
L'adoption simple, qui conserve la filiation d'origine, pourrait paraître plus ouverte que l'adoption plénière, puisqu'elle est toujours possible, même en cas de filiation déjà établie, sous réserve du consentement des parents biologiques 103 ( * ) .
Toutefois, la même incertitude existe sur la possibilité d'adoptions simples successives 104 ( * ) . Cette incertitude est d'autant plus préjudiciable aux intérêts des familles que plusieurs pays étrangers, source d'un nombre important d'adoption internationale n'acceptent que l'adoption simple en cette matière. Tel est notamment le cas d'Haïti : on ne peut alors exclure qu'un enfant adopté sous cette forme par une personne célibataire ne puisse l'être ensuite, si cette dernière venait à se marier, par son conjoint.
Par ailleurs, aux termes du deuxième alinéa de l'article 360 du code civil, l'adoption simple, après une adoption plénière, n'est autorisée que s'il est justifié de motifs graves : il s'agit là, selon la formule du doyen Carbonnier d'une « solution de rebond » : « après une plénière qui a mal tourné, l'adopté peut être admis à repartir dans une adoption simple » 105 ( * ) . Cette restriction exclut qu'une adoption simple succède à une adoption plénière pour un autre motif.
Dans l'intention de ses auteurs, le présent article vise à remédier à ces deux situations, d'une part, en autorisant l'adoption simple de l'enfant du conjoint déjà adopté par lui en la forme simple et, d'autre part, en permettant à une adoption simple au bénéfice du conjoint d'intervenir après une adoption plénière.
Or, il semble, comme précédemment, que le dispositif proposé dépasse largement ce simple objet.
Aujourd'hui, une adoption simple prononcée sur l'échec d'une adoption plénière est susceptible de réunir, sur la tête du même enfant, quatre liens de filiations différents : les deux premiers, résultant de l'adoption plénière, et les deux derniers, créés par l'adoption simple 106 ( * ) . Cette pluri-parentalité est toutefois justifiée par des motifs graves, qui signalent l'échec de la première adoption et montrent qu'elle n'entre pas en concurrence avec la seconde.
Dans le dispositif proposé, rien n'interdirait qu'il en aille de même : il suffirait pour cela que l'enfant ait fait l'objet d'une adoption plénière conjointe par deux époux, puis qu'après leur séparation, chacun ait réclamé, pour son nouveau conjoint, le bénéfice d'une adoption simple 107 ( * ) .
Pourrait ainsi s'organiser, sans qu'il soit justifié de motifs graves, une pluri-filiation rassemblant autour du même enfant deux couples et quatre adultes, et provoquant un éclatement des attributaires de l'autorité parentale.
De la même manière, autoriser, sans plus de précision, l'adoption simple de l'enfant du conjoint, lorsque celui-là aurait déjà fait l'objet d'une adoption simple conjointe pourrait permettre, sans qu'il soit besoin de justifier de motifs particuliers, d'organiser autour d'un couple pivot ayant adopté l'enfant à l'origine, deux adoptions simples par les nouveaux conjoints de chacun des parents.
De telles configurations joueraient d'ailleurs indifféremment dans le cadre de couples de même sexe ou de sexe différent.
Votre rapporteur souligne que la question de la pluri-parentalité et du statut du beau-parent, qui concerne toutes les familles recomposées, est une question importante, qui mérite une réflexion approfondie sur la filiation et l'autorité parentale . L'examen prochain d'un projet de loi sur la famille en fournira l'occasion.
Dans le cadre de ce texte il lui semble préférable de restreindre le dispositif aux seuls cas où la première adoption a été effectuée par une personne seule, ce qui constitue la principale préoccupation à l'origine du présent article.
À son initiative, la commission des lois a par conséquent adopté un amendement en ce sens.
Votre commission a adopté l'article 1 er ter ainsi modifié .
Article 1er quater (supprimé) (art. 365 du code civil) - Principe de l'exercice en commun de l'autorité parentale en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint
Cet article, résultant d'un amendement du rapporteur, adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale, vise à poser le principe d'un exercice en commun de l'autorité parentale en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint.
L'article 365 du code civil pose la règle selon laquelle l'adoptant en la forme simple est seul investi à l'égard de l'adopté de tous les droits d'autorité parentale.
Cette règle reçoit une exception pour l'adoption de l'enfant du conjoint, qui distingue entre l'attribution et l'exercice de l'autorité parentale. Cette autorité appartient concurremment aux deux. Mais le parent d'origine en conserve seul l'exercice, sauf à ce que les deux époux, par une déclaration conjointe au greffier en chef du tribunal de grande instance, demandent un exercice en commun.
Le présent article supprime cette distinction et pose le principe général d'un exercice en commun de l'autorité parentale. Les époux qui souhaiteraient y déroger devraient saisir le juge aux affaires familiales aux fins d'homologation de la convention par laquelle ils organiseraient différemment les modalités d'exercice de cette autorité.
L'objet de cette modification est de faciliter l'exercice en commun de l'autorité parentale en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint.
L'avantage retiré vaut-il les inconvénients éventuels de cette solution ?
Le droit en vigueur n'interdit nullement l'exercice en commun de l'autorité parentale. Il le soumet seulement à une formalité minime, puisqu'il s'agit d'une simple déclaration auprès du greffe, qui est négligeable par rapport à celles qu'engage la procédure d'adoption simple au terme de laquelle elle intervient.
À titre de comparaison, la saisine du juge aux affaires familiales, qui n'est pas le juge de l'adoption, contraindra les époux à une procédure d'homologation plus formelle et plus longue.
En outre, posant le principe d'un exercice réservé au parent d'origine, la rédaction actuelle de l'article 365 du code civil s'adapte parfaitement à la réalité de l'adoption simple d'un enfant mineur.
Les chiffres de l'adoption simple en 2007 L'enquête « Adoption » du ministère de la justice établissait qu'en 2007, 9 412 personnes avaient été adoptées en la forme simple L'adoption internationale (1,7 %) et l'adoption nationale non familiale (3,4 %) représentent à peine 5 % du total. La quasi-totalité de ces adoptions (95 %) correspondent en effet à des adoptions intrafamiliales, principalement (92 %) l'adoption de l'enfant du conjoint actuel (79,5 %) ou d'un ex-conjoint ou d'un conjoint décédé (8 %). Les adoptés intrafamiliaux sont relativement âgés, puisque le jugement intervient en moyenne lorsqu'ils ont 33,6 ans. 13 % (environ 1160) sont mineurs, 87 % sont majeurs. Source : Secrétariat général du ministère de la justice, Les adoptions simples et plénières en 2007 , juin 2009. |
Beaucoup n'interviennent que tardivement et n'ont d'autre vocation que symbolique et successorale, ni l'adoptant ni le parent d'origine ne souhaitant alors un exercice en commun de l'autorité parentale.
Ainsi, selon les chiffres fournis à votre rapporteur par le ministère de la justice, entre 2004 et 2011, le nombre de déclarations conjointes d'exercice de l'autorité parentale a oscillé entre 9 et 22 demandes par an, ce qui représente moins de 2 % des adoptions simples de mineurs : les demandes d'exercice conjoint de l'autorité parentale sont très faibles et ne sauraient justifier une inversion de la règle actuelle.
En outre, cette préférence donnée au parent d'origine manifeste le privilège qui lui est reconnu : il ne s'agit pas d'une adoption plénière qui supprime toute référence à la famille d'origine et traite également les deux parents adoptifs, mais bien d'une adoption simple particulière, qui, dans le cas général, conserve au parent auprès duquel l'enfant vit depuis sa naissance, une priorité sur celui qui ne le connaît que par son truchement.
D'ailleurs, ce faisant, le droit en vigueur traite de la même façon l'adoptant simple et le parent qui reconnaît tardivement son enfant : l'article 372 du code civil prévoit ainsi que le premier parent reste seul investi de l'exercice de l'autorité parentale, sauf déclaration conjointe des père et mère adressée au greffier en chef du TGI ou décision du juge aux affaires familiales. Le dispositif proposé par les députés créerait une distorsion entre ces deux régimes.
Enfin, même s'il consent à l'adoption de son enfant par son conjoint, le parent peut souhaiter, pour des raisons légitimes, s'en tenir à l'attribution en commun de l'autorité parentale, sans son exercice en commun : l'adoption se limite alors à des obligations et des engagements envers l'enfant, pour sa protection, sans s'étendre à un pouvoir de décision sur son avenir ou son éducation. Les statistiques relatives aux demandes d'exercice en commun corroborent cette analyse.
Certains parents peuvent ainsi juger raisonnable de réserver la possibilité d'une progression dans l'accès de l'adoptant à la décision parentale, afin d'éprouver la force du lien ou éviter qu'en cas de séparation précipitée, le divorce et le conflit éventuel s'alourdissent de considérations sur la résidence de l'enfant ou les modalités d'exercice de l'autorité parentale.
L'ensemble de ces raisons motivent, aux yeux de votre rapporteur, la suppression du présent article.
Votre commission a supprimé l'article 1 er quater .
Article 1er quinquies (art. 353-2, 371-4 et 373-3 du code civil et L. 351-4 du code de la sécurité sociale) - Maintien des liens de l'enfant, en cas de séparation, avec le tiers qui a résidé avec lui et l'un de ses parents et participé à son éducation
Cet article, adopté en séance à l'initiative de notre collègue député Erwann Binet, rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale et avec l'avis favorable du Gouvernement, vise à permettre le maintien de relations personnelles de l'enfant avec son second parent, à l'égard duquel il n'a pas de filiation établie, en cas de séparation du couple.
La préoccupation à l'origine du présent dispositif est susceptible de renvoyer à deux situations différentes : la rupture des liens de l'enfant avec celui qui l'a élevé - seule traitée par le présent article - et l'éviction du premier parent, non reconnu par la loi, par un nouveau parent légal - qui justifierait un dispositif spécifique.
•
La protection des liens de l'enfant
avec celui qui l'a élevé
La situation visée par l'auteur de l'amendement à l'origine du présent article, est celle du parent « social » ou « non statutaire ». En effet, par définition, l'adoption intrafamiliale, qui permettra de concrétiser juridiquement, au sein des familles homoparentales, les liens existants entre le deuxième parent et l'enfant du couple, ne concernera que les familles encore unies à la date d'entrée en vigueur de la loi. Le second parent des couples séparés continuera d'être juridiquement considéré comme un tiers vis-à-vis d'un enfant qui l'a pourtant traité comme un père ou une mère, à égalité avec son autre parent.
Pour remédier à cette situation, le présent article introduit à l'article 373-3 du code civil, consacré à l'intervention des tiers en cas de séparation des parents, lorsque l'un d'entre eux est privé de tout ou partie de l'autorité parentale, un alinéa autorisant le juge à prendre les mesures susceptibles de garantir le maintien de liens personnels entre l'intéressé et l'enfant, lorsque l'intérêt de l'enfant le commande 108 ( * ) . Il donne du parent « non statutaire » la définition suivante : « celui qui a résidé, de manière stable, avec [l'enfant] et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et avec lequel il a noué des liens affectifs durables ».
Ce dispositif appelle plusieurs observations.
La définition retenue recouvre aussi bien le parent non statutaire que le beau-parent, voire le demi-frère, la demi-soeur ou tout tiers qui, résidant au même domicile, se seraient fortement impliqués dans l'éducation de l'enfant et auraient noué avec lui une affection durable.
Ce faisant, son effet dépasse le strict objet qui motive le présent article à l'origine. Elle renvoie à une réflexion plus générale, qui devra être poursuivie dans le cadre du projet de loi sur la famille annoncé par le Gouvernement.
Par ailleurs, le dispositif proposé semble déjà largement satisfait par le droit en vigueur, à la faveur d'une jurisprudence qui prend plus nettement en compte les évolutions de la famille.
L'article 371-4 du code civil impose au juge aux affaires familiales, si tel est l'intérêt de l'enfant, de fixer les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non.
Sur cette base, les magistrats judiciaires ont ainsi accordé à l'ex-compagne de la mère biologique un droit de visite et d'hébergement au motif qu'il était de l'intérêt de l'enfant que soit préservée une stabilité dans ses relations affectives et sociales avec ceux qui ont décidé, dès avant sa conception, d'être ses parents et qui en ont assumé les obligations et la responsabilité depuis sa naissance 109 ( * ) .
De la même manière, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nanterre a refusé de supprimer une mesure de délégation d'autorité parentale dont bénéficie l'ex-compagne de la mère, en dépit de la séparation des parents 110 ( * ) . De même, la cour d'appel de Paris a confirmé un jugement organisant, postérieurement à la séparation du couple, une délégation partielle de cette autorité 111 ( * ) .
Votre rapporteur observe que, si la généralité des termes employés par l'article 371-4 du code civil n'apporte pas toujours une réponse satisfaisante à ceux qui souhaiteraient pouvoir identifier la situation particulière dont ils relèvent, elle est aussi ce qui garantit que le juge puisse adapter sa décision, conformément à l'intérêt de l'enfant, à toutes les configurations familiales envisageables.
L'insertion du dispositif proposé à l'article 373-3 du code civil est-elle vraiment adaptée ? Le paragraphe 4, de la section I, du titre IX sur l'autorité parentale est certes consacré à l'intervention des tiers. Mais, cette intervention est alors conçue en suppléance de la défaillance, volontaire ou involontaire, des parents, ce qui ne correspond pas à la situation visée dans le présent article. L'article 371-4 précité, qui traite aussi du cas particulier des ascendants de l'enfant, accueillerait plus pertinemment un tel dispositif.
Pour l'ensemble de ces raisons, après avoir constaté que le droit en vigueur, tel qu'appliqué par les tribunaux, était susceptible d'apporter une protection efficace aux liens que les parents non statutaires, au même titre que les beaux-parents, auraient noué avec l'enfant qu'ils ont élevé jusqu'à la séparation du couple, votre rapporteur a proposé à votre commission, qui l'a adopté, un amendement ayant deux objets :
- la suppression du dispositif proposé à l'article 373-3 du code civil, afin de s'en tenir au dispositif général et éprouvé de l'article 371-4 du code civi l. Toute réflexion plus poussée sur le statut du tiers non-parent mérite plutôt d'être conduite dans le cadre général du projet de loi sur la famille annoncé par le Gouvernement ;
- la reprise, à titre de précision, à l'article 371-4, de la définition proposée par l'Assemblée nationale, qui peut s'appliquer autant au « parent social » qu'au « beau-parent ». Cette précision imposera aux magistrats d'examiner plus particulièrement cette situation, sans lier d'aucune manière leur appréciation de ce qui est conforme à l'intérêt de l'enfant.
•
Le risque d'éviction du parent
non reconnu par la loi
L'article 1 er quinquies ne répond pas à une des préoccupations légitimes des associations de défense des droits des familles homoparentales, sur l'un des effets indirects de la présente loi.
Lors de leur audition par votre commission, les représentants de l'association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL) se sont inquiétés de l'éviction éventuelle du parent « social », par le nouveau conjoint du parent à l'égard duquel la filiation de l'enfant est établie, grâce à l'adoption intrafamiliale . Dans des situations de séparation conflictuelle, le seul parent reconnu par la loi aurait ainsi la faculté d'écarter son ex-compagne ou compagnon, en consentant à l'adoption de son enfant par son nouveau conjoint.
De telles situations ne seront sans doute pas majoritaires, mais l'intérêt de l'enfant et celui de son parent, qui n'aura pu, jusqu'à l'adoption de la présente loi, assurer juridiquement leur lien affectif et filiatif, appelle toute la vigilance du législateur.
Or, l'éviction du parent non reconnu par la loi procède de l'adoption. C'est donc au moment de l'examen de la demande d'adoption ou lorsqu'elle sera contestée, que le juge pourra apprécier si celle-ci est bien conforme à l'intérêt de l'enfant, et si l'antériorité et la force des liens noués avec son premier parent n'imposent pas de la rejeter .
Les voies de recours contre les jugements d'adoption sont limitées. L'article 353-2 dispose ainsi que la tierce opposition n'est recevable qu'en cas de fraude ou de dol imputable aux adoptants.
Cette procédure, cependant, paraît tout à fait adaptée à la situation éventuelle du second parent évincé : le risque est grand, en effet, qu'il n'ait pas été alerté du procès d'adoption et n'ait pu intervenir à ce stade. Or, justement, la tierce opposition constitue une voie de recours extraordinaire, ouverte, pendant trente ans, à celui qui n'a été ni partie, ni représenté à une instance qui lui porte préjudice. Elle lui permet d'obtenir si sa prétention est jugée fondée, l'annulation de la décision pour ce qui le concerne, voire son annulation complète si les conséquences de la décision sont jugées indivisibles de son préjudice. Tel serait le cas pour le prononcé de l'adoption.
Cette procédure a d'ailleurs été utilisée par des grands-parents qui souhaitaient maintenir de forts liens avec l'enfant pour obtenir l'annulation du jugement d'adoption. En effet, le tribunal a considéré que le fait que les adoptants lui aient sciemment caché le voeu des grands-parents de l'adopté, était constitutif d'un dol, dans la mesure où cette circonstance aurait pu influer sur sa décision 112 ( * ) .
La situation d'un second parent évincé serait proche : s'il n'a pas de droit absolu à s'opposer à l'adoption par le conjoint du parent biologique, de l'enfant qu'il a élevé, il doit néanmoins avoir la certitude que le juge aura été informé de cet état de fait. La dissimulation de cette circonstance, par le parent légal, devrait pouvoir être assimilée à un dol.
Votre rapporteur souligne, toutefois, qu'il ne faut pas, pour autant, ouvrir trop largement la tierce opposition, au risque sinon de placer les adoptions dans une situation d'insécurité juridique dangereuse et contraire à l'intérêt des adoptés.
Pour cette raison, il a proposé à votre commission un amendement qu'elle a adopté, qui complète l'article 353-2 du code civil, afin d'établir que constitue un dol imputable aux adoptants la dissimulation au tribunal du maintien des liens entre l'enfant adopté et un tiers, conformément à une décision rendue par le juge aux affaires familiales sur le fondement de l'article 371-4 du code civil.
En effet, cette décision du juge aux affaires familiales, matérialise et valide juridiquement, dans l'intérêt de l'enfant, la persistance des liens qu'il entretient avec un tiers. Il pourra notamment s'agir des grands-parents ou du parent social ou beau-parent tel que défini par la nouvelle rédaction de l'article 371-4 proposée au présent article.
Votre rapporteur rappelle enfin que l'accès à la tierce opposition n'est pas une garantie d'obtenir l'annulation de l'adoption : celle-ci peut être maintenue par le juge, parce qu'il la jugera seule conforme à l'intérêt de l'enfant.
Votre commission a adopté l'article 1 er quinquies ainsi modifié .
CHAPITRE II - DISPOSITIONS RELATIVES AU NOM DE FAMILLE
L'intitulé de ce chapitre, qui visait initialement aussi les dispositions relatives à l'adoption a été restreint à celles relatives au nom de famille, par amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, par coordination avec la création d'un chapitre I er bis spécialement dédié à ces dispositions.
Article 2 A (nouveau) (art. 225-1 [nouveau] du code civil) - Possibilité d'usage, par l'un des époux, du nom de l'autre époux
Cet article additionnel a été introduit dans le texte de la commission par l'adoption d'un amendement de notre collègue Cécile Cukierman.
Il crée un nouvel article 225-1 dans le code civil qui dispose que « chacun des époux peut porter, à titre d'usage, le nom de l'autre époux, par substitution ou adjonction à son propre nom dans l'ordre qu'il choisit. »
Jusqu'à présent, les règles qui gouvernent le nom d'usage entre époux, n'étaient évoquées qu'incidemment à l'occasion des textes sur le divorce (article 264) et la séparation de corps (article. 300).
Cependant, si ces règles n'étaient pas explicitement consacrées au sein des dispositions du code civil relatives au mariage, en pratique, elles s'appliquaient déjà pour partie.
En effet, le paragraphe 674 de l'instruction générale de l'état civil (IGREC) prévoit que si le mariage ne modifie pas le patronyme de chaque époux, qui lui est indéfectible 113 ( * ) , il acquiert le droit d'user du nom de son conjoint. Mais, ce texte opère une distinction entre le mari et la femme. Le mari peut user du nom de sa femme mais uniquement par adjonction au sien, alors que l'épouse peut choisir d'user du nom de son mari par substitution ou adjonction au sien.
Cette disposition de nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen est donc bienvenue. Elle permet, d'une part, de consacrer explicitement les règles relatives à l'usage par un époux du nom de l'autre époux et, d'autre part, de mettre fin à la distinction opérée entre mari et femme, qui ne peut logiquement s'appliquer aux couples de personnes de même sexe, et qui ne se justifie plus pour les couples de personnes de sexe différent.
Votre commission a adopté l'article additionnel 2 A ainsi rédigé .
Article 2 (art. 311-21, 311-23, 357 et 357-1 du code civil) - Dévolution du nom de famille en cas de filiation légalement établie et d'adoption plénière
Cet article tire les conséquences, pour l'attribution du nom de famille, de l'ouverture de l'adoption plénière aux époux de même sexe, en prévoyant, que par défaut, ou en cas de désaccord, le nom attribué à l'enfant est composé des deux noms des parents, dans l'ordre alphabétique. À l'initiative de Madame la députée Corinne Narassiguin, il étend cette règle aux autres filiations légalement établies.
1. Les règles de dévolution du nom de famille
Il y a dix ans, les règles de dévolution du nom de famille ont été profondément modifiées par deux lois successives, du 4 mars 2002 114 ( * ) et du 18 juin 2003 115 ( * ) . L'expression « nom de famille » a remplacé celle de « nom patronymique » et une plus grande liberté a été donnée aux parents pour choisir le nom de leurs enfants.
En cas de filiation légalement établie 116 ( * ) , l'article 311-21 du code civil ouvre aux parents le choix suivant : soit le nom du père, soit le nom de la mère, soit leurs deux noms accolés dans l'ordre choisi par eux dans la limite d'un nom de famille pour chacun d'eux. Les parents font connaître à l'officier d'état civil leur décision, par déclaration conjointe.
Par défaut, s'ils ont omis d'effectuer une déclaration conjointe, ou s'ils n'ont pu s'accorder, l'enfant prend le nom de celui de ses parents à l'égard duquel sa filiation est établie en premier lieu et le nom de son père si sa filiation est établie simultanément à l'égard de l'un et de l'autre.
La dévolution subsidiaire du nom du parent à l'égard duquel la filiation est établie en premier lieu vise à préserver la possibilité, pour la mère, en procédant à une reconnaissance prénatale, de transmettre son nom à l'enfant, même en cas de désaccord avec le père. Introduite par la loi précitée du 18 juin 2003, en correction de celle du 4 mars 2002, elle était motivée par le souci de rééquilibrer en faveur de la mère les règles de dévolution du nom de famille. En effet, une fois la filiation établie à l'égard des deux parents au jour de la déclaration de naissance, l'absence de déclaration conjointe de nom de famille profitait au père, qui pouvait transmettre son nom.
La seconde règle de dévolution subsidiaire, en cas de filiation établie concomitamment, constitue la dernière traduction juridique de la faveur traditionnelle dont bénéficie le nom paternel.
Une fois le nom de famille choisi, il s'impose à tous les enfants du couple à venir, afin de garantir l'unité de la fratrie.
Lorsque l'enfant n'a sa filiation établie qu'à l'égard d'un seul parent, il en prend le nom. Ceci n'interdit toutefois pas, s'il est reconnu ensuite par son deuxième parent, que ces père et mère choisissent soit le nom de l'autre parent, soit leurs deux noms accolés, sous la réserve du nom éventuel de la fratrie. En l'absence d'accord entre eux, l'enfant conserve son nom d'origine 117 ( * ) .
Une règle générale s'impose absolument, pour éviter des noms triples ou quadruples : si chacun des parents décide de transmettre son nom, celui qui possède un double nom ne peut transmettre qu'un des deux, à sa discrétion.
En cas d'adoption plénière par deux époux , les mêmes règles s'appliquent, puisque l'article 357 du code civil renvoie expressément à l'article 311-21 du même code. C'est aussi le cas pour l'adoption de l'enfant du conjoint 118 ( * ) . Toutefois, il convient de souligner la spécificité de la procédure dans ce cas : le jugement d'adoption mentionne le nom de famille de l'enfant 119 ( * ) . Les époux sont donc conduits, dans le cours du procès d'adoption, à faire connaître au juge leur décision sur ce point, soit qu'ils établissent une déclaration commune, soit qu'ils s'en remettent à la règle subsidiaire.
Une règle particulière doit être signalée, celle de la « dation de nom » : le mari ou la femme qui adopte seul un autre enfant que celui de son conjoint, peut demander au tribunal que l'adopté reçoive, comme nom de famille, celui de son conjoint, substitué ou accolé au sien. L'accord de l'intéressé est nécessaire. S'il est décédé ou dans l'impossibilité d'exprimer sa volonté, le tribunal apprécie l'opportunité de la demande après avoir le cas échéant consulté les proches du défunt.
2. Le projet de loi initial et la modification adoptée par les députés
En l'absence de décision commune des conjoints, l'enfant adopté reçoit, par application de la règle subsidiaire, le nom du père adoptif. Cette disposition n'aurait pu, par principe, s'appliquer au cas d'époux de même sexe.
Le Gouvernement a donc prévu dans le projet de loi initial de substituer à cette règle subsidiaire, une autre règle : par défaut, l'enfant prendrait le premier nom de famille de chacun des époux, accolés dans l'ordre alphabétique.
Le présent article supprimait aussi, dès cette première rédaction, la faculté offerte à l'adoptant marié qui adopte seul, d'attribuer à l'enfant le nom de son conjoint. La Chancellerie justifie cette suppression par la désuétude de la procédure de dation de nom, qui n'est plus mise en oeuvre aujourd'hui.
L'article 2 intègre ces modifications en procédant à une réécriture complète de l'article 357 du code civil, qui reprend, sauf pour la règle subsidiaire, les principales dispositions du régime général.
Cette réécriture complète met fin au régime transitoire dont bénéficiaient jusqu'alors les enfants nés avant le 1 er janvier 2005, qui continuaient de relever des règles antérieures à la loi du 4 mars 2002. Ceci permettra de garantir l'unité de la fratrie, puisque les parents pourront choisir un nom de famille commun pour tous les enfants nés avant ou après cette date. Une telle situation est susceptible de correspondre à celle des familles homoparentales déjà existantes, qui établiront par l'adoption le second lien de filiation jusque là manquant, ce qui justifie la fin de ce régime transitoire.
Par coordination, s'agissant des adoptions internationales, le renvoi de l'article 357-1 du code civil à l'article 311-21 du même code est supprimé au profit d'un renvoi à l'article 357 120 ( * ) . La référence à cet article est par ailleurs introduite, par coordination aussi, aux articles 311-21 et 311-23.
Le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale n'avait proposé que des modifications d'ordre rédactionnel. Mais, avec son avis favorable, la commission des lois a adopté un amendement de Mme la députée Corinne Narassiguin et plusieurs de ses collègues, qui a étendu aux filiations non-adoptives la suppression de la préférence donnée, par défaut, au nom du père.
Cet amendement était motivé par une double préoccupation :
- garantir l'égalité, dans la dévolution du nom de famille, entre les enfants adoptés et les enfants naturels, en les soumettant au même régime ;
- mettre fin au privilège donné au nom du père, et garantir ainsi une complète égalité entre les sexes pour la transmission du nom.
La rédaction retenue fait disparaître par conséquent, à l'article 311-21 du code civil, toute référence à l'attribution du nom de famille du parent à l'égard duquel la filiation a été établie en premier lieu. Cette règle était censée rééquilibrer, en faveur de la mère, ce privilège. Les députés ayant fait le choix d'un dispositif qui interdit à l'un des sexes de prévaloir sur l'autre, la disposition en cause n'avait plus lieu d'être.
La solution ainsi préconisée par les députés correspond sensiblement à celle retenue initialement par l'Assemblée nationale lors de l'examen de la loi précitée du 4 mars 2002. À l'époque, le Sénat avait obtenu le rétablissement de la priorité donnée par défaut au nom paternel.
Ce nouveau dispositif a donné lieu, dans le cadre du présent texte, à un débat nourri en séance publique, autour des mêmes arguments que dix ans plus tôt : pour les uns, l'égalité entre les enfants et entre les pères et mères ; pour les autres, l'usage, la simplicité, la tradition et la nécessité d'équilibrer socialement les filiations paternelles, plus incertaines, et les filiations maternelles, irréfutables.
La garde des sceaux, Mme Christine Taubira, tout en défendant l'objectif d'égalité porté par l'amendement, a reconnu combien le sujet était sensible, et, attentive aux inquiétudes qu'il suscitait, a émis le voeu qu'il puisse être retravaillé et précisé au cours de la navette parlementaire.
3. La position de votre commission
L'exigence d'égalité entre les sexes et le souci de ne pas traiter différemment les enfants adoptés des autres enfants dans l'attribution de leur nom de famille, sont deux raisons puissantes au soutien de la rédaction retenue par les députés, qui pourraient justifier de remettre en cause un usage ancien, maintenu en 2002 et 2003.
En 2004, la Cour européenne des droits de l'homme a ainsi jugé contraire aux articles 8 (droit au respect de sa vie privée et familiale) et 14 (prohibant toute discrimination fondée sur le sexe) de la convention européenne des droits de l'homme, la disposition du droit civil turc qui imposait aux femmes mariées comme nom de famille, celui de leur époux 121 ( * ) .
Elle a constaté qu'un « consensus se dessin[ait] au sein des États contractants du Conseil de l'Europe quant au choix du nom de famille des époux sur un pied d'égalité ». Examinant la question « de savoir si l'unité de la famille doit être manifestée par un nom de famille commun et, en cas de désaccord entre les époux sur celui-ci, si le patronyme d'un époux peut être imposé à l'autre », elle a observé sur ce point que, « selon la pratique des États contractants, il est parfaitement concevable que l'unité de la famille soit préservée et consolidée lorsqu'un couple marié choisit de ne pas porter un nom de famille commun » et en a conclu que « l'objectif de traduire l'unité de la famille par un nom de famille commun ne saurait justifier la différence de traitement fondée sur le sexe ».
Même si cette jurisprudence ne porte que sur le nom commun des époux, et non sur le nom de famille donné aux enfants 122 ( * ) , et si elle ne sanctionne que la primauté donnée au mari en cas de désaccord entre les époux, elle signale un mouvement général en Europe, de suppression des privilèges du patronyme masculin et d'égalité entre les père et mère.
Votre commission prend la mesure de ce mouvement comme de la nécessité de faire progresser l'égalité entre les hommes et les femmes pour la dévolution aux enfants du nom de famille.
Toutefois, elle constate que la solution proposée par les députés suscite des interrogations légitimes.
La première a trait à l'effet concret d'une telle règle subsidiaire.
En privilégiant l'ordre alphabétique, elle introduit un biais de sélection des noms de famille : si, comme aujourd'hui, l'absence de déclaration conjointe prédomine, à la deuxième génération, l'enfant qui aura reçu ce double nom transmettra le premier, qui a l'avantage dans l'ordre alphabétique. Au fil des générations, les noms de famille désavantagés dans l'ordre alphabétique disparaîtraient au profit de ceux mieux placés, en tête d'alphabet 123 ( * ) .
Plus généralement, au cours des auditions, plusieurs intervenants, se sont fait l'écho des inquiétudes soulevées par la nouvelle règle subsidiaire.
M. François Fondard, président de l'union nationale des associations familiales a ainsi rejeté la modification introduite par les députés : « Le projet de loi prévoyait que les enfants adoptés prendraient les noms de leurs deux parents, dans l'ordre alphabétique ; afin d'éviter une rupture entre filiation biologique et filiation adoptive, l'Assemblée nationale vient d'étendre ce changement à toutes les familles. Cette transformation majeure n'a fait l'objet d'aucune étude préalable et n'a pas sa place dans ce texte ; nous demandons au Sénat de revenir sur ce point ».
Le docteur Pierre Levy-Soussan, a dénoncé les conséquences, pour tous les couples, d'une modification introduite, à l'origine, pour les seuls parents de même sexe : « on voit bien la difficulté quand on aborde la question des noms propres : pour s'en sortir, on propose de juxtaposer les deux noms pour tout le monde. Pour nous, psychiatres, c'est une aberration. La transmission du nom du père est une manière, pour le père, de compenser le lien charnel de l'enfant avec sa mère. Si on donne le choix au couple, qui choisira ? ».
Votre commission relève, dans le même temps, qu'en dépit des lois de 2002 et 2003, la transmission du nom du père aux enfants demeure un usage ancré dans les familles.
Dans de nombreux cas, notamment lorsqu'ils sont mariés et que la filiation paternelle est présumée, les parents s'abstiennent de toute déclaration conjointe, marquant ainsi implicitement leur accord avec la règle subsidiaire d'attribution du patronyme aux enfants.
Le ministère de la justice 124 ( * ) a ainsi indiqué à votre rapporteur que, sur les 826 786 naissances enregistrées en France en 2011, seulement 143 582 (soit 17 % du total) faisaient l'objet d'une déclaration conjointe des deux parents : la règle subsidiaire est la règle majoritaire, puisqu'elle s'applique dans plus de 80 % des cas, au bénéfice, principalement, du patronyme masculin 125 ( * ) .
Par ailleurs, lorsque les parents s'entendent pour une déclaration conjointe, dans plus de 60 % des cas (88 379), ils choisissent alors comme nom de famille celui du père.
Ainsi, les parents, dans la très grande majorité des cas, choisissent volontairement ou s'accommodent sans difficulté de la transmission à l'enfant du seul nom du père : au total, 685 140 enfants ont pris le nom de leur père, soit près de 83 % des enfants nés en 2011.
Les chiffres observés en 2012 confirment ces proportions, plus nettes encore dans le cas des adoptions plénières : le service central d'état civil indique ainsi qu'au 19 décembre 2012, sur 2502 adoptions plénières transcrites sur ses registres, et alors même que les adoptants doivent se prononcer sur le nom de famille dans le cadre du jugement d'adoption, seulement 161 enfants adoptés portent un double nom, soit à peine 6,5 %.
Peut-on raisonnablement regarder cette tendance comme illégitime, et exclure qu'elle réponde au voeu tacite de conserver un usage ancien ?
Si la loi peut utilement devancer les moeurs, en ouvrant de nouvelles perspectives, elle s'honore aussi à respecter des habitudes consacrées, confiant plus sûrement à la liberté de chacun le soin de les faire progresser.
Enfin, le dispositif adopté par les députés est le seul, de tout le projet de loi, qui modifierait sensiblement le droit applicable aux couples hétérosexuels.
Une solution médiane pourrait être envisagée qui concilierait l'exigence légitime d'égalité et les pratiques observées, sans modifier sensiblement le droit applicable aux familles par le sang.
Elle consisterait à distinguer, dans la règle subsidiaire, le défaut de déclaration conjointe, du désaccord entre les parents .
Un tel désaccord paraît par hypothèse exclu, dans le cas d'une adoption plénière conjointe, puisque l'engagement des deux époux pour l'adoption ne serait pas compatible avec un conflit sur le nom de famille. D'ailleurs, il serait alors au pouvoir du juge prononçant l'adoption de trancher pour une solution plutôt qu'une autre.
Contrairement à ce qui peut advenir dans le cas de filiations biologiques, l'inertie des époux adoptants est nécessairement volontaire et ne saurait résulter d'un manque d'information, puisque le juge aura exigé des intéressés qu'ils se prononcent sur la question au cours du procès d'adoption.
La solution retenue par l'Assemblée nationale pour l'adoption plénière peut donc être conservée, la règle subsidiaire n'ayant pas vocation à régir la plus grande part des situations.
En revanche, tel ne serait pas le cas des filiations légalement établies.
En effet, des désaccords sont susceptibles d'apparaître dans le cas d'une filiation biologique, entre les parents séparés au moment de la naissance ou en conflit ouvert.
Il n'est alors pas souhaitable que le père puisse, par son désaccord, imposer son nom, pour l'enfant, à la mère : le signalement à l'officier d'état civil, par l'un des parents dès avant la naissance ou jusqu'à sa déclaration 126 ( * ) , d'un désaccord entre eux deux sur le nom de famille, l'obligerait alors à attribuer à l'enfant leurs deux noms accolés selon l'ordre alphabétique 127 ( * ) .
Tel n'est plus le cas, lorsque l'absence de déclaration conjointe résulte d'une inertie de la part des parents : on peut alors légitimement présumer qu'ils s'en remettent à l'usage traditionnel, et souhaitent que l'enfant reçoive le nom du père. La règle actuelle pourrait persister dans ce cas.
À l'initiative de votre rapporteur votre commission a adopté un amendement , mettant en oeuvre, pour la filiation biologique uniquement, la règle subsidiaire ainsi proposée.
Elle a par ailleurs rétabli la possibilité, qui profite généralement à la mère, pour le premier parent ayant reconnu l'enfant, de lui donner par priorité son propre nom en l'absence de choix conjoint. Toutefois, cette éventualité cèderait en cas de désaccord exprimé par l'autre parent.
L'adoption de cet amendement ne remet pas en cause l'exigence légitime d'égalité dans la dévolution du nom de famille : il garantit au contraire que l'un des sexes ne puisse imposer sa décision à l'autre. Votre rapporteur engage par ailleurs le Gouvernement à veiller à ce que les parents reçoivent une information pleine et entière, afin qu'ils décident en toute conscience du nom que recevra leur enfant.
Votre commission a adopté l'article 2 ainsi modifié .
Article 3 (art. 361 et 363 du code civil) - Dévolution du nom de famille en cas d'adoption simple
Cet article adapte les règles organisant la dévolution du nom de famille en cas d'adoption simple, à la situation des adoptants de même sexe et supprime toute discrimination en faveur de l'un ou l'autre sexe : à défaut d'accord entre les époux adoptants, l'adopté verrait adjoint à son nom, en seconde position, le premier de leurs noms selon l'ordre alphabétique.
1. Le droit en vigueur : l'adaptation des règles générales de dévolution du nom famille au principe d'adjonction du nom des adoptants, spécificité de l'adoption simple
L'adoption simple ne rompt pas la filiation antérieure : les règles de dévolution du nom de famille en portent la marque, puisqu'elles prévoient qu'en principe l'adopté conserve son nom de famille d'origine, auquel est ajouté celui des adoptants. La Cour de cassation rappelle toutefois que l'adopté majeur doit consentir à cette adjonction 128 ( * ) .
Deux cas particuliers sont distingués : l'adoption simple par une personne seule ou l'adoption conjointe.
Dans le premier cas, lorsque l'adoptant ou l'adopté portent un double nom de famille, le nouveau nom de l'adopté résulte de l'adjonction du nom de l'adoptant à son propre nom, dans la limite d'un nom pour chacun. Le choix appartient à l'adoptant, sous réserve du consentement de l'adopté, s'il est âgé de plus de treize ans. À défaut de choix ou en cas de désaccord, le nom conféré à l'adopté résulte de l'adjonction du premier nom de l'adoptant au premier nom de l'adopté.
Lorsque l'intéressé est adopté par deux époux, le nom adjoint est, à leur demande, soit celui du mari, soit celui de la femme, dans la limite d'un nom pour chacun d'eux, et, à défaut d'accord, le premier nom du mari.
Si l'adopté porte un double nom de famille, les adoptants décident du nom conservé par l'intéressé, qui doit cependant y consentir s'il a plus de treize ans. En cas de désaccord ou à défaut de choix, le nom des adoptants retenu est ajouté au premier nom de l'adopté.
En principe, le nom de l'adoptant suit celui de l'adopté, mais la Cour de cassation reconnaît au juge la possibilité de modifier cet ordre 129 ( * ) .
Le tribunal peut, à la demande de l'adoptant, substituer son nom à celui de l'adopté. Cette demande peut être formée postérieurement à l'adoption. En cas d'adoption conjointe, les époux choisissent soit le nom du mari, soit celui de la femme, soit leurs noms accolés dans l'ordre choisi par eux et dans la limite d'un seul nom pour chacun. L'adopté de plus de treize ans doit consentir à cette substitution du nom de famille.
2. Le projet de loi initial et la modification adoptée par les députés
En dehors de la spécificité de l'adjonction du nom de l'adoptant, l'adoption simple ne se distingue pas de l'adoption plénière pour la dévolution du nom de famille : le principe est le nom choisi conjointement par les époux, et la règle subsidiaire, à défaut de choix, la prévalence du nom masculin.
Cette règle subsidiaire était par nature incompatible avec l'adoption par deux époux de même sexe. Le présent article, qui procède à une réécriture complète de l'article 363 du code civil 130 ( * ) , la supprime au profit d'une règle par défaut prévue, à l'article précédent, pour l'adoption plénière : le nom adjoint à celui de l'adopté serait le premier nom des deux adoptants dans l'ordre alphabétique.
Il apporte aussi quelques précisions, sur la possibilité pour les adoptants de choisir l'ordre d'adjonction des noms ainsi que la faculté, pour le tribunal, de décider qu'en cas d'adoption de l'enfant du conjoint, celui-ci conserverait son nom d'origine. Il rappelle aussi que l'adopté majeur doit consentir à l'adjonction du nom de l'adoptant, et que celui âgé de plus de treize ans doit consentir au choix des adoptants sur les noms - sinon, la règle subsidiaire s'applique.
Le présent article procède par ailleurs à une coordination nécessaire du renvoi prévu à l'article 361 du code civil, vers l'article 357, compte tenu de la nouvelle rédaction qui lui est apportée à l'article 2.
Le texte adopté par les députés a conservé la rédaction initiale du texte, sous réserve de quelques amendements rédactionnels du rapporteur.
3. La position de votre commission
Conformément à la position qu'elle a adoptée pour l'article 2, votre commission a conservé la nouvelle règle subsidiaire mise en place par l'article 3 en matière d'adoption simple.
En effet, l'accord est la règle en la matière, puisque les parents d'origine doivent consentir à l'adoption et que la question du nom de famille est examinée lors du jugement d'adoption.
Votre commission a adopté l'article 3 sans modification .
CHAPITRE III - DISPOSITIONS DE COORDINATION
Articles 4 et 4 bis(art. 6-1 [nouveau], 34, 75, 108, 206, 371-1, 601, 718 [rétabli] et 757-1 du code civil) - Égalité de traitement entre les époux ou parents de même sexe et ceux de sexe différent - Habilitation du Gouvernement pour procéder aux coordinations nécessaires, hors code civil
Ces deux articles organisaient, à l'origine, l'ensemble des coordinations au sein du code civil et de l'ensemble de la législation, rendues nécessaires par l'ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe.
1. Le droit en vigueur
Le code civil porte en effet la marque du modèle de la famille biologique : les articles 75 et 108, sur la célébration du mariage et le domicile conjugale mentionnent le « mari » et la « femme ». Plusieurs dispositions relatives au régime juridique du mariage ou des régimes matrimoniaux, de l'adoption, de l'autorité parentale, de l'administration légale ou de la tutelle, de la protection juridique des majeurs, de l'usufruit, du droit des successions et des libéralités, et même du droit des obligations ou de la responsabilité civile, font, elles, référence au « père » et à la « mère » voire au « beau-père » et à la « belle-mère ».
De telles mentions auraient été susceptibles de fermer aux couples ou aux parents de même sexe l'accès aux droits et obligations concernés, si le législateur n'en avait pas disposé autrement.
Deux remarques s'imposent.
Le titre VII du livre premier, consacré à la filiation biologique, par opposition à la filiation adoptive, traitée au titre VIII, est en dehors du champ d'application du présent projet de loi : l'ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe est, comme on l'a vu précédemment, sans effet sur les modes d'établissement légaux de la filiation biologique. Par conséquent les références aux « père » et « mère », ou à la présomption de paternité dans le mariage interdisent que ces dispositions soient invoquées par le conjoint de même sexe que le premier parent, pour établir à son égard une filiation autre qu'adoptive. Le titre VII du livre premier n'a, par conséquent, pas vocation à être modifié par le présent projet de loi .
Les réformes récentes du code civil, prenant acte des évolutions sociologiques des familles et des modèles familiaux ont progressivement neutralisées les mentions qui auraient pu limiter l'accès à un droit à un sexe plutôt qu'à un autre . Ainsi le titre IX du livre premier sur l'autorité parentale évoque, la plupart du temps, les parents et place sur un strict pied d'égalité les pères et les mères. Les dispositions relatives au conjoint survivant ne distinguent pas selon le sexe de l'intéressé, ni celles relatives à l'ordonnance de protection en cas de violences conjugales. L'exigence d'égalité des droits et son corollaire, la lutte contre les discriminations, imprègnent ainsi progressivement le code civil .
2. Le projet de loi initial et les modifications apportées par l'Assemblée nationale
Le Gouvernement a fait le choix, à l'article 4 du projet de loi initial, d'une substitution exhaustive, à chaque fois que nécessaire, de termes généraux aux termes sexués du code civil, lorsque ceux-ci interdisaient l'accès des époux ou des parents de même sexe à certains droits ou obligations.
Cette solution - répétée, aux articles 5 à 21 pour le reste de la législation - conduisait, dans le seul code civil, à plus de 110 substitutions de termes, « parents » remplaçant « père » et « mère », « beaux-parents », « beau-père » et « belle-mère » ; « époux » ou « conjoints », se substituant à « mari » et « femme » ; et l'expression « parents » utilisée en droit des successions pour désigner les ascendants, descendants ou collatéraux, étant remplacée, pour éviter toute confusion, par ces derniers termes.
Le dispositif ainsi retenu a alimenté un large débat à l'Assemblée nationale sur la prétendue disparition de ces termes chargés de symbole, dans le code de référence de notre droit.
Or, même si cette substitution était importante, elle n'aboutissait pas, contrairement à ce qui était parfois indûment allégué, à faire disparaître du code civil les termes de « père » et « mère » .
Ceux-ci étaient notamment intégralement conservés au sein du titre VII du livre premier du code civil sur la filiation, car ils correspondaient alors à la réalité des filiations biologiques, non remise en cause par le projet de loi.
C'est ce que Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, interrogée sur ce point par M. le député Hervé Mariton, a rappelé lors de l'examen du texte en commission, ajoutant qu'« il serait bien misérable [de la part du Gouvernement] d'ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe et de n'en tirer aucune conséquence juridique, ce qui empêcherait dans la pratique les citoyens de jouir de leurs libertés et d'exercer leurs droits. Notre sens des responsabilités politiques nous amène donc à ne remplacer les mentions du père et de la mère que lorsque cela est strictement nécessaire. [...]
« C'est ce que j'ai dit lors de la séance des questions au Gouvernement [...] tout comme j'avais déjà dit, devant cette Commission, que nous sommes conscient de la charge symbolique des mots, et que le fait d'ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe ne changera strictement rien à la vie des couples hétérosexuels.
« J'ai même précisé qu'à chaque fois que cela avait été possible, nous n'avions pas modifié les termes. Et j'ai cité des exemples d'articles où ceux-ci étant au pluriel, nous les y avions laissés, parce qu'il n'y avait aucun risque d'ambiguïté. » 131 ( * )
Toutefois, le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale a souligné que ce choix, légitime dans son principe, ne résolvait pas toutes les difficultés pratiques .
D'une part des incohérences subsistaient dans les coordinations, puisque, par exemple, l'expression « père ou mère » qui était applicable aussi aux parents de même sexe avait parfois été remplacée par celle de parents 132 ( * ) , ce qui n'était pas nécessaire.
D'autre part, la substitution en cascade du terme « parents » aux termes « père et mère », et du terme « membre de la famille » au terme « parents » en droit des successions posait en réalité plus de difficulté qu'elle n'en résolvait.
En effet, en droit des successions, la notion de « parents » renvoie aux ascendants, descendants et collatéraux, jusqu'au sixième degré. La remplacer par l'expression « membre de la famille », qui ne fait l'objet d'aucune définition juridique, introduit un élément d'incertitude : le conjoint, les beau-fils et belle-fille ou, plus généralement, les alliés sont-ils membres de la famille ?
Les représentants du conseil supérieur du notariat entendus par notre collègue député Erwann Binet ont confirmé cet inconvénient.
Afin d'y remédier, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à l'initiative de son rapporteur et de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Mme Marie-Françoise Clergeau, un amendement substituant au dispositif prévu par le Gouvernement, deux dispositions générales d'application de la loi.
La première, inscrite à l'article 4, concerne le code civil. La seconde, introduite dans un nouvel article 4 bis , porte sur le reste de la législation.
Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale consiste à inscrire, en tête du livre premier du code civil, relatif aux personnes, ainsi qu'en tête du livre III relatif aux biens, deux nouveaux articles 6-1 et 718, précisant que les dispositions de chacun de ses livres s'appliquent également aux parents de même sexe, lorsqu'elles font référence aux père et mère ; aux aïeuls de même sexe, pour les aïeul et aïeule ; aux conjoints survivant de même sexe, pour les veuf et veuve ; ainsi qu'aux branches parentales, pour les branches paternelle et maternelle.
Il s'agit de dispositions interprétatives, qui guideront l'appréciation du juge dans la reconnaissance de l'égalité des droits entre les époux et les parents de même sexe et de sexe différent.
Le titre VII du livre premier est expressément exclu du champ d'application de ces dispositions, afin que ne soient pas remises en cause les règles régissant la filiation biologique.
La rédaction issue des travaux de l'Assemblée maintient quelques substitutions de termes nécessaires, comme celles concernant les conditions de célébration du mariage ou la définition du domicile conjugal aux articles 75 et 108 du code civil 133 ( * ) , l'obligation alimentaire des beaux-parents, à l'article 206, l'usufruit des père et mère sur les biens de leurs enfants, à l'article 601, la succession concurrente du conjoint survivant, en l'absence de descendants, avec les père et mère du défunt, à l'article 757-1.
Ce dispositif s'articule avec celui prévu à l'article 4 bis , qui impose la même règle d'interprétation 134 ( * ) pour l'ensemble de la législation, à l'exclusion du code civil, soumis à l'article 4.
Il a fait tomber, par voie de conséquence la plupart des articles de coordinations du projet de loi initial 135 ( * ) .
3. La position de votre commission : consacrer le principe de l'égalité de traitement entre les époux ou les parents de même sexe et ceux de sexe différent
•
La nécessité de garantir
la sécurité juridique du dispositif balai
La solution de l'Assemblée nationale règle les problèmes d'exhaustivité des coordinations réalisées par les articles 4 à 22 du présent texte, grâce aux deux dispositions « balais » des articles 4 et 4 bis .
Ces deux dispositions doivent être appréciées ensemble, puisqu'elles sont complémentaires.
Or, si la disposition interprétative inscrite à l'article 4 ne paraît pas présenter de risque juridique, s'agissant du code civil, celle de l'article 4 bis , qui régit l'ensemble de la législation, n'offre pas les mêmes assurances.
En premier lieu, non codifiée, elle serait moins aisément accessible, pour les citoyens, que celle insérée au coeur du code civil, alors même qu'elle devrait être prise en considération pour l'interprétation de toute disposition faisant référence, de manière sexuée, aux parents ou aux époux. Si l'exigence constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi n'impose pas la codification d'une disposition législative, cette codification, loin d'y nuire, contribue à son respect 136 ( * ) .
En second lieu, elle reporte sur le juge le soin de décider quelle lecture il devra faire de chaque dispositif ouvert, directement ou indirectement, à des conjoints ou des parents de sexe différents, pour l'étendre ou non aux intéressés de même sexe.
Quelle serait son interprétation pour une loi postérieure au présent texte qui maintiendrait les termes de « mari » et « femme », alors que l'article 4 bis ne s'applique expressément qu'aux dispositions législatives en vigueur à la date de promulgation du présent texte ? Le juge devrait alors apprécier si la nouvelle rédaction déroge ou non à la règle générale.
De la même manière, cette disposition balai s'imposerait-elle aux textes réglementaires pris par le Gouvernement, alors qu'elle est restreinte aux seules lois ? Et comment l'exigence d'égalité s'appliquera-t-elle aux dispositions législatives de la compétence des collectivités territoriales d'outre-mer régie par le principe de la spécialité législative 137 ( * ) ?
Enfin, ne faisant référence qu'à une expression pour désigner les époux, les parents ou les conjoints survivants, elle laisserait au juge le soin d'apprécier, pour des formulations équivalentes ou partielles ou pour des termes juridiques moins précis, s'il convient de les appliquer aussi aux intéressés de même sexe, conformément à l'intention du législateur.
Votre commission a jugé nécessaire de parer à ces incertitudes juridiques, qui fragilisent la réforme engagée.
À l'initiative de son rapporteur, elle a par conséquent substitué à ces deux dispositions « balais », un nouveau dispositif, conforme au principe égalitaire qui inspire le présent texte, et qui laisse moins de champ à l'interprétation du juge .
•
La consécration du principe
d'égalité de traitement entre les époux ou les parents de
même sexe et ceux de sexe différent
Le premier amendement adopté par votre commission, sur proposition de son rapporteur, supprime, à l'article 4, les deux dispositions interprétatives, insérées en tête des livres I er et III du code civil, et les remplace par un nouvel article 6-1 placé à la fin du titre préliminaire du code civil.
Ce titre préliminaire, intitulé « De la publication, des effets et de l'application des lois en général » regroupe six articles généraux qui ont vocation à régir non seulement le code civil, mais toute la législation : l'entrée en vigueur et la publication de la loi (article 1 er ), la non rétroactivité de la loi (article 2), les conflits de lois internationales et l'ordre public (article 3), l'interdiction du déni de justice et la prohibition des arrêts de règlement (articles 4 et 5), l'interdiction faite aux contrats de déroger à l'ordre public et aux bonnes moeurs (article 6).
L'article 6-1 qui viendrait le compléter, poserait un nouveau principe général, qui s'imposerait à toutes les lois : l'égalité entre les époux ou les parents de même sexe et ceux de sexe différent, pour les effets du mariage et de la filiation adoptive reconnus par les lois .
Il ne s'agirait là que de l'expression légale de l'exigence constitutionnelle d'égalité, énoncée à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 et fondement de la réforme mise en oeuvre par le présent texte.
Ce dispositif s'inspire de la solution consacrée par le droit espagnol 138 ( * ) .
Il convient de préciser que la disposition introduite à ce nouvel article 6-1 ne concernerait que les effets du mariage ou de la filiation adoptive, non les conditions d'accès au mariage ou à la parenté .
L'égalité d'accès au mariage sera assurée par l'article 1 er du présent texte. L'égalité d'accès à l'adoption, entre les époux de sexe différent et les époux de même sexe, en découle nécessairement, et elle seule.
À cet égard, le titre VII du livre premier du code civil, relatif à la filiation biologique serait expressément exclu du champ d'application du principe consacré au nouvel article 6-1, puisque le projet de loi ne consacre de liens de filiations établis à l'égard de deux personnes de même sexe que sur une base adoptive. Ni les présomptions légales de filiation, ni la possession d'état ne pourraient être invoqués par des conjoints homosexuels sur le fondement de ce nouvel article 6-1.
Votre rapporteur observe qu'une telle mention expresse d'exclusion du champ de l'article 6-1 n'est pas nécessaire s'agissant de l'assistance médicale à la procréation. En effet, l'accès à cette dernière ne dépend pas du statut marital des intéressés - des concubins peuvent y prétendre, à l'égal des époux 139 ( * ) - mais du caractère pathologique de l'infertilité, qui doit être médicalement constaté 140 ( * ) . La différence de traitement entre les couples hétérosexuels et les couples homosexuels repose sur une différence de situation, du point de vue la procréation, entre les couples constitués d'un homme et d'une femme et ceux constitués de deux personnes de même sexe, ce qui place ces dispositions hors du champ du nouvel article 6-1 du code civil.
En revanche, visant tous les effets, droits et obligations résultants du mariage et de la filiation, cet article s'appliquerait aussi aux aïeuls de même sexe ou aux beaux-parents de même sexe, traités à l'égal de ceux de sexe différents.
Le champ d'application de ce nouvel article 6-1 du code civil est par ailleurs général et s'étend, à l'instar des autres règles inscrites au sein de ce titre préliminaire du code civil à toute la législation, même postérieure - sauf dérogation expresse.
Consacrant légalement une égalité complète entre les époux ou les parents de même sexe et ceux de sexe différents, il devrait s'imposer aux textes réglementaires .
En effet, dans la mesure où la loi proclame une identité de statut entre les uns et les autres, les règlements, même dans le domaine de compétence exclusive du Gouvernement, ne seraient plus fondés, en vertu du principe général d'égalité, à opérer de distinction entre eux ni à refuser l'accès à un droit sur ce fondement. Ce serait, sinon, soumettre à un traitement différent, deux couples que la loi répute pourtant être dans la même situation juridique.
La même observation pourrait valoir pour les matières relevant de la compétence des collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution ou de la Nouvelle-Calédonie : le maintien, dans ces législations, d'une discrimination entre les époux ou les parents de même sexe et ceux de sexe différent, alors même que le mariage d'un couple homosexuel et l'adoption par des conjoints de même sexe s'y appliquera, pourrait être interprété par le juge comme constitutive d'une rupture d'égalité.
•
L'habilitation conférée
au Gouvernement pour procéder aux coordinations textuelles
nécessaires, en dehors du code civil
En adoptant l'amendement de son rapporteur à l'article 4, votre commission a souhaité lever les incertitudes que présentait la rédaction précédente et inscrire, en tête du code civil, un principe général d'égal traitement des époux ou des parents de même sexe et de ceux de sexe différent.
Ce nouveau principe ayant vocation à régir toute la législation, la disposition balai de l'article 4 bis n'avait plus de raison d'être et aurait dû être supprimée par coordination.
Toutefois, votre commission a considéré, avec son rapporteur, que si le principe d'égal traitement retenu au nouvel article 6-1 du code civil suffit à garantir l'égalité de droits et de devoirs des époux ou des parents homosexuels avec les époux ou les parents hétérosexuels, il est aussi souhaitable d'adapter en conséquence, pour une meilleure lisibilité, les termes retenus dans les différentes lois et codes sociaux qui ouvrent des droits particuliers aux conjoints ou aux parents.
Pour cette raison, elle a adopté un amendement du Gouvernement 141 ( * ) , qui supprime la rédaction de l'article 4 bis issue des travaux de l'Assemblée nationale et la remplace par une habilitation donnée au Gouvernement pour prendre par ordonnance les mesures de coordination textuelle requises , pour confirmer que le droit ou l'obligation en cause est bien applicable sans distinction.
Le champ de cette habilitation est délimité : si elle couvre l'ensemble des codes et lois, elle ne s'étend pas au code civil, qui continuerait d'employer les termes de « père et mère » ou de « mari et femme ». L'inscription à la fin du titre préliminaire de ce code du nouvel article 6-1 apparaît une mesure suffisante pour assurer la pleine intelligibilité et clarté des droits civils reconnus aux uns comme aux autres.
Son objet est strict : procéder à des coordinations textuelles, à droit constant, conformes au principe d'égalité de traitement défini au nouvel article 6-1 du code civil.
Enfin le Parlement pourra procéder à un contrôle ex post des choix de coordination du Gouvernement, lors de l'examen du projet de loi de ratification qui devra être déposé dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance, qui elle-même interviendra dans un délai de six mois après la publication de loi.
•
Le maintien de quelques coordinations
terminologiques au sein du code civil
Votre commission n'a par ailleurs conservé, à l'article 4, que les substitutions de termes proposés par l'Assemblée nationale à l'article 75 du code civil, qui dispose que l'officier d'état reçoit des époux la déclaration qu'ils se veulent prendre « pour mari et femme ». Les autres coordinations, aux articles 108, 206, 601 et 757-1 du même code, ne sont plus nécessaires compte tenu du nouvel article 6-1.
L' amendement adopté par votre commission à l'initiative de votre rapporteur en ajoute toutefois deux autres.
La première substitution de termes touche l'article 34 du code civil, qui énumère les énonciations que doivent comporter les actes d'état civil, et compte à ce nombre, pour ceux de naissance ou de reconnaissance, la date et le lieu de naissance des « père et mère ». La possibilité de l'adoption conjointe pour des époux de même sexe rend nécessaire de substituer à cette expression celle de « parents », ce qui permettra aux actes en cause de présenter la réalité de la filiation juridique de l'enfant. En revanche, aucune substitution n'est nécessaire à l'article 57, qui correspond aux énonciations reproduites dans l'acte de naissance établit lors de la déclaration de naissance qui suit l'accouchement.
La détermination du format et des modèles de livrets de famille ne relevant pas des règles concernant l'état des personnes, le législateur n'est pas compétent en la matière 142 ( * ) . Il reviendra néanmoins au Gouvernement d'en tirer les conséquences pour les mentions qui seront susceptibles d'être reproduites, en fonction de la situation filiative de l'enfant, au sein du livret de famille.
La seconde substitution de termes touche l'article 371-1 du même code, qui pose le principe de l'attribution conjointe de l'autorité parentale aux « père » et « mère ».
En effet, cet article est au nombre de ceux lus aux futurs époux, en vertu de l'article 75 du code civil, par l'officier d'état civil le jour de la célébration du mariage. Il est par conséquent pertinent de remplacer, à l'article 371-1, les termes de « père » et « mère » par celui de « parents », d'ailleurs utilisé au paragraphe suivant du même article.
Votre commission a adopté les articles 4 et 4 bis ainsi modifié .
Article 4 ter (art. L. 211-1 du code de l'action sociale et des familles) - Critères d'éligibilité au statut d'association familiale
Cet article vise à permettre aux associations représentant les familles homoparentales et à celles représentants les familles constituées autour d'un pacte civil de solidarité, de recevoir le statut d'association familiale.
Il résulte d'un amendement de Mme la députée Marie-Georges Buffet et plusieurs de ses collègues du groupe de la gauche démocrate et républicaine, adopté en séance publique avec l'avis favorable de la commission des lois, le Gouvernement s'en étant remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.
Si les associations dont la raison sociale est la représentation de certaines familles peuvent se constituer librement, l'accès au statut particulier d'« association familiale » au sens du code de l'action sociale et des familles (CASF), est réservé à celles qui satisfont aux critères définis à l'article L. 211-1 du CASF.
Le premier critère est lié au but que se fixe l'association. Il doit s'agir, essentiellement, de la défense de l'ensemble des intérêts matériels et moraux, soit de toutes les familles, soit de certaines catégories d'entre elles.
Le second critère, qui s'ajoute au premier, intéresse les adhérents de l'association. Il doit s'agir :
- de familles constituées par le mariage et la filiation ;
- de couples mariés sans enfant ;
- de toutes personnes physiques qui ont charge légale d'enfants par filiation ou adoption ou qui exercent l'autorité parentale ou une tutelle sur un ou plusieurs enfants dont elles ont la charge effective et permanente.
L'article L. 211-2 du même code prévoit que ces associations familiales peuvent adhérer à des unions départementales des associations familiales, lesquelles sont regroupées au sein d'une fédération nationale, dite « union nationale des associations familiales » (UNAF). L'UNAF et les fédérations départementales sont des interlocuteurs reconnus des pouvoirs publics pour l'ensemble des politiques publiques qui touchent aux familles.
Rien n'interdit, au regard des exigences posées par l'article L. 211-1 du CASF, que des associations représentants les familles homoparentales puissent se voir reconnaître la qualité d'« association familiale » ni qu'elles puissent, à ce titre, adhérer à une fédération départementale.
En effet, comme l'a relevé Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille, au cours des débats à l'Assemblée nationale, il suffit pour cela que les couples ou les personnes membres de cette association élèvent un ou plusieurs enfants.
Si les couples de personnes de même sexe sans enfant ne peuvent aujourd'hui y adhérer, ils le pourront demain, à l'égal des couples hétérosexuels, en se mariant.
Toutefois, aux yeux de ses auteurs, l'amendement dont résulte le présent article, serait justifié par les difficultés que rencontreraient, en fait, les familles homosexuelles à adhérer à l'union nationale des associations familiales ou aux fédérations départementales.
Afin d'y remédier, le présent article ajouterait au critère des familles constituées par le mariage et la filiation, celui des familles constituées par un partenariat civil de solidarité (Pacs) et la filiation.
Il préciserait en outre que les adhérents de l'association personnes physiques qui élèvent des enfants ne doivent être soumis à aucune distinction de sexe ou liée à l'orientation ou identité sexuelle.
La première modification, liée au Pacs, simplifiera l'adhésion des familles recomposées autour d'un couple pacsé, au sein desquels les enfants n'ont de filiation établie qu'à l'égard d'un des deux membres du couple, le second faisant office de beau-parent. Elle est pertinente et profitera aux partenaires de même sexe comme à ceux de sexe différent.
S'agissant de la seconde, Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille, a rappelé au cours des débats à l'Assemblée nationale, que toute discrimination entre les associations familiales, pour l'adhésion aux structures départementales ou nationales, fondée sur l'orientation sexuelle de leurs membres serait illégale, ce critère n'étant pas pertinent aux regards des exigences posées par les articles L. 211-1 et suivants du CASF.
Votre rapporteur observe que l'adoption du présent projet de loi constituera un puissant signal, susceptible de lever les difficultés rencontrées jusqu'alors, par les associations familiales homoparentales, pour adhérer aux unions départementales et nationales.
Interrogé sur ce point par notre collègue Michelle Meunier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, M. François Fondard, président de l'union nationale des associations familiales, a d'ailleurs déclaré lors de son audition par votre commission, que « quelques associations de familles homosexuelles ont fait des demandes d'adhésion ; pour l'heure, aucune n'a été agréée car leurs statuts n'étaient pas conformes au code de l'action sociale et des familles. L'association des familles homoparentales avait ainsi demandé à adhérer à l'UNAF de Paris, mais n'a pas été agréée car elle n'a pas fourni la liste de ses adhérents - ce qu'exige le code de l'action sociale et des familles. Si elle le fait, nous n'aurons aucune raison de ne pas donner suite à sa demande ».
Cet engagement, conforme à ce qu'exige la loi, est important. Le Gouvernement comme le Parlement doivent veiller à ce qu'il soit respecté.
Votre commission a adopté l'article 4 ter sans modification .
Articles 5 à 13 (suppression maintenue) - Coordinations dans divers codes
À l'origine, ces articles du projet de loi initial procédaient aux coordinations terminologiques nécessaires pour garantir l'égalité de droits entre les époux ou les parents de même sexe et ceux de sexe différent, s'agissant des dispositions insérées dans le code général des impôts, et dans les codes de l'action sociale et des familles, de la défense, de l'environnement, de l'expropriation pour cause d'utilité publique, de justice militaire, des pensions civiles et militaires de retraite, des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, de procédure pénale.
L'adoption, par la commission des lois de l'Assemblée nationale, des deux dispositions balais inscrites aux articles 4 et 4 bis , a rendu ces coordinations inutiles. À l'initiative conjointe de M. Erwann Binet, rapporteur pour la commission des lois, et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, ces articles ont donc été supprimés par les députés.
L'égalité de traitement serait à présent garantie par le nouveau dispositif adopté par votre commission à l'article 4. En outre, le Gouvernement pourra procéder aux coordinations nécessaires pour assurer pour une meilleure lisibilité de la loi, sur le fondement de l'habilitation prévue à l'article 4 bis : il n'est donc pas utile de rétablir ces articles.
Votre commission a maintenu la suppression des articles 5 à 13.
Article 13 bis (art. L. 732-10, L. 732-10-1 [nouveau], L. 732-11, L. 732-12 et L. 732-12-1 du code rural et de la pêche maritime) - Ouverture du congé d'adoption du régime des exploitants agricoles
Cet article qui résulte d'un amendement de Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, étend aux hommes le bénéfice de l'indemnisation du congé d'adoption du régime des exploitants agricoles, aujourd'hui réservé aux femmes.
L'article L. 732-10 du code rural et de la pêche maritime permet en effet aux femmes exploitantes agricoles, épouse ou aide familiale non salariée d'un exploitant agricole, d'être indemnisée pendant la durée de leur congé de maternité ou d'accueil d'un enfant en vue de son adoption.
Les intéressées perçoivent alors, à la condition d'être remplacées dans les travaux de l'exploitation agricole, une allocation de remplacement justement destinée à rémunérer cet emploi salarié particulier.
L'article L. 732-10 traitant simultanément le congé de maternité et celui d'adoption, il réserve l'un et l'autre aux seules femmes 143 ( * ) , ce qui est contraire à l'égalité de traitement entre les adoptants de même sexe et ceux de sexe différent.
Le présent article procède à une réécriture de cette disposition pour la consacrer exclusivement au cas de la maternité.
Il crée, par coordination, un nouvel article L. 732-10-1, consacré au congé d'adoption, qu'il étend aux hommes, et rend susceptible d'être partagé entre les adoptants. Enfin, il procède aux coordinations textuelles nécessaires.
Votre commission a adopté l'article 13 bis sans modification .
Article 14 (art. L. 331-7, L. 351-4, L. 613-19 à L. 613-19-2, L. 722-8 à L. 722-8-3 du code de la sécurité sociale) - Coordinations dans le code de la sécurité sociale
Cet article procède à certaines coordinations nécessaires, dans le code de la sécurité sociale, pour garantir l'égalité de droits sociaux, en matière d'adoption et d'accueil de l'enfant, entre les couples de même sexe et ceux de sexe différent.
•
Les dispositions relatives au
congé d'adoption
Le code de la sécurité prévoit l'indemnisation du congé d'adoption que peuvent prendre les salariés à l'article L. 331-7. Cependant, l'indemnisation de ce congé, conçu sur le modèle de l'assurance maternité, est réservée à la femme assurée, qui peut en céder tout ou partie au père adoptant.
Le présent article, qui n'a fait l'objet que de modifications rédactionnelles sur ce point, étend, sans distinction de sexe le bénéfice de cette indemnisation aux adoptants d'un enfant. De la même manière, il en autorise le partage entre les deux parents de même sexe, par moitié.
Les femmes travailleurs indépendants non salariés peuvent, pour leur part, être indemnisées de leur cessation d'activité en cas d'adoption. Cette indemnisation n'est en revanche pas partagée avec le père adoptant, lequel peut bénéficier d'un congé d'adoption calqué sur le congé de paternité. Lorsque l'épouse adoptante est la collaboratrice du travailleur indépendant, elle peut bénéficier d'une allocation forfaitaire de remplacement en cas d'embauche d'un salarié pour pourvoir à son emploi. Les conditions d'accès à ces congés sont définies aux articles L. 613-19 et L. 613-19-1 du code la sécurité sociale pour le régime social des indépendants et L. 722-8 et L. 722-8-1 pour celui des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés, assimilés aux premiers.
Le présent article, qui n'a fait l'objet, sur ce point, que de modifications rédactionnelles, adapte ces dispositions à l'adoption par des conjoints de même sexe, en en ouvrant le bénéfice sans distinction de sexe aux couples adoptants et en autorisant le partage du congé d'adoption entre les deux époux.
•
Les dispositions relatives à la
majoration de la durée d'assurance vieillesse des salariés au
titre de l'adoption ou de l'éducation d'un enfant
adopté
L'article L. 351-4 du code de la sécurité sociale institue, au bénéficie du père ou de la mère, une majoration de la durée d'assurance vieillesse de quatre trimestre, pour chaque enfant mineur, au titre de son adoption pendant sa minorité ou de son éducation pendant les quatre années suivant sa naissance ou son adoption.
En principe, les parents choisissent celui des deux qui en bénéficiera, ou s'accordent sur la répartition entre eux de cet avantage.
En cas de désaccord, la majoration profite à celui qui s'en est occupé le plus longtemps et, en cas d'égalité, elle est partagée par moitié.
En revanche, à défaut d'accord ou de désaccord, seule la mère bénéficie de cet avantage.
Le présent article rend ces dispositions applicables au cas des parents de même sexe : la majoration profiterait à l'un des deux, à moins qu'ils décident de la partager entre eux. À défaut d'option ou de désaccord, elle serait partagée par moitié.
•
La suppression de certaines
coordinations
L'article 14, dans sa version d'origine, procédait à un certain nombre de coordinations terminologiques afin de rendre les dispositions du code de la sécurité sociale applicables, sans distinction, aux époux ou aux parents de même sexe 144 ( * ) . L'adoption, par les députés, des deux dispositions balais des articles 4 et 4 bis ont rendu ces coordinations inutiles. Elles ont été supprimées à l'initiative du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, M. Erwann Binet.
Du fait du dispositif adopté par votre commission aux articles 4 et 4 bis , il n'est pas nécessaire de les rétablir.
Votre commission a adopté l'article 14 sans modification .
Articles 15 et 16 (suppression maintenue) - Coordinations dans les codes des transports et du travail
À l'origine, ces articles du projet de loi initial procédaient, comme les précédents, aux coordinations terminologiques requises pour garantir l'égal accès aux droits sociaux reconnus par le code du travail et celui des transports aux époux ou aux parents de même sexe et à ceux de sexe différent.
Ces coordinations, nombreuses dans le code du travail, n'avaient plus de raison d'être du fait de l'adoption, par la commission des lois de l'Assemblée nationale, des deux dispositions balais inscrites aux articles 4 et 4 bis . Les députés les avaient donc supprimées.
Votre commission ayant adopté un nouveau dispositif aux articles 4 et 4 bis , qui garantit l'égalité de traitement et autorise le Gouvernement à procéder aux coordinations nécessaires par ordonnance, il n'est pas utile de rétablir ces articles supprimés.
Votre commission a maintenu la suppression des articles 15 et 16.
Article 16 bis (art. L. 1132-3-2 [nouveau] du code du travail) - Protection du salarié homosexuel refusant une mutation dans un pays incriminant l'homosexualité
Cet article, qui résulte d'un amendement de Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, vise à protéger les salariés mariés ou pacsés avec une personne de même sexe, qui refuseraient une mutation dans un État incriminant l'homosexualité.
Les clauses de mobilité, incluses dans le contrat de travail sont licites. Elles obligent le salarié à accepter sa mutation, si celle-ci leur est conforme. Le refus illégitime du salarié, qui ne constitue pas une faute grave, suffit à caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Or, l'application de cette règle, dans toute sa rigueur, au cas d'un salarié marié à une personne de même sexe risquerait, selon l'auteur de l'amendement à l'origine du présent article, de lui porter un grave préjudice.
En effet, comme le rappelle notre collègue député Erwann Binet dans son rapport, « de nos jours, les actes homosexuels sont encore passibles de peine de mort dans sept pays : Afghanistan, Arabie saoudite, Iran, Nord du Nigeria, Mauritanie, Soudan et Yémen. En outre, l'homosexualité est toujours pénalement sanctionnée - emprisonnement, sévices corporels, travaux forcés - dans une soixantaine de pays » 145 ( * ) .
Le présent article vise donc à garantir au salarié marié ou lié par un pacte civil de solidarité (Pacs) à une autre personne de même sexe 146 ( * ) le droit de refuser toute mutation dans un pays incriminant l'homosexualité, en interdisant qu'il puisse être licencié pour ce motif ou faire l'objet d'une sanction ou de toute mesure discriminatoire 147 ( * ) .
Seules les personnes mariées ou liées par un Pacs seraient concernées, dans la mesure où la mention de la personne qui leur est liée dans leurs actes d'état civil révèle leur orientation sexuelle.
Votre rapporteur partage l'objectif de protection poursuivi par l'auteur de l'amendement dont est issu le présent article : il serait trop grave qu'un salarié soit ainsi exposé à de graves dangers, en raison de son homosexualité, parce qu'il n'aurait pu refuser la mutation que lui proposait son employeur.
Toutefois, votre rapporteur constate que le droit en vigueur garantit d'ores et déjà cette protection, laquelle risque d'être au contraire diminuée par le dispositif proposé .
En effet, l'employeur ne peut imposer au salarié le respect d'une clause de mobilité sans considération des circonstances. Et, inversement, le refus que ce dernier lui oppose est parfois reconnu comme légitime par le juge.
La chambre sociale de la Cour de cassation rappelle ainsi, au visa de l'article 1134 du code civil, qui fait notamment référence à la bonne foi dans l'exécution du contrat, que la mise en oeuvre d'une clause de mobilité ne doit pas porter atteinte au droit du salarié à une vie personnelle et familiale et qu'une telle atteinte doit être justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché 148 ( * ) .
Or, il est manifeste que la mutation d'un salarié marié à une personne de même sexe dans un pays incriminant l'homosexualité serait constitutive d'une telle atteinte excessive aux droits du salarié : le risque que cette mutation lui ferait courir est en effet insusceptible d'être ni proportionné à l'objet économique de la mutation ni justifié par cet objet.
Cette jurisprudence n'est que la traduction, en matière de droit à la vie personnelle et familiale, de l'article L. 1121-1 du code du travail, aux termes duquel, « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
En outre, comme l'a d'ailleurs relevé le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, M. Erwann Binet, l'interdiction, posée à l'article L. 1132-1 du code du travail, de toute sanction ou mesure discriminatoire à l'encontre d'un salarié en raison de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle ou de son identité sexuelle, devrait jouer en faveur du salarié placé dans cette situation : le licenciement ou la sanction décidé par l'employeur serait illégal, car discriminatoire, puisque indirectement fondé sur son orientation sexuelle, un salarié hétérosexuel n'étant pas placé dans la même situation de danger.
Enfin, en ne visant spécifiquement que les salariés mariés ou pacsés avec une personne du même sexe, le présent article laisse hors de sa protection tous ceux qui, homosexuels, ne vivent pas sous l'un ou l'autre de ces régimes. Il crée, sans que cela soit d'ailleurs l'intention de ses auteurs, le risque d'un raisonnement a contrario , qui déroberait aux intéressés la protection efficace que leur assure aujourd'hui le droit en vigueur.
Des employeurs pourraient ainsi tirer argument de la disposition introduite par le présent article, pour dénier à des salariés homosexuels ni mariés, ni pacsés, tout droit à refuser la mutation proposée .
Votre rapporteur rappelle, à cet égard, qu'on affaiblit la norme à lui faire répéter, imparfaitement ou partiellement, ce qu'elle impose déjà.
La suppression de cet article n'est pas souhaitable, car la raison qui l'anime est importante et qu'il ne faudrait pas que cette suppression soit interprétée comme un désaveu.
Il apparaît donc nécessaire de concevoir un dispositif qui satisfasse le même objectif, sans présenter les mêmes lacunes.
Votre rapporteur a par conséquent proposé à Mme Michelle Meunier, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales d'examiner l'opportunité de déposer un amendement en séance publique susceptible de remédier aux difficultés soulignées .
Au bénéfice de ces observations , votre commission a adopté l'article 16 bis sans modification .
Articles 17 à 20 (suppression maintenue) - Coordinations dans les lois relatives aux fonctions publiques et dans l'ordonnance relative à l'enfance délinquante
À l'origine, les articles 17 à 19 procédaient aux coordinations nécessaires pour étendre aux couples de personnes de même sexe le bénéfice du congé d'adoption reconnu aux fonctionnaires des trois fonctions publiques.
L'article 20 procédait à une unique coordination au sein de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.
Pour la même raison qu'aux articles 5 à 13, 15 et 16 précédents, l'adoption, par les députés, des deux dispositions balais des articles 4 et 4 bis , a eu pour conséquence la suppression de ces articles de coordination, devenus inutiles.
Compte tenu du nouveau dispositif adopté par votre commission aux mêmes articles 4 et 4 bis , il n'est pas nécessaire de rétablir les articles 17 à 20.
Votre commission a maintenu la suppression des articles 17 à 20.
Article 21 (art. 6 de l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte) - Coordinations dans la législation relative aux prestations familiales à Mayotte
Cet article rend les dispositions relatives aux prestations familiales à Mayotte applicable à la situation de parents de même sexe.
En effet, l'article 6 de l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 prévoit que les prestations familiales sont dues à la personne qui a la charge effective de l'enfant. Il présume qu'il s'agit de la mère et précise qu'à défaut, il s'agit du père ou de toute personne qui assume cette charge par décision de justice.
Le présent article prévoit que, dans le cas d'un couple de personne de même sexe dont les deux membres assument à leur foyer la charge effective et permanente de l'enfant, l'allocataire de cette prestation familiale serait celui des deux qu'ils désigneront d'un commun accord. À défaut, la qualité d'allocataire serait attribuée à celui qui en ferait la demande le premier.
Votre commission a adopté l'article 21 sans modification .
CHAPITRE IV - DISPOSITIONS DIVERSES, TRANSITOIRES ET FINALES
Article 22 - Application du texte aux mariages contractés avant son entrée en vigueur
Cet article fixe les conditions de reconnaissance et de transcription des mariages contractés à l'étranger entre personnes de même sexe avant l'entrée en vigueur de la loi.
En l'état actuel du droit, l'ordre public français réserve le mariage à deux personnes de sexe différent. Dès lors, le mariage contracté régulièrement par deux personnes de même sexe, dont l'une au moins est française, dans un pays les y autorisant (Belgique et Pays-Bas par exemple) ne produit pas d'effets en France.
En revanche, lorsque leur loi personnelle autorise une telle union, le mariage de deux étrangers de même sexe peut produire des effets en France. Comme l'ont rappelé les représentants du conseil supérieur du notariat à votre commission lors de leur audition, les notaires traitent déjà « des effets patrimoniaux en France de mariages conclus à l'étranger par des couples homosexuels, notamment en cas de décès de l'un des conjoints possédant des biens situés en France ».
De même Mme Anne Bérard, vice-présidente, responsable du service des affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris, a également fait valoir, lors de son audition par votre commission, que depuis le 21 juin 2012, en application du règlement du Conseil de l'Union européenne du 20 décembre 2010, dit « Rome 3 » 149 ( * ) , le juge français a d'ores et déjà la faculté de divorcer les personnes étrangères de même sexe régulièrement mariées à l'étranger.
L'entrée en vigueur du présent texte ne permettra pas la validation automatique de ces mariages de Français, déjà conclus à l'étranger. En effet, la loi n'est, en principe, pas rétroactive, et les conditions de validité d'un mariage s'apprécient au regard de la loi personnelle des parties, au jour de la célébration.
Dès lors, l'article 22 prévoit expressément que les mariages, conclus à l'étranger sous l'empire du droit antérieur, sont reconnus, tant dans leurs effets à l'égard des époux et des enfants, qu'à l'égard des tiers, après transcription sur les registres de l'état civil français.
Cependant, la reconnaissance de la validité de ces mariages est subordonnée au respect d'un certain nombre de dispositions relatives aux qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage ainsi qu'au respect des règles générales de nullité des mariages :
- la condition de l'âge : dix-huit ans révolus (article 144) ;
- le consentement à mariage des futurs époux (article 146) ;
- la présence des futurs époux lors de la célébration, même lorsque celle-ci a lieu à l'étranger (article 146-1) ;
- l'interdiction de la bigamie (article 147) ;
- les empêchements familiaux à mariage (articles 161, 162 et 163) ;
- les conditions de nullité du mariage pour cause d'absence de consentement, d'erreur sur la personne ou sur ses qualités substantielles (article 180) ;
- la nullité encourue par les mariages n'ayant pas fait l'objet d'une célébration publique devant l'officier public compétent (article 191).
Quant à l'opposabilité du mariage aux tiers, l'article 22 dispose expressément qu'elle est conditionnée par la transcription du mariage sur les registres de l'état civil français, dont la demande est laissée à la faculté des époux. À défaut de transcription, dans les conditions prévues aux articles 171-5 et 171-7, le mariage ne produira d'effets qu'à l'égard des époux et des enfants.
Ne sont évidemment concernés par la transcription que les mariages célébrés régulièrement à l'étranger entre deux Français ou entre un Français et un étranger, puisqu'il s'agit d'une inscription sur les registres de l'état civil français. Pour les couples étrangers, le mariage produit déjà des effets en France, dès lors qu'il répond aux conditions de validité fixées par la loi personnelle des époux.
Enfin, la transcription n'est pas automatique. La procédure de l'article 171-7 prévoit que sont effectués un certain nombre de contrôles.
Votre rapporteur est tout à fait favorable à l'adoption de l'article 22, en l'absence duquel, le mariage de Français ou d'un Français avec un étranger, célébré valablement à l'étranger, avant l'entrée en vigueur de la loi ne produirait aucun effet en France une fois celle-ci adoptée, et obligerait ces couples à se remarier s'il s'agit d'une couple de Français, voire à divorcer pour se remarier, s'il s'agit par exemple d'un couple franco-belge.
Votre commission a adopté l'article 22 sans modification .
Article 23 - Application du texte dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie
Cet article définit les conditions d'application de la loi dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
Les lois réglant le régime de spécialité législative dont bénéficient certaines de ces collectivités attribuent à l'État la compétence normative pour la plupart des matières du droit civil concernées par le projet de loi 150 ( * ) .
Le droit civil est même directement applicable dans les Terres australes et antarctiques françaises 151 ( * ) , à Saint-Martin et Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
S'il relève de la compétence de l'État dans les îles Wallis et Futuna 152 ( * ) , les lois intervenant en cette matière n'y sont applicables que par mention expresse.
L'article 14 de la loi n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française conserve à l'État la compétence en matière de « nationalité ; droits civiques ; droit électoral ; droits civils, état et capacité des personnes, notamment actes de l'état civil, absence, mariage, divorce, filiation ; autorité parentale ; régimes matrimoniaux, successions et libéralités ». Les dispositions relatives à la nationalité, à l'état et la capacité des personnes y sont directement applicables ; les autres doivent faire l'objet d'une mention expresse 153 ( * ) .
Enfin, en Nouvelle-Calédonie, l'État conserve les compétences relatives au droit civil et aux règles concernant l'état civil, jusqu'à leur transfert à la collectivité 154 ( * ) . L'applicabilité des dispositions législatives et réglementaire intervenant dans ces matières est subordonnée à une mention expresse à cette fin 155 ( * ) .
Le présent article rend par conséquent applicables dans ces trois collectivités les articles 1 à 4 et 22 du présent texte. La mention faite, pour ces articles, aux TAAF est superfétatoire et votre commission l'a supprimé par un amendement de son rapporteur.
L'article 4, dans la rédaction adopté par votre commission, pose le principe de l'égalité de traitement entre les époux ou les parents de même sexe et ceux de sexe différents. Visant le mariage et la filiation, il relève donc de la compétence de l'État et est applicable, du fait de la mention portée au présent article, dans l'ensemble des collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
Votre commission a adopté l'article 23 ainsi modifié .
*
* *
Au bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission a adopté le projet de loi ainsi modifié .
EXAMEN EN COMMISSION
MERCREDI 20 MARS 2013
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Nous avons procédé à des auditions pendant une quarantaine d'heures au total. Un grand nombre d'entre nous y ont participé, elles se sont déroulées dans un climat de travail serein, approprié à ce sujet sensible que nous avons ainsi pu aborder au fond, en échangeant des arguments dans le respect des convictions des uns et des autres.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Nous sommes saisis en première lecture du projet de loi qui ouvre le mariage aux personnes de même sexe, voté par l'Assemblée nationale le 12 février 2013. En offrant aux couples homosexuels la faculté d'accéder au mariage, ce projet de loi consacre l'exigence d'égalité entre les couples, sans distinction de sexe ni d'orientation sexuelle. Nous avons procédé à une quarantaine d'heures d'auditions, auxquelles une centaine de sénateurs ont participé, et qui ont été diffusées sur Public Sénat. J'en ai effectué moi-même une dizaine. Toutes se sont déroulées dans un climat serein et attentif, comme il convenait à la dignité et à l'importance du sujet abordé. Toutes les personnes qui le souhaitaient ont été entendues, pourvu qu'elles présentent des garanties de sérieux et de représentativité suffisantes.
Ce texte introduit dans le code civil un changement symbolique important, qui répond à une triple exigence : la reconnaissance sociale des couples homosexuels et des familles homoparentales, l'égalisation des droits et des devoirs avec les autres familles et celle de la protection que l'État doit leur assurer. L'égalité, des droits comme des devoirs, est le maître-mot de la réforme : Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice a déclaré que « le projet de loi est marqué du sceau de l'égalité ». Les auditions que nous avons conduites ont confirmé cette volonté de reconnaissance des couples homosexuels et d'égalité des droits avec les couples hétérosexuels, y compris parmi les associations ou les courants religieux minoritaires au sein des grandes Églises.
Ce voeu d'égalité est conforme aux principes qui fondent notre République. Il a cependant été dénoncé à plusieurs reprises lors des auditions : certaines des personnes entendues, et certains sénateurs, ont fait valoir que l'égalité n'est pas l'identité, et qu'elle n'impose de traiter également que des personnes placées strictement dans la même situation. L'argument mérite d'être entendu, mais s'applique-t-il vraiment à la situation visée par le présent projet de loi ? Le texte écarte toute assimilation des couples homosexuels aux couples hétérosexuels pour ce qui regarde la filiation biologique. Mais lorsqu'il s'agit de protection mutuelle, fondée sur l'amour que l'on se porte, quelle différence entre un couple homosexuel et un couple hétérosexuel ? Lorsqu'il s'agit de la protection d'un enfant par la reconnaissance juridique des liens qui l'unissent à ceux qui l'éduquent et l'élèvent, quelle différence entre l'enfant de parents de même sexe et celui de parents de sexe différent ? Faut-il que les enfants fassent les frais des orientations sexuelles de leurs parents ? Pourquoi réserver aux uns le mariage et ses effets, et tenir les autres à l'écart de ce statut protecteur ? L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen n'indique-t-il pas que « la loi doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ?
L'idée est souvent avancée, par ceux qui s'opposent au mariage des couples de personnes de même sexe, que l'égalité des droits pourrait être assurée par un statut spécifique, distinct du mariage, et propre aux couples homosexuels. Cette union civile s'ajouterait au pacte civil de solidarité (Pacs), ou s'y substituerait, les droits et les obligations ouverts par ce dernier étant alors renforcés. Une telle proposition ne peut être retenue, car elle contredit l'esprit qui anime la présente réforme, en perpétuant l'inégalité ou la différence de traitement appliquée à des situations pourtant identiques. Bien sûr, si l'union civile s'ajoutait au mariage et s'appliquait à tous les couples, comme le propose un des trois amendements déposés, ce serait acceptable - quoique cela ne rentre pas dans l'objet de ce texte. Sinon, soit l'union civile offre aux couples homosexuels exactement les mêmes droits et les mêmes garanties que le mariage, ce qui reviendrait à créer un doublon du mariage, qui n'aurait d'autre intérêt que de priver les couples de personnes de même sexe d'une reconnaissance sociale symbolique, en réservant la dénomination « mariage » à l'union d'un homme et d'une femme, soit l'union civile est en retrait par rapport au mariage, et les couples homosexuels seraient alors privés de droits - en dehors de ceux relatifs à la filiation biologique - reconnus aux couples hétérosexuels. De plus, un statut à part cantonnerait les homosexuels à une place à part dans notre société, ce qui ne correspond pas aux fondements de l'universalisme républicain. Maître Jacques Combret, s'exprimant devant votre commission au nom du conseil supérieur du notariat, a d'ailleurs écarté l'intérêt de régimes juridiques spécifiques supplémentaires. Les notaires se sont ainsi prononcés très clairement contre un nouveau statut de type union civile.
M. Jean-Jacques Hyest . - Non !
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - C'est ce que j'ai entendu lors des auditions...
M. Patrice Gélard . - Pas du tout !
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - ...et vous aussi, en toute bonne foi.
Aucune norme constitutionnelle ni conventionnelle ne proscrit le mariage de deux personnes de même sexe, ni l'adoption par un célibataire ou un couple homosexuel. Au contraire, le principe d'égalité et le droit à une vie familiale et personnelle peuvent fonder l'accès des intéressés à ces deux institutions. En la matière toutefois, la décision ne peut venir que du législateur. C'est ce que la Cour de cassation a laissé entendre dans l'affaire du mariage de Bègles et ce que le Conseil constitutionnel a rappelé le 28 janvier 2011. En effet, après avoir constaté que la Constitution n'imposait ni n'interdisait de réserver le mariage aux couples hétérosexuels, il a indiqué qu'il ne lui appartenait pas de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, de la différence de situation entre les couples homosexuels et les couples de sexe différent. Cette dernière mention correspond, dans la jurisprudence constitutionnelle, à la limite que la Haute instance donne à son propre contrôle, et à la marge d'appréciation discrétionnaire qui relève de la compétence souveraine du législateur. Le Conseil reconnaît donc que le choix d'ouvrir ou non le mariage aux couples de personnes de même sexe n'appartient qu'au législateur et qu'aucune norme constitutionnelle ne s'y oppose.
Les engagements internationaux de la France ne présentent pas davantage un obstacle à la décision du législateur en la matière, qu'il s'agisse de la convention européenne des droits de l'homme ou de la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 ainsi que du pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations unies, le 16 décembre 1966. Aucune norme supérieure ne s'oppose donc à ce que la loi ouvre le mariage aux couples de personnes de même sexe. Certains des principes qui les inspirent peuvent au contraire utilement guider le législateur dans son choix : la liberté, l'égalité et le droit de mener une vie familiale normale plaident tous trois pour que le droit dont bénéficient aujourd'hui les couples hétérosexuels soit ouvert aux couples homosexuels.
Sous cette lumière, si la décision peut être débattue, l'avancée sociale apparaît plus que jamais nécessaire. Nos auditions rendent compte du débat que suscite, au sein de la société française, la reconnaissance, au profit des homosexuels, du droit se marier et d'adopter ensemble. Les inquiétudes ou les observations suscitées par cette réforme méritent d'être entendues, lorsqu'elles restent respectueuses de chacun, parce qu'elles rendent compte de conceptions partagées par nombre de nos concitoyens. En revanche, elles ne peuvent être retenues : compte tenu du périmètre limité de la réforme, le bouleversement symbolique allégué n'est pas avéré.
Les opposants à la réforme lui font porter le poids d'évolutions sociales ou psychologiques qu'ils contestent. Or, l'ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe ne crée ni la conjugalité homosexuelle, ni l'homoparentalité. Au contraire, ces familles lui préexistent et le projet de loi se limite à leur offrir le cadre légal et protecteur qu'elles sont en droit d'attendre de la Nation.
Plusieurs des intervenants entendus par votre commission
- représentants des grandes Églises, pédiatres,
psychologues... - se sont inquiétés des conséquences
psychologiques ou symboliques de la réforme proposée sur l'ordre
social ainsi que sur les enfants des familles homoparentales. Leurs
affirmations ont toutefois été contredites à plusieurs
reprises dans la suite des auditions, notamment par d'autres psychologues. Par
exemple, la présidente de l'association française des magistrats
de la jeunesse et de la famille, Mme Hourcade, a observé que les juges
des enfants ne font pas état de signalements portant sur des enfants qui
seraient en danger en raison de l'homosexualité de l'un de leurs
parents.
Les enfants élevés par des parents de même sexe ne le sont ni mieux ni moins bien que ceux élevés par des parents de sexe différent. Je souligne en outre que le droit actuel autorise, sans discrimination, les homosexuels à adopter un enfant, en tant que célibataires, même si cela leur est souvent refusé ; de tels refus ont toutefois été jugés discriminatoires par la Cour européenne des droits de l'homme.
La question est d'admettre ou non l'adoption conjointe pour les couples de même sexe et d'établir ainsi la parenté effective sur une filiation juridique reconnue. Le débat est biaisé lorsque des arguments psychologiques sont mobilisés pour contester la reconnaissance juridique complète de l'homoparentalité, alors même que le droit établit la possibilité d'une filiation qui ne repose pas sur le modèle hétérosexuel du père et de la mère et que le fait consacre l'existence de ces familles. Plaçant le débat actuel dans le temps long de l'anthropologie, Mme Françoise Héritier a d'ailleurs nié qu'on puisse invoquer une « vérité anthropologique » pour refuser le mariage aux couples homosexuels.
L'ouverture du mariage et de l'adoption conjointe aux personnes de même sexe est parfois dénoncée à raison de ses conséquences pour le mariage traditionnel et pour la filiation. L'argument ne peut être reçu, compte tenu du champ limité du présent projet de loi. Les couples homosexuels accéderaient à l'adoption conjointe et au mariage sans en changer les règles, en dehors de la dévolution du nom de famille pour l'adoption. Rien n'est ôté au mariage que connaissent aujourd'hui les couples hétérosexuels. Les règles et les effets de la filiation biologiques demeurent inchangés. La présomption de paternité du mari est maintenue et ne concernerait pas les époux de même sexe. Aucune modification n'est apportée aux principes régissant l'autorité parentale. Le régime juridique de l'adoption plénière et de l'adoption simple resterait le même s'agissant de la possibilité pour l'enfant de maintenir une filiation préétablie ou d'accéder à ses origines personnelles. Chaque forme de famille conserverait ainsi la place que lui fait le droit dans la société, et une nouvelle serait admise à leur côté.
Certains, au cours des auditions, ont craint que la réforme ouvre la voie à d'autres qui engageraient notre société sur une pente dangereuse. L'argument de l'inexorabilité d'une évolution mue par la revendication d'égalité, à laquelle plus aucun principe ne pourrait être opposé, repose cependant sur une prémisse contestable : la revendication d'égalité serait sans freins, parce qu'elle serait sans guide. Or, il appartient au législateur de décider, conformément à l'idéal républicain, sous quel rapport la différence de situation qui existe entre deux individus justifie, ou non, qu'ils soient traités différemment. La différence entre un couple constitué d'un homme et d'une femme, et un couple constitué de deux hommes ou de deux femmes peut ainsi être jugée pertinente pour ce qui intéresse la filiation biologique, mais sans effet pour ce qui concerne l'exercice des droits parentaux ou l'établissement d'une filiation adoptive conjointe. Déjà, le législateur a pu réserver l'accès aux techniques de procréation médicalement assistée aux couples constitués d'un homme et une femme dans le seul cas d'une infertilité médicalement constituée, sans l'ouvrir à ceux qui ne présentent pas cette infertilité. Même, parmi les couples infertiles, il a opéré une distinction entre ceux dont l'infertilité peut faire l'objet d'un traitement procréatif qu'il a autorisé, et ceux dont l'infertilité, due à une impossibilité pour la femme à porter l'enfant, ne peut trouver un remède que dans la gestation pour autrui, qu'il a prohibée. Le législateur a donc posé des freins à la revendication d'égalité.
Le Gouvernement a annoncé un projet de loi consacré à la famille, qui abordera des questions non traitées par le présent projet de loi, notamment l'adoption et la filiation. Il reviendra au législateur de se prononcer sur ces sujets. Préjuger aujourd'hui de ses choix, en tirant argument d'une évolution irrémédiable engagée, dès à présent, par le texte qui vous est soumis, est méconnaître le pouvoir souverain de la loi. D'ailleurs, l'observation des pays européens qui ont autorisé le mariage homosexuel montre la palette des solutions retenues par chacun. Aussi important qu'ait été le débat qui a précédé ces réformes, celles-ci se sont déroulées sans heurts et ont été assimilées sans difficulté par la société.
L'exemple français du pacte civil de solidarité enseigne que le temps est l'allié le plus précieux des réformes de société. Le débat qui a précédé l'adoption de la loi du 15 novembre 1999 fut particulièrement vif, et les craintes alors exprimées furent les mêmes que celles formulées aujourd'hui. Pourtant le succès de cette législation ne se dément pas et le dispositif est prisé au point d'être salué par ceux qui s'opposent au mariage des personnes de même sexe et souhaitent désormais la mise en place d'un Pacs amélioré ou d'une union civile conçue sur son modèle. L'histoire du Pacs est-elle prémonitoire de celle du mariage homosexuel ? Les exemples des États européens qui l'ont autorisé peuvent conduire à le penser. L'étude de législation comparée réalisée à la demande de la commission montre que six États européens ont ouvert le mariage aux personnes de même sexe : les Pays-Bas (2001), la Belgique (2003), l'Espagne (2005), la Suède (2009), et le Portugal (2009). L'Angleterre s'est depuis engagée dans cette voie. Aucun n'a depuis remis en cause l'ouverture du mariage aux couples homosexuels, en dépit des alternances politiques : la réforme s'est progressivement enracinée. Les différentes cours constitutionnelles ont validé les dispositifs concernés.
L'ouverture du mariage aux couples homosexuels n'est pas seulement légitime, elle est aussi nécessaire, pour deux raisons. Elle rend enfin le droit conforme aux évolutions de la société et elle garantit aux familles homoparentales la même protection et la même reconnaissance sociale que la loi accorde aujourd'hui aux familles traditionnelles.
Certains évoquent une dénaturation de l'institution du mariage. Mais n'est-ce pas renverser l'ordre des choses ? Car le texte proposé sanctionne plutôt l'évolution de l'institution elle-même, qui s'est abstraite du modèle cristallisé pendant plusieurs siècles sur lequel elle reposait, pour revenir aux principes de liberté et d'universalité qui la caractérisaient à l'origine : institution de protection plus que seul modèle de filiation possible. « Une affirmation de la liberté de l'homme, dans la formation comme dans la dissolution du lien matrimonial, c'est, pour l'ordre terrestre, l'essentiel du message français », rappelait le doyen Jean Carbonnier. Cette affirmation, qui renoue avec l'esprit consensualiste du droit romain du mariage, s'est trouvée confirmée successivement par l'article 7 de la Constitution du 3 septembre 1791 ou l'article 146 du code civil, inchangé depuis 1804.
Cet esprit de liberté s'appuie sur l'universalisme de l'accès au mariage : tout citoyen majeur peut y prétendre. La Révolution a ici opéré une rupture avec le mariage religieux de l'Ancien régime et confirmé l'égalité de tous devant le mariage. En consacrant la liberté de mariage et en la rattachant à la liberté personnelle découlant des articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, le Conseil constitutionnel a marqué qu'elle a partie liée avec l'universalisme républicain. L'évolution du mariage vers plus de liberté et d'égalité s'est poursuivie au dix-neuvième siècle, puis au vingtième, avec le rétablissement du divorce et, surtout, la fin du monopole du mariage pour l'établissement de la filiation : la loi du 3 janvier 1972, inspirée par le doyen Carbonnier, a engagé l'abolition de la distinction entre les enfants légitimes, adultérins et naturels.
Parallèlement, les formes de conjugalité ont évolué : s'il reste majoritaire, le mariage n'est plus la seule union possible. Une étude de l'Insee montre qu'en 2011, en France métropolitaine, sur 32 millions de personnes majeures déclarant être en couple, 72 % sont mariées et partagent la même résidence que leur conjoint, 22,6 % sont en union libre et 4,3 % sont pacsées. Cette évolution des conjugalités s'est répercutée sur les filiations. Depuis 2006, il naît plus d'enfants hors mariage qu'au sein du mariage : en 2012, presque 57% des naissances totales. Il n'est dès lors plus aujourd'hui possible de considérer le mariage comme l'unique institution de la filiation, indissociable de la filiation biologique.
Le sens du mariage a évolué, exprimant avec plus d'intensité ses ressorts libéraux et égalitaires. Le texte qui vous est soumis accompagne cette dynamique plus qu'il ne la crée. L'institution du mariage a ainsi sensiblement changé de sens et de but : elle n'est plus un mécanisme de légitimation sociale des familles, mais la garantie de leur protection. Chacun investit le mariage d'une signification qui lui est propre et emprunte à ses convictions religieuses, philosophiques ou civiles. Mais, quel que soit le sens qu'on lui donne, le mariage n'est jamais moins que le plus haut degré de protection juridique que peuvent se vouer librement deux personnes qui s'aiment. Cette protection transparaît à chaque moment du mariage. Surtout, elle s'étend aux enfants, car il est de leur intérêt que chacun de leurs parents soit suffisamment protégé. Elle se manifestera, notamment, par le fait qu'un juge se prononcera obligatoirement, en cas de séparation, sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale.
Ainsi compris, rien ne peut justifier de tenir encore à
l'écart de la protection de la loi les familles homoparentales qui
souhaiteraient se placer sous son égide. Cette demande est
légitime, parce qu'il s'agit d'une demande de reconnaissance et de
protection juridique, à l'égal des autres. La réforme
proposée parachèverait une évolution engagée depuis
plusieurs années, d'acceptation sociale de l'homosexualité et
d'affirmation en parallèle des familles homoparentales. Le projet de loi
sur le mariage ne doit pas faire oublier, qu'avant même que se posent les
questions de reconnaissance civile des couples homosexuels, la première
victoire a été celle de l'abrogation de toute prohibition
pénale de l'homosexualité par la loi du 27 juillet 1982,
avec l'abrogation des délits spécifiques d'homosexualité.
Le combat s'est ensuite déplacé du plan pénal au plan
civil, de l'acceptation à la reconnaissance civile engagée par le
Pacs
- ouvert à tous pour éviter d'enfermer les couples
homosexuels dans un statut à part. Pour autant, il s'est limité
à des effets patrimoniaux : ne confèrant aucun droit en
matière de filiation ni même d'autorité parentale, il
facilite la vie des couples, mais pas celle des familles. Une étape
séparait donc encore les familles homoparentales de
l'égalité avec les familles hétérosexuelles :
le présent texte prétend la franchir.
Nombreux furent ceux qui ont évoqué, au cours des auditions, la question de l'intérêt supérieur de l'enfant, parfois pour s'étonner, comme M. Baudis, qu'elle n'ait pas été plus présente dans l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi, ou pour évoquer la question de l'adoption par un conjoint du même sexe, comme Mme Marie-Anne Chapdelaine, présidente du conseil supérieur de l'adoption. L'argument est majeur, parce qu'il vise notamment la procédure d'adoption intrafamiliale de l'enfant du conjoint. L'approche doit être pragmatique : ces familles et ces enfants ont droit à la protection de la loi. Or, elles sont fragilisées par le fait que l'un des deux parents n'a aucun lien juridique avec l'enfant qu'il élève pourtant aussi bien qu'un autre parent. Pour y remédier, il est nécessaire d'autoriser l'adoption de l'enfant de l'autre parent. Or l'adoption de l'enfant du conjoint n'est possible que dans le mariage. Ouvrir le mariage aux couples de même sexe est ainsi permettre à leurs enfants de profiter de la protection que leur garantira cette adoption. Cette protection, d'ailleurs, s'étend au-delà du simple lien de filiation, pour atteindre la protection mutuelle des époux, car il est de l'intérêt des enfants que leurs parents voient leur propre situation assurée face aux accidents de la vie ou du sentiment.
Je n'ai pas souhaité étendre le champ couvert par le présent texte à d'autres questions comme la PMA ou l'extension des possibilités d'adoption, qui seront débattues dans le cadre du projet de loi à venir sur la famille.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Merci. Je vous propose d'avoir un débat général avant de discuter des amendements.
M. Patrice Gélard . - Je salue le travail du rapporteur. J'avais moi aussi procédé à de nombreuses auditions - il s'agissait d'ailleurs assez largement des mêmes personnes.
Le Président de la République avait pris l'engagement de lancer, sur les grands problèmes de société, une vaste concertation impliquant l'ensemble de l'opinion publique. Je constate que ce n'est pas le cas. Il y a même un refus de concertation ! Heureusement que la commission des lois de l'Assemblée nationale, et surtout celle du Sénat, ont mis en place un tel débat. Ce refus transparaît nettement dans le caractère rapide et fort discutable de l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi : elle est tout simplement bâclée, ne va pas au fond des choses, et traite avec légèreté d'éléments fondamentaux. Le débat part donc sur de mauvaises bases, par la faute du Gouvernement.
Je pense que le rapporteur a fait siennes les thèses des gender studies ... Ce n'est pas mon cas : je tiens, à la suite du doyen Hauriou, qu'il y a en France une constitution sociale à côté de la constitution écrite, dont font partie les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, ainsi que les parties du droit civil consacrées à la famille, comme le disait le doyen Carbonnier. Le droit de la famille ne peut pas se manipuler comme d'autres aspects du droit. Il s'agit d'un élément fondamental de notre contrat social. Il est possible de le remettre en cause, mais avec précaution et non par une procédure législative ordinaire, sans concertation avec l'opinion publique...
Notre conception du mariage diffère de celle des pays dans lesquels les études de droit comparé nous montrent que le mariage pour les couples de même sexe a été adopté. Dans les pays protestants, le mariage est dépourvu de la solennité que nous y mettons : le code civil le revêt chez nous d'une valeur sacramentelle, renforcée par la difficulté d'y mettre fin. Vous me direz que l'Espagne n'est pas un pays protestant, mais c'est un cas à part : une décision récente de la Cour constitutionnelle a simplement reconnu le bien-fondé de la loi, puisque la Constitution espagnole prévoit que le législateur peut intervenir sur le sujet - encore a-t-il fallu près de sept années pour que cette décision soit rendue. Notre conception du mariage est héritée de la Révolution française, et même du droit romain, et n'est pas analogue à celle des pays scandinaves ou nordiques.
En ce qui concerne l'adoption, la loi aboutira à une inégalité foncière entre les enfants. Certains ne seront pas adoptables, d'autres le seront par adoption simple, d'autres par adoption plénière : il ne s'agit pas d'égalité mais bien d'une inégalité totale de statuts ! Ce problème n'est pas résolu par les amendements de notre rapporteur. Il en va de même pour d'autres sujets : rien n'est dit sur la situation du beau-parent dans les couples homosexuels, comme dans les couples hétérosexuels. Déjà, pour le Pacs, Mme Guigou avait promis que ce problème serait traité, cela n'a jamais été fait ! Depuis longtemps il y a des enfants qui sont élevés par une ou deux femmes, ou un ou deux hommes. L'adoption plénière par une seule personne a été mise en place après la première guerre mondiale pour reconnaître des situations de fait causées par le manque d'hommes. Pourquoi l'adoption simple est-elle délaissée ? Parce que son régime fiscal lui ôte tout intérêt... C'est une anomalie de notre droit.
D'autres pistes mériteraient d'être étudiées et ne l'ont pas été. Le parrainage civil a été rétabli - à juste titre. Pourquoi ne pas l'utiliser dans ces situations ? Certains cas ne sont pas traités par la loi. Prenez par exemple le cas d'un homosexuel qui aurait un enfant avec une homosexuelle par insémination artificielle. Le conjoint de chacun des deux parents pourra souhaiter l'adopter, ce qui ferait quatre parents en tout ! C'est impossible, car l'enfant a déjà un père et une mère. Cela illustre bien la nécessité de revoir de fond en comble le problème de l'adoption, qui est mal traité par notre droit - ou plutôt traité en fonction des problématiques de transmission de patrimoine et de nom. Nous avons tué l'adoption simple, qui résoudrait tous les problèmes.
La délégation de l'autorité parentale est encore exceptionnelle. La question se pose dans les couples hétérosexuels aussi. Il faudrait l'étudier en profondeur.
Nous ne voterons pas ce texte. Nous proposons une union civile, qui garantit les mêmes droits que le mariage mais qui n'entraîne aucune conséquence en matière de filiation et d'adoption.
L'adoption doit être réexaminée. Dans ce texte, cette question est bâclée. De plus ne soyons pas hypocrites. Chacun sait qu'aujourd'hui, dans les faits, il est impossible d'adopter : aucune adoption depuis six ans en Belgique ; aux Pays-Bas seuls des enfants hollandais peuvent être adoptés. Certains pays, comme la Russie, ou le Viet-Nam, qui autorisaient l'adoption pour une personne seule envisagent de l'interdire désormais pour les couples homosexuels.
Une modification aussi brutale de notre contrat social aurait nécessité une réflexion plus large. Nous sommes favorables à une évolution, mais les propositions du rapporteur apparaissent prématurées, insuffisamment concertées et décalées par rapport à l'opinion publique.
Mme Esther Benbassa . - Que de discussions auraient été évitées si cette loi s'était intitulée « ouvrir le mariage civil aux personnes de même sexe » ! Nous ne demandons pas une consécration par les autorités religieuses ...
Le rapport omet la notion de « parent social ». Or il s'agit d'une notion essentielle au regard de la filiation.
Nous voterons le texte même si nous défendrons nos amendements sur l'adoption, la filiation ou la notion de parent social, car nous craignons que le projet de loi sur la famille, que Mme Bertinotti prépare, ne soit repoussé aux calendes grecques.
M. Michel Mercier . - Notre société a changé, en effet. Notre législation doit être plus respectueuse des droits des personnes homosexuelles. Toutefois une modification aussi profonde du mariage tel que le concevait Portalis ou le doyen Carbonnier n'est pas justifiée.
Monsieur le rapporteur, vous n'avez avancé, pour défendre ce texte, que deux arguments, tout en vous contredisant. L'égalité, tout d'abord. Mais le mariage est fondé sur l'altérité. De plus l'égalité a ses limites : quid des pères privés de la garde de leurs enfants ? Quid également de la différence des sexes au nom de laquelle Portalis justifiait, en 1804, le mariage ? Enfin le texte aboutit à la coexistence de deux mariages différents, puisque le mariage entre personnes hétérosexuelles demeure inchangé. Ils ne sont donc pas égaux. Autre argument, le périmètre de ce texte serait limité. Mais une autre loi est annoncée régulièrement, pour satisfaire les uns ou effrayer les autres. Le périmètre n'est donc pas fixé.
Ce texte change la définition du mariage : celui-ci qui était un acte à la fois individuel et collectif devient simplement un acte individuel. Je suis partisan d'un texte qui accorderait plus de droits aux personnes de même sexe, leur reconnaissant un droit au « mariage », avec toute la dimension symbolique que cela comporte, même si nombreux sont ceux qui ne souhaitent pas que la loi leur impose des règles, mais sans inclure la filiation, qui relève d'une autre dimension. En tant qu'élu j'ai souvent accordé l'autorisation d'adopter à des personnes homosexuelles, parfois en toute connaissance de cause : il vaut mieux, en effet, être adopté par un couple homosexuel bien éduqué et aisé que par un couple hétérosexuel alcoolique qui le battra. Mais ne généralisons pas !
Nous sommes prêts à travailler à un statut des personnes de même sexe. Toutefois ce texte va bien au-delà car, avec l'article 143 du code civil, il modifie profondément la filiation.
Mme Cécile Cukierman . - Je suis satisfaite des auditions menées par notre commission. Chacun a pu s'exprimer et donner son avis.
Nous soutenons ce texte. Il ouvre simplement l'accès au mariage aux personnes de même sexe qui le souhaitent et constitue une avancée dans le sens de l'égalité.
Nos amendements reprennent ceux déjà déposés par Mme Buffet à l'Assemblée nationale. Nous ne souhaitons pas tant élargir le champ de ce texte que prendre date en vue de prochain projet de loi sur la famille et faire en sorte qu'il ne soit pas repoussé aux calendes grecques. Nous défendrons nos amendements, sans conditionner notre accord à leur adoption. Il serait en effet naïf et hypocrite de se satisfaire de ce texte en ignorant les discussions qui traversent la société. La revendication d'un certain nombre de couples homosexuels est devenue une avancée progressiste alors que certains considéraient il y a peu le mariage comme une institution bourgeoise...
M. Jean-Jacques Hyest . - Marx !
Mme Cécile Cukierman . - Le marxisme consiste justement à savoir s'adapter ! Le mariage a partie liée avec la transmission de la vie et la construction d'une famille. Des avancées sont nécessaires.
M. Jean-René Lecerf . - Je félicite le rapporteur pour la qualité de son travail et ce n'est pas un compliment de simple politesse ! Notre commission a su organiser des auditions dans un climat bien différent de celui qui a prévalu à l'Assemblée nationale, en particulier lorsque les représentants des cultes ont été entendus !
Si ce texte avait eu uniquement pour objet l'élargissement du mariage aux personnes de même sexe, je l'aurais soutenu. : le mariage n'étant pas un contrat mais une institution, il est normal qu'il soit ouvert à tous. Mais l'intitulé du projet de loi ne correspond pas à la réalité. Il implique aussi, qu'on le veuille ou non, l'homoparentalité et la banalisation de la procréation médicalement assistée (PMA) ou de la gestation pour autrui (GPA) que la jurisprudence de la CEDH rendra inévitable, comme l'expliquent les professeurs de droit, si le principe du mariage pour tous est adopté.
Je ne crois pas, à la différence d'Élisabeth Badinter, à une « GPA éthique », qui relève de l'angélisme. Aussi, en dépit de mon accord sur le titre de ce projet de loi, je ne le voterai pas.
Mme Catherine Tasca . - Le rapporteur a choisi une approche juridique, elle était nécessaire. Chacun a pu se forger son opinion : nos positions divergent mais nul ne peut prétendre que le débat n'a pas eu lieu. Autre motif de satisfaction : le rapporteur n'a pas élargi le périmètre. Une loi sur la famille nous donnera l'occasion de poursuivre l'adaptation de notre droit aux attentes de la société.
Je regrette qu'en dix ans le législateur n'ait pas fait évoluer le Pacs. Aussi le mariage civil constitue-t-il, aujourd'hui, le meilleur cadre de protection des intérêts des partenaires.
À titre personnel, je considère que le principe d'égalité n'était sans doute pas le meilleur argument à invoquer à l'appui du texte. Mieux aurait valu considérer le mariage pour tous comme une liberté nouvelle, susceptible à ce titre d'être encadrée par le législateur. Bien des critiques auraient été évitées.
Je partage l'avis du rapporteur : nous devrons réfléchir à l'adoption. Un point fait l'objet de consensus : il faut s'attacher en priorité à l'intérêt supérieur de l'enfant.
M. Jean-Jacques Hyest . - Vous avez cité Mme Chapdelaine, mais en tronquant ses propos ; selon elle, le Conseil supérieur de l'adoption était très partagé. Je regrette également que les représentants minoritaires des religions n'aient pas été auditionnés.
Vous invoquez l'égalité. Mais on ne peut appliquer l'égalité qu'à des situations égales. Or le mariage est fondé sur l'altérité. Le texte ne se contente pas d'ouvrir le mariage aux couples de même sexe, il bouleverse l'institution du mariage, il la subvertit. La notion de « genre » s'est déjà répandue dans les conventions internationales. Peu à peu la notion de personne dotée d'une orientation sexuelle se substitue à la notion de sexe. Les difficultés apparaissent si l'on creuse.
Lors de la création du Pacs, la garde des sceaux de l'époque nous avait affirmé que l'on n'irait pas plus loin, réaffirmant que le Pacs se différenciait du mariage défini par l'union d'un homme et d'une femme. La situation a évolué !
Certains ont déposé des amendements sur la PMA, qui devient la procréation socialement assistée... Un texte à venir concernera la famille, dit-on. Mais l'adoption relève déjà du droit de la famille, et les objections juridiques abondent.
C'est avec les amendements de coordination que le bât blesse. Comment appliquer les notions du mariage du code civil aux couples homosexuels ? Le projet de loi initial avait sa logique : il supprimait les termes de « père » et de « mère ». Les résistances ont été vives. Mais la solution retenue depuis se révèle problématique.
Je ne soutiendrais que la création d'une union civile. Je n'irai pas au-delà.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Monsieur Hyest, il est vrai que la garde des sceaux avait indiqué lors du débat sur le Pacs qu'il n'était pas question d'instaurer un droit au mariage pour les personnes de même sexe. Mais ceux qui, à l'époque, s'opposaient au Pacs en font aujourd'hui l'éloge et souhaiteraient le transformer en une union civile. Tout le monde évolue car la société évolue !
Les personnes homosexuelles ont été vilipendées, stigmatisées pendant des siècles, accusées de commettre un grave péché par certaines religions, un crime par certaines sociétés. Ces indignités étaient couvertes par un prétendu consensus social.
Je voterai ce texte pour deux raisons. D'une part il constitue une reconnaissance. Beaucoup de personnes homosexuelles considèrent, alors même qu'elles ne souhaitent pas se marier, que l'égalité des droits est un signe de reconnaissance. D'autre part, comment justifier que deux personnes de même sexe ne puissent pas adopter, alors que des personnes vivant seules en ont le droit ?
Ma position, en revanche, est plus réservée sur la PMA et la GPA. Je ne serais pas prêt à voter un texte les banalisant. L'argument selon lequel, si une mesure a été adoptée à l'étranger, elle devrait être obligatoirement adoptée en France, ne tient pas. Supprimons le Parlement dans ce cas ! La circulaire de la garde des sceaux concernant les enfants nés dans ce cadre à l'étranger répond à une situation de fait. Ces enfants ne doivent pas être apatrides. Elle ne modifie pas le droit. À cet égard, rien ne changera tant que nous ne l'aurons pas décidé.
M. Alain Anziani . - La ligne de fracture entre nous tient à la définition du mariage. Celle-ci n'est pas gravée dans le marbre d'une réalité biologique mais correspond à une notion sociale.
Je ne partage pas l'avis de M. Lecerf. L'arrêt de la CEDH rendu en février concernant l'Autriche n'implique pas un élargissement de la PMA. Les couples homosexuels auront les mêmes droits que les autres, sans plus. Or la PMA est soumise à des conditions très restrictives qui ne sont pas modifiées.
On peut en revanche s'interroger sur l'opportunité de l'élargissement des conditions d'accès à la PMA car il suffit aux couples de se rendre en Belgique pour en bénéficier. Accepterons-nous que les couples puissent se rendre en Belgique, concevoir un enfant grâce à la PMA puis revenir en France pour le légitimer grâce à l'adoption ? La clef de voûte est l'adoption.
Je regrette que les articles 343 et 360 du code civil concernant l'adoption, ou 310 sur la filiation, n'aient pas été réécrits. Le Conseil constitutionnel risque de considérer qu'il existe des contradictions entre ce texte et le code civil.
Je soutiens les amendements du rapporteur sur la pluriparentalité qui permettront d'éviter la multiplication des parents par le biais d'adoptions successives. En revanche, la création proposée par Mme Benbassa d'une présomption de parentalité accordée au conjoint ou à la conjointe d'un parent me semble problématique. À ces réserves près je suis favorable au texte.
M. François Pillet . - Je suis satisfait que le Sénat, à la différence de l'Assemblée nationale s'empare de ce sujet difficile dans une ambiance calme et sereine.
Un consensus existe sur la nécessité d'adapter le statut des personnes qui vivent ensemble dans des règles fixées par la société, alliance ou mariage, pour qu'ils bénéficient des mêmes droits. Je regrette qu'une opportunité d'apaiser le débat dans l'opinion publique n'ait pas été saisie. La solution que nous proposons pourrait être acceptée aussi bien par Mme Benbassa que par Mme Tasca : une alliance pour les personnes de même sexe et le mariage pour les personnes de sexe différent.
L'égalité est brandie pour défendre le mariage pour tous. Mais au prix de quels sophismes ! L'égalité, c'est l'égalité des droits : il suffisait de créer une autre institution. Mais ceux qui réclament aujourd'hui l'égalité ne revendiquaient-ils pas naguère le droit à la différence ?
En outre, le mariage, à la différence d'une alliance, implique la parentalité, l'apparition d'un troisième être, l'enfant, titulaire de droits qu'il ne faut pas négliger. À cet égard le texte est ambigu.
J'aurais volontiers voté ce texte, mais il ne résout pas toutes les ambiguïtés sur les droits de l'enfant, qui sont différents de ceux des parents. Tout enfant a le droit inaliénable de connaître ses origines. Je m'opposerai à tout dispositif qui le nierait. Je refuse que le droit à l'enfant l'emporte sur les droits des enfants.
M. Christophe Béchu . - Pourquoi s'opposer à ce texte qui ne modifie pas la situation des couples hétérosexuels, mais permet aux couples homosexuels de vivre leur amour en bénéficiant de la même reconnaissance institutionnelle et symbolique ? Telle n'est pas la question. L'enjeu n'est pas d'ordre compassionnel ou humaniste mais juridique. Il s'agit de tenir compte non seulement des aspirations individuelles mais aussi de l'intérêt général. La ligne de fracture ne sépare pas les protagonistes selon le respect qu'ils portent aux individus. L'enjeu est social.
L'évolution des mentalités ne saurait constituer un argument : bien des évolutions ne nous conduisent pas à légiférer.
Ne vidons pas le concept d'égalité de son sens. L'égalité, c'est accorder les mêmes droits à des personnes placées dans une même situation. Justifier le mariage pour tous de la sorte aboutit à frayer la voie à tous les amalgames dans tous les domaines de notre droit.
Enfin ce texte consacre encore davantage les droits des adultes au détriment des droits des enfants. Dans son blog, M. Rosenczveig, juge pour enfants au tribunal de Bobigny, peu suspect de conservatisme, s'alarme de cette évolution qui s'étend à de nombreux domaines.
Je comprends la logique de ceux qui souhaitent tirer toutes les conséquences de la recherche de l'égalité, selon lesquels le mariage conduit à la PMA et à la GPA pour tous. Je comprends moins la position de ceux qui souhaitent accorder l'égalité par paliers en ne se déclarant favorables qu'au mariage ou à l'adoption. Comment justifier alors l'absence de PMA et de GPA ? Des inégalités entre couples de lesbiennes et homosexuels masculins existeront. En outre, ce cadre juridique ne permettra pas de répondre aux situations de fait qui surgiront. La logique du « ni-ni » conduira à des évolutions au cas par cas, comme l'illustre la circulaire de Mme Taubira qui cherche à résoudre le cas inextricable de quelques enfants - entre 15 et 20 - nés de mères porteuses à l'étranger, dont la mère biologique n'est pas reconnue et dont la mère sociale n'est pas la mère biologique.
Aussi ayons un débat franc entre partisans de cette logique, avec toutes ses conséquences, et ceux qui considèrent qu'une autre voie est possible, dans le respect des personnes, y compris d'un point de vue symbolique, sans remettre en cause le droit des enfants et notre socle social.
Mlle Sophie Joissains . - Selon le rapporteur, lorsque l'on a un but, le droit s'adapte. M. Vial - qui a dû s'absenter momentanément - m'a demandé de faire part de sa réaction à la commission. Il s'étonne que le rapport fasse croire qu'il n'est pas question de GPA ou de PMA, alors qu'elles constituent la conséquence logique du droit au mariage pour les personnes de même sexe.
Pour ma part, je considère que la suppression de l'altérité dans le mariage fragilise cette institution. Bientôt - le président du conseil français du culte musulman ne m'a pas contredite -, c'est la condition du nombre qui pourra évoluer puisque le mariage aura perdu son caractère sacré.
Comme MM. Pillet et Lecerf j'aurais soutenu cette mesure si elle ne consistait qu'en une reconnaissance symbolique. En revanche les dispositions sur la filiation n'ont pas fait l'objet d'une réflexion suffisamment approfondie. Le principe d'égalité n'oppose aucune barrière à l'extension de la PMA et de la GPA. Cette loi conduit à une réification de l'enfant, dont les droits sont relégués au second plan derrière le désir d'enfant. À terme elle s'accompagnera du développement de la commercialisation du corps humain, de sa marchandisation, et de la négation du lien particulier qui unit la mère à l'enfant qu'elle a porté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Monsieur Gélard, c'est vrai, il y a une constitution écrite et une constitution sociale, mais la principale évolution de notre constitution sociale s'est produite lorsque le père d'un enfant né hors mariage s'est vu reconnaître le droit de le légitimer, sans même l'accord de son épouse. Cette révolution fondamentale a sonné le glas du mariage fondé sur la paternité, la transmission du nom, l'héritage.
Effectivement, il ne faut pas mettre sur le même plan les pays nordiques et les pays de tradition judéo-chrétienne. Dans les premiers, pays protestants, le mariage n'est pas un sacrement et les Églises procèdent aux mariages civils et religieux, pour tous les couples, de sexes différents ou non, et tiennent l'état civil. Dans les pays à dominance catholique, en Amérique du sud, au Portugal, en Espagne, la situation est différente. Mais nous ne pouvons pas nous appuyer sur la conception catholique du mariage. Le texte d'ailleurs ne fait pas mention du mariage religieux et n'oblige pas les Églises à marier religieusement ceux qui auront été mariés civilement.
La question du parent social trouve ici un début de solution, puisque nous reprenons la définition qu'en a donnée l'Assemblée nationale, en la déplaçant au sein du texte, pour plus de lisibilité, et que nous ajoutons une garantie contre son éviction éventuelle, auprès de l'enfant, par le nouveau conjoint du parent légal.
Notre législation sur l'adoption n'est plus adaptée. D'une part, il n'y a presque plus d'enfants adoptables en France. D'autre part, l'adoption plénière a été conçue après la guerre de 1914-1918 : à cette époque, des bébés étaient concernés, il était facile de gommer leurs origines. Cela n'est plus vrai aujourd'hui, car les enfants sont généralement plus grands lorsqu'ils sont adoptés, en France ou à l'étranger.
Si un couple homosexuel a la chance d'adopter à deux un enfant étranger, celui-ci comprendra immédiatement qu'il n'est pas issu de ce couple : il sera peut-être différent par sa couleur de peau, et surtout, il comprendra très tôt qu'il faut un homme et une femme pour faire un enfant.
Je suis absolument favorable à ce que les enfants connaissent leurs origines et leur histoire. La personnalité ne se construit pas sur le mensonge : nous connaissons tous des exemples d'adoption cachée à l'intéressé, nous en savons les conséquences...
Les auditions ont été riches, et j'ai retenu ce que nous a dit Mme Chapdelaine, présidente du Conseil supérieur de l'adoption. Nous cherchons une formule autre que l'adoption afin que les enfants, lorsqu'ils ne sont pas adoptables parce qu'ils reçoivent une carte postale par an, ne soient plus brinquebalés d'une famille d'accueil à l'autre.
Mme Esther Benbassa . - C'est un business !
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Il serait bon de trouver une solution juridique afin que ces enfants restent dans la même famille d'accueil.
À partir du moment où les couples homosexuels sont autorisés à se marier, il est logique de leur ouvrir, dans un cadre qui est à revoir, l'adoption simple ou plénière. Les adoptions plénières intra-familiales deviendront possibles, ce qui règlera également le problème du beau-parent. Aujourd'hui, on peut avoir trois parents, deux biologiques et un adoptif. Cela ne changera pas ! Nous avons su éviter l'écueil de la pluri-parentalité. Je m'en réjouis : adoption sur adoption ne vaut.
Devons-nous traiter inégalement les enfants des couples mariés et les enfants des couples homosexuels ? Non ! Mais l'égalité, monsieur Mercier, n'est pas le seul fondement de la loi. Je vous le concède, l'étude d'impact, l'exposé des motifs, ne sont pas fantastiques. La loi repose aussi sur le principe de la liberté, que le projet de loi encadre, pour éviter les dérives. La liberté ne consiste pas à faire tout et n'importe quoi ; et c'est au législateur qu'incombe la responsabilité de mettre le holà. J'ajoute qu'il y a aujourd'hui des discriminations volontairement établies par la loi pour la PMA, tous les couples ne sont pas traités à égalité.
Madame Cukierman, nous traiterons de la famille ultérieurement. J'en profite pour rendre hommage aux améliorations du texte apportées à l'Assemblée nationale par Mme Marie-George Buffet. Elle a été une des premières au parti communiste à soutenir le Pacs et le droit des homosexuels. Nous retiendrons les amendements qu'elle a présentés en séance et qui ont été adoptés.
J'ai répondu en partie à M. Lecerf, ainsi qu'à Mme Tasca : le législateur doit fixer des limites. Ici, il n'enlève rien aux uns, mais donne aux autres. Nous verrons dans un texte ultérieur ce qu'il convient de modifier pour tous.
Monsieur Hyest, les homosexuels peuvent d'ores et déjà adopter en tant que célibataires. Quant aux minorités cultuelles, j'ai entendu quatre groupes de minorités, catholique, protestant, israélite et musulman la semaine dernière ; je regrette que le compte rendu de ces rencontres ne puisse figurer en annexe du rapport. J'avoue avoir été très surpris par l'association des musulmans progressistes, favorable au mariage pour tous et à toutes les avancées concernant la filiation.
Mme Esther Benbassa . - Chez les libéraux seulement !
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Ce sont les minorités qui font les avancées sociales, en droit du travail, dans le droit civil... Elles proposent, essuient des refus, jusqu'au jour où elles obtiennent satisfaction.
Monsieur Anziani, si certains professeurs de droits et magistrats en mal de reconnaissance ont vaticiné sur le risque de censure, ni les décisions antérieures du Conseil constitutionnel ni le droit européen ne permettent de présumer que les dispositions seront jugées inconstitutionnelles.
À M. Pillet, je dirai que je n'ai pas la prétention de convaincre, mais que je suis totalement partisan de la connaissance des origines.
S'agit-il d'une remise en cause de la signification du mariage ? « Le mot est le meurtre de la chose », disait Jacques Lacan. Or la chose est là : les couples homosexuels demandent à pouvoir se marier, à participer à cette institution républicaine. Le mot n'est pas sacré, le mariage est inscrit dans le code civil et nous devons accepter qu'il s'applique à des situations différentes de celles que nous connaissons.
Monsieur Béchu, la circulaire de la garde des sceaux dit simplement que les enfants nés de GPA à l'étranger auront la nationalité de leur père. C'est l'intérêt de l'enfant qui est ici considéré. Je l'ai dit à mon ami Jean-Pierre Rosenczveig : il ne s'agit pas de faire droit au désir d'enfant des parents mais de protéger l'enfant. Pourquoi supporterait-il les conséquences de l'infraction commise par ses parents ? Les enfants nés d'une PMA ou d'une GPA à l'étranger, sur les conseils de bons gynécologues français, ont-ils ou non droit à la même protection que ceux qui sont nés en France d'un homme et d'une femme ? Si vous répondez oui, la question est réglée.
M. Michel Mercier . - Finalement, il suffit donc d'avoir de l'argent et d'aller à l'étranger...
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - À Mme Joissains, je réponds que certes, le texte n'aborde pas toutes les questions de filiation.
Le professeur Hauser, qui lors de la création du Pacs proposait une union civile dans un rapport remis à la ministre, nous enjoint à prendre aujourd'hui nos responsabilités : si nous acceptons la demande des couples homosexuels de rentrer dans la même institution que les autres, et d'être placés sur un pied d'égalité, nous nous engageons à revoir, dans une loi sur la famille, tous les types de filiation et à définir les conditions dans lesquelles le citoyen, qu'il soit célibataire, père adoptif, parent homosexuel ou hétérosexuel, marié, pacsé ou en union libre peut avoir un enfant.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Articles additionnels avant l'article 1 er
M. Christian Cointat . - De nombreux homosexuels revendiquent l'égalité des droits mais ne souhaitent pas se marier : ils trouvent seulement anormal de ne pas avoir les mêmes droits sociaux, fiscaux, successoraux. D'autres veulent se marier par idéologie, ils entendent que leur couple soit reconnu comme les autres. Certains jeunes choisissent d'aller se marier à l'étranger et s'installent dans un pays où ils peuvent épouser leur conjoint de même sexe. Enfin, comme l'a rappelé le doyen Gélard, faute d'enfants à adopter, il n'y a pas d'adoptions par des couples homosexuels - la Belgique, qui les a autorisées il y a dix ans, n'en pas connu une seule !
La question des enfants à venir ne se pose donc qu'en théorie. En revanche, il faut résoudre le problème des enfants existants, nés d'un des parents homosexuels. Sur ce point, le Pacs ne suffit pas ; du reste, à sa création, j'avais voté contre pour cette raison et la suite des événements m'a donné raison. C'est l'objet de mon amendement n° COM-1, qui s'ajoute au texte sans s'y substituer. Je me distingue ainsi de mon groupe UMP, puisque je voterai le texte du Gouvernement - non par conviction, car je suis plutôt contre. Ma position se fonde sur le réel besoin de légiférer dans ce domaine.
Entre un contrat d'union civile et le mariage, je suis convaincu que le contrat d'union civile l'emportera, auprès des homosexuels comme des hétérosexuels, car il est bien plus simple. Un pays dans lequel les gens sont heureux est plus puissant qu'un pays d'insatisfaits. Devant mon mandat de législateur, mes convictions personnelles s'effacent et j'invite le rapporteur à accepter cet amendement, qui élargit la gamme pour satisfaire tout le monde.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Je suis très sensible à votre intervention. Cependant, je vous invite à retirer votre amendement, et à déposer ultérieurement une proposition de loi dans lequel ce statut, au lieu de s'ajouter au Pacs, s'y substituerait. Le Pacs est très insuffisant, c'est vrai, et vous apportez ici toutes les corrections nécessaires. Mais ce sujet n'entre pas dans le périmètre de ce projet de loi.
Vous pouvez également déposer à nouveau votre amendement en séance, pour prendre date sur une réforme du Pacs. Mme Benbassa propose l'adoption pour les couples pacsés. Le groupe CRC-SPG avait aussi déposé une proposition de loi en ce sens. Pourquoi pas ? Je soutiendrai les évolutions nécessaires, dans une loi famille, voire dans une proposition de loi du Sénat, que je suis disposé à rapporter. Mais ici, tenons-nous en au texte.
M. Christian Cointat . - J'ai déjà déposé une proposition de loi, mais le système en effet, ne se substitue pas au Pacs. Je retire mon amendement et le déposerai en séance, pour que la réponse du rapporteur résonne dans l'hémicycle...
M. Patrice Gélard . - Je partage l'analyse du rapporteur : votre contrat est une amélioration du Pacs existant. J'en suis partisan, mais dans un autre cadre, par conséquent, je m'abstiendrai.
Mme Catherine Tasca . - Je souscris également à la position du rapporteur, avec une interrogation : si ce nouveau type de contrat était adopté, qu'adviendrait-il des couples déjà pacsés ?
M. François Zocchetto . - L'amendement que je présenterai tout à l'heure comprend non un contrat mais une union.
L'amendement n° COM-1 est retiré.
M. Patrice Gélard . - L'amendement n° COM-2 réécrit la totalité des dispositions consacrées au mariage pour lui substituer une union civile. La seule différence entre cette union civile et le mariage inscrit dans votre texte, c'est que l'adoption et la filiation ne sont pas abordées. Les droits et les devoirs sont exactement les mêmes.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Merci pour ce travail important et constructif de l'opposition sénatoriale, qui fait honneur à notre Haute Assemblée - notamment en comparaison de l'Assemblée nationale. Votre proposition va cependant à l'encontre de nos principes, car elle est réservée aux homosexuels. L'union civile, déconnectée de l'adoption et de la filiation, n'est pas identique au mariage. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Cet travail tranche en effet avec certaines attitudes consistant à vilipender le texte sans faire de contre-propositions.
M. Christian Cointat . - Pour les raisons que j'ai déjà évoquées, je m'abstiendrai.
L'amendement n° COM-2 est rejeté.
M. François Zocchetto . - La notion de mariage est subjective : institution pour les uns, changement de civilisation pour la garde des sceaux, tandis qu'à entendre notre rapporteur le mariage pour tous ne changerait pas grand-chose... Le terme de « mariage » a pour chacun de nous un sens particulier, qui peut d'ailleurs varier au cours de la vie. Le législateur de 1804 a été quelque peu présomptueux en voulant en donner une version universelle et définitive. Sans doute s'agissait-il, à l'époque, de protéger l'épouse.
Quelle sera la portée de notre vote en séance publique ? Nous ne partageons pas votre point de vue sur les liens de parentalité, mais il est évident que les liens de conjugalité sont à repenser et que le mariage tel qu'il figure dans le code civil ne correspond plus aux attentes. Nous continuons à penser que le mariage doit concerner des personnes de sexe différent. La filiation et l'adoption se déduisent de ce postulat, même si nous sommes d'accord pour une refonte de la législation sur l'adoption. D'où notre proposition, un peu différente de celle du groupe UMP. L'union civile de notre amendement n° COM-4 n'est pas un contrat, mais un engagement entre deux personnes, que nous ne réservons pas à celles du même sexe, cela serait discriminatoire.
Si nous adoptons le projet de loi en l'état, nous allons accentuer la perte de repères, chez les jeunes en particulier. Après le vote, chacun choisira son union à la carte, et cela m'inquiète d'autant plus que certaines religions prônent des unions peu compatibles avec notre droit.
Concernant la filiation et l'adoption, le texte n'est même pas au milieu du gué, il est resté sur la rive, rien n'a été fait. Il faut s'attendre néanmoins à très bientôt devoir examiner un projet de loi sur la PMA et la GPA. Notre commission ayant développé une expertise (et pas seulement juridique) sur ces questions, j'estime qu'elle devrait se saisir, au minimum pour avis, des textes à venir.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Je partage tout à fait ce point de vue. Notre commission se saisira de tout texte sur la famille, la PMA ou la GPA.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Monsieur Zocchetto, votre amendement n° COM-4, soit déborde l'objet du texte et je vous demanderai de le retirer, soit se substitue au mariage et je ne peux qu'y être défavorable.
M. François Zocchetto . - Nous ne le retirons pas.
M. Patrice Gélard . - Nous nous abstiendrons : cet amendement est incomplet et ne nous convient pas - je songe à la dissolution devant un notaire.
M. Christian Cointat . - C'est ce qui me plaît ! Je voterai cependant contre l'amendement parce qu'il se substitue et non s'ajoute à l'actuelle rédaction.
M. Jacques Mézard . - Je ne voterai pas cet amendement. Ma formation politique propose le mariage pour tous depuis longtemps, aussi je n'ai pas d'états d'âme. Ne compliquons pas les choses : le mariage pour tous va inéluctablement déclencher la refonte de la filiation, de la GPA et la PMA, qui soulève d'énormes difficultés. Il est quelque peu hypocrite de se concentrer sur le mariage en renvoyant le reste à plus tard, sachant bien qu'il faudra y venir... N'ajoutons pas au millefeuille territorial le millefeuille familial : mariage, union civile, Pacs, concubinage...
Prenons notre parti des évolutions : elles sont là, et ceux qui hier refusaient le Pacs veulent aujourd'hui l'améliorer. De même, ceux qui ne voulaient pas de la pilule ont changé d'avis. Notre rôle de législateur consiste précisément à accompagner ces évolutions.
L'amendement n° COM-4 est rejeté.
Mme Cécile Cukierman . - Les amendements n°COM-16 et n°COM-14 ouvrent l'accès à l'assistance médicale à la procréation aux couples de femmes. Des évolutions sont inéluctables. Mais du fait des inégalités biologiques, nous ne traitons pas pareillement toutes les situations de couple de femmes et d'hommes.
Faisons un peu de marxisme : les peuples décident de leur avenir, rien n'est écrit à l'avance...
J'indique tout de suite que nous allons retirer les amendements n°COM-16 et COM-14 en commission, mais les redéposerons en séance pour susciter le débat.
Les amendements n os COM-16 et COM-14 sont retirés.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Avis défavorable aux amendements de suppression n° COM-3 et COM-5.
Les amendements de suppression n° COM-3 et COM-5 sont rejetés.
Articles additionnels avant l'article 1 er bis A (nouveau)
Mme Esther Benbassa . - L'amendement n° COM-26 permet la transcription à l'état civil français des actes de naissance des enfants nés à l'étranger par GPA. Il protège uniquement les enfants nés ou à naître.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Je n'y suis pas favorable, nous en rediscuterons. Êtes-vous disposée à le retirer ?
Mme Esther Benbassa . - Oui, mais je le déposerai en séance
L'amendement n° COM-26 est retiré.
Mme Esther Benbassa . - L'amendement n° COM-27 concerne les couples de femmes, pacsées ou non, qui ont recours à la PMA à l'étranger. Une fois né, l'enfant n'a qu'une mère légale, l'autre n'ayant aucun droit. Ayons recours pour combler ce vide à la possession d'état.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Je suis contre. La possession d'état a relève de la filiation biologique : retrait ou défavorable.
M. Jean-Jacques Hyest . - Exactement.
Mme Esther Benbassa . - Je le retire, mais le déposerai en séance.
L'amendement n° COM-27 est retiré.
Mme Esther Benbassa . - L'amendement n° COM-28 est le même que celui déposé par mes camarades communistes. Je le retire, mais le déposerai en séance, et ferai de même pour l'amendement n° COM-29.
L'amendement n° COM-28 est retiré, de même que l'amendement n° COM-29.
Mme Esther Benbassa . - L'amendement n° COM-30 instaure une présomption de parenté au profit de la conjointe de la mère d'un enfant issu d'un projet parental commun et qui n'a pas de filiation paternelle connue. L'enfant aurait une filiation établie à l'égard de ses deux parents, qui auraient les mêmes droits et devoirs envers lui. En pratique, mon amendement concernera les enfants issus d'une PMA à l'étranger.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Défavorable, pour les raisons évoquées à l'amendement précédent.
Mme Esther Benbassa . - Je le retire, mais le déposerai en séance.
L'amendement n° COM-30 est retiré.
Mme Esther Benbassa . - L'amendement n°COM-31 ouvre le droit à l'adoption aux couples liés par un pacte civil de solidarité. Contrairement à l'argument avancé selon lequel seul le mariage serait source de sécurité affective pour l'enfant, je rappelle que les célibataires peuvent adopter, qu'un enfant sur deux naît hors mariage, et qu'un mariage sur deux se solde à Paris par un divorce. Nos concitoyens ont été plus de 205 000 en 2010 à opter pour le Pacs, dont 9 143 pour se lier avec une personne de même sexe. Le droit à l'adoption doit leur être ouvert.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - À titre personnel, je ne suis pas défavorable à l'amendement, mais le rapporteur que je suis émet un avis défavorable : ne parlons pas du Pacs dans ce texte.
M. Patrice Gélard . - Les intentions sont bonnes, mais n'oublions pas que le Pacs peut être dissous par la volonté d'une seule des parties : les conséquences sur les enfants seraient insurmontables. Dans l'état actuel de notre droit, ce dispositif est prématuré.
L'amendement n° COM-31 est rejeté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-15 précise que le choix par les époux du lieu de célébration du mariage ne dépend pas des parents, comme le laissait entendre la rédaction de l'Assemblée nationale. C'est également un amendement de coordination.
M. Michel Mercier . - Qui est concerné ?
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Tout le monde : c'est une raison supplémentaire pour voter l'ensemble du projet de loi !
M. Patrice Gélard . - Cette mesure est absolument nécessaire. Le code civil date d'une époque où les jeunes filles vivaient encore chez leurs parents au moment où elles se mariaient.
Mme Cécile Cukierman . - Avec la crise, cela se produit à nouveau.
Mme Esther Benbassa . - En Italie cela devient fréquent.
M. Patrice Gélard . - Je rappelle que le Conseil constitutionnel a annulé comme cavalier une disposition que nous avions adoptée à l'unanimité, autorisant le mariage au domicile des parents. Heureusement, une directive non officielle du garde des sceaux demande aux procureurs de faire preuve de souplesse sur ce point. Cela me paraît logique.
L'amendement n° COM-15 est adopté.
Article additionnel après l'article 1 er bis (nouveau)
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-17 tend à supprimer la lecture des dispositions du code civil concernant le crédit à la consommation lors de la cérémonie du mariage.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - La cérémonie doit rester une fête !
L'amendement n° COM-17 est adopté.
L'amendement rédactionnel n° COM-18 est adopté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-19 évitera les adoptions plénières successives qui, intervenant sur une filiation biologique établie, créerait des situations de pluri-parentalité.
M. Patrice Gélard . - Les adoptions plénières successives sont impossibles au sein des couples hétérosexuels, sauf cas exceptionnels, décès du conjoint ou déchéance de l'autorité parentale par le juge. La même règle doit effectivement s'appliquer aux couples homosexuels. Restons-en à la situation actuelle.
L'amendement n° COM-19 est adopté.
M. François Zocchetto . - Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, autorise expressément une personne à demander l'adoption plénière d'un enfant que son conjoint a antérieurement adopté seul sous la forme plénière. Nous y sommes opposés en l'état actuel du droit. Par cohérence, l'amendement n° COM-6 supprime cet article.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Mon amendement n° COM-19 règle la difficulté. Retrait, sinon rejet.
M. François Zocchetto . - À ce stade de la discussion, je n'ai pas arrêté définitivement ma position...
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - La rédaction retenue par les députés autorisait, en cas de séparation du couple, le nouveau conjoint du second parent adoptif à adopter l'enfant, ce qui aurait fait disparaître la filiation biologique. Nous y avons remédié avec l'amendement n° COM-19.
M. François Zocchetto . - Je maintiens mon amendement.
L'amendement n° COM-6 est rejeté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-20, dans la même logique que l'amendement n° COM-19, interdit les adoptions simples successives.
M. Patrice Gélard . - Je signale un risque d'impossibilité matérielle ! L'adoption simple peut être révoquée...
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Il sera tenu compte de votre remarque.
L'amendement n° COM-20 est adopté.
M. François Zocchetto . - Avec l'amendement n° COM-7, nous demandons la suppression de l'article, en raison de notre position, exposée précédemment, sur l'adoption par deux personnes de même sexe.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - L'avis est le même que précédemment...
L'amendement n° COM-7 est rejeté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Inverser le principe général selon lequel l'adoption simple conserve au parent d'origine l'exercice de l'autorité parentale est contraire à la logique de ce type d'adoption. Je vous propose de supprimer l'article.
M. François Zocchetto . - Tout à fait ! J'ai d'ailleurs proposé un amendement n°COM-8 identique.
Les amendements identiques n os COM-21 et COM-8 sont adoptés.
Mme Esther Benbassa . - Mes amendements n os COM-32 et COM-34 autorisent l'adoption simple de l'enfant au sein des couples pacsés ou vivant en concubinage.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Retrait, sinon défavorable.
Mme Esther Benbassa . - Je m'incline, mais je les redéposerai en séance, comme les précédents.
Les amendements n os COM-32 et COM-34 sont retirés.
Article additionnel après l'article 1 er quater (nouveau)
Mme Esther Benbassa . - Le but de l'amendement n°COM-33 est d'élargir la délégation partage de l'autorité parentale qui peut être faite en faveur du conjoint ou de l'ancien conjoint du parent. Cela garantira des droits au parent non biologique.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement que nous examinerons ensuite vous donnera partiellement satisfaction. Nous sommes d'accord pour régler le cas du parent social, mais non pour lui permettre de solliciter de lui-même une délégation de l'autorité parentale. Celle-ci, dans notre droit, est consubstantielle à la filiation.
L'amendement n° COM-33 est rejeté.
Article 1 er quinquies (nouveau)
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-22 insère la définition du parent social ou du beau-parent, votée par l'Assemblée nationale, à l'article 371-4 du code civil.
Quelle est la difficulté ? Imaginons deux femmes qui, vivant ensemble, auraient porté ensemble un projet parental. L'un d'elle aurait recouru à une PMA, peu importe que ce soit en France ou à l'étranger. En cas de séparation, l'autre, parce qu'elle n'est pas la mère biologique, verrait son lien rompu avec l'enfant qu'elle avait espéré, accueilli et éduqué. Je propose, en reprenant une jurisprudence de la Cour de cassation, que le juge aux affaires familiales ait la faculté d'accorder à cette femme un droit de garde ou de visite.
Imaginons ensuite que la mère biologique de cet enfant se remarie avec un homme ou une femme et que ce conjoint veuille adopter l'enfant. Le juge de l'adoption devra obligatoirement être prévenu du jugement antérieur donnant droit de garde ou de visite à la femme qui est le parent social. Si tel n'est pas le cas, l'adoption pourra être annulée.
M. François Pillet . - Et que se passera-t-il si une femme a un enfant à partir de l'ovule de sa compagne et du spermatozoïde d'un tiers ? Cela nous promet de beaux débats lors du prochain texte sur l'adoption...
M. Patrice Gélard . - Cela ne colle pas ! Le système ne fonctionnera pas pour les couples hétérosexuels. Prenons une mère qui se sépare du conjoint avec lequel elle a élevé l'enfant jusqu'à ses dix ans puis se remarie. Son ex-compagnon voudra continuer de voir l'enfant, dont le nouveau mari s'occupera au quotidien. Si le nouveau mari veut adopter le petit, il ne le pourra pas ! Que faire ? Mieux vaut régler ces situations très complexes dans la future loi sur l'adoption.
M. François Zocchetto . - Je proposerai une disposition plus globale pour un statut de celui qu'on appelle communément le beau parent.
M. André Reichardt . - La difficulté signalée par M. Gélard peut être levée puisque l'amendement n° COM-22 offre une simple possibilité au juge. Ce dernier aura toute liberté pour prendre les mesures adaptées à la situation de l'enfant.
M. Patrice Gélard . - À voir...
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Mon amendement s'inspire d'une jurisprudence de la Cour de cassation visant à protéger les droits des grands-parents. Les juges aux affaires familiales attendent une telle évolution ; Mme Anne Bérard, présidente de chambre au tribunal de grande instance de Paris, l'a confirmé lors de son audition.
L'amendement n° COM-22 est adopté.
Article additionnel avant l'article 2
Mme Cécile Cukierman . - Profitons de ce texte pour clarifier, enfin, les règles qui gouvernent le nom d'usage entre époux. Tel est l'objet de l'amendement n° COM-13.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'avis est favorable à condition d'une modification rédactionnelle. Le nouvel article 225-1 du code civil serait mieux rédigé ainsi : « Chacun des époux peut porter, à titre d'usage, le nom de l'autre époux, par substitution ou adjonction à son propre nom dans l'ordre qu'il choisit. »
Mme Cécile Cukierman . - Modification acceptée.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Ce sera l'amendement n° COM-13 rectifié.
L'amendement n°COM-13 rectifié est adopté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-23 concerne le nom de l'enfant, pour tous les couples. Je propose une solution plus équilibrée que celle trouvée à l'Assemblée nationale : l'enfant prendra le nom de ses deux parents en cas de désaccord exprimé entre eux. Si aucune volonté particulière n'est exprimée, il prendra le nom du père.
M. Jean-Jacques Hyest . - Et si l'enfant a deux pères ?
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Cela suppose une adoption, ce qui n'est pas le cas visé.
Mme Hélène Lipietz . - Vous proposez d'accoler les deux noms selon l'ordre alphabétique. Or les associations généalogiques s'inquiètent, à juste titre, d'une concentration des noms de famille dans la première moitié de l'alphabet. Je proposerai un amendement en séance pour varier le classement des deux noms selon la période du mois : pendant un temps, l'ordre alphabétique ; ensuite, le sens contraire.
Mme Hélène Lipietz . - Le problème est sérieux : il y a de plus en plus de Schmidt en Allemagne !
M. Jean-Jacques Hyest . - Comme de Martin en France !
M. François Pillet . - Quelle complexité !
Mme Hélène Lipietz . - Le phénomène est statistiquement inéluctable dans un siècle ou deux. Il n'a rien d'amusant.
M. François Zocchetto . - Je continuerai de m'opposer, comme je l'ai toujours fait, aux mesures qui encourageront la tendance naturelle à la concentration des noms sur les treize premières lettres de l'alphabet. Quelle est ma proposition ? De procéder par tirage au sort !
M. Jean-Pierre Sueur , président . - M. Zocchetto défend avec le talent qu'on lui connaît la lettre Z. Cela étant, l'amendement réduit la faculté de donner les deux noms de famille à l'enfant aux seuls cas de désaccord manifeste. Cela correspond à une situation très minoritaire ; du moins, on peut l'espérer.
M. François Zocchetto . - Si nous résolvons ainsi la difficulté envisagée, nous appliquerons la même solution dans d'autres circonstances.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-23 va dans le sens de Mme Lipietz puisqu'il restreint le texte des députés. Le tirage au sort, franchement...
M. Jean-Jacques Hyest . - Depuis la loi sur les noms de famille, une immense majorité des enfants ont continué à recevoir le nom du père. L'Assemblée nationale, posant une obligation de donner un nom double, va trop loin. La solution du rapporteur est moins mauvaise. Je m'abstiendrai.
M. Yves Détraigne . - Un détail pratique : les machines, qui effectuent dorénavant le tri postal, ne parviennent pas à lire le nom des rues lorsqu'il est très long. Cela va m'obliger à débaptiser une rue dans ma commune. L'allongement des noms risque de multiplier les erreurs de distribution de courrier.
L'amendement n° COM-23 est adopté.
M. François Zocchetto . - La suppression de l'article 2 ne se motive pas seulement par des considérations sur l'ordre alphabétique et les noms... Je l'ai dit : nous sommes opposés à l'adoption par les couples de même sexe en l'état actuel du droit. Tel est l'objet de l'amendement n° COM-9.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Rejet.
L'amendement n° COM-9 est rejeté.
M. François Zocchetto . - Idem pour l'amendement n°COM-10 de suppression.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Avis également défavorable.
L'amendement n° COM-10 est rejeté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'Assemblée nationale a adopté un dispositif balai pour reconnaître l'égalité de traitement des époux et parents de même sexe, à l'exclusion des dispositions relatives à la filiation biologique. Mieux vaut pour un principe général de traitement égal le placer en tête du code civil, dans les principes généraux, en excluant cependant de son champ les dispositions relatives à la filiation biologique. La loi doit être lisible, dit notre cher Conseil constitutionnel.
M. Jean-Jacques Hyest . - Et il a raison !
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Certes ! Et ce principe de lisibilité de la loi est surtout important pour les juges. Cet amendement n° COM-24 est adossé à un amendement du Gouvernement demandant une habilitation à légiférer par ordonnance pour procéder à toutes les coordinations nécessaires dans les autres textes que le code civil.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - C'est un dispositif d'ouverture plutôt qu'un dispositif balai. Les amateurs d'opéra apprécieront !
M. Jean-Jacques Hyest . - Quand bien même, le texte restera bancal. Initialement, le Gouvernement projetait d'abandonner les termes de père et mère pour ceux de parents, indifférenciés, dans tout le code civil ; nous n'en voulions pas. La solution proposée, je le reconnais, est plus subtile que celle des députés ; elle butte pourtant sur la même réalité. Je ne la voterai pas.
M. Patrice Gélard . - Les couples homosexuels n'auront pas les mêmes droits, quoi qu'on en dise. Certains enfants seront adoptables, d'autres ne le seront pas en raison de leur filiation biologique.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement concerne les rapports de filiation entre parents et enfants, non les enfants eux-mêmes.
M. Jean-Jacques Hyest . - Reste qu'il crée des discriminations.
M. Michel Mercier . - Je dirai même plus : il est contraire à l'égalité.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Chacun aura le temps de progresser dans la réflexion et d'apporter des améliorations d'ici la prochaine réunion de la commission puis la séance publique.
L'amendement n° COM-24 est adopté.
M. François Zocchetto . - Il aurait été plus logique d'examiner mon amendement n° COM-12 de suppression de l'article avant celui de M. Michel.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - C'est une règle constante de notre commission : les amendements du rapporteur, puis ceux des commissaires. Nous l'avons appliquée ici article par article, cela nous semblait plus judicieux.
M. François Zocchetto . - Je comprends mieux. Avec cet article 4, nous touchons très clairement les limites de ce projet de loi : en créant de nouvelles inégalités, il donnera du travail aux juges. Mais nous avons encore le temps d'améliorer le texte...
Remplacer les termes de père et de mère par la notion de parents est dangereux. La notion de mère, universelle, n'a pas besoin d'être précisée ; le père est clairement défini dans le code civil. La signification du mot parent, elle, est singulièrement floue ; elle varie selon les pays et les usages. Je suis le parent de ma cousine, mais non son père... Votre proposition sèmera le trouble au-delà du champ juridique.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-24 répond précisément à la préoccupation de notre honorable collègue Zocchetto.
M. Jean-Jacques Hyest . - Il y répond imparfaitement.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur. - Nous conservons les termes de père et de mère, tout en plaçant les dispositions sur l'égalité de traitement pour les couples de même sexe en tête du code civil. Au juge d'en tirer les conséquences.
L'amendement n° COM-12 est rejeté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-35 du Gouvernement, suggéré par votre rapporteur, correspond à une habilitation à légiférer par ordonnance pour procéder aux coordinations nécessaires, à l'exclusion du code civil.
M. Jean-Jacques Hyest . - La Constitution mentionne-t-elle le code civil, ou le droit civil ?
M. Patrice Gélard . - Elle mentionne les régimes matrimoniaux.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - Il n'y aura pas de coordination dans le code civil, où les notions de père et mère sont maintenues.
M. Jean-Jacques Hyest . - J'accepte l'habilitation pour les adaptations indispensables à l'outre-mer, le 2° de l'amendement. Sur le 1° en revanche, j'attends de voir...
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Nous ne pouvons rectifier l'amendement du Gouvernement ! Mais peut-être celui-ci souhaitera-t-il l'améliorer.
M. Hugues Portelli . - Je me souviens d'un certain président de la commission des lois qui protestait, il y a deux ans, contre les ordonnances d'habilitation en matière de droit civil...
L'amendement n° COM-35 est adopté.
L'amendement de suppression n° COM-11 est rejeté.
M. Jean-Pierre Michel , rapporteur . - L'amendement n° COM-25 rectifie l'application outre-mer du texte.
L'amendement n° COM-25 est adopté.
M. Jean-Pierre Sueur , président . - Nous allons passer au vote sur l'ensemble du texte. Le débat fut sérieux, serein et approfondi.
L'ensemble du projet de loi est adopté dans la rédaction résultant des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Article(s) additionnel(s) avant l'article 1 er |
|||
M. Cointat |
1 |
Création d'une union civile ouverte
|
Retiré |
M. Gélard |
2 |
Création d'une union civile ouverte
|
Rejeté |
M. Zocchetto |
4 |
Création d'une union civile ouverte
|
Rejeté |
Mme Cukierman |
16 |
Accès des couples de femmes à la PMA |
Retiré |
Mme Cukierman |
14 |
Reconnaissance de filiation à l'égard de deux femmes ayant consenti à une PMA |
Retiré |
Article 1
er
|
|||
M. Gélard |
3 |
Suppression |
Rejeté |
M. Zocchetto |
5 |
Suppression |
Rejeté |
Article(s) additionnel(s) avant Article 1 er bis A (nouveau) |
|||
Mme Benbassa |
26 |
Reconnaissance en France des enfants nés à l'étranger d'une gestation pour autrui |
Retiré |
Mme Benbassa |
27 |
Ouverture de l'établissement de la filiation par possession d'état aux couples de même sexe |
Retiré |
Mme Benbassa |
28 |
Reconnaissance de filiation à l'égard de deux femmes ayant consenti à une PMA |
Retiré |
Mme Benbassa |
29 |
Accès des couples de femmes à la PMA |
Retiré |
Mme Benbassa |
30 |
Création d'une présomption de parenté au profit des couples de femmes |
Retiré |
Mme Benbassa |
31 |
Ouverture de l'adoption aux pacsés |
Rejeté |
Article 1
er
bis
B
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
15 |
Choix par les époux du lieu
|
Adopté |
Article(s) additionnel(s) après Article 1 er bis B |
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
17 |
Suppression de la lecture, lors de la célébration, de l'article 220 du code civil relatif aux dettes solidaires des époux |
Adopté |
Article 1
er
bis
D
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
18 |
Simplification rédactionnelle |
Adopté |
Article 1
er
bis
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
19 |
Limitation des adoptions successives au cas où l'enfant n'a sa filiation établie qu'à l'égard du seul premier adoptant |
Adopté |
M. Zocchetto |
6 |
Suppression |
Rejeté |
Article 1
er
ter
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
20 |
Limitation des adoptions simples successives |
Adopté |
M. Zocchetto |
7 |
Suppression |
Rejeté |
Article 1
er
quater
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
21 |
Suppression |
Adopté |
M. Zocchetto |
8 |
Suppression. |
Adopté |
Mme Benbassa |
32 |
Adoption simple de l'enfant
|
Retiré |
Mme Benbassa |
34 |
Adoption simple de l'enfant du partenaire du Pacs ou concubin depuis cinq ans au moins |
Retiré |
Article(s) additionnel(s) après l'article 1 er quater |
|||
Mme Benbassa |
33 |
Délégation partage d'autorité parentale demandée par un conjoint ou ancien conjoint |
Rejeté |
Article 1
er
quinquies
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
22 |
Maintien, dans l'intérêt de l'enfant, des liens avec celui qui l'a élevé |
Adopté |
Article additionnel avant l'article 2 |
|||
Mme Cukierman |
13 |
Nom d'usage des époux |
Adopté avec modification |
Article 2
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
23 |
Prise en compte du désaccord des parents dans la dévolution du nom de famille |
Adopté |
M. Zocchetto |
9 |
Suppression |
Rejeté |
Article 3
|
|||
M. Zocchetto |
10 |
Suppression |
Rejeté |
Article 4
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
24 |
Reconnaissance d'un principe général d'égalité de traitement entre époux ou parents de même sexe et de sexe différent |
Adopté |
M. Zocchetto |
12 |
Suppression |
Rejeté |
Article 4
bis
|
|||
Le Gouvernement |
35 |
Habilitation pour réaliser
|
Adopté |
M. Zocchetto |
11 |
Suppression |
Rejeté |
Article 23
|
|||
M. J.P. Michel, rapporteur |
25 |
Rectification pour l'application outre-mer |
Adopté |
ANNEXE 1 - LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LA COMMISSION
MARDI 5 FÉVRIER 2013
- Mme Irène Théry, sociologue, directrice d'études à l'école des hautes études en sciences sociales
- Mme Françoise Héritier, anthropologue et ethnologue, professeur honoraire au collège de France
- M. Stéphane Nadaud, pédopsychiatre
- M. Pierre Lévy-Soussan , pédopsychiatre et psychanalyste
MERCREDI 6 FÉVRIER 2013
- Interassociative inter-LGBT
M. Nicolas Gougain, porte parole ; M. Mathieu Nocent, co-secrétaire de la commission politique
- Association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL)
M. Dominique Boren, co-président ; Mme Marie-Claude Picardat, co-présidente ; Mme Fathira Acherchour, porte parole
- Association de protection de l'enfance La voix de l'enfant
Mme Martine Brousse, déléguée générale ; M. Bertrand Colin, avocat
- Association de protection de l'enfance Enfance et Partage
Mme Isabelle Guillem, secrétaire générale
JEUDI 7 FÉVRIER 2013
- Union nationale des associations familiales (UNAF)
M. François Fondard, président ; M. François Edouard, vice-président, président du département « Droit de la Famille et protection de l'enfance » ; Mme Guillemette Leneveu, directrice générale ; Mme Claire Ménard, chargée des relations parlementaires
- Confédération Nationale des Associations Familiales Laïques (CNAFAL)
M. Jean-Marie Bonnemayre, président ; Mme Marie-Odile Pelle Printanier, vice-présidente
- Union des Familles Laïques (UFAL)
M. Michel Canet, président ; M. Charles Arambourou, administrateur
- Confédération syndicale des Familles (CSF)
Mme Marie-Françoise Martin, présidente ; Mme Aminata Koné, secrétaire générale
- Familles de France
M. Patrick Chrétien, secrétaire général ; M. Thierry Vidor, directeur général
- Confédération Nationale des Associations Familiales Catholiques (CNAFC )
M. Antoine Renard, président ; Mme Clotilde Brunetti, chargée du droit de la famille et de la protection de l'enfance ; M. Bernard Mantienne, ancien sénateur-maire de Verrières-le-Buisson
MARDI 12 FÉVRIER 2013
- Culte protestant
M. le Pasteur Claude Baty, président de la fédération protestante de France
- Culte catholique
M. le Cardinal André Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, président de la Conférence des Évêques de France
- Culte juif :
M. le Grand Rabbin Gilles Bernheim, Grand Rabbin de France
- Culte musulman
M. Mohammed Moussaoui, président du conseil français du culte musulman
- Culte bouddhiste
Mme Marie-Stella Boussemart, présidente de l'union bouddhiste de France
- Culte orthodoxe
M. le Métropolite Emmanuel, président de l'assemblée des évêques orthodoxes de France
MERCREDI 13 FÉVRIER 2013
- M. Daniel Sibony psychanalyste
- M. Jean-Pierre Winter, psychanalyste
- Mme Elisabeth Roudinesco, historienne de la psychanalyse, directrice de recherche à l'Université de Paris VII
JEUDI 14 FÉVRIER 2013
- Fédération française des organismes autorisés pour l'adoption (FFOAA) :
Mme Marie-Claude Riot, présidente
- Mouvement pour l'adoption sans frontières (MASF)
M. Marc Lasserre, président
- Enfance et Familles d'Adoption
Mme Nathalie Parent, présidente
- La Voix des adoptés
Mme Cécile Février, présidente
- M. Thibaud Collin, philosophe
- Mme Sylviane Agacinski, philosophe
- Mme Claire Neirinck, professeur de droit à l'université de Toulouse I Capitole
- M. Daniel Borillo, maître de conférences en droit privé à l'université Paris Ouest
- M. Jean Hauser, professeur émérite de droit privé à l'université Montesquieu Bordeaux IV
- Mme Florence Millet, maître de conférences à l'université de Cergy-Pontoise
MARDI 19 FÉVRIER 2013
- Association des maires de France (AMF)
M. Jacques Pélissard, président
- Assemblée des départements de France (ADF)
M. Jérôme Guedj, député, président du conseil général de l'Essonne
- Ministère de la justice
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice
- Ministère des Affaires sociales et de la Santé
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille
MERCREDI 20 FÉVRIER 2013
- Agence française de l'adoption
Mme Isabelle Vasseur, présidente ; Mme Béatrice Biondi, directrice générale ; M. Arnaud Del Moral, chef du service international, chargé de la stratégie et des procédures d'adoption
- M. Dominique Baudis, Défenseur des droits
- Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH)
Mme Christine Lazerges, présidente
JEUDI 21 FÉVRIER 2013
- Conseil supérieur du notariat
M. Jean Tarrade, président ; M. Jacques Combret, président de la section famille de l'institut d'études juridiques
- Conseil national des barreaux
Mme Hélène Poivey-Leclercq, ancien membre du conseil national des barreaux, avocat à Paris ; Mme Carine Denoit-Benteux, avocate, membre du conseil de l'ordre de Paris
- Conseil national d'accès aux origines personnelles
M. André Nutte, président ; M. Raymond Chabrol, secrétaire général
- Juges aux affaires familiales
Mme Anne Bérard, présidente de chambre au tribunal de grande instance de Paris, responsable du service « Affaires familiales » ; Mme Marie-Pierre Hourcade, présidente de l'association française des magistrats de la jeunesse et de la famille ; M. Daniel Pical, magistrat honoraire
MARDI 12 MARS 2013
- Conseil supérieur de l'adoption
Mme Marie-Anne Chapdelaine, députée, présidente
- M. Jacques-Alain Miller, psychanalyste
ANNEXE 2 - LISTE DES AUDITIONS COMPLÉMENTAIRES DU RAPPORTEUR
MINISTÈRE DE LA JUSTICE
- Mme Sandrine Zientara-Logeay, conseillère technique législation civile et pénale au cabinet de la ministre ;
- M. Laurent Vallée, directeur des affaires civiles et du Sceau
- M. François Ancel, sous directeur du droit civil
- Mme Valérie Delnaud, cheffe du bureau du droit des personnes et de la famille
ASSOCIATIONS
- Association des familles homoparentales (ADFH)
M. Alexandre Urwicz, co-président ; M. François Rico, responsable de la commission politique
- Beit Haverim
M. Franck Jaoui, porte parole
- Carrefour des chrétiens inclusifs
Mme Marina Zuccon, présidente ; Pasteur Stéphane Lavignotte
- David et Jonathan
M. Patrick Sanguinetti, président et co-porte-parole ; M. Nicolas Neiertz, co-vice-président
- Fédération Total respect
Mme Gwladys Pallas, présidente ; M. David Auerbach Chiffrin, porte-parole ; M. Damien Trawale, administrateur ; M. Jean-Marc Saminadin, administrateur ; M. David Mohit, administrateur
- Gay Lib
Mme Catherine Michaud, présidente ; M. Bertrand Cazenave, vice-président
- Homosexualités et Socialisme
M. Denis Quinqueton, président
- « L'autre Maman »
Mme Nabila Tribak, présidente ; Mme Marie Mandy, porte-parole ; Mme Isabelle Charmoille, secrétaire ; Mme Mariam Nahavandy, adhérente
- Le Refuge
Maître Charles Bernier, avocat de l'association
PERSONNALITÉS QUALIFIÉES
- Mme Annick Batteur, professeur de droit privé à la Faculté de droit de Caen
- M. Hugues Fulchiron, professeur de droit privé à l'Université de Lyon 3 Jean Moulin
- M. et Mme René et Annick Morantin
CONTRIBUTIONS ÉCRITES
- Association des familles homoparentales (ADFH)
- Conseil national des évangélistes de france
ANNEXE 3 - ÉTUDE DE LÉGISLATION COMPARÉE
Novembre 2012
LÉGISLATION COMPARÉE
Mariage des personnes de même sexe et homoparentalité
_____
Allemagne - Belgique - Canada (Québec) - Danemark -
Espagne - Italie -
Pays-Bas - Portugal - Royaume-Uni (Angleterre) -
Suède
_____
Ce document a été réalisé à la demande
de
M. Jean-Pierre Sueur,
sénateur,
Président de la commission des lois
constitutionnelles, de législation
du suffrage universel, du
Règlement et d'administration générale
DIRECTION DE L'INITIATIVE PARLEMENTAIRE ET DES DÉLÉGATIONS LC 229 |
|
Ce document constitue un instrument de travail élaboré à la demande des sénateurs par la division de Législation comparée de la direction de l'Initiative parlementaire et des délégations. Il a un caractère informatif et ne contient aucune prise de position susceptible d'engager le Sénat. |
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
NOTE DE SYNTHÈSE
Le choix des dix États retenus pour cette étude a été guidé par le souci de considérer les principaux pays ayant légiféré sur le sujet au cours des dernières années. Neuf de ces pays sont situés en Europe (Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, Italie, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni [Angleterre] et Suède) et un en Amérique du Nord, le Canada (Québec).
Elle est relative :
- au mariage des personnes de même sexe ;
- et à l'alternative légale au mariage, équivalent du pacte civil de solidarité (PACS), quelle que soit sa dénomination dans chacun de ces États.
Elle examine les dispositions qui régissent :
- l'accueil d'un enfant : adoption, recours à la procréation médicalement assistée ou à la gestation pour autrui ;
- et l'exercice de l'autorité parentale.
Elle n'évoque ni le régime de l'adoption internationale ni les questions de droit international privé relatives à la situation, au regard de l'état civil, des enfants nés à la suite d'une procréation médicalement assistée ou d'une gestation pour autrui pratiquée à l'étranger.
En France, le mariage des personnes de même sexe n'est pas possible. L'article 144 du code civil disposant que « l'homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus [...] », la chambre civile de la Cour de cassation a jugé que « selon la loi française, le mariage est l'union d'un homme et d'une femme » 156 ( * ) .
Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel français a, quant à lui, jugé :
- que la liberté du mariage ne restreint pas la compétence que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution pour fixer les conditions du mariage ;
- et que le droit de mener une vie familiale normale, qui résulte du préambule de la Constitution de 1946, n'implique pas celui de se marier pour les couples de même sexe 157 ( * ) .
En conséquence les personnes de même sexe peuvent :
- conclure un PACS dans les conditions prévues par le titre XIII du livre I er du code civil ;
- ou vivre en concubinage dans les conditions fixées par l'article 515-8 du même code.
En ce qui concerne l'accueil d'un enfant :
- les dispositions du code civil réservent l'adoption aux couples mariés, ce qui exclut ipso facto les couples de même sexe ;
- l'assistance médicale à la procréation est réservée au couple composé d'un homme et d'une femme ;
- la jurisprudence permet la délégation de l'autorité parentale au sein d'un couple de personnes de même sexe 158 ( * ) ;
- l'article 16-7 du même code prévoit enfin la nullité de toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui.
1. Reconnaissance juridique du couple formé de deux personnes de même sexe
Les pays où existe une impossibilité constitutionnelle à reconnaître le mariage des personnes de même sexe se distinguent de ceux dans lesquels le législateur ne se heurte pas à cet obstacle.
• Impossibilité constitutionnelle faisant obstacle au mariage de personnes de même sexe
La Cour constitutionnelle italienne a jugé que le mariage de deux personnes de même sexe était contraire à la constitution. La Cour de Karlsruhe a déclaré que le mariage était l'union de deux personnes de sexe différent.
Le Tribunal constitutionnel espagnol, quant à lui, a rejeté en novembre 2012 le recours formé contre la loi instituant le mariage des personnes de même sexe.
• Mariage ou partenariat des personnes de même sexe
La législation des dix États considérés se divise en deux catégories distinctes.
Dans les sept premiers ont été reconnus à la fois le mariage des personnes de même sexe et une alternative à celui-ci, quelle que soit son appellation (Belgique, Espagne [au niveau des autonomies], Pays-Bas, Portugal, Québec, Danemark et Suède, étant observé que dans ces deux derniers pays la loi sur le « partenariat enregistré » a été abrogée par la loi sur le mariage des personnes de même sexe, en conséquence ne subsistent plus que les partenariats conclus antérieurement). On notera que la conversion d'un partenariat en mariage est possible au Danemark et aux Pays-Bas.
Aucun de ces sept États, à savoir les Pays-Bas (2001), la Belgique (2003), l'Espagne et le Québec (2005), la Suède (2009), le Portugal (2010) et le Danemark (2012), n'est revenu sur cette modification depuis lors.
Dans les trois autres États ce type de mariage n'existe pas : soit parce que l'on reconnaît seulement une forme de « partenariat » réservé aux couples de même sexe (Allemagne et Angleterre), soit parce que n'existent ni mariage ni alternative au mariage (Italie où les tribunaux civils sont cependant fondés en vertu de la jurisprudence récente de la Cour de cassation à accorder un traitement homogène aux couples non mariés de même sexe et aux couples mariés de sexe différent).
2. Adoption
En matière d'adoption, on distingue, parmi les sept États étudiés qui reconnaissent la validité du mariage des personnes de même sexe :
- six pays qui ont ouvert l'adoption à tous les couples mariés (Belgique, Danemark, Espagne et Québec ainsi que, sous certaines conditions, Pays-Bas et Suède).
- et le Portugal qui refuse toute forme d'adoption aux conjoints de même sexe.
3. Présomption ou
acceptation de la filiation et reconnaissance
de l'enfant né pendant
le mariage
Sur les sept États qui ont autorisé le mariage des personnes de même sexe, deux reconnaissent - pour les seuls couples composés de deux femmes - le droit d'établir un lien de filiation avec l'enfant né pendant l'union, soit en acceptant la filiation (Espagne), soit en bénéficiant d'une présomption de parentalité (Québec).
Quant à l'Angleterre, qui n'a pas institué ce type de mariage, elle a également créé pour les « partenariats » de femmes une forme de présomption de parentalité.
4. Procréation médicalement assistée (PMA)
Parmi les sept États étudiés qui reconnaissent le mariage des personnes de même sexe, la PMA est :
- possible pour les femmes au Danemark, en Espagne, aux Pays-Bas, au Québec ainsi qu'en Belgique et en Suède où elle est réservée aux couples de femmes mariées ou partenaires ;
- interdite à ces couples au Portugal.
Elle est par ailleurs permise aux partenaires de même sexe (PMA assortie d'une gestation pour autrui pour les couples masculins) en Angleterre où leur mariage n'est pas autorisé.
5. Gestation pour autrui (GPA)
La gestation pour autrui, qu'il s'agisse ou non de couples de même sexe :
- est possible en Angleterre et aux Pays-Bas, lorsqu'elle est à titre gratuit, ainsi qu'en Belgique ;
- n'est interdite que si elle est pratiquée à titre onéreux en Angleterre et aux Pays-Bas, où elle est même sanctionnée pénalement ;
- est interdite au Danemark, en Espagne, au Portugal, au Québec et en Suède.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
TABLEAUX COMPARATIFS
_____
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
TABLEAU COMPARATIF 1 - MARIAGE
Allemagne |
Belgique |
Canada (Québec) |
Danemark |
Espagne |
France |
|
Mariage |
non |
oui
|
oui
|
oui
|
oui
|
non |
Adoption : |
||||||
- conjointe |
-- |
oui |
oui |
oui |
oui |
-- |
- individuelle |
-- |
oui pour l'enfant biologique ou adoptif de l'époux(se) |
oui pour l'enfant biologique ou adoptif de l'époux(se) |
oui : - pour l'enfant biologique ou adoptif de l'époux(se) - dès naissance pour couples de femmes 159 ( * ) |
oui |
-- |
Présomption / acceptation
|
-- |
non |
femmes mariées
|
non |
oui
acceptation
|
-- |
Procréation médicalement assistée |
-- |
oui pour
|
oui 160 ( * ) |
oui
|
oui
|
-- |
Gestation pour autrui |
-- |
Pas de dispositions légales |
non |
non |
non |
non |
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
TABLEAU COMPARATIF 1 - MARIAGE (suite)
Italie |
Pays-Bas |
Portugal |
Royaume-Uni (Angleterre) |
Suède |
|
Mariage |
non |
oui
|
oui (2010) |
non |
oui
|
Adoption : |
|||||
- conjointe |
-- |
oui |
non |
-- |
oui |
- individuelle |
-- |
oui : - couples d'hommes : condition de délai - couples de femmes : dès la naissance |
non |
-- |
oui pour l'enfant du conjoint |
Présomption / acceptation
|
-- |
non |
non |
-- |
non |
Procréation médicalement assistée |
-- |
oui |
non |
-- |
oui
|
Gestation pour autrui |
-- |
sanctionnée pénalement si vénale |
non |
-- |
non |
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
TABLEAU COMPARATIF 2 - ALTERNATIVES LÉGALES AU MARIAGE
Allemagne |
Belgique |
Canada (Québec) |
Danemark |
Espagne |
France |
|
Type d'union |
partenariat de vie
|
cohabitation légale
|
union civile
|
partenariat enregistré
|
union de fait
|
pacte civil de solidarité
|
Possibilité de
conversion
du partenariat
|
-- |
non |
non |
oui |
non |
non |
Adoption : |
||||||
- conjointe |
non |
oui |
oui |
oui |
non |
-- |
- individuelle |
oui, pour enfant biologique du partenaire |
oui, pour l'enfant biologique ou adoptif du partenaire |
oui, pour l'enfant biologique ou adoptif du partenaire |
oui :
- dès naissance pour couples de femmes 164 ( * ) |
non |
-- |
Présomption / acceptation
|
non |
non |
femmes unies civilement lors de la PMA : présomption de parentalité 165 ( * ) |
non |
non |
non |
Procréation médicalement assistée |
non 166 ( * ) |
oui
|
oui |
oui
|
oui
|
non |
Gestation pour autrui |
non |
pas de dispositions légales |
non |
non |
non |
non |
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
TABLEAU COMPARATIF 2 - ALTERNATIVES LÉGALES AU MARIAGE (suite)
Italie |
Pays-Bas |
Portugal |
Royaume-Uni (Angleterre) |
Suède |
|
Type d'union |
-- |
partenariat enregistré (1998) |
union de fait (2001) |
partenariat civil
|
partenariat enregistré
|
Possibilité de
conversion
du partenariat
|
-- |
oui |
non |
-- |
non |
Adoption : |
|||||
- conjointe |
-- |
oui |
non |
oui |
oui |
- individuelle |
-- |
oui :
- partenariat hommes :
- partenariat femmes : dès la naissance |
non |
oui |
oui
|
Présomption / acceptation
|
-- |
non |
non |
femmes liées par partenariat civil lors de la PMA : une forme de présomption de parentalité |
non |
Procréation médicalement assistée |
non |
oui |
non |
oui |
oui
|
Gestation pour autrui |
non |
sanctionnée pénalement si vénale |
non |
oui tout couple de femmes ou d'hommes avec le matériel génétique d'au moins un des partenaires 169 ( * ) |
non |
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
MONOGRAPHIES PAR PAYS
_____
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
ALLEMAGNE
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
Le mariage entre personnes de même sexe n'est pas autorisé.
Dans le cadre de contrôles de constitutionnalité où était invoqué l'article 6 de la loi fondamentale qui prévoit que le mariage et la famille sont placés sous la protection particulière de l'État, la Cour constitutionnelle a défini le mariage comme « une communauté de personnes de sexe différent » (Geschlechtsverschiedene Gemeinschaft , décision BVerfGe 10, 59 ) .
2. L'alternative légale au mariage
Le partenariat de vie (Lebenspartnerschaft) est la seule forme de vie commune prévue par la loi.
La loi du 16 février 2001 sur le partenariat de vie ne s'applique qu'aux personnes de même sexe. Elle ne prévoit pas d'assimilation générale de ce partenariat au mariage mais confère aux partenaires certains droits et les soumet à certaines obligations des époux.
Comme le mariage, le partenariat est conclu pour la durée de la vie.
Les partenaires peuvent choisir un nom de famille commun. Chacun d'eux entre dans la famille de l'autre et devient parent par alliance des membres de celle-ci.
Comme les époux, les partenaires ont un devoir d'assistance mutuelle qui persiste après la séparation.
Pendant la durée du partenariat, ils doivent contribuer équitablement aux charges du couple par leur travail et leur patrimoine.
Le partenariat entraîne, sauf convention contraire conclue par les intéressés, la création d'un régime patrimonial identique au régime matrimonial légal.
La loi organise la séparation de fait des partenaires et la dissolution du partenariat qui, comme le divorce, résulte d'une décision judiciaire.
En cas de succession légale, les partenaires héritent l'un de l'autre dans des conditions similaires à celles des époux.
En revanche, le partenariat n'a pas les mêmes conséquences que le mariage en matière de filiation et d'adoption (voir infra ).
Subsistent également des différences dans le domaine fiscal et en matière d'assurances sociales. La ministre de la Justice a annoncé la volonté du Gouvernement d'y remédier.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
Le mariage n'est pas autorisé entre personnes de même sexe (voir supra ).
2. L'alternative légale au mariage
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Adoption conjointe
Le partenariat n'ouvre pas droit à l'adoption conjointe qui est réservée par le code civil aux couples mariés de sexe différent. Deux partenaires de même sexe ne peuvent pas adopter ensemble un enfant.
Adoption de l'enfant du partenaire
La loi du 16 janvier 2001 a été modifiée pour permettre, à compter du 1 er janvier 2005, à un membre du partenariat d'adopter l'enfant biologique de son partenaire.
Une réflexion est en cours sur la possibilité pour un partenaire d'adopter l'enfant adoptif de l'autre, ce qui est à ce jour interdit.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
Aucune disposition législative n'a été adoptée sur ce point en faveur des couples de même sexe.
La directive en matière de procréation médicalement assistée de l'ordre fédéral des médecins, publiée en février 2006, réserve cette technique aux couples mariés. Elle ne peut bénéficier à une femme célibataire que si celle-ci est engagée dans une relation durable avec un homme non marié qui s'engage à reconnaître sa paternité à l'égard de l'enfant à naître.
Cette directive sert de modèle aux recommandations que l'ordre des médecins de chaque Land peut adopter et que les médecins confrontés à des problèmes médicaux soulevant des questions éthiques doivent prendre en considération conformément à la réglementation professionnelle.
Toutefois, l'ordre des médecins de Hambourg et celui de Berlin laissent leurs membres pratiquer des actes de procréation médicalement assistée en faveur d'un couple de femmes liées par un partenariat.
L'ordre des médecins de Hambourg a adopté des dispositions prévoyant que les couples non mariés engagés dans un partenariat stable peuvent également recourir à cette méthode après délibération d'une commission ad hoc de l'ordre.
L'ordre des médecins de Berlin n'a pas adopté de recommandation en matière de procréation médicalement assistée, laissant à chaque médecin sa libre appréciation.
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle n'est ouverte ni aux couples hétérosexuels, ni aux couples homosexuels.
Il est interdit au corps médical d'effectuer des actes en faveur d'une gestation pour autrui sous peine de sanctions pénales. La loi du 13 décembre 1990 sur la protection des embryons punit d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois ans quiconque pratique une insémination artificielle ou un transfert d'embryon sur une femme (mère de substitution, Ersatzmutter ) qui est prête à laisser durablement, après la naissance, son enfant à un tiers.
b) Autorité parentale
Lorsqu'un partenaire adopte l'enfant biologique de l'autre, les deux partenaires exercent conjointement l'autorité parentale sur celui-ci.
Dans les autres cas, la loi du 16 janvier 2001 donne au partenaire du parent d'un enfant biologique une autorité parentale réduite sur celui-ci à condition que le parent en question soit le seul titulaire de l'autorité parentale.
Le partenaire exerce un droit de codécision, avec l'accord du parent détenteur de l'autorité parentale, pour les questions relatives à la vie quotidienne de l'enfant. Ce droit disparaît si les partenaires vivent durablement de manière séparée.
En cas d'extrême urgence, le partenaire a également le droit d'accomplir tous les actes juridiques nécessaires au bien de l'enfant mais doit en référer au plus vite au parent détenteur de l'autorité parentale.
Le tribunal aux affaires familiales peut augmenter ou réduire le contenu de cette forme d'autorité parentale dans l'intérêt de l'enfant.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITE
BELGIQUE
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
La loi du 13 février 2003 ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du code civil autorise le mariage entre personnes du même sexe à compter du 1 er juin 2003.
2. L'alternative légale au mariage
La loi du 23 novembre 1998 instaurant la « cohabitation légale », entrée en vigueur le 1 er janvier 2000, offre un cadre juridique minimal à la vie commune de deux personnes de même sexe ou non, quel que soit leur lien de parenté, sous réserve qu'elles fassent une déclaration de cohabitation légale devant l'officier de l'état civil du domicile commun.
La cohabitation légale oblige chacun des cohabitants à contribuer aux charges de la vie commune, à participer aux dettes contractées tant au titre de celle-ci que pour les enfants élevés ensemble. Toutes les décisions relatives au logement commun doivent être prises ensemble comme dans le mariage.
La loi du 28 mars 2007 170 ( * ) prévoit que le cohabitant légal a un droit d'usufruit sur le logement commun et les meubles qui le garnissent au moment de l'ouverture de la succession sauf testament contraire du prédécédé.
Selon la loi de 1998, « les cohabitants règlent les modalités de leur cohabitation légale par convention (devant notaire) comme ils le jugent à propos » dans le respect de la légalité.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Adoption conjointe
La loi du 18 mai 2006 modifiant certaines dispositions du code civil en vue de permettre l'adoption par des personnes de même sexe, entrée en vigueur le 30 juin 2006, permet à deux personnes mariées de même sexe d'adopter conjointement un enfant.
Adoption de l'enfant du conjoint
Depuis 2006 également, le code civil autorise une personne à adopter l'enfant biologique ou l'enfant adoptif de son conjoint de même sexe.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
La loi du 6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée (PMA) et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes prévoit que « les centres de fécondation font preuve de la plus grande transparence quant à leurs options en ce qui concerne l'accessibilité du traitement ; ils ont la liberté d'invoquer la clause de conscience à l'égard des demandes qui leur sont adressées ».
Les femmes célibataires et les couples homosexuels féminins ont donc accès à la procréation médicalement assistée sous réserve que le centre de fécondation consulté donne suite à leur demande, ce qu'il n'est pas légalement tenu de faire.
La loi dispose que « préalablement à toute démarche médicale [...], le ou les auteurs du projet parental et le centre de fécondation consulté établissent une convention. [...] Lorsqu'il s'agit d'un couple, la convention est signée par les deux auteurs du projet parental ».
L'auteur du projet parental est défini comme « toute personne ayant pris la décision de devenir parent par le biais d'une procréation médicalement assistée, qu'elle soit effectuée ou non au départ de ses propres gamètes ou embryons ».
• Gestation pour autrui (GPA)
La gestation pour autrui ne fait l'objet d'aucune disposition légale ou réglementaire, et donc d'aucune interdiction expresse.
b) Autorité parentale
Depuis le 1 er septembre 2005, date d'entrée en vigueur de la loi du 24 avril 2003 réformant l'adoption, le code civil prévoit que l'autorité parentale 171 ( * ) est exercée conjointement par les deux époux en cas d'adoption conjointe ou lorsque l'adopté est l'enfant biologique ou l'enfant adoptif du conjoint de l'adoptant.
2. L'alternative légale au mariage
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Adoption conjointe
La loi du 18 mai 2006 précitée permet à deux personnes de même sexe vivant en cohabitation légale d'adopter conjointement un enfant.
Adoption de l'enfant du cohabitant
Depuis 2006 également, le code civil autorise une personne à adopter l'enfant biologique ou l'enfant adoptif de son cohabitant de même sexe.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
Les femmes célibataires et les couples homosexuels féminins ont accès à la procréation médicalement assistée (PMA) sous réserve que le centre de fécondation consulté donne suite à leur demande, ce qu'il n'est pas légalement tenu de faire (voir supra ).
• Gestation pour autrui (GPA)
La gestation pour autrui ne fait l'objet d'aucune disposition légale ou réglementaire, et donc d'aucune interdiction expresse.
b) Autorité parentale
Depuis le 1 er septembre 2005, date d'entrée en vigueur de la loi du 24 avril 2003 réformant l'adoption, le code civil prévoit que l'autorité parentale est exercée conjointement 172 ( * ) par les deux cohabitants en cas d'adoption conjointe ou lorsque l'adopté est l'enfant biologique ou l'enfant adoptif du cohabitant de l'adoptant.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
CANADA (Québec)
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
Le mariage entre deux personnes de même sexe est autorisé au Québec comme dans le reste du Canada par la loi canadienne sur le mariage civil promulguée le 20 juillet 2005.
2. L'alternative légale au mariage
La loi québécoise instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation promulguée le 7 juin 2002 détermine le cadre juridique de la vie commune de deux personnes, qu'elles soient ou non de même sexe.
Comme dans le mariage, les partenaires ont une obligation mutuelle de respect, de fidélité, de secours et d'assistance. Les droits et les obligations sont très proches, notamment s'agissant de la contribution aux charges du ménage, de l'obligation alimentaire, du régime patrimonial (puisque les partenaires peuvent choisir un des trois régimes matrimoniaux légaux ou un régime conventionnel), du logement familial, de la direction de la famille, de l'autorité parentale, ainsi qu'en matière successorale.
La fin de l'union civile résulte d'une décision judiciaire si le couple a des enfants communs. En l'absence de ceux-ci, une déclaration commune devant un notaire peut suffire si les partenaires y règlent toutes les conséquences patrimoniales de leur séparation par acte notarié.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Adoption conjointe
Les époux de même sexe peuvent adopter conjointement un enfant au Québec.
Adoption de l'enfant du conjoint
Dans les couples mariés de même sexe, l'un des époux peut adopter l'enfant biologique ou adoptif de l'autre.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
Le code civil du Québec modifié par la loi de 2002 précitée ne vise pas seulement la procréation médicalement assistée, mais d'une manière plus générale la procréation assistée qui comprend le cas où « l'apport génétique se fait par relation sexuelle » 173 ( * ) . Il en donne la définition suivante :
« Le projet parental avec assistance à la procréation existe dès lors qu'une personne seule ou des conjoints ont décidé, afin d'avoir un enfant, de recourir aux forces génétiques d'une personne qui n'est pas partie au projet parental. »
La procréation assistée est donc accessible aux célibataires ainsi qu'aux couples mariés, de même sexe ou non.
Le code dispose que « la filiation de l'enfant né d'une procréation assistée s'établit comme une filiation par le sang, par l'acte de naissance » et qu'« à défaut de ce titre, la possession constante d'état suffit ; celle-ci s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation entre l'enfant, la femme qui lui a donné naissance et, le cas échéant, la personne qui a formé, avec cette femme, le projet parental commun ».
Il instaure également une présomption simple de parentalité en faveur des couples de femmes mariées selon laquelle « l'enfant, issu par procréation assistée d'un projet parental entre époux [...] qui est né pendant leur union ou dans les trois cents jours après sa dissolution ou son annulation est présumé avoir pour autre parent le conjoint de la femme qui lui a donné naissance ». Dans ce cas, l'une a le droit de déclarer à l'état civil la filiation à l'égard de l'autre en vue de l'établissement de l'acte de naissance. Elles sont désignées comme les mères de l'enfant.
• Gestation pour autrui (GPA)
Le contrat de gestation pour autrui est illégal au Québec.
Selon le code civil québécois, « toute convention par laquelle une femme s'engage à procréer ou à porter un enfant pour le compte d'autrui est nulle de nullité absolue ».
b) Autorité parentale
Les parents de même sexe mariés exercent ensemble l'autorité parentale sur leurs enfants.
Pour l'enfant né d'un projet parental avec procréation assistée, le code civil québécois prévoit que « lorsque les parents sont tous deux de sexe féminin, les droits et obligations que la loi attribue au père, là où ils se distinguent de ceux de la mère, sont attribués à celle des deux mères qui n'a pas donné naissance à l'enfant ».
Pour l'enfant adopté, « lorsque les parents de l'adopté sont de même sexe, celui qui a un lien biologique avec l'enfant a, dans le cas où la loi attribue à chaque parent des droits et obligations distincts, ceux du père, s'il s'agit d'un couple masculin, et ceux de la mère, s'il s'agit d'un couple féminin. L'adoptant a alors les droits et obligations que la loi attribue à l'autre parent ». Dans les autres cas, le jugement d'adoption détermine les droits et obligations de chacun.
A ce jour, la situation de l'époux du parent d'un enfant ne fait pas l'objet de dispositions légales. Dans un projet de loi n° 81 modifiant le code civil et d'autres dispositions législatives en matière d'adoption et d'autorité parentale déposé en juin 2012 devant le parlement du Québec, le gouvernement québécois propose que « le père ou la mère qui exerce seul de fait ou de droit l'autorité parentale puisse, avec l'autorisation du tribunal, partager cet exercice avec son conjoint qui cohabite avec l'enfant depuis au moins un an ». Ce partage ne serait possible que dans l'intérêt de l'enfant, avec le consentement de l'autre parent et celui de l'enfant âgé de 10 ans et plus.
2. L'alternative légale au mariage
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Adoption conjointe
Les personnes de même sexe ayant conclu une « union civile » peuvent adopter conjointement un enfant au Québec.
Adoption de l'enfant du partenaire d'union civile
Les personnes de même sexe ayant conclu une « union civile » peuvent adopter l'enfant biologique ou adoptif de leur partenaire.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
Voir supra les dispositions communes applicables aux célibataires et aux couples de même sexe ou non.
Selon le code civil du Québec, « la filiation de l'enfant né d'une procréation assistée s'établit comme une filiation par le sang, par l'acte de naissance ».
Ce texte instaure une présomption simple de parentalité en faveur des couples de femmes unies civilement puisque « l'enfant, issu par procréation assistée d'un projet parental entre [...] conjoints unis civilement qui est né pendant leur union ou dans les trois cents jours après sa dissolution ou son annulation est présumé avoir pour autre parent le conjoint de la femme qui lui a donné naissance ». Dans ce cas, l'une a le droit de déclarer, à l'état civil, la filiation à l'égard de l'autre en vue de l'établissement de l'acte de naissance.
• Gestation pour autrui (GPA)
Le contrat de gestation pour autrui est illégal au Québec.
b) Autorité parentale
Les parents de même sexe ayant conclu une « union civile » exercent ensemble l'autorité parentale. Les remarques exposées supra concernant les cas où l'enfant né par procréation assistée pendant le mariage est adopté ou vit avec le partenaire d'un de ses parents valent également pour l'union civile.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
DANEMARK
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
La loi du 12 juin 2012 modifiant la loi sur la conclusion du mariage et sa fin, la loi sur les effets juridiques du mariage et la loi sur l'administration de la justice et abrogeant la loi sur le partenariat enregistré a inséré dans la loi sur la conclusion et la dissolution du mariage un article 1 selon lequel celle-ci « s'applique au mariage entre deux personnes de sexe différent et entre deux personnes de même sexe ».
Le mariage entre deux personnes du même sexe est possible depuis le 15 juin 2012.
La loi du 5 janvier 1995 sur les effets juridiques du mariage s'applique également au mariage entre deux personnes de même sexe sous les deux réserves suivantes introduites par la loi du 12 juin 2012 :
- les dispositions de la législation danoise qui contiennent des règles spécifiques relatives à l'un des époux en fonction du sexe de celui-ci ne s'appliquent pas au mariage entre deux personnes de même sexe ;
- et les dispositions de traités internationaux ne s'appliquent pas au mariage entre deux personnes de même sexe, sauf si les États signataires du traité se sont entendus sur ce point.
2. L'alternative légale au mariage
A compter du 15 juin 2012, la loi précitée a abrogé la loi 174 ( * ) du 10 octobre 2005 sur le partenariat enregistré qui était la seule forme de vie commune prévue par le législateur. Les partenariats enregistrés avant cette date subsistent et continuent d'être régis par la loi de 2005.
Ils peuvent également être convertis en mariage, si les partenaires le souhaitent, par le chef de l'administration communale, auquel la loi n° 38 du 15 janvier 2007 sur la conclusion du mariage et sa fin confie la responsabilité de vérifier que les conditions légales du mariage sont réunies. Les partenaires remplissent un formulaire qu'ils adressent à la commune qui a enregistré leur partenariat.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
Depuis le 15 juin 2012, les couples mariés de même sexe ont les mêmes droits que les couples mariés de sexe différent.
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Adoption conjointe
Comme les époux de sexe différent, les couples mariés de même sexe peuvent adopter conjointement un enfant depuis le 15 juin 2012.
Adoption de l'enfant du conjoint
Comme dans les couples mariés de sexe différent, l'un des membres d'un couple marié de même sexe peut adopter l'enfant biologique ou adoptif de l'autre par la voie de l'adoption dite adoption des beaux-enfants (Stedbarnsadoption) .
L'adoption est même possible dès la naissance dans les couples de femmes recourant à la PMA (voir infra ).
• Procréation médicalement assistée (PMA)
L'accès à la procréation médicalement assistée est ouvert aux femmes célibataires et aux femmes vivant en couple marié de même sexe.
L'instruction du 4 juillet 2012 relative à l'adoption prévoit que les règles applicables aux partenariats enregistrés avant le 15 juin 2012 s'appliquent de manière analogue aux mariages entre deux personnes du même sexe (voir infra ).
Un membre d'un couple marié peut adopter l'enfant du conjoint à partir du jour de la naissance avec l'accord de celui-ci, si l'enfant a été conçu à la suite d'une insémination artificielle avec donneur anonyme et si le couple vivait ensemble avant la fécondation.
Cette disposition s'applique aux couples de femmes mariés.
Une demande d'« adoption des beaux-enfants » (Stedbarnsadoption) doit être adressée à l'administration aux affaires familiales après la 22 ème semaine de grossesse et avant les trois mois de l'enfant.
• Gestation pour autrui (GPA)
La loi du 7 juin 2001 sur l'enfant dispose que les conventions de gestation pour autrui sont nulles. Une femme ne peut pas conclure de contrat selon lequel elle porterait un enfant et le remettrait à un tiers après la naissance.
En outre, la loi du 4 septembre 2006 sur la procréation artificielle en relation avec le traitement médical, le diagnostic et la recherche interdit aux professionnels de santé de pratiquer une procréation médicalement assistée en faveur d'une femme qui aurait préalablement conclu un contrat de gestation pour autrui.
b) Autorité parentale
Depuis le 15 juin 2012, les personnes mariées de même sexe ont la même autorité parentale sur l'enfant adopté ensemble ou sur l'enfant du conjoint qu'ils ont adopté, y compris en cas de procréation médicalement assistée, que les époux de sexe différent placés dans la même situation.
2. L'alternative légale au mariage
Les dispositions relatives au partenariat ne s'appliquent désormais qu'aux partenariats enregistrés avant le 15 juin 2012 et non transformés en mariage.
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Avant même le vote de la loi sur le mariage des personnes de même sexe, dès le 1 er juillet 2010, le partenariat produisait les mêmes effets que le mariage (hétérosexuel) dans le domaine de l'adoption et de l'autorité parentale sous les deux réserves identiques à celles mentionnées supra .
Adoption conjointe
Les partenaires peuvent adopter conjointement au Danemark depuis le 1 er juillet 2010 sauf dans le cas où l'enfant a fait l'objet d'une adoption internationale.
Adoption de l'enfant du partenaire
Les partenaires de même sexe bénéficient de cette possibilité depuis le 1 er juillet 2010.
Un membre d'un partenariat peut adopter l'enfant biologique ou adoptif de l'autre par la voie de l'« adoption des beaux-enfants » (voir supra ).
L'adoption est aussi possible dès la naissance dans les couples de femmes recourant à la PMA (voir infra ).
• Procréation médicalement assistée (PMA)
L'accès à la procréation médicalement assistée est ouvert aux femmes célibataires et aux femmes vivant en partenariat.
La loi du 12 juin 2009 modifiant la loi sur l'adoption permet, depuis le 1 er juillet 2009, à un partenaire d'adopter l'enfant de l'autre à partir du jour de la naissance avec l'accord de celui-ci, si l'enfant a été conçu à la suite d'une insémination artificielle avec donneur anonyme et si les partenaires vivaient ensemble avant la fécondation. Une demande d'« adoption des beaux-enfants » doit être adressée à l'administration aux affaires familiales après la 22 ème semaine de grossesse et jusqu'aux trois mois de l'enfant. En pratique, cette disposition profite à des femmes vivant en partenariat.
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle est interdite (voir s upra ).
b) Autorité parentale
Depuis le 1 er juillet 2010, les partenaires de même sexe ont la même autorité parentale sur l'enfant adopté ensemble ou sur l'enfant du conjoint qu'ils ont adopté, y compris en cas de procréation médicalement assistée, que les époux de sexe différent placés dans la même situation.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITE
ESPAGNE
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
Le mariage des personnes de même sexe a été autorisé par la loi n° 13 du 1 er juillet 2005 qui modifie le code civil espagnol dont l'article 44 dispose désormais que « le mariage est soumis aux mêmes conditions et a les mêmes effets quand chacun des deux contractants est de même sexe ou de sexe différent ».
Le Tribunal constitutionnel espagnol a rejeté le 6 novembre 2012 le recours formé contre la loi précitée.
2. L'alternative légale au mariage
• Partenariat enregistré
La constitution espagnole réserve à l'État la compétence en matière de détermination du régime du mariage.
Les communautés autonomes ont, les premières, modifié leur droit civil afin d'autoriser l'ouverture de registres destinés à l'enregistrement des unions non maritales, équivalentes aux « partenariats enregistrés », qu'elles soient qualifiées d'unions de fait (uniones de hecho) ou de couples stables (parejas estables) . La plus ancienne législation en la matière est celle de Catalogne (1998) et la plus récente celle de Murcie (2010). Ces lois se caractérisent par des contenus variés.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
a) Accueil d'un enfant
• Acceptation de la filiation
Une disposition additionnelle de la loi n° 3 du 15 mars 2007 sur la rectification de l'enregistrement de la mention relative au sexe de la personne permet à l'épouse d'une femme de faire savoir à l'officier d'état civil du lieu du domicile conjugal qu'elle accepte la filiation d'un enfant né de sa conjointe.
• Adoption
Adoption conjointe
La loi n° 13 du 1 er juillet 2005 a ouvert l'adoption conjointe aux couples de même sexe.
Adoption de l'enfant du conjoint
Cette loi permet l'adoption des enfants du conjoint.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
La loi n° 14 du 26 mai 2006 modifiant la loi n° 35 du 22 novembre 1988 sur les techniques de reproduction assistée dispose que toute femme peut accéder à celles-ci « indépendamment de son état civil et de son orientation sexuelle ».
Selon l'article 235-8 du code civil espagnol, les enfants nés à la suite de la PMA pratiquée avec le consentement exprès du conjoint (sans référence à son sexe) sont les enfants de celui-ci.
• Gestation pour autrui (GPA)
La gestation pour autrui est explicitement interdite par la loi n° 14 du 23 mai 2006 qui dispose que sont nulles toutes les conventions qui y ont trait.
b) Autorité parentale
La loi ne prévoit pas de régime spécifique pour les couples composés de personnes de même sexe. Le code civil vise « les parents » sans distinction de sexe.
2. L'alternative légale au mariage
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
L'adoption n'est pas possible dans ce cas car le code civil espagnol réserve l'adoption conjointe aux couples mariés puisque nul ne peut être adopté par plus d'une personne, hormis des époux(ses). 175 ( * )
• Procréation médicalement assistée (PMA)
Elle est possible pour toute femme (voir supra ).
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle est explicitement interdite par la loi (voir supra ).
b) Autorité parentale
La loi ne prévoit pas de régime spécifique pour les membres des « partenariats enregistrés » composés de personnes de même sexe reconnus par les lois des autonomies.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
ITALIE
La législation italienne ne permet pas le mariage des personnes de même sexe et ne connaît pas de régime équivalent au « partenariat enregistré ».
La procréation médicalement assistée (PMA) est explicitement réservée par la loi n° 40 du 19 février 2004 aux couples mariés de personnes de sexe différent souffrant de stérilité ou d'infertilité. La PMA hétérologue (par don de gamètes) est interdite.
La loi n° 184 du 4 mai 1983 sur le droit du mineur à une famille réserve l'adoption aux couples mariés depuis au moins trois ans.
Deux décisions juridictionnelles récentes ont cependant modifié la situation juridique des unions de personnes de même sexe.
Tout en jugeant que la constitution italienne ne reconnaît pas à deux personnes de même sexe le droit de se marier, la Cour constitutionnelle italienne, par sa décision n° 138-2010, s'est fondée sur l'article 2 de ce texte qui dispose que la République italienne reconnaît et garantit les droits inviolables de l'Homme, soit seul soit dans les formations sociales où il développe sa personnalité, pour juger que le terme de « formation sociale » doit « s'entendre comme toute forme de communauté, simple ou complexe, propre à permettre et favoriser le libre développement de la personne [...] », au nombre desquelles figure « l'union homosexuelle entendue comme la vie commune stable de deux personnes de même sexe, auxquelles revient le droit fondamental de vivre librement en couple en en obtenant, dans les délais, selon les modalités et dans les limites déterminés par la loi, la reconnaissance juridique ainsi que les droits et devoirs y afférents ».
La Cour a ajouté que « l'on doit exclure, cependant, que l'aspiration à cette reconnaissance - qui suppose nécessairement une législation de portée générale destinée à déterminer le droits et les devoirs des composants du couple - puisse être réalisée seulement au moyen d'une mise sur le même plan des unions homosexuelles et du mariage. L'examen, même non exhaustif, des législations des pays qui ont jusqu'à présent reconnu ces unions, suffit pour constater la diversité des choix effectués ». La Cour en a conclu qu'« il revient au Parlement, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, de déterminer les formes de garantie et de reconnaissance de ces unions [...] ».
La première section civile de la Cour de cassation italienne a, dans sa décision 4184-2012, quant à elle jugé le 15 mars 2012 que « les membres d'un couple homosexuel vivant ensemble dans une relation de fait stable, [...] peuvent - sans préjudice de l'intervention du législateur en la matière - en tant que titulaires du droit à la "vie familiale" et dans l'exercice du droit inviolable de vivre librement en couple ainsi que du droit à la protection juridictionnelle de situations spécifiques, en particulier à la protection d'autres droits fondamentaux, saisir les juges de droit commun pour faire valoir, en présence de "situations spécifiques", le droit à un traitement homogène par rapport à celui assuré par la loi au couple marié [...] ».
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITE
PAYS-BAS
Les Pays-Bas ont successivement reconnu aux couples de personnes de même sexe en :
- 1998, la faculté de conclure un « partenariat enregistré » (geregistreerde partnerschap) et la possibilité pour le conjoint d'un parent qui a un enfant de demander l'équivalent de l'autorité parentale ;
- 2001, le droit de se marier et la faculté d'adopter ;
- 2002, la reconnaissance de l'équivalent de l'autorité parentale, de plein droit, sur l'enfant né au cours d'une union ;
- et, en 2008, le droit d'adopter pour les couples composés de deux femmes.
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
Les Pays-Bas sont le premier État à avoir reconnu, à compter du 1 er avril 2001, le mariage des personnes de même sexe. L'article 30 du code civil y dispose qu'un mariage peut être contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe.
Les règles relatives aux conditions et aux obligations réciproques des conjoints ainsi qu'à la dissolution du mariage sont les mêmes pour tous les couples quelle que soit leur composition.
En revanche, le mariage de deux personnes du même sexe ne produit pas les mêmes effets juridiques à l'égard des enfants que le mariage de deux personnes de sexe différent (voir infra ).
Le divorce requiert dans tous les cas l'intervention d'un juge.
2. Les alternatives légales au mariage
• Partenariat enregistré
La loi a institué, en 1998, le « partenariat enregistré » susceptible d'être conclu par deux personnes, qu'elles soient de même sexe ou de sexe différent.
Déterminés par la loi, les effets du « partenariat enregistré » sont analogues à ceux du mariage, hormis en ce qui concerne la filiation puisque l'enfant d'un des deux partenaires n'entretient pas de relation de descendance avec l'autre partenaire. Pour le reste, le « partenariat enregistré » entre deux personnes de même sexe produit les mêmes effets que le mariage en créant une communauté de biens, des droits successoraux et fiscaux...
Le partenariat peut être converti en mariage moyennant une déclaration des deux partenaires effectuée devant le fonctionnaire de l'état civil. Depuis 2009, le mariage ne peut plus, en revanche, être transformé en partenariat enregistré dans les mêmes conditions.
Le partenariat résulte d'une déclaration effectuée librement devant un officier d'état civil.
Lorsque les deux parties sont d'accord et qu'elles n'ont pas d'enfants de moins de 18 ans, la dissolution du partenariat ne nécessite pas l'intervention d'un juge. Elle résulte d'une convention signée devant un notaire ou un avocat pour en régler les conséquences (sort du logement commun, partage de la communauté, droits à pension), convention qui est enregistrée à l'état civil.
• Contrat de vie commune
Deux ou plusieurs personnes peuvent aussi déterminer par un « contrat de vie commune », les droits et obligations qu'elles se reconnaissent.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
Le mariage de deux personnes de même sexe ne produit pas les mêmes effets à l'égard des enfants que celui de deux personnes de sexe différent.
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Règles communes à tous les types de couples mariés composés de personnes de même sexe
Adoption conjointe
Les deux parents de même sexe peuvent adopter un enfant aux Pays-Bas sous réserve d'avoir pris soin de l'enfant et de l'avoir élevé pendant au moins un an.
Adoption individuelle de l'enfant du conjoint
Le conjoint du parent d'un enfant peut adopter cet enfant dont le domicile est aux Pays-Bas, sous réserve d'avoir au moins trois ans de vie commune avec le parent, d'avoir pris soin de l'enfant et de l'avoir élevé pendant au moins un an. Dans ce cas, le lien parental subsiste avec le parent.
Régime spécifique aux couples composés de deux femmes
Adoption individuelle par la compagne de la mère (duomoeder)
La femme qui accouche d'un enfant né au sein d'un couple marié composé de deux femmes est sa mère. Son épouse (duomoeder) peut adopter l'enfant afin de devenir aussi sa mère au sens légal. Dans ce cas, les délais de droit commun prévus supra pour l'adoption par le conjoint (couple constitué depuis au moins trois ans qui prend soin de l'enfant et l'élève depuis au moins un an) ne s'appliquent pas. La demande peut être formulée avant la naissance de l'enfant et au plus tard six mois après celle-ci. L'adoption prend effet à la naissance dans le premier cas et à la date du dépôt de la demande dans le second.
Si une femme qui appartient à un couple de même sexe recourt à la procréation médicalement assistée, sa conjointe obtient automatiquement du juge l'adoption de l'enfant, à moins qu'elle n'apparaisse pas réalisée dans l'intérêt de ce dernier.
Mesures en cours d'examen par le Parlement néerlandais
Le projet de loi déposé en octobre 2011 tend à :
- permettre au donneur de sperme 176 ( * ) qui entretient une relation étroite avec l'enfant de demander au juge la reconnaissance de l'enfant ;
- reconnaître à l'épouse 177 ( * ) d'une femme qui met au monde un enfant pendant leur union le statut de parent de plein droit si cet enfant est issu d'une fécondation artificielle par un donneur qui ne jouera pas de rôle dans son éducation.
La procédure serait considérablement plus légère que celle de l'adoption : elle ne nécessiterait pas l'intervention d'un juge mais seulement l'établissement d'un acte de reconnaissance par un fonctionnaire de l'état civil ou par un notaire. Elle aurait pour corollaire que la même épouse pourrait se voir imposer par le juge de devenir l'un des parents de l'enfant et d'assumer les responsabilités qui sont liées à ce statut (obligation alimentaire...).
• Procréation médicalement assistée (PMA)
Elle est autorisée sans discriminations liée au sexe des parents.
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle n'est pas interdite lorsqu'elle ne donne pas lieu à contrepartie financière, les articles 151 b et c du code pénal réprimant toute forme « commerciale » de maternité pour autrui.
b) Autorité parentale
Le droit néerlandais distingue l'autorité parentale (ouderlijke gezag) , exercée par les parents, l'autorité conjointe (gesamenlijke gezag) exercée par un non-parent qui vit avec le parent et la tutelle (voogdij) .
En ce qui concerne les couples mariés dont au moins un des membres est le parent de l'enfant, l'autorité conjointe, qui confère à son titulaire les mêmes droits et devoirs qu'au parent, est exercée :
- de plein droit sur les enfants nés après le mariage sous réserve qu'il n'existe pas d'autre parent (par exemple dans le cas d'une naissance consécutive à une insémination artificielle avec donneur anonyme) ;
- sous réserve d'une décision juridictionnelle rendue à la demande des époux, lorsqu'existe un second parent de l'enfant qui n'est pas membre du couple en question [par exemple s'il y a un donneur qui, dans le cadre d'une fécondation in vitro (FIV), a reconnu l'enfant] et si les deux conjoints ont élevé ensemble pendant au moins un an l'enfant que l'un d'entre eux, qui en est le parent, a élevé seul pendant au moins trois ans.
Dans le cas où l'un des époux obtient l'autorité conjointe il ne devient pas, ipso facto , le parent de l'enfant auquel elle s'applique. Le statut de parent n'est obtenu que par l'adoption et sous les conditions prévues pour celle-ci.
Enfin, deux non-parents ne peuvent exercer que la tutelle commune (gezamenlijke voogdij) de l'enfant . L'obtention de cette tutelle par un couple de deux hommes sur un enfant conçu par PMA ou GPA peut être le préalable à l'adoption de celui-ci 178 ( * ) .
2. L'alternative légale au mariage
Le « partenariat enregistré » de deux personnes de même sexe ne produit pas les mêmes effets à l'égard des enfants que celui contracté entre deux personnes, de sexe différent.
Les relations juridiques des enfants et des partenaires de même sexe sont identiques à celles qui existeraient si ces deux personnes étaient mariées 179 ( * ) . La loi n'opère pas de distinction en fonction du type d'union.
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Règles communes à tous les types de partenaires de même sexe
Adoption conjointe
Les deux parents de même sexe peuvent adopter conjointement un enfant aux Pays-Bas sous réserve d'avoir pris soin de l'enfant et de l'avoir élevé pendant au moins un an.
Adoption de l'enfant du partenaire
Le partenaire du parent d'un enfant domicilié aux Pays-Bas peut adopter celui-ci, sous réserve d'avoir au moins trois ans de vie commune avec ce partenaire, d'avoir pris soin de l'enfant et de l'avoir élevé pendant au moins un an. Dans ce cas, le lien parental subsiste avec le parent.
Régime spécifique aux couples composés de deux femmes
Les dispositions applicables en cas de mariage (v. supra ) s'appliquent également au « partenariat enregistré » pour l'adoption individuelle par la compagne de la mère (duomoeder) .
• Procréation médicalement assistée (PMA)
Elle est autorisée sans discrimination en fonction du sexe.
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle n'est pas interdite lorsqu'elle ne donne pas lieu à contrepartie financière, les articles 151 b et c du code pénal réprimant toute forme « commerciale » de maternité pour autrui.
b) Autorité parentale
En matière d'autorité parentale exercée par les deux parents, d'autorité conjointe exercée par le partenaire du parent et enfin de tutelle, le régime applicable aux partenaires enregistrés est identique à celui des époux.
Dans les « partenariats enregistrés » dont au moins un des membres est le parent de l'enfant, l'autorité conjointe, qui confère à son titulaire les mêmes droits et devoirs qu'au parent, est exercée comme dans le cas du mariage évoqué supra :
- de plein droit sur les enfants nés après la signature d'un partenariat sous réserve qu'il n'existe pas d'autre parent (cas d'une naissance consécutive à une insémination artificielle avec donneur anonyme) ;
- sous réserve d'une décision juridictionnelle rendue à la demande des partenaires lorsqu'existe un second parent de l'enfant qui n'est pas membre de l'union en question (cas de FIV où le donneur a reconnu l'enfant) et si les deux partenaires ont élevé ensemble pendant au moins un an l'enfant que l'un d'entre eux, qui en est le parent, a élevé seul pendant au moins trois ans.
Dans le cas où l'un des partenaires obtient l'autorité conjointe, il ne devient pas, ipso facto , le parent de l'enfant auquel elle s'applique. Le statut de parent n'est obtenu que par l'adoption et sous les conditions prévues pour celle-ci. Sur ce point le régime applicable au partenariat est identique à celui du mariage.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITE
PORTUGAL
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
La loi n° 9 du 31 mai 2010 autorisant le mariage civil entre deux personnes du même sexe a modifié le code civil portugais dont l'article 1577 dispose désormais que « le mariage est le contrat conclu entre deux personnes qui aspirent à constituer une famille au moyen d'une vie commune [...] ».
2. L'alternative légale au mariage
• Union de fait
La loi n° 7 du 11 mai 2001 portant mesures de protection des unions de fait (uniões de facto) règle, indépendamment de leur sexe, la situation des personnes qui vivent dans le cadre d'une union de fait depuis plus de deux ans.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
La loi n° 9 du 31 mai 2010 autorisant le mariage civil entre deux personnes de même sexe dispose explicitement que les modifications qu'elle opère dans le code civil n'ont pas pour effet de permettre l'adoption, dans aucune de ses modalités, par des personnes mariées de même sexe.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
La loi n° 32/2006 sur la procréation médicalement assistée réserve la possibilité de recourir à la PMA aux couples hétérosexuels mariés ou vivant de façon maritale depuis plus de deux ans.
Du fait de l'extension de la possibilité de se marier aux personnes de même sexe, l'interprétation littérale de cette disposition conduirait à penser que le législateur a entendu ouvrir la PMA à tous les couples mariés, quelle que soit leur composition. Selon le Conseil national d'éthique pour les sciences de la vie, il résulte des travaux parlementaires que le législateur n'avait pas cette intention, et il importe que la PMA soit réservée aux couples mariés ou non, de sexe différent.
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle n'est autorisée par la loi n° 32/2006 précitée ni pour les couples de sexe différent ni pour ceux de même sexe.
b) Autorité parentale
La loi ne prévoit pas de régime spécifique pour les couples composés de personnes de même sexe. En pratique, l'impossibilité d'adopter constitue un obstacle majeur à l'exercice de l'autorité parentale.
2. L'alternative légale au mariage
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
La loi n° 7 du 11 mai 2001 portant mesures de protection des unions de fait reconnaît le droit d'adopter aux seules personnes hétérosexuelles - et pas aux personnes de même sexe - qui appartiennent à une telle union de fait.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
La loi n° 32/2006 sur la procréation médicalement assistée réserve la possibilité de recourir à la PMA aux couples hétérosexuels mariés ou vivant de façon maritale depuis plus de deux ans. Le Conseil national d'éthique pour les sciences de la vie recommande, comme on l'a vu supra , d'appliquer cette disposition conformément à l'intention du législateur, c'est-à-dire en n'ouvrant la PMA qu'aux seuls couples de sexe différent.
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle n'est autorisée par la loi n° 32/2006 précitée ni pour les couples de sexe différent ni pour ceux de même sexe.
b) Autorité parentale
La loi ne prévoit pas de régime spécifique en la matière pour les couples composés de personnes de même sexe. En pratique, l'impossibilité d'adopter constitue un obstacle majeur à l'exercice de l'autorité parentale.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITE
ROYAUME-UNI (Angleterre)
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
Il n'est pas prévu. La loi sur le mariage de 1949 n'autorise que le mariage entre un homme et une femme.
En mars 2012, le Gouvernement a lancé une consultation sur le mariage civil des couples de même sexe qui s'est terminée le 14 juin 2012. Les pouvoirs publics s'interrogent notamment sur l'opportunité :
- d'autoriser le mariage civil des couples de même sexe ;
- de conserver le partenariat civil ;
- et de permettre la conversion du partenariat civil en mariage.
Le Gouvernement a indiqué qu'il présenterait un projet de loi au plus tard en 2015.
2. L'alternative légale au mariage
• Le partenariat civil
Le partenariat civil (civil partnership) est la seule forme de vie commune prévue par la loi.
La loi sur le partenariat civil de 2004, entrée en vigueur en décembre 2005, ne s'applique qu'aux personnes de même sexe.
Le partenariat civil, même si sa dissolution par un tribunal est possible, est conclu pour la vie comme le mariage. Il présente des analogies avec celui-ci, notamment l'obligation de subvenir aux besoins mutuels et accorde aux partenaires des droits équivalents à ceux des couples mariés dans de nombreux domaines (protection du logement du couple et droits successoraux par exemple).
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
Comme on l'a dit supra , le mariage n'est pas autorisé entre personnes de même sexe.
2.L'alternative légale au mariage
a) Accueil d'un enfant
Les couples de même sexe et les célibataires peuvent élever pendant une durée déterminée un enfant recueilli par les services sociaux qui le leur confient. Cette forme d'accueil particulière (fostering) qui ne crée en général pas de lien juridique entre l'enfant et les personnes qui s'occupent de lui n'est pas étudiée dans cette note.
• Adoption
Adoption conjointe
S'ils sont engagés dans une relation familiale stable (enduring family relationship) , les couples de même sexe, liés par un partenariat civil ou non, peuvent adopter conjointement un enfant en vertu de la loi de 2002 sur l'adoption et l'enfant.
Adoption de l'enfant du partenaire
La loi précitée permet au partenaire de même sexe d'un parent d'adopter l'enfant de celui-ci dès lors qu'ils sont engagés dans une relation stable et sont liés par un partenariat civil ou non. L'enfant doit avoir vécu avec l'adoptant pendant une période de six mois avant le dépôt de la demande d'adoption.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
L'accès à la procréation médicalement assistée est ouvert aux femmes célibataires ainsi qu'aux femmes vivant en partenariat civil.
La loi de 2008 relative à la fécondation humaine et à l'embryologie prévoit qu'à compter du 6 avril 2009, lorsqu'une femme est engagée dans un partenariat civil au moment de la procréation médicalement assistée, sa partenaire est automatiquement traitée comme le parent légal de l'enfant (the child's legal parent) sauf si cette dernière indique expressément qu'elle ne consent pas à cet acte médical.
Ce texte offre également la même possibilité aux femmes vivant en union de fait sous réserve que toutes les deux y consentent par écrit au moyen de formulaires disponibles dans les cliniques.
• Gestation pour autrui (GPA)
En application de la loi de 1985 sur les accords relatifs à la gestation pour autrui, cette pratique est légale. Les accords ne sauraient toutefois être conclus à titre onéreux ni faire l'objet d'une exécution forcée.
Les couples de même sexe, masculins comme féminins, peuvent conclure un tel accord avec une mère porteuse.
La loi de 2008 relative à la fécondation humaine et à l'embryologie permet, depuis avril 2010, à deux personnes de demander à un juge de rendre une décision en matière parentale (parental order) aux termes de laquelle l'enfant sera légalement considéré comme leur enfant dans les cas impliquant une PMA (parenthood in cases involving assisted reproduction) si :
- il a été porté par une femme qui n'est pas l'un des requérants et qu'il s'agit d'une procréation médicalement assistée ;
- le matériel génétique d'au moins un des demandeurs a servi à la conception de l'embryon.
En outre :
- « les requérants doivent être des partenaires civils ou deux personnes vivant comme des partenaires dans une relation familiale stable ;
- ils doivent déposer leur requête dans un délai de six mois à compter de la naissance de l'enfant ;
- l'enfant doit être domicilié chez les demandeurs dont l'un au moins est domicilié au Royaume-Uni ;
- les deux requérants doivent être âgés de 18 ans au moment de la décision du juge qui doit s'assurer que :
• la mère porteuse et tout autre parent de l'enfant (à l'exclusion des requérants) a donné un accord libre et inconditionnel à la décision du juge dont ils ont compris toute la portée ;
• aucune rétribution ou avantage n'a été donné ou reçu par les requérants en vue d'obtenir cette décision, les consentements nécessaires pour celle-ci ou la remise de l'enfant ».
Ces dispositions permettent aux « partenaires civils » 180 ( * ) masculins qui accueillent un enfant remis par une mère porteuse - si l'un d'entre eux est le père génétique de celui-ci - de demander un jugement qui les reconnaît comme les parents. En revanche, si aucun d'entre eux n'est le père biologique de l'enfant, seule la voie de l'adoption est ouverte.
b) Autorité parentale
L'adoption conjointe ou l'adoption de l'enfant du partenaire donne à l'adoptant l'autorité parentale (parental responsibility) sur l'enfant comme tel serait le cas pour des couples hétérosexuels placés dans la même situation.
Le partenaire a également l'autorité parentale dans tous les cas où il est considéré comme le parent légal de l'enfant :
- par la loi, sous certaines conditions, pour les couples de femmes recourant à une technique de PMA (voir supra ) ;
- par un juge qui rend une décision en matière parentale aux termes de laquelle le ou les requérants dans les couples de femmes ou d'hommes deviennent les parents légaux de l'enfant (legal parentage) .
La loi de 1989 sur l'enfant permet au « partenaire civil » du parent d'un enfant d'obtenir l'autorité parentale en s'adressant à un juge ou en concluant un accord sur l'autorité parentale (Parental Responsibility Agreement) avec le ou les parents détenteurs de l'autorité parentale au moyen d'un formulaire spécifique signé devant des témoins appartenant au personnel judiciaire autorisé à recevoir des serments et enregistré officiellement au Registre principal de la Division aux affaires familiales (Principal Registry of the Family Division) .
Selon le même texte, les couples de femmes recourant à une technique de PMA peuvent conclure un accord sur l'autorité parentale afin que la partenaire de celle qui met l'enfant au monde puisse aussi être titulaire de l'autorité parentale.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
SUÈDE
La Suède a successivement reconnu aux couples de personnes de même sexe en :
- 1988, la possibilité de cohabiter dans le cadre d'un régime légal ;
- 1994, le droit de contracter un « partenariat enregistré » ;
- 2003, le droit d'exercer l'autorité parentale et celui d'adopter ;
- et à compter du 1 er mai 2009, le droit de se marier.
A. LES UNIONS
1. Le mariage des personnes de même sexe
En vertu du code du mariage, les deux personnes qui sont mariées depuis le 1 er mai 2009, sans référence à leur sexe, sont des époux.
2. Les alternatives légales au mariage
• Partenariat enregistré
La loi sur le « partenariat enregistré » (registrerat partnerskap) , qui ne concernait que les personnes de même sexe, a été abrogée par la loi de 2009 qui a ouvert le mariage à ces personnes. Identique à celui du mariage, le régime applicable aux partenariats signés avant le 1 er mai 2009 n'a pas été modifié.
• Cohabitation
La loi sur la cohabitation (sambolag) définit les cohabitants 181 ( * ) - sans distinction relative à leur sexe - comme deux personnes qui habitent ensemble de façon permanente, dans une relation de couple, et ont un domicile commun. D'autres textes leur assurent des droits analogues à ceux du mariage, notamment en matière successorale.
B. HOMOPARENTALITÉ ET FILIATION
1. Le mariage des personnes de même sexe
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Adoption conjointe
Les époux ne peuvent, quant à eux, en principe, adopter que conjointement. Toutefois, un époux peut adopter seul si son conjoint vit dans un endroit inconnu ou souffre de troubles psychiatriques graves.
Le régime applicable aux personnes mariées s'applique aussi à celles qui ont signé un partenariat enregistré avant le 1 er mai 2009.
Adoption de l'enfant de l'autre époux
L'un des époux peut adopter, avec l'assentiment de son conjoint, l'enfant de ce dernier.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
La PMA par insémination artificielle et par fécondation in vitro est ouverte aux couples mariés composés de deux femmes, sous réserve que la partenaire de la femme qui reçoit l'embryon ait donné son consentement et que le matériel génétique de l'une des deux épouses soit utilisé (pas de PMA si elles sont toutes deux infertiles).
Le régime applicable aux personnes mariées s'applique aussi à celles qui ont signé un partenariat enregistré avant le 1 er mai 2009.
Une résolution adoptée par le Riksdag le 29 mars 2012 a chargé le gouvernement suédois d'élaborer un projet de loi autorisant les femmes célibataires à bénéficier de la procréation médicalement assistée tant en ce qui concerne l'insémination que la procréation in vitro .
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle est interdite. Cependant, dans la résolution précitée du 29 mars 2012, le Riksdag a aussi chargé le gouvernement suédois d'étudier « sans préjugé » la question de la maternité pour autrui.
• Autorité parentale
La loi dispose que la « garde » (vårdnad) des enfants, équivalent de l'autorité parentale, est exercée par les deux parents de l'enfant qui naît au sein d'un couple (sans référence à la composition sexuelle de celui-ci). Il en va de même si ceux-ci se marient après la naissance. Dans ce cas, l'autorité s'applique à compter de la date du mariage.
Lorsqu'un parent exerce seul l'autorité parentale, le juge peut décider à la demande des conjoints, de leur conférer l'autorité conjointe sur cet enfant.
Si l'enfant est enregistré en Suède à la naissance, les parents peuvent aussi obtenir l'autorité conjointe par le biais d'une déclaration effectuée auprès de la Direction générale des services sociaux ou encore auprès des services fiscaux.
2. L'alternative légale au mariage
Cette rubrique ne concerne que les partenaires enregistrés avant 2009 et les cohabitants puisque la loi relative au partenariat - dont le régime est identique à celui du mariage - a été abrogée par la loi de 2009 qui a ouvert le mariage aux personnes de même sexe.
a) Accueil d'un enfant
• Adoption
Le régime applicable aux personnes mariées s'applique aussi à celles qui ont signé un partenariat enregistré avant le 1 er mai 2009. Voir supra .
Les cohabitants ne peuvent pas adopter d'enfant conjointement. Ils peuvent exclusivement recourir à l'adoption individuelle.
• Procréation médicalement assistée (PMA)
La PMA par insémination artificielle et par fécondation in vitro n'est ouverte qu'aux partenaires de sexe féminin, sous réserve que la partenaire de la femme qui reçoit l'embryon ait donné son consentement et que le matériel génétique de l'une des deux épouses soit utilisé (pas de PMA si elles sont toutes deux infertiles).
• Gestation pour autrui (GPA)
Elle n'est pas autorisée.
b) Autorité parentale
La loi dispose que l'autorité parentale peut être attribuée à deux personnes (sans référence à leur sexe), dans les mêmes conditions que les époux, dès lors qu'elles sont cohabitantes.
MARIAGE DES PERSONNES DE MÊME SEXE ET HOMOPARENTALITÉ
ANNEXE
ALLEMAGNE
• Textes constitutionnels et législatifs
Das Grundgesetz für die BundesRepublik Deutschland
loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne du 23 mai 1949
Lebenspartnerschaftsgesetz
loi du 16 février 2001 sur le partenariat enregistré
Bürgerliches Gesetzbuch
code civil
Embryonenschutzgesetz
loi du 13 décembre 1990 sur la protection des embryons
• Autre document
( Muster-)Richtlinie zur Durchführung der assistierten Reproduktion (Februar 2006)
directive de l'ordre fédéral des médecins en matière de procréation médicalement assistée (février 2006)
BELGIQUE
• Textes législatifs
Loi du 13 février 2003 ouvrant le mariage à des personnes de même sexe et modifiant certaines dispositions du code civil
Loi du 23 novembre 1998 instaurant la cohabitation légale
Loi du 28 mars 2007 modifiant, en ce qui le concerne le droit successoral à l'égard du cohabitant légal survivant, le code civil et la loi du 29 août 1988 relative au régime successoral des exploitations agricoles en vue d'en promouvoir la continuité
Loi du 18 mai 2006 modifiant certaines dispositions du code civil en vue de permettre l'adoption par des personnes de même sexe
Loi du 6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes
Loi du 24 avril 2003 réformant l'adoption
• Autre document
Jean-Louis Renchon « L'"homoparentalité" en droit belge », dans Société de législation comparée Homoparentalité. Approche comparative , Paris 2012, p. 95
CANADA (Québec)
• Textes législatifs
Loi canadienne sur le mariage civil, L.C. 2005, ch.33
Loi québécoise instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation promulguée, L.Q.2002, ch.6
Code civil du Québec
• Autres documents
Projet de loi québécois n°81 modifiant le code civil et d'autres dispositions législatives en matière d'adoption et d'autorité parentale déposé le 13 juin 2012 devant l'Assemblée nationale du Québec
Carmen Lavallée « Homoparenté, parentalité et filiation en droit québécois : une égalité à géométrie variable », dans Société de législation comparée Homoparentalité. Approche comparative , Paris 2012, p. 139 - 160.
DANEMARK
• Textes législatifs
Lov nr 532 af 12/06/2012 om ændring af lov om ægteskabs indgåelse og opløsning, lov om ægteskabets retsvirkninger og retsplejeloven og om ophævelse af lov om registreret partnerskab
loi du 12 juin 2012 modifiant la loi sur la conclusion du mariage et sa fin, la loi sur les effets juridiques du mariage et la loi sur l'administration de la justice et abolissant la loi sur le partenariat enregistré
Lov nr 37 af 05/01/1995 om ægteskabets retsvirkninger
loi du 5 janvier 1995 sur les effets juridiques du mariage
Lov nr 938 af 10/10/2005 om registreret partnerskab
loi du 10 octobre 2005 sur le partenariat enregistré
Lov nr 38 af 15/01/2007 om ægteskabs indgåelse og opløsning
loi n° 38 sur la conclusion du mariage et sa fin
Børnloven nr 460 af 07/06/2001
loi du 7 juin 2001 sur l'enfant
Bekendtgørelse af lov om kunstig befrugtning i forbindelse med lægelig behandling, diagnostik og frsking m.v.LBK nr 923 af 04/09/2006
loi du 4 septembre 2006 sur la procréation artificielle en relation avec le traitement médical, le diagnostic et la recherche
Lov nr 494 af 12/06/2009 om ændring af adoptionsloven og forskellige andre love
loi du 12 juin 2009 modifiant la loi sur l'adoption et d'autres lois
• Autres documents
Vejledning nr 57 af 04/07/2012 om adoption
instruction n° 57 du 4 juillet 2012 relative à l'adoption
sites internet :
Ankestyrelsen (Conseil administratif national d'appel en matière sociale)
Statsforvaltningerne (Administrations régionales d'État)
ESPAGNE
• Textes législatifs
Código civil, Artículos 154, 156, 175
code civil, articles 154, 156, 175
Ley 10/1998, de 15 de julio, de uniones estables de pareja
loi n° 10/1998 du 15 juillet 1998, sur les unions stables de couples (Catalogne)
Ley 6/1999, de 26 de marzo, relativa a parejas estables no casadas
loi n° 6/1999 du 26 mars 1999 relative aux couples stables non mariés (Aragon)
Ley foral 6/2000, de 3 de julio, para la igualdad jurídica de las parejas estables
loi n° 6/2000 du 3 juillet 2000 pour l'égalité juridique des couples stables
Decreto 124/2000 de 11-07-2000 por el que se regula la creación y el régimen de funcionamiento del Registro de parejas de hecho de la Comunidad Autónoma de Castilla-La Mancha
décret n° 124/2000 du 11 juillet 2000 régissant la création et le régime de fonctionnement du registre des couples de fait (Castille-La Mancha)
Ley 1/2001, de 6 de abril, por la que se regulan las uniones de hecho
loi n° 1/2001 du 6 avril 2001, régissant les unions de fait (Communauté de Valence)
Ley 18/2001, de 19 de diciembre, de Parejas estables
loi n° 18/2001 du 19 décembre 2001 sur les couples stables (Îles Baléares)
Ley 11/2001, de 19 de diciembre, de Uniones de Hecho de la Comunidad de Madrid
loi n° 11/2001 du 19 décembre 2001 sur les unions de fait (Communauté de Madrid)
Ley de Principado de Asturias 4/2002, de 23 de mayo de parejas estables
loi n° 4/2002 du 23 mai 2002, sur les couples stables (Asturies)
Decreto 111/2002, de 24 de octubre, por el que se crea el Registro de Uniones de Hecho en Castilla y León y se regula su funcionamiento
décret n° 111/2002 du 24 octobre 2002, créant le registre des unions de fait en Castille et Léon et régissant son fonctionnement
Ley 5/2002, de 16 de diciembre, de Parejas de Hecho
loi n° 5/2002 du 16 décembre 2002, sur les couples de fait
Ley 5/2003, de 6 de marzo, para la regulación de las parejas de hecho en la Comunidad Autónoma de Canarias
loi n° 5/2003 du 6 mars 2002, sur les couples de fait dans la communauté autonome des Canaries
Ley 5/2003, de 20 de marzo, de parejas de hecho de la Comunidad Autónoma de Extremadura
loi n° 5/2003 du 20 mars 2003, sur les couples de fait de la communauté autonome d'Estrémadure
Ley 2/2003, de 7 de mayo, reguladora de las parejas de hecho
loi n° 2/2003 du 7 mai 2003, sur les couples de fait (Pays-Basque)
Ley de Cantabria 1/2005, de 16 de mayo, de parejas de hecho de la comunidad autónoma de Cantabria
loi n° 1/2005 du 26 mai 2005, sur les couples de fait (Communauté autonome de Cantabrie)
Ley 13/2005, de 1 de julio, por la que se modifica el Código civil en materia de derecho a contraer matrimonio
loi n° 13/2005 du 1 er juillet 2005 qui modifie le code civil en matière de droit à contracter mariage
Ley 14/2006 de 26 de mayo sobre técnica de reproducción humana asistida
loi n° 14/2006 du 26 mai 2006 sur les techniques de reproduction humaine assistée
Ley 2/2006, de 14 de junio, de derecho civil de Galicia
loi n° 2/2006 du 14 juin 2006, sur le droit civil de Galice
Ley 3/2007, de 15 de marzo, reguladora de la rectificación registral de la mención relativa al sexo de las personas, artículo 7
loi n° 3/2007 du 15 mars 2007 sur la rectification de l'enregistrement de la mention relative au sexe des personnes, article 7
Decreto 30/2010, de 14 de mayo, por el que se crea el Registro de parejas de hecho de La Rioja
décret n° 30/2010 du 14 mars 2010, créant le registre des couples de fait de La Rioja
Ley 25/2010, de 29 de julio, del libro segundo del Código civil de Cataluña, relativo a la persona y la familia, articulo 235-3
loi n° 25/2010 du 29 juillet 2010, portant livre second du code civil de Catalogne relatif à la personne et à la famille, article 235-3
Reglamento del registro municipal de uniones de hecho del ayuntamiento de Murcia
règlement du registre municipal des unions de fait de Murcie (25 octobre 2010)
• Autre document
Ana Quiñones Escámez, « Conjugalité parenté et parentalité : la famille homosexuelle en droit espagnol comparé » dans Société de législation comparée, Homoparentalité. Approche comparative , Paris 2012, p. 41-79.
FRANCE
• Texte législatif
Code civil, Livre Ier, Titre V Du mariage ; Titre VIII De la filiation adoptive, Titre XIII Du pacte civil de solidarité et du concubinage
• Autres documents
Conseil constitutionnel, décision n° 2010-92 QPC du 28 janvier 2011
Cour de cassation, première chambre civile, arrêt n° 511 du 13 mars 2007
Hugues Fulchiron, « Homoparenté v. Homoparentalité ? Le droit français face à la question homoparentale » dans Société de législation comparée, Homoparentalité. Approche comparative , Paris 2012, p. 115-138.
ITALIE
• Texte législatif
Legge 19 febbraio 2004 n° 40, norme in materia di procreazione medicalmente assistita
loi n° 40 du 19 février 2004 portant règles en matière de procréation médicalement assistée
• Autres documents
Corte Costituzionale, Sentenza n° 138 anno 2010
Cour constitutionnelle italienne, décision n° 138-2010
Corte suprema di Cassazione, Prima sezione civile, sentenza 4184-2012
Cour de cassation italienne, première section civile, décision 4184-2012
PAYS-BAS
• Textes législatifs
Wet van 21 december 2000 tot wijziging van Boek van het Burgerlijke Wetboek in verband met de openstelling van het huwelijk voor personen van hetzelfde geslacht (wet openstelling huwelijk)
loi du 21 décembre 2000 portant modification du livre 1 du code civil, concernant l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe (loi sur l'ouverture du mariage)
Burgerlijk Wetboek, Boek 1, Titel 11 Afstamming, Titel 12 Adoptie, Titel 14 Het gezag over minderjarige kinderen
code civil, livre 1, titre 11 filiation, titre 12 adoption, titre 14 l'autorité sur les enfants mineurs
Wet van 21 december 2000 tot wijziging van Boek 1 van het burgerlijk wetboek (adoptie door personen van hetzelfde geslacht
loi du 21 décembre 2000 portant modification du livre 1 du code civil (adoption par des personnes de même sexe)
Tweede Kamer der Staten Generaal, Vergaderjaar 2011-2012, 33 032, Wijziging van Boek 1 van het Burgerlijke Wetboek in verband met het juridisch ouderschap van de vrouwelijke partner van de moeder anders van door adoptie, memorie van toelichting
Seconde chambre des États généraux, session 2011-2012, 33 032, modification du code civil concernant la parentalité juridique de la partenaire féminine de la mère, autrement que par adoption, exposé des motifs
• Autres documents
Ministerie van Veiligheid en Justitie , Adoptie van een king in Nederland , juli 2012 J-14934
ministère de la Sécurité et de la Justice, adoption d'un enfant aux Pays-Bas, juillet 2012, J-14934
Ministerie van Veiligheid en Justitie , Trouwen, geregistreerde partnerschap en samenwonen , juli 2012 J-14934
ministère de la Sécurité et de la Justice, mariage, partenariat enregistré et cohabitation, juillet 2012, J-12997
lettre 196747 du ministre de la Justice au Président de la Seconde Chambre des États généraux du 16 décembre 2011, sur la maternité pour autrui (draagmoederschap)
Machteld Vonk, « Same-sex parents in the Netherlands » dans dans Société de législation comparée, Homoparentalité. Approche comparative , Paris 2012, p. 13-39
PORTUGAL
• Textes législatifs
Lei n° 7/2001 de 11 de Maio, Adopta medidas de protecçaõ das uniões de facto
loi n°7 du 11 mai 2001 portant mesures de protection des unions de fait
Lei n° 9/2010 de 31 de Maio, Permite o casamento civil entre pessoas do mesmo sexo
loi n° 9 du 31 mai 2010 autorisant le mariage civil entre deux personnes du même sexe
Lei n° 32/2006 de 26 de Julho, Prociaçaõ medicamente assistida
loi n°32/2006 sur la procréation médicalement assistée
• Autre document
Conselho nacional de ética para as ciências da vida, 63/CNEV/2012, Parecer n° 63, prociaçaõ medicamente assistida e gestaçaõ de substituiçaõ
Conseil national d'éthique pour les sciences de la vie, avis n° 63/2012, sur la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui
ROYAUME-UNI (Angleterre)
• Textes législatifs
Marriage Act 1949
loi sur le mariage de 1949
Civil Partnership Act 2004
loi sur le partenariat civil de 2004
Adoption and Children Act 2002
loi de 2002 sur l'adoption et l'enfant
Human Fertilisation and Embryology Act 2008
loi de 2008 relative à la fécondation humaine et à l'embryologie
Surrogacy Arrangements Act 1985
loi de 1985 sur les accords relatifs à la gestation pour autrui
Children Act 1989
loi de 1989 sur l'enfant
• Autre document
Equal civil marriage consultation (March 2012)
consultation sur un mariage civil identique pour les couples de même sexe (mars 2012)
SUÈDE
• Textes législatifs
Föräldrabalk 1949 :381
code des parents, n° 381 de 1949
Äktenskapsbalk 1987 :230
code du mariage, n° 230 de 1987
Lag 1994 :1117 om registrerat partnerskap
loi sur le partenariat enregistré, n° 1117 de 1994
Sambolag 2003 :76
loi sur la cobitation n° 76 de 2003
Lag om genetisk integritet 2006 :351
loi sur l'intégrité génétique n° 351 de 2006
Lag 2009 :260 om upphävande av lagen 1994 :117 om registrerat partnerskap
loi n° 260 de 2009 portant abrogation de la loi n° 117 de 1994 sur le partenariat enregistré
• Autre document
Betänkande 2011/12 SoU26 Assisterad befrukning
rapport 2011/12 SoU26 sur la procréation assistée du 29 mars 2012
* 1 Projet de loi n° 349 (2012-2013), ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe .
* 2 Préalablement, la commission des lois avait sollicité de la division de législation comparée de la direction de l'initiative parlementaire et des délégations du Sénat, la production d'une étude de droit comparé sur le mariage des personnes de même sexe et l'homoparentalité dans neuf États européens et au Québec ( http://www.senat.fr/notice-rapport/2012/lc229-notice.html ). Cette étude est reproduite en annexe au présent rapport.
* 3 Ces auditions furent complétées par celles tenues par votre rapporteur, qui a aussi reçu de nombreuses contributions écrites ( cf. pour la liste complète des auditions et des contributions écrites, infra ).
* 4 Loi n° 99-944 du 15 novembre 1999, relative au pacte civil de solidarité.
* 5 Art. 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
* 6 Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 13 mars 2007, req. 05-16.627.
* 7 CC, n° 2010-92 QPC du 28 janvier 2011, Journal officiel du 29 janvier 2011, p. 1894.
* 8 L'argument parfois avancé, selon lequel la définition légale du mariage comme union d'un homme et d'une femme, maintenu sans exception jusqu'à aujourd'hui, pourrait constituer un principe fondamental reconnu par les lois de la République ne peut prospérer : si tel était le cas, dans la décision précitée, le juge constitutionnel aurait dû en tenir compte pour limiter la marge d'appréciation du législateur en la matière, ce qu'il n'a pas fait.
* 9 Cf ., infra , le commentaire de l'article 3.
* 10 Une étude de l'Insee dénombre un million de Pacs au début de l'année 2010 ( Insee première , n° 1336, février 2011).
* 11 Les premiers ne représentent que 6 % des partenariats enregistrées, contre 94 % pour les couples hétérosexuels (même étude).
* 12 La chambre des communes a en effet adopté le 24 janvier 2013, un projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, actuellement soumis à la chambre des Lords.
* 13 Jean Carbonnier, « Terre et Ciel dans le droit français du mariage » in Le droit privé français au milieu du XXe siècle, Études offertes à Georges Ripert , tome I, 1950, p. 327.
* 14 Sur l'exclusion, notamment des comédiens et les difficultés faites à la reconnaissance du mariage des protestants à partir de la révocation de l'Édit de Nantes en 1685, cf. Jean Claude Bologne, Histoire du mariage en Occident, Pluriel, 1997, p. 303-314.
* 15 CC, 2003-484 DC, 20 novembre 2003, cons. 94, Rec. p. 438.
* 16 Le 8 mai 1816.
* 17 Par la loi du 27 juillet 1884.
* 18 « Le couple dans tous ses états : Non-cohabitation, conjoints de même sexe, Pacs... », Insee Première, n° 1435, février 2013.
* 19 Chiffres Insee, http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATnon02231 .
* 20 La légitimation adoptive était, avant la réforme de 1966, l'institution qui préfigurait l'adoption plénière (note de votre rapporteur).
* 21 Jean Danet, « Le statut de l'homosexualité dans la doctrine et la jurisprudence françaises », in Daniel Borrillo (dir.), Homosexualités et droit , PUF, 1998, p. 97 à 108.
* 22 Cour de cassation, chambre sociale, 11 juillet 1989.
* 23 CE, 1 ère et 4 e sous-sections réunies, 9 octobre 1996, JCP, 1997, 22766.
* 24 CJUE, Fretté contre France, 26 février 2002, n° 36515/97.
* 25 Proposition de loi n° 422 (1989-1990), de MM. Jean-Luc Mélenchon et plusieurs de ses collègues du groupe socialiste, tendant à créer un contrat de partenariat civil, déposée le 25 juin 1990 au Sénat.
* 26 Proposition de loi n° 3066 (AN - IX e législature)de M. Jean-Yves Autexier, déposée le 25 novembre 1992 à l'Assemblée nationale et reprise dans la proposition de loi n° 880 (AN - X e législature) de M. Jean-Pierre Michel tendant à créer un contrat d'union civile, déposée le 21 décembre 1993.
* 27 « Le couple dans tous ses états : Non-cohabitation, conjoints de même sexe, Pacs... », Insee Première, n° 1435, février 2013.
* 28 Loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.
* 29 Cour de cassation. 1 ère chambre civile, 13 mars 2007.
* 30 Décision n° 2010-92 QPC du 28 janvier 2011.
* 31 Les articles 133 à 143, relatifs à la déclaration d'absence, avaient été abrogés par la loi n° 77-1447 du 28 décembre 1977 portant réforme du titre IV du livre I er du code civil : Des absents.
* 32 L'article 515-1 du code civil, issu de la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 définit le pacte civil de solidarité comme « un contrat conclu pas deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune ». L'article 515-8, introduit dans le code par la même loi dispose que « le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple. »
* 33 Loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité.
* 34 L'article 515-8 du code civil, introduit dans le texte à l'initiative du Sénat, dispose que « le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple. »
* 35 Cf. Cour de cassation, chambre sociale, 11 juillet 1989 et Cour de cassation, 3 e chambre civile, 17 décembre 1997, n° 95-20.779 : la cour d'appel a « retenu à bon droit, que le concubinage ne pouvait résulter que d'une relation stable et continue ayant l'apparence du mariage, donc entre un homme et une femme ».
* 36 Loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités.
* 37 Décision n° 99-419 DC du 09 novembre 1999 « loi relative au pacte civil de solidarité ».
* 38 Ces conditions sont : le consentement et la capacité des partenaires, l'objet du contrat (l'organisation de la vie commune selon l'article 515-1) et la cause.
* 39 Cf . article 515-2 du code civil.
* 40 L'article 515-4 prévoit que « Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'engagent à une vie commune, ainsi qu'à une aide matérielle et une assistance réciproques. Si les partenaires n'en disposent autrement, l'aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives .
Les partenaires sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante. »
* 41 Initialement, la loi du 15 novembre 1999 prévoyait le bénéfice de cette disposition à compter de l'imposition des revenus de l'année du troisième anniversaire de l'enregistrement du pacte. Cette condition a été supprimée par la loi de finances pour 2005
* 42 Article 94 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.
* 43 L'article 515-7 du code civil dispose que le Pacs prend fin de plein droit au décès de l'un des deux membres du couple, en cas de mariage de l'un d'eux avec un tiers ou de mariage célébré entre les deux partenaires, par leur volonté commune ou par la volonté de l'un d'eux.
* 44 Par exemple, lors de la rupture, le partenaire bénéficie d'une protection de son logement qui s'approche de celle d'un époux. En revanche, paradoxalement, pendant la durée du Pacs, il n'existe aucune protection du partenaire qui ne dispose pas de titre sur le logement. De sorte que le locataire exclusif peut librement mettre fin au bail sans l'accord de l'autre, ou décider de disposer seul du logement dont il est propriétaire.
* 45 Selon les chiffres de l'Insee, en 2010, 205 558 Pacs ont été conclus dont 9 143 par des couples de personnes de même sexe.
* 46 Loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.
* 47 Lien de parenté entre personnes qui descendent les unes des autres.
* 48 Cet empêchement d'alliance existe également pour le Pacs, mais il n'est pas prévu pour le concubinage.
* 49 Lien de parenté entre personnes qui descendent d'un auteur commun.
* 50 Le domicile est le lieu où la personne a son principal établissement.
* 51 La résidence est le lieu où demeure une personne d'une façon assez stable et habituelle.
* 52 Ces deux textes concernent l'assistance matérielle que se doivent mutuellement les époux pour assurer leur vie quotidienne. Elle dépasse une simple obligation alimentaire et n'est pas subordonnée à un état de besoin du conjoint. Il s'agit de toutes les dépenses du train de vie, y compris celles d'agrément (vacances, dépenses relatives à l'installation familiale...).
* 53 Chaque époux est tenu sur l'ensemble de ses biens et revenus de la dette contractée par l'un d'eux au moins. Elle concerne toutes les dépenses contractées pour l'entretien du ménage et l'éducation des enfants (loyers, aliments, chauffage, soins médicaux...).
* 54 Lors de la dissolution du mariage. Si les époux étaient locataires, l'article 1751 prévoit que le bail est « réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux ». Dès lors, au moment du divorce, le juge peut l'attribuer à l'un des époux « en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause ».
Dans le cas où le logement appartenait aux deux époux, il doit alors être vendu de l'accord des deux époux ou alors attribué par le juge à l'un d'eux dans le cadre des opérations de partage des intérêts en cause.
Si le logement appartient en propre à l'un des époux, il en reste propriétaire après le divorce, mais peut être contraint par le juge à le louer à son ancien conjoint, contre paiement d'un loyer dont il fixe le montant (article 285-1).
* 55 L'article 732 du code civil dispose qu'« est conjoint successible, le conjoint survivant non divorcé ».
* 56 Loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral.
* 57 Rapport d'information fait au nom de la commission des lois, par le groupe de travail, constitué par MM. Dominique de Legge et Jacques Mézard, sur le bilan d'application de la loi du 3 décembre 2001 sur les droits du conjoint survivant (n°476, 2010-2011).
* 58 Loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités.
* 59 Cf . article 763 du code civil.
* 60 Cf . article 764.
* 61 Cf . article 175l.
* 62 Les mentions spécifiques aux père et mère dans le titre dédié à la filiation adoptive concernent les parents biologiques de l'enfant qui sera adopté.
* 63 À laquelle est consacrée la section III du chapitre I er du titre VII du livre premier du code civil.
* 64 Par renvoi de l'article 361 du code civil.
* 65 Art. 356 et 358 du code civil.
* 66 Art. 348 du code civil.
* 67 Art. 354 du même code.
* 68 Art. 357 du même code.
* 69 Art. 356 du même code.
* 70 Art. 355 et 359 du même code.
* 71 Art. 364 du même code.
* 72 Art. 363 du même code.
* 73 Art. 365 du même code.
* 74 Art. 370 du même code.
* 75 Art. 343-1 du même code.
* 76 La Cour européenne des droits de l'homme a en effet jugé qu'un refus d'agrément opposé à un célibataire, fondé sur ce motif, serait discriminatoire (CEDH, 22 janvier 2008, req. 43546/02).
* 77 M. Arnaud Del Moral, chef du service international, chargé de la stratégie et des procédures d'adoption de l'agence française de l'adoption a ainsi rappelé, lors de son audition, le 20 février dernier que « la France n'est pas le premier pays à ouvrir l'adoption aux couples homosexuels : dix-sept pays l'acceptent déjà. Ce sont les États les plus avancés économiquement, ceux où l'on propose peu d'enfants à l'adoption. Quatre pays pourraient cependant être ciblés : les États-Unis, où plusieurs États se sont dotés d'une législation favorable, le Brésil pour deux États, l'Afrique du Sud, où la loi est nationale, et, éventuellement, l'État de Mexico, au Mexique. Cela dit, on y préfèrera une adoption par des nationaux. Aucune adoption internationale par un couple homosexuel n'a eu lieu en Belgique depuis que ce pays s'est ouvert à l'adoption homoparentale en 2006 ».
* 78 CEDH, Gas et Dubois contre France, 15 mars 2012, req. 25951/07.
* 79 CEDH, X et autres c. Autriche , 19 février 2013, req. n° 19010/07.
* 80 Le domicile est le lieu où la personne a son principal établissement.
* 81 La résidence est le lieu où demeure une personne d'une façon assez stable et habituelle.
* 82 Dans sa rédaction proposée par le présent texte. Cf. infra : article 1 er bis B.
* 83 Dans un arrêt du 6 février 2007, la première chambre civile de la Cour de cassation a clairement posé le principe de la responsabilité de l'État et non de la commune s'agissant du dysfonctionnement du service de l'état civil.
* 84 Par exemple, le procureur de la République fait des réquisitions aux fins de transcription du jugement d'adoption plénière (article 354), ou d'adoption simple (article 362) sur les registres de l'état civil.
* 85 Le paragraphe 16 de l'IGREC dispose que « le procureur de la République constitue l'autorité supérieure en matière d'état civil.
« L'officier de l'état civil exerce donc ses fonctions sous le contrôle et la surveillance du parquet territorialement compétent qui peut lui donner des instructions. »
* 86 Décision du Conseil constitutionnel n° 2011-641 DC du 8 décembre 2011.
* 87 Lecture est donnée des articles 212, 213 (alinéas 1 er et 2), 214 (alinéa 1 er ), 215 (alinéa 1 er ), 220 et 371-1.
* 88 Proposition de loi n°° 779 (2010-2011) de M. Éric Doligé, de simplification des normes applicables aux collectivités locales.
* 89 Loi n° 2010-737 du 1 er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation.
* 90 Proposition de loi n° 81 (2011-2012) visant à modifier l'obligation de lecture des articles 220 et 371-1 du code civil lors des cérémonies de mariage.
* 91 Cf. compte rendu intégral de la deuxième séance du samedi 2 février 2013.
* 92 Le décret du 26 octobre 1939, modifié par le décret du 15 décembre 1958 leur permet de célébrer un mariage entre un français et un étranger en « Afghanistan, Arabie saoudienne, Chine, Égypte, Irak, Iran, Japon, Maroc (zone de Tanger), Oman (Mascate), Thaïlande, Yémen, Cambodge, Laos ». Cependant, la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires prévoit, dans son article 5 f, que les fonctions consulaires consistent à agir en qualité d'officier de l'état civil « pour autant que les lois et règlements de l'État de résidence ne s'y opposent pas ». Ainsi, certains États disposent d'une réglementation qui s'oppose expressément à toute célébration de mariage par les autorités consulaires étrangères. Il en est notamment ainsi de la Suisse, du Royaume-Uni, de l'Irlande, des États-Unis.
* 93 L'amendement initial prévoyait que le mariage était célébré dans la commune de la dernière résidence de l'un des époux, ou, à défaut, dans la commune de leur choix.
* 94 L'article L. 12 du code électoral autorise les Français établis hors de France peuvent demander leur inscription sur la liste électorale leur commune de naissance, la commune de leur dernier domicile ou résidence, de la commune de naissance de l'un des ascendants,...
* 95 En effet, l'article L. 12 du code électoral concerne les élections des députés, des conseillers généraux et des conseillers municipaux.
* 96 Chiffres de l'Insee.
* 97 Sur le régime juridique de l'adoption plénière et de l'adoption simple, cf. infra , le commentaire de l'article 1 er .
* 98 Circ. NOR : JUSC1119808C du 28 octobre 2011 relative aux règles particulières à divers actes de l'état civil relatifs à la naissance et à la filiation, BOMJL n° 2011-11 du 30 novembre 2011.
* 99 Cf ., Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 12 janvier 2011, req. n° 09-16.527, qui censure une cour d'appel ayant autorisé l'adoption simple, par l'épouse du père, d'un enfant adopté précédemment par le mari de la mère, au motif que « que le droit au respect de la vie privée et familiale n'interdit pas de limiter le nombre d'adoptions successives dont une même personne peut faire l'objet, ni ne commande de consacrer par une adoption, tous les liens d'affection, fussent-ils anciens et bien établis ».
* 100 Art. 348 du code civil.
* 101 Cf. sur ce point, le rapport de notre regretté collègue, Luc Dejoie, sur la proposition de loi relative à l'adoption à l'origine de la loi du 5 juillet 1996 (rapport n° 295 (1995-1996), fait au nom de la commission des lois, déposé le 27 mars 1996, p. 44-45 - http://www.senat.fr/rap/l95-295/l95-295.html).
* 102 Cet alinéa autorise expressément une nouvelle adoption par un nouveau conjoint du parent survivant, lorsque le premier adoptant est décédé.
* 103 Art. 348 du code civil, par renvoi de l'article 361.
* 104 L'article 346 du code civil, qui dispose que nul ne peut être adopté par plusieurs personnes, sauf par deux époux est en effet applicable, par renvoi de l'article 361, à l'adoption simple.
* 105 Jean Carbonnier Droit civil , vol. I, PUF Quadrige, 1 ère éd., 2004, p. 1122.
* 106 La règle spéciale posée par l'article 360 du code civil tient ainsi en échec la règle générale selon laquelle « nul ne peut être adopté par plusieurs personnes si ce n'est par deux époux » de l'article 346 du même code.
* 107 Pour la même raison que pour le deuxième alinéa de l'article 360 du code civil, la règle de l'article 346 du même code serait tenue en échec par cette nouvelle rédaction.
* 108 La seconde modification apportée par le II. du présent article correspond à une simple coordination avec le code de la sécurité sociale.
* 109 TGI Briey, 21 octobre 2010, Revue trimestrielle de droit civil , 2011.118, obs. Jean Hauser.
* 110 TGI Nanterre, 14 décembre 2010, Actualité juridique - Droit de la famille , 2011.426, obs. Siffrein-Blanc.
* 111 Cour d'appel de Paris, 1 er décembre 2011, Actualité juridique - Droit de la famille , 2012.146, obs. Siffrein-Blanc.
* 112 Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 7 mars 1989, Bull. civ. I, n° 112 ; ainsi que Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 5 novembre 2008, Bull. civ. I, n° 248.
* 113 L'article 1 er de la loi du 6 fructidor an II prévoit que « aucun citoyen ne pourra porter de nom ou de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance : ceux qui les auraient quittés seront tenus de les reprendre ».
* 114 Loi n° 2002-304 du 4 mars 2002 relative au nom de famille.
* 115 Loi n° 2003-516 du 18 juin 2003 relative à la dévolution du nom de famille.
* 116 L'expression s'entend de toutes les filiations biologiques établies par reconnaissance ou déclaration, ainsi que de celles établies par possession d'état.
* 117 Art. 311-23 du code civil.
* 118 Le deuxième alinéa de l'article 356 du code civil dispose en effet que si l'adoption de l'enfant du conjoint laisse subsister sa filiation d'origine à l'égard de ce conjoint et de sa famille, elle produit, pour le surplus, les effets d'une adoption par deux époux, ce qui recouvre, en particulier, les règles relatives à la dévolution du nom de famille. Telle est notamment l'interprétation retenue par la circulaire du 28 octobre 2011 relative aux règles particulières à divers actes de l'état civil relatifs à la naissance et à la filiation précitée (§ 344).
* 119 Art. 354, 3 e alinéa.
* 120 Le renvoi est complet, à l'exception de la disposition permettant au tribunal prononçant l'adoption de modifier, à la demande de l'adoptant, les prénoms de l'enfant. En effet, elle n'a pas vocation à jouer dans le cadre d'une adoption prononcée à l'étranger, seule la déclaration à l'officier d'état civil du nom de famille étant pertinente en la matière.
* 121 CEDH, 16 novembre 2004, Ünal Tekeli c/ Turquie , req. n° 29865/96.
* 122 Le droit français, modifié en 2002 pour tenir compte de cette exigence, ne tombe par conséquent pas sous le coup de cette jurisprudence, puisqu'il conserve à chaque époux le droit de porter son propre nom de famille. Celui qui le souhaite peut se faire désigner par le nom de son conjoint, mais il ne s'agit là que d'un nom d'usage, sans conséquence sur le véritable nom légal de l'intéressé.
* 123 Il serait possible de remédier à cette situation en prévoyant de tirer au sort l'ordre alphabétique ou contralphabétique de l'apposition de noms des deux parents. Un amendement de M. le député Jean-Marc Germain, déposé en séance publique à l'Assemblée nationale a ainsi proposé que l'ordre alphabétique soit retenu les jours pairs, l'ordre inverse les jours impairs. La commission des lois, comme le Gouvernement ont rendu un avis défavorable sur cet amendement, qui rendait trop complexe le dispositif.
* 124 Sur la base des données recueillies et traitées par l'Insee.
* 125 Une part des absences de déclaration conjointe correspond, par définition, aux situations où la filiation de l'enfant n'est établie qu'à l'égard d'un de ses parents, en l'occurrence, le plus souvent, sa mère.
* 126 La signification du désaccord pourrait ainsi être anticipée par le parent qui craindrait sinon de ne pouvoir donner son nom à l'enfant.
* 127 Ce faisant, la suppression de la mention selon laquelle, l'enfant prend le nom du parent à l'égard duquel sa filiation a été établie la première, peut être conservée : cette disposition avait jusqu' à aujourd'hui vocation à contrer la prévalence donnée au nom du père en cas de désaccord. La règle d'égalité ainsi consacrée la rend inutile.
* 128 Cour de cassation, QPC, 8 juillet 2010, n°12135. La Cour de cassation considère en effet que le dernier alinéa de l'article 61-3 du code civil, qui dispose que « l'établissement ou la modification du lien de filiation n'emporte cependant le changement du nom de famille des enfants majeurs que sous réserve de leur consentement », s'applique à l'adoption simple.
* 129 Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 6 octobre 2010 qui dispose que l'article 363 du code civil « n'exclut pas la possibilité pour le juge de décider que le nom d'origine de l'adopté suivra celui de l'adoptant ».
* 130 Comme pour l'adoption plénière examinée à l'article précédent, la réécriture complète de l'article 363 met fin au régime transitoire dont bénéficiaient les enfants nés avant le 1 er janvier 2005( cf. supra ).
* 131 Rapport AN n° 628 (XIV e législature), fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale par M. Erwann Binet, tome 1, p. 353.
* 132 Notamment aux articles 211 du code civil sur l'obligation d'aliment des parents, 373 sur le parent privé de l'exercice de l'autorité parentale et 395 en matière de tutelle.
* 133 Ces textes visent en effet le « mari » et la « femme ».
* 134 À l'exclusion des aïeuls et des branches parentales.
* 135 Sur ce point , cf. infra , les commentaires des articles 5 à 13, 15 à 16 et 17 à 20.
* 136 CC, n° 99-421 DC, 16 décembre 1999, Rec. p. 136.
* 137 Le II. du de l'article 4 bis , dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, prévoit en effet l'application de l'article 4 bis dans les seules matières relevant des compétences de l'État.
* 138 La loi 13/2005 du 1 er mars 2005 qui a ouvert le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe a en effet ajouté à l'article 44 du code civil espagnol, un deuxième alinéa disposant que : « le mariage comportera les mêmes obligations et les même effets lorsque les deux contractants seront du même sexe ou de sexe différent » ( cf. , sur ce point, Ana Quiñones Escamez, « Conjugalité, parenté et parentalité : la famille homosexuelle en droit espagnol comparé », in , Homoparentalité ? Approche comparative , Société de Législation comparé, 2012, p. 47).
* 139 En effet, la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique a supprimé toute référence au couple marié ou en union stable depuis au moins deux ans.
* 140 Article L. 2141-2 du code de la santé publique.
* 141 Conformément à l'article 38 de la Constitution, une telle demande d'habilitation ne peut émaner que du Gouvernement.
* 142 Conseil d'État, 25 juillet 1975, Lebon 1049.
* 143 Le père adoptif, ainsi que, le cas échéant, le conjoint de la mère ou la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité ou vivant maritalement avec elle peuvent prétendre, en cas d'adoption au versement d'une allocation de remplacement pendant une durée équivalente à celle du congé de paternité ou d'accueil de l'enfant.
* 144 Aux articles L. 434-10, L. 434-11, L. 521-2, L. 523-1, L. 523-3.
* 145 Rapport AN n° 628 (XIV e législature), fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale par M. Erwann Binet, tome 1, p. 399.
* 146 Cette mention a été ajoutée, à l'initiative de Mme Clergeau et plusieurs de ses collègues, lors de l'examen en séance publique du texte à l'Assemblée nationale, afin d'étendre le champ de la protection apportée exclusivement, à l'origine au salarié marié à une personne de même sexe.
* 147 Au sens de l'article L. 1132-1, il s'agit pour un candidat à l'embauche d'être écarté « d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise », et pour un salarié d'« être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1 er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat ».
* 148 Cour de cassation, chambre sociale, 14 octobre 2008, n° 07-40523. Cette jurisprudence s'inscrit dans le droit fil de décisions condamnant l'abus de droit de l'employeur dans l'usage de la clause de mobilité, qui avait muté sur d'autres chantiers une salariée ne bénéficiant pas de moyen de transport individuel ou collectif (Soc., 10 févr. 2001, Juris-Data n° 2001-007702) ou qui, par légèreté blâmable, avait imposé à une salariée une mutation alors même qu'il était conscient que la salariée devait s'occuper de son enfant handicapé durant le déjeuner, et que son poste initial était resté libre (Soc., 18 mai 1999, Juris-Data n° 1999-002121).
* 149 Règlement (UE) n° 1259/2010 du Conseil du 20 décembre 2010 mettant en oeuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps.
* 150 Le principe, pour les collectivités d'outre-mer, est fixé à l'article 3 de la loi n° 70-589 du 9 juillet 1970 relative au statut civil de droit commun dans les territoires d'outre-mer : les dispositions relatives à l'état et à la capacité des personnes, aux régimes matrimoniaux, ainsi qu'aux successions et libéralités y sont applicables de plein droit, sauf exception prévue par la loi.
* 151 Art. 1-1 de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton.
* 152 En vertu de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer.
* 153 Art. 7 de la loi 2004-192 précitée.
* 154 Art. 21 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.
* 155 Art. 6-2 de la loi n° 99-209 précitée.
* 156 Cass. Civ. arrêt n° 511 du 13 mars 2007.
* 157 Décision n° 2010-92 QPC du 28 janvier 2011.
* 158 Elle refuse en revanche l'adoption par une femme de l'enfant de sa partenaire de PACS, en tant que cette adoption entraîne le transfert de l'autorité parentale à l'adoptante seule et prive la mère biologique qui entend continuer à élever l'enfant de ses propres droits sur celui-ci, v. Cass. Civ. 1 re , 20 février 2007.
* 159 Sous certaines conditions, v. note infra .
* 160 Le code civil du Québec vise la procréation assistée qui comprend également la procréation par relation sexuelle avec une personne qui n'est pas partie au projet parental.
* 161 Voir les autres conditions dans la note infra .
* 162 Depuis 2012, il n'est plus possible de conclure un partenariat.
* 163 Le vote des lois des autonomies s'étend de 1998 à 2010.
* 164 Sous certaines conditions, v. note infra .
* 165 Le code civil du Québec vise la procréation assistée qui comprend également la procréation par relation sexuelle avec une personne qui n'est pas partie au projet parental.
* 166 Exception, en pratique, pour les partenariats enregistrés de femmes à Hambourg et Berlin.
* 167 Depuis 2009, il n'est plus possible de conclure un partenariat.
* 168 Voir les autres conditions dans la note infra .
* 169 Une décision du juge établit la filiation à l'égard des deux parents.
* 170 Loi du 28 mars 2007 modifiant, en ce qui le concerne le droit successoral à l'égard du cohabitant légal survivant, le code civil et la loi du 29 août 1988 relative au régime successoral des exploitations agricoles en vue d'en promouvoir la continuité.
* 171 Les dispositions du code civil relatives à l'autorité parentale continuent à ne viser que les père et mère de l'enfant et « n'envisagent donc pas l'hypothèse où une autorité parentale serait exercée par deux mères ou deux pères » cité par Jean-Louis Renchon, « L'"homoparentalité" en droit belge », dans Société de législation comparée, Homoparentalité, approche comparative , Paris 2012, p. 95.
* 172 Les dispositions du code civil relatives à l'autorité parentale continuent à ne viser que les père et mère de l'enfant et « n'envisagent donc pas l'hypothèse où une autorité parentale serait exercée par deux mères ou deux pères » cité par Jean-Louis Renchon, « L'"homoparentalité" en droit belge », dans Société de législation comparée, Homoparentalité, approche comparative , Paris 2012, p. 95.
* 173 Dans ce cas, « un lien de filiation peut être établi, dans l'année qui suit la naissance, entre l'auteur de l'apport et l'enfant ».
* 174 Le partenariat enregistré a été créé par une loi du 7 juin 1989.
* 175 La présente note ne traite pas des dispositions en matière d'adoption en vigueur en Aragon, Navarre, au Pays Basque, dans la Communauté autonome de Cantábria et en Galice.
* 176 La loi néerlandaise distingue le père biologique qui a conçu un enfant d'une façon naturelle et le donneur qui a donné son sperme sans concevoir l'enfant de façon naturelle. La jurisprudence a réserve un sort particulier au donneur qui entretient une vie familiale avec l'enfant, hypothèse qui n'est pas étudiée dans la présente note.
* 177 Le projet de loi ne concerne pas les personnes qui ont conclu un partenariat enregistré.
* 178 Sur ce point voir les observations de M. Vonk dans « Same-sex parents in the netherlands », article cité en annexe, p. 34.
* 179 Le mariage et le partenariat enregistré qui unissent des personnes de sexe différent n'ont, en revanche, pas la même incidence en cas de naissance d'un enfant. Seul le premier crée une présomption de paternité, tandis que dans le second l'homme doit reconnaître l'enfant pour en devenir le père.
* 180 Ou engagés dans une relation familiale stable.
* 181 On préfère cette expression à celle d'« union libre » qui renvoie, en France, à un mode de vie qui n'a pas fait l'objet d'une disposition législative spécifique.