C. PROGRAMME 135 « DÉVELOPPEMENT ET AMÉLIORATION DE L'OFFRE DE LOGEMENT »
1. Un calibrage approximatif des dépenses et des recettes
Le programme, qui regroupe les aides « à la pierre », finance essentiellement le développement de l'offre de logements sociaux, l'Etat ayant décidé, par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (loi Mole), de rationaliser ses interventions en désignant l'Agence nationale de l'habitat (Anah) comme unique opérateur dédié au parc privé.
Il a été doté, en loi de finances initiale , de 542 millions d'euros en AE et 501 millions d'euros en CP.
La consommation effective des crédits s'est établie, sur l'exercice, à 440 millions d'euros en AE et 567 millions d'euros en CP, soit des écarts respectifs de -19 % et de +13 % .
Ces différences résultent de plusieurs facteurs :
- ces montants devaient être complétés par un apport de 13 millions d'euros en AE et 93 millions d'euros en CP de fonds de concours en provenance du fonds de mutualisation entre les organismes de logement social mis en oeuvre dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2011 et abondé, d'une part, par le produit du prélèvement assis sur le potentiel financier des organismes et, d'autre part, par la majoration de la cotisation additionnelle qu'ils versent à la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Or les crédits ouverts à ce titre n'ont représenté que 1 million d'euros en AE et CP, en raison des délais de mise en place du prélèvement 303 ( * ) , qui ont reporté à 2012 le rattachement de ces crédits au programme ;
- plusieurs mouvements de sens inverse, et concernant des montants importants, sont intervenus en cours d'exercice : annulation de 35 millions en AE et 49,4 millions en CP par décret d'avance du 30 novembre 2011, report de crédits de 21 millions en AE et 148 millions en CP, annulation de 8,7 millions en AE et CP par les deux lois de finances rectificatives de juillet et septembre 2011 ;
- la lecture des résultats d'exécution est, par ailleurs, rendue particulièrement difficile du fait d'importantes consommations négatives liées à l'effet conjugué de la « bascule Chorus » 304 ( * ) et à de nombreuses erreurs d'imputation.
Votre rapporteur spécial constate, enfin, deux dérives touchant des actions précises du programme :
- la première concerne les dépenses de communication imputées en 2010 sur l'action 4 « Réglementation de l'habitat » et inscrites en 2011 à l'action 5 « Soutien ». Ces dépenses continuent leur progression et atteignent 7 millions d'euros en CP dont 1 million seulement provenant d'une participation d'un organisme par voie de fonds de concours, alors que la dotation inscrite en loi de finances initiale était de 0,6 million. En outre, pour une très large part, ces actions de communication profitent à des organismes privés (comme les banques dans le cas du PTZ+) qui pourraient en assumer la charge ;
- la seconde vise le droit au logement opposable , dont le récent rapport de nos collègues Claude Dilain et Gérard Roche fait un bilan très contrasté 305 ( * ) . Alors que le nombre de dossiers se maintient à un niveau élevé (74 000 recours reçus en 2011), le pourcentage de relogement ne progresse pas - faute d'offre locative adaptée et de mobilisation stratégique des parcs locatifs tant social que privé. Cette situation crée une incompréhension de la part des demandeurs prioritaires qui, dans leur quasi-totalité, possèdent des ressources inférieures au plafond des logements très sociaux (PLAI). Cela explique la forte hausse du nombre de recours contentieux pour non mise en oeuvre des décisions. 4 600 recours avaient été déposés en 2010 ; en 2011, 5 648 recours ont été enregistrés, dont 80 % en Île-de-France. Dans ces conditions, les crédits prévus au titre des condamnations de l'Etat 306 ( * ) s'avèrent très sous-estimés 307 ( * ) , et la dette de l'Etat pourrait rapidement s'accroître . Ainsi, pour une enveloppe globale, votée en loi de finances initiale à destination du contentieux de l'habitat, de 10 millions d'euros en AE et CP, les crédits consommés spécifiquement pour le DALO s'élèvent à 9,99 millions en AE et 9,95 millions en CP, alors que le montant total de condamnations a été de 18,34 millions en 2011 308 ( * ) . Seule la moitié des condamnations prononcées en 2011 aura donc été réglée au cours du même exercice et la charge s'imputera sur l'exercice 2012 .
* 303 Les derniers textes réglementaires d'application ont été publiés le 30 novembre 2011.
* 304 Au 1 er janvier 2011 l'ensemble de la dépense est désormais géré dans Chorus, outil commun et intégré de gestion financière, budgétaire et comptable.
* 305 Voir le rapport n° 621 (2011-2012) fait au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois par MM. Claude Dilain et Gérard Roche.
* 306 Les astreintes accompagnant ces décisions sont versées au profit du fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL) pour les liquidations prononcées depuis le 31 juillet 2011.
* 307 Le contrôle budgétaire (CBCM) du ministère de l'Ecologie (avis du 23 février 2011) alerte sur le calibrage du niveau de dépenses lié au contentieux du droit au logement opposable, la dépense étant obligatoire.
* 308 Ces condamnations ont été partiellement notifiées en 2012, pour un montant de 8,3 millions d'euros.