2. Des incertitudes sur le sort de certaines compétences
Les blocages s'expliquent également par le sort réservé à certaines compétences de proximité , dont l'exercice au niveau intercommunal est mis en danger par deux des orientations assignées aux SDCI :
- la fixation d'un seuil minimal de 5 000 habitants pour la mise en place d'un EPCI à fiscalité propre ;
- la réduction du nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes, appelés à s'effacer au profit des EPCI à fiscalité propre.
Il est aisé en effet de constater que de nombreuses compétences (par exemple celles relatives aux écoles, aux crèches, ou encore au portage des repas à domicile) étaient jusque là assurées par des groupements de « petite » taille ou par des syndicats ; l'augmentation du nombre de communes membres de l'intercommunalité, conséquence mécanique de l'élargissement des périmètres, peut rendre plus complexe la gestion de ces compétences par le nouvel établissement et le dissuader de les adopter dans le cas où une petite communauté en rejoint une autre de caractère plus urbain.
Si ce problème peut être surmonté, comme le préconise l'Association des maires de France (AMF), via la constitution de syndicats intercommunaux, une telle démarche demande une analyse approfondie de la situation et suppose la conduite préalable de débats entre les communes ; mais ces initiatives, qui demandent du temps, ne peuvent se dérouler dans le cadre du calendrier actuel.
3. Le bouleversement de la composition des organes délibérants des EPCI touchés par la rationalisation intercommunale
L'article 9 de la loi de réforme des collectivités territoriales a apporté des changements substantiels aux règles régissant la composition des conseils communautaires des EPCI et de leurs bureaux, en particulier pour limiter fortement le nombre de membres de ces deux organes.
Les nouvelles règles de fixation du nombre et de
la répartition des sièges
L'article 9 de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a substantiellement modifié les règles de composition de l'organe délibérant et du bureau des EPCI à fiscalité propre. Ainsi, en ce qui concerne la composition du conseil communautaire , auparavant régie par des accords locaux : - les communes membres d'une communauté de communes ou d'une communauté d'agglomération peuvent conclure, à la majorité qualifiée (deux tiers des communes représentant au moins la moitié de la population, ou la moitié des communes représentant au moins deux tiers de la population), un accord par lequel elles répartissent librement les sièges entre elles, tout en « [tenant] compte de la population » de chacune d'entre elles. Le total de sièges ainsi créé est plafonné à hauteur de l'effectif qui aurait résulté de l'application du tableau qui figure au III du nouvel article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales (voir infra ) ; - à défaut d'accord dans les communautés de communes et dans les communautés d'agglomération, ainsi que dans les communautés urbaines et les métropoles, le nombre total de sièges est déterminé par un tableau qui fait dépendre ce nombre de la population totale de l'EPCI sans référence au nombre de communes regroupées. Les sièges sont répartis entre les communes membres selon une représentation proportionnelle à la plus forte moyenne ; les plus petites communes (c'est-à-dire celles qui n'ont obtenu aucun siège en application de la répartition proportionnelle) se voient ensuite attribuer un siège au-delà de l'effectif total fixé par le tableau. À l'issue de cette phase, 10 % de sièges supplémentaires peuvent être créés par l'EPCI. Par ailleurs, le plafond applicable au nombre de membres du bureau des EPCI à fiscalité propre, auparavant fixé à 30 % de l'effectif du conseil communautaire, a été durci : désormais, le nombre de vice-présidents ne peut être supérieur ni à 20 % du nombre de délégués communautaires, ni à 15 (dans le cas des conseils communautaires dépassant 75 membres). Source : rapport précité sur la proposition de loi portant diverses dispositions relatives à l'intercommunalité (n° 67, 2011-2012) |
Le II de l'article 83 de la loi du 16 décembre 2010 prévoit que ces nouvelles règles s'appliquent immédiatement aux intercommunalités, sauf si elles ont été créées avant la promulgation de cette même loi ou si elles ont fait l'objet d'un arrêté de périmètre avant cette date. Il résulte de la lecture combinée de ce II et du V du même article que l'application immédiate des dispositions issues de la loi de réforme des collectivités territoriales concerne l'ensemble des EPCI devant subir en 2012-2013 une modification (fusion, transformation, extension de périmètre) sous l'effet du processus de rationalisation de la carte intercommunale.
Comme l'ont révélé les auditions menées par votre rapporteur sur la proposition de loi portant diverses dispositions relatives à l'intercommunalité, le plafonnement immédiat du nombre de délégués communautaires et de vice-présidents conduit fréquemment à la cessation anticipée des mandats des représentants des communes (et notamment des plus « petites » d'entre elles) et crée de nombreuses tensions sur le terrain : les élus sont en effet réticents à appliquer un dispositif qui aura pour conséquence de modifier brutalement la composition du conseil communautaire et du bureau, et donc de déstabiliser la gouvernance des EPCI. L'AMF et l'Association des communautés de France (AdCF) ont donc demandé, dès l'été 2011, que l'application des dispositions issues de la loi de réforme des collectivités soit différée, pour l'ensemble des EPCI préexistants à ce texte, au prochain renouvellement général des conseils municipaux, soit en mars 2014.
Ces motifs de réticence, qui sont d'un niveau second au regard de l'intérêt général de l'achèvement de l'intercommunalité, devraient selon votre rapporteur être traités par des dispositions temporaires qui n'ont pas de réel inconvénient pour la vie des communautés modifiées, qui sera brève avant le renouvellement du printemps 2014.