Article 11 (art. L. 131-8, L. 241-13, L. 241-2 et L. 241-6 du code de la sécurité sociale, art. L. 731-2 et L. 741-9 du code rural et de la pêche maritime, art. 61 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de financement de la sécurité sociale pour 2005, art. 53 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008) - Prise en compte des heures supplémentaires dans le calcul des allégements généraux
Objet : Cet article vise à réintégrer les heures supplémentaires et complémentaires dans la base de calcul des allégements généraux de cotisations sociales.
I - Le dispositif proposé
Les allégements généraux de cotisation correspondent à une exonération dégressive de cotisations sociales patronales sur les rémunérations des salariés comprises entre 1 et 1,6 fois le Smic.
En l'état actuel, la formule de calcul du taux de ces allégements dits Fillon ne tient pas compte des rémunérations relatives aux heures supplémentaires et complémentaires (pour les salariés à temps partiel) versées par les employeurs à leurs salariés, et qui bénéficient elles-mêmes d'une réduction spécifique de cotisations sociales depuis l'instauration de la loi Tepa d'août 2007. Celle-ci a en effet explicitement prévu la neutralisation des heures supplémentaires dans le calcul de la réduction Fillon.
La conséquence est que les heures supplémentaires ou complémentaires ouvrent droit à l'exonération générale au même taux qu'une heure « normale » alors même qu'elles sont payées davantage en raison des règles de majorations de la rémunération au titre de ces heures.
Comme l'a souligné le Conseil des prélèvements obligatoires dans son rapport d'octobre 2010 sur les niches fiscales et sociales bénéficiant aux entreprises, cette situation conduit à aider deux fois plus l'employeur qui recourt à des heures supplémentaires que celui qui rémunère un salarié globalement au même niveau sur l'année, sans que ce salarié accomplisse d'heures supplémentaires, c'est-à-dire sur la base d'un salaire horaire plus élevé.
Dans ce dernier cas, l'employeur n'a en effet pas droit aux exonérations spécifiques liées aux heures supplémentaires et par ailleurs, bien qu'ayant versé une même rémunération brute annuelle que dans le premier cas, son taux d'exonération générale est inférieur, en raison de la dégressivité du barème.
Comme le rapport du conseil des prélèvements obligatoires, l'étude d'impact annexée au projet de loi pointe des pratiques d'optimisation, estimant que, dans certains cas, le surplus d'exonération permis par la législation actuelle entraine des effets de substitution d'heures supplémentaires à des hausses de salaire sur le temps de travail normal .
C'est pour mettre un terme à cet avantage que le Gouvernement propose, par cet article, d'intégrer la rémunération afférente aux heures supplémentaires dans le calcul du coefficient d'allégement. Il organise par ailleurs l'affectation du produit de cette mesure.
Prise en compte des heures supplémentaires et complémentaires dans le calcul des allégements généraux
A cet effet, le paragraphe I modifie l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale qui détermine les règles de calcul du montant de la réduction. Cet article avait été entièrement remanié dans la loi de financement pour 2011 pour permettre la mise en oeuvre du calcul annualisé des allégements généraux. Désormais, le coefficient de réduction sera fonction du rapport entre la rémunération annuelle du salarié et le Smic calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail augmentée, le cas échéant, du nombre d'heures supplémentaires ou complémentaires sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu.
Affectation du produit de la mesure
Sur un rendement total attendu de 600 millions d'euros en 2012, le Gouvernement propose d'en attribuer une moitié aux organismes de sécurité sociale, et l'autre au panier de recettes fiscales compensant les exonérations accordées au titre des heures supplémentaires et complémentaires.
Le paragraphe II modifie l'article L. 131-8 du même code qui répartit le produit des impôts et taxes entre les différents organismes et fonds de la sécurité sociale, en ce qui concerne deux catégories de taxes :
- la taxe sur les salaires qui viendra alimenter la Cnav à hauteur de 59,03 % de son produit au lieu de 59,9 % actuellement et la Cnaf pour 24,27 % au lieu de 23,4 % ;
- le droit de consommation sur les tabacs qui sera versé pour 58,10 % à la Cnam, pour 7,86 % à la Cnav, pour 15,44 % à la branche maladie du régime des exploitants agricoles, pour 1,89 % au régime d'assurance vieillesse complémentaire des exploitants agricoles, pour 9,18 % aux branches famille et action sociale du régime des salariés agricoles, pour 0,6 % à divers régimes (Enim, Sncf, RATP, etc.), pour 0,31 % au Fcaata, pour 1,48 % au Fnal, pour 1,25 % au FSV et pour 3,89 % à la compensation des exonérations liées aux heures supplémentaires et complémentaires.
Le paragraphe III prévoit une répartition différente du droit de consommation sur les tabacs inscrite à l'article L. 131-8 au seul titre de l'année 2012 , avec une proportion légèrement moindre de droits tabacs pour la branche maladie et légèrement supérieure pour la branche famille, afin de garantir à celle-ci ses ressources conformément à ce qui a été prévu lors de l'affectation de recettes de compensation du prélèvement de CSG effectué sur ses ressources au profit de la Cades.
Le paragraphe IV effectue une coordination à l'article L. 241-2 relatif aux ressources de la branche maladie pour tenir compte de la nouvelle rédaction de l'article L. 131-8 et pour mentionner la part du produit de la taxe sur les salaires en faisant référence à l'article 1001 du code général des impôts.
Les paragraphes V, VI et VII modifient, respectivement, les articles L. 241-6 du code de la sécurité sociale et L. 731-2 et L. 741-9 du code rural et de la pêche maritime pour y faire référence aux ressources mentionnées à l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale.
Le paragraphe VIII abroge, par coordination, l'article 61 de la loi de finances pour 2005 qui effectuait la répartition du droit de consommation sur les tabacs.
Le paragraphe IX modifie l'article 53 de la loi de finances pour 2008 relatif à la compensation des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires, afin de tenir compte de la nouvelle rédaction de l'article L. 131-8.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.
III - La position de la commission
Votre commission approuve cette mesure de rationalisation du calcul des allégements généraux de cotisations sociales qui permet la suppression d'un avantage pouvant conduire à des situations de réelle inéquité et à des effets d'aubaine pour certaines entreprises.
Elle rappelle néanmoins sa profonde hostilité aux exonérations de cotisations applicables aux heures supplémentaires et complémentaires , mises en place par l'article 1 er de la loi Tepa. Celles-ci sont en effet à la fois extrêmement coûteuses, près de 3,5 milliards d'euros, et contre-productives. Elle propose d'ailleurs de les supprimer grâce à l'adoption d'un amendement portant article additionnel avant l'article 11.
De la même manière, votre commission estime indispensable de mener une réflexion approfondie sur l'ensemble des allégements généraux de cotisations sociales . Plus de 20 milliards d'euros y sont consacrés ; il conviendrait d'avoir une approche plus fine à leur égard afin de privilégier les situations dans lesquelles ils ont la plus grande efficacité en termes d'emploi.
Au bénéfice de ces observations, la commission vous demande d'adopter cet article sans modification.