c) L'information déficiente sur le compte d'avances aux collectivités territoriales ne permet pas d'évaluer avec certitude le coût de la réforme de la taxe professionnelle pour l'Etat

Le profil d'exécution du compte d'avances aux collectivités territoriales aura été particulièrement atypique en 2010, année au cours de laquelle les collectivités n'ont perçu ni la taxe professionnelle (supprimée à compter du 1 er janvier 2010), ni les nouvelles impositions créées en remplacement de celle-ci (versées à compter du 1 er janvier 2011). Durant cette année de transition, les collectivités ont perçu la compensation relais (32,4 milliards d'euros), qui a cependant pris la forme d'un prélèvement sur recettes et n'a donc pas transité par le compte d'avances. En 2010, la suppression de la taxe professionnelle a donc minoré les dépenses du compte de 30 milliards d'euros.

Dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire 2010, la Cour des comptes estime néanmoins que le coût 2010 de la réforme de la TP pour l'Etat ne peut faire l'objet d'une évaluation fiable compte tenu des incertitudes fortes qui pèsent sur les opérations enregistrées sur le compte d'avances .

Les recettes du compte d'avances se composent en effet de recettes réelles , constituées des produits des impôts directs effectivement recouvrés, et de recettes pour ordre trouvant leur contrepartie dans des dépenses pour ordre de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Ces dépenses pour ordre correspondent à la part des dégrèvements non décaissés et aux admissions en non-valeur, dont le coût est financé par l'Etat. Elles ne donnent pas lieu à encaissements et décaissements mais simplement à des écritures comptables entre le budget général et le compte d'avances . En effet, la distinction entre opérations réelles et pour ordre dépend essentiellement de la façon dont sont réalisés les dégrèvements :

Le contribuable demande un remboursement après avoir payé la totalité de l'impôt

Le contribuable auto-impute son dégrèvement sur l'impôt dû avant paiement

Année n

Encaissement de la totalité de la recette par le compte d'avance aux collectivités territoriales

Absence de recouvrement de la fraction auto-imputée sur le compte d'avances

Enregistrement d'une dépense budgétaire sur la mission « Remboursements et dégrèvements »

Absence de dépense budgétaire sur la mission « Remboursements et dégrèvements »

Année n + 1

-

Inscription d'une recette d'ordre sur le compte d'avances

-

Inscription d'une dépense d'ordre sur la mission « Remboursements et dégrèvements »

Or la Cour des comptes constate que « l'administration n'est pas en mesure, compte tenu des insuffisances des systèmes d'information, d'opérer la distinction entre (les recettes d'ordre) et les recettes réelles. Le montant exact de taxe professionnelle effectivement recouvré au titre d'un exercice et le rattachement de ces recettes à chacun des rôles émis antérieurement ne peuvent davantage être connus. Le partage entre les dégrèvements auto-imputés par les entreprises et ceux dont elles réclament la restitution au Trésor public ne peut donc être effectué » .

Le coût de la réforme de la TP est estimé à 7,7 milliards d'euros pour l'Etat en 2010 . Il résulte de la différence entre un coût pour le budget général de 17,9 milliards d'euros (soit 14,5 milliards d'euros de recettes supplémentaires au titre des nouvelles impositions moins 32,4 milliards d'euros de compensation relais versée aux collectivités territoriales), compensé par une amélioration du solde du compte d'avances aux collectivités territoriales de 10,2 milliards d'euros (10,2-17,9 = 7,7).

Cet important excédent résulte majoritairement d'un surplus de recettes de taxe professionnelle sur exercices antérieurs par rapport à la prévision de la LFI 2010, soit 9,9 milliards d'euros contre 4,5 milliards d'euros anticipés. Cet écart de 5,4 milliards d'euros ne peut toutefois être justifié avec certitude par l'administration , compte tenu des insuffisances affectant les systèmes d'information, qui ne permettent ni de distinguer recettes réelles et recettes d'ordre, ni de connaître le montant de TP rattachable à un exercice ou à des émissions de rôles antérieures.

La Cour des comptes indique qu' « en l'absence de ces données, l'administration s'est efforcée de reconstituer ex post une explication plausible de l'écart (constaté), en mettant en avant l'hypothèse d'une erreur répétée de prévision les années antérieures, qui l'aurait conduite à sous-estimer la part du "plafonnement valeur ajoutée" donnant lieu à auto-imputation par les entreprises » . Cette explication est sujette à caution, la lecture des soldes cumulés du compte d'avances de 2006 à 2009 ne corroborant pas cette hypothèse.

Prenant acte du caractère « inauditable » du compte d'avances, la Cour des comptes conclut à une « incertitude sur la charge nette supplémentaire ayant pesé en 2010 sur le budget de l'Etat à l'occasion de la première année de mise en oeuvre de la réforme de la taxe professionnelle » .

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