Article 20 (art. L. 2141-2 du code de la santé publique) Affirmation de la finalité médicale de l'assistance médicale à la procréation ; accès de l'assistance médicale à la procréation des partenaires d'un pacte civil de solidarité sans condition de délai

Objet : Cet article définit les objectifs de l'assistance médicale à la procréation et en élargit le bénéfice.

I - Les dispositions initiales du projet de loi

Cet article modifie l'article L. 2141-2 du code de la santé publique relatif aux objectifs de l'assistance médicale à la procréation (AMP). Il se compose de deux parties.

Le remplace les deux premiers alinéas à des fins de clarification rédactionnelle.

Le élargit l'accès à l'AMP aux couples liés par un Pacs sans condition de délai et aux couples concubins depuis au moins deux ans.

II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

A l'initiative de sa commission spéciale, l'Assemblée nationale a supprimé tout critère relatif au mode d'union des couples ayant recours à l'AMP, en considérant que leur stabilité s'apprécierait au long du parcours de procréation.

III - Le texte adopté par la commission

La commission a adopté, à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des lois, un amendement rétablissant l'énumération des modes d'union des couples autorisés à recourir à une AMP, afin de garantir la stabilité de cette union, tout en ne prévoyant pas de durée minimale.

Elle a adopté cet article ainsi modifié.

Article 20 bis (art. L. 2141-2 et 2141-11 du code de la santé publique, art. 311-20-1, 314-1, 724-2 à 724-5 (nouveaux) et  815 du code civil) Autorisation de transfert d'embryons post mortem

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, vise à autoriser le transfert d'embryons constitué avant le décès d'un homme. Ce faisant, il en tire les conséquences notamment dans le domaine du droit successoral.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

La mission d'information sur la révision des lois de bioéthique de l'Assemblée nationale avait conclu au maintien de l'interdiction des inséminations post mortem mais avait cependant préconisé l'autorisation du transfert d'embryons post mortem .

Elle avait en effet considéré que l'embryon a été conçu dans le cadre d'un projet parental, certes rompu par un décès brutal mais qui existait bien et résultait de la volonté exprimée par chacun des membres du couple.

Elle avait également estimé que la disparition de l'homme ne faisait pas disparaître les droits que la femme peut considérer avoir sur ses embryons.

Elle avait enfin jugé que la possibilité de procéder ou non au transfert in utero d'un embryon ne doit pas s'évaluer dans l'absolu mais au regard d'autres voies possibles du devenir de l'embryon, à savoir la destruction, le don à la recherche ou l'accueil par un autre couple. Dans ce contexte, la destruction de l'embryon ou son accueil par un autre couple, alors que la femme qui est à l'origine de sa conception aurait souhaité le porter, ont pour effet d'ajouter au deuil un sentiment de profonde incompréhension.

Le dispositif retenu par l'Assemblée nationale pour cet article s'inspire largement de celui qu'elle avait déjà adopté lors de la première lecture de la loi bioéthique de 2004 :

- le transfert d'embryons doit être autorisé par l'agence de la biomédecine,

- le père doit y avoir consenti ;

- le transfert ne peut intervenir avant un délai « de réflexion » de six mois et au plus tard dans un délai de dix-huit mois après le décès du père.

Si ces conditions sont remplies, il est prévu que la filiation paternelle légitime ou naturelle, selon que le couple était marié ou non, sera établie et l'enfant sera appelé à la succession de son père.

A cet effet, le paragraphe I modifie l'article L. 2141-2 du code de la santé publique de façon à préciser les conditions dans lesquelles peuvent ou ne peuvent pas se faire l'insémination ou le transfert des embryons :

- font obstacle à l'insémination ou au transfert d'embryons, le dépôt d'une requête en divorce ou en séparation de corps, la cessation de la communauté de vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par l'homme ou la femme ;

- le décès d'un des membres du couple fait obstacle à l'insémination ;

- mais, si l'homme à donné par écrit son consentement à la poursuite de l'AMP dans l'éventualité de son décès, le transfert d'embryons peut être réalisé. Il a alors lieu entre six et dix-huit mois après ce décès, après autorisation de l'agence de la biomédecine. La naissance d'un ou plusieurs enfants à la suite d'un même transfert met fin à la possibilité d'en réaliser un autre. La femme doit bénéficier d'un accompagnement personnalisé. Il est précisé qu'elle peut à tout moment renoncer au transfert et que celui-ci ne peut être réalisé en cas de mariage ou de remariage.

Le paragraphe II prévoit de compléter l'article L. 2141-11 du code de la santé publique pour préciser qu'une information adaptée est remise aux intéressés sur les conditions d'accès à l'AMP et en particulier sur les conséquences en cas de décès d'un des membres du couple.

Le paragraphe III définit les conditions dérogatoires au droit actuel dans lesquelles pourra s'établir la filiation à l'égard du père, dès lors que celui-ci a donné son consentement écrit à la poursuite éventuelle d'une procédure d'AMP postérieurement à son éventuel décès. Ces règles sont inscrites dans deux nouveaux articles du code civil, 311-20-1 et 314-1.

Le paragraphe IV détermine les règles dérogatoires au droit successoral qui pourront s'appliquer pour les enfants nés d'un transfert d'embryons post mortem . Quatre nouveaux articles sont introduits dans le code civil dans ce but : les articles 724-2 à 724-5. Une disposition spécifique est par ailleurs inscrite à l'article 815 pour les indivisions.

II - Le texte adopté par la commission

Votre rapporteur a, au cours de ses auditions, entendu des avis très partagés sur cette question.

L'étude de la situation des pays voisins montre également que, sur ce point précis, les législations divergent sensiblement.

Etude de législation comparée n° 193 sur l'accès à l'assistance médicale à la procréation (janvier 2009)

(synthèse en ce qui concerne le transfert d'embryons post mortem)

L'Allemagne, le Danemark, l'Italie et la Suisse prohibent explicitement l'insémination et le transfert d'embryons post mortem , tandis que la Belgique, l'Espagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni admettent ces pratiques.

Dans chacun de ces quatre pays, la procréation post mortem est subordonnée à un accord exprès du mari - ou du compagnon - de la future mère, c'est-à-dire de l'homme qui devait devenir père.

Par ailleurs, la période pendant laquelle l'insémination ou le transfert d'embryons post mortem est possible est limitée par la durée maximale de cryoconservation, en général fixée à cinq ans. La loi belge prévoit en outre un délai spécifique pour ces opérations, qui ne peuvent avoir lieu ni moins de six mois ni plus de deux ans après le décès.

À l'exception de la loi espagnole, qui établit le lien de filiation entre l'homme décédé et l'enfant si l'insémination ou le transfert d'embryons post mortem ont lieu moins de douze mois après le décès, les textes ne règlent pas cette question. La filiation des enfants ainsi nés doit donc être établie par voie judiciaire. C'est notamment le cas au Royaume-Uni, qui a pourtant adopté une loi spécifique sur ce sujet en 2003 : désormais, en cas de procréation post mortem , certaines données d'état civil relatives au mari (ou au compagnon) de la mère peuvent être enregistrées, mais cette disposition, purement symbolique, n'a aucune conséquence juridique.

Sur proposition du rapporteur pour avis de la commission des lois, d'Anne-Marie Payet et de Marie-Thérèse Hermange, et après un long débat, la commission a décidé de supprimer cet article. A l'appui de cette décision, il a notamment fait valoir que l'intérêt de l'enfant n'était pas de naître orphelin.

En outre, selon le rapporteur de la commission des lois, autoriser le transfert post mortem d'embryon entraînerait la remise en cause de principes fondateurs du droit de la bioéthique, du droit de la famille et du droit des successions.

Votre commission a supprimé cet article.

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