II. LES MOYENS DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI QUI ÉCHAPPENT À LA MAÎTRISE DIRECTE DES GESTIONNAIRES DE PROGRAMME
A. LES DÉPENSES FISCALES
Ainsi que cela a été indiqué plus haut, le montant des dépenses fiscales s'établit à 10,51 milliards d'euros pour 2011, soit un niveau équivalent à celui des crédits budgétaires de la mission. Treize mesures dépassent les 100 millions d'euros de perte de recettes fiscales et représentent, à elles seules, 10,35 milliards d'euros, soit 98,5 % des dépenses fiscales rattachées à la mission.
Les principaux postes sont les suivants :
- les crédits et réductions d'impôts pour l'emploi de salariés à domicile (3,05 milliards d'euros) ;
- la prime pour l'emploi (PPE) pour un montant de 2,98 milliards d'euros ;
- l'exonération des heures supplémentaires (1,36 milliard d'euros) ;
- le taux réduit de 5,5 % de TVA pour les cantines (900 millions d'euros).
Or la préoccupation majeure de votre rapporteur spécial porte sur l'absence d'évaluation de l'efficacité des crédits ou réductions d'impôts au regard de l'emploi .
Au demeurant, celle-ci ne peut être que complexe car si le coût brut d'une dépense fiscale peut être aisément mesuré, il en va tout autrement du coût net, qui prendrait également en compte les rentrées engendrées par la dépense fiscale. C'est particulièrement le cas en matière d'emploi, puisque les personnes retrouvant un travail sont également susceptibles de payer l'impôt sur le revenu ou, en accroissant leur dépenses, de majorer, pour l'Etat, les recettes tirées de la taxe sur la valeur ajoutée. Au-delà des seules rentrées fiscales, la reprise d'emploi, en augmentant les cotisations sociales des personnes bénéficiaires des dispositifs, contribue également à l'équilibre des organismes de sécurité sociale. De fait, cette analyse fait défaut .
Sur un total de 33 dépenses fiscales, seuls trois indicateurs de performances sont associées à la mesure de l'efficience de trois dispositifs :
- la prime pour l'emploi au moyen de la mesure de la part des bénéficiaires de la prime pour l'emploi précédemment au chômage ou inactifs ;
- le crédit d'impôt en faveur de l'apprentissage et l'exonération en faveur des salaires des apprentis par la mesure du taux d'insertion dans l'emploi à l'issu du contrat d'apprentissage ;
- les dispositifs fiscaux dérogatoires en faveur des services à la personne, qui sont mis en relation avec la mesure du taux de croissance annuel du nombre d'heures travaillées dans le secteur des services à la personne.
La recommandation, formulée l'année dernière, visant à étendre , de manière systématique et suivie, à l'ensemble des dispositifs fiscaux dérogatoires le principe d'une évaluation détaillée et associée à un indicateur de performance , dûment renseigné, est donc réitérée.
Cette exigence s'avère d'autant plus légitime que, dans le contexte de rationalisation des dispositifs dérogatoire, il convient de pouvoir analyser précisément le bilan coût/avantage de chaque perte de recettes pour l'Etat.
Les dépenses fiscales de plus de 100 millions d'euros de la mission « Travail et emploi »
(en millions d'euros)
Dépenses fiscales |
Programme |
Chiffrage
|
Chiffrage
|
Chiffrage
|
Chiffrage
|
Variation
|
Nombre de bénéficiaires |
Prime pour l'emploi |
102 |
4 230 |
3 936 |
3 560 |
2 980 |
-16% |
8,9 millions |
Crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile |
103 |
1 260 |
1 682 |
1 750 |
1 750 |
0% |
1,2 million |
Exonération d'impôt sur le revenu au titre des heures supplémentaires |
103 |
400 |
1 290 |
1 360 |
1 360 |
0% |
4,4 millions |
Réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile |
103 |
1 040 |
1 248 |
1 300 |
1 300 |
0% |
2 millions |
TVA à 5,5 % pour les cantines et restaurants d'entreprise |
111 |
790 |
860 |
870 |
900 |
3% |
non déterminé |
Exonération de TVA des prestations de services rendus aux personnes physiques par les associations agréées |
103 |
550 |
600 |
650 |
700 |
8% |
6 800 entreprises |
Crédit d'impôt en faveur de l'apprentissage |
103 |
300 |
440 |
440 |
440 |
175 000 entreprises |
|
Exonération du salaire des apprentis |
103 |
250 |
255 |
265 |
275 |
4% |
424 000 |
Exonération de la participation employeur aux tickets restaurant |
111 |
220 |
200 |
200 |
200 |
0% |
2,7 millions |
Réduction d'impôt sur les cotisations syndicales |
111 |
125 |
123 |
130 |
130 |
0% |
1,5 million |
TVA à 5,5 % pour les services d'aide à la personne par les entreprises agréées |
103 |
90 |
110 |
110 |
120 |
9% |
6 400 entreprises |
Exonération partielle de la prise en charge par l'employeur des frais de transport entre le domicile et le lieu de travail |
111 |
60 |
60 |
100 |
100 |
0% |
non déterminé |
Crédit d'impôt en faveur de l'intéressement |
111 |
- |
- |
50 |
100 |
100% |
non déterminé |
TOTAL |
9 315 |
10 804 |
10 785 |
10 355 |
-4% |
Source : projet annuel de performances « Travail et emploi » annexé au projet de loi de finances pour 2011
Ainsi que l'illustre le tableau ci-dessus, des économies importantes ont déjà été enregistrées du fait de la décision, en 2009, de ne pas procéder à la revalorisation annuelle de la prime pour l'emploi. L'augmentation de cette dépense fiscale a pu être enrayée (3,2 milliards d'euros en 2005, 4,3 milliards en 2006, 4,2 milliards en 2007 et 2008, 3,9 milliards d'euros en 2009 et 3,5 milliards attendus en 2010) et son montant serait réduit de 16 % pour 2011 (2,98 milliards d'euros).
Votre rapporteur spécial vous proposera plus loin d'accentuer encore l'effort de contraction de ce dispositif.