b) La sous-reconnaissance des maladies professionnelles

Une maladie est reconnue d'origine professionnelle :

- si elle figure dans un tableau, fixé par décret en Conseil d'Etat, qui recense les maladies présumées être d'origine professionnelle ;

- ou si le salarié est reconnu atteint d'une maladie professionnelle par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP), dont l'avis s'impose à la caisse de sécurité sociale.

Nombre de maladies professionnelles reconnues par dérogation aux critères
des tableaux (alinéa 3) et en dehors des tableaux (alinéa 4)

2005

2006

2007

2008

2009

Affections rhumatologiques

2 767

3 036

3 150

3 634

4 429

Affections amiante

475

509

524

458

462

Surdité

295

285

245

272

248

Affections respiratoires

86

151

84

166

113

Affections de la peau

32

28

16

26

79

Autres pathologies

151

38

162

119

132

Nombre de pathologies reconnues au titre de l'alinéa 3

3 806

4 169

4 181

4 675

5 463

Nombre de pathologies reconnues au titre de l'alinéa 4

129

150

176

186

227

Source : Cnam

Cette procédure peut ne pas être exempte de défaillances. Des pathologies émergentes ou mal connues peuvent ne pas figurer sur les tableaux de maladies professionnelles.

Un autre problème, de nature scientifique cette fois, tient à la difficulté à déterminer la cause exacte d'une affection. La ligne de partage entre les maladies professionnelles et les autres peut être délicate à tracer, ce qui explique que les taux de reconnaissance puissent différer de façon significative d'une CPAM à une autre.

c) Evaluation du phénomène et de ses conséquences

La sous-déclaration des accidents du travail semble relativement limitée, tout au moins pour les accidents ayant occasionné un arrêt de travail. En comparant les statistiques de la Cnam aux informations recueillies par la Dares 3 ( * ) grâce à ses enquêtes auprès des salariés et des entreprises, le rapport Diricq estime le taux de sous-déclaration aux alentours de 5 %, ce qui correspondrait à 38 000 accidents avec arrêt.

La sous-déclaration et la sous-reconnaissance des maladies professionnelles seraient de plus grande ampleur. Il convient cependant d'être prudent en la matière, puisqu'elles sont appréciées à l'aide d'études épidémiologiques relatives au nombre de sinistres d'origine professionnelle, qui ne sont pas exhaustives et reposent sur des méthodologies et des hypothèses complexes.

Pour évaluer le coût de la sous-déclaration et de la sous-reconnaissance, la commission Diricq a d'abord estimé le nombre de sinistres non pris en compte dans les statistiques de la Cnam et l'a rapporté au coût moyen attaché à ces accidents et maladies. Compte tenu des incertitudes qui viennent d'être indiquées, la commission a abouti à une fourchette assez large, comprise entre 564,7 millions et 1,015 milliard d'euros .

Le précédent exercice d'évaluation, réalisé en 2005, avait conclu à une fourchette comprise entre 356 et 749 millions. L'écart par rapport à l'évaluation réalisée cette année tient à trois causes principales :

- un effet de champ, la commission Diricq s'étant attachée en 2008 à évaluer les coûts liés à des pathologies non prises en compte antérieurement, comme les dermatoses et les broncho-pneumopathies ;

- l'augmentation du coût du traitement des pathologies ;

- l'augmentation des effectifs salariés.

La commission formule de nombreuses propositions destinées à réduire la sous-déclaration et la sous-reconnaissance. Elle insiste notamment sur l'amélioration de l'information et de la formation des salariés et des élus du personnel, notamment des membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), ainsi que des professionnels de santé. Il faut veiller aussi à une actualisation régulière des tableaux de maladies professionnelles et à une diminution des disparités observées dans les décisions des différentes CPAM et CRRMP. Chaque caisse devrait également mettre en place une procédure d'aide à la déclaration des maladies et d'accompagnement des victimes.

Dans l'attente du rapport de la prochaine commission qui sera remis en 2011 et en l'absence d'élément nouveau, le Gouvernement a décidé de reconduire le montant du versement en 2011 à 710 millions d'euros.


Récapitulatif des principales propositions et recommandations émises en juillet 2010 par la mission d'information de la commission des affaires sociales sur le mal-être au travail

Code du travail

1. Faire figurer explicitement dans le code une disposition prévoyant que l'organisation du travail et les méthodes de gestion ne doivent pas mettre en danger la sécurité et la santé des travailleurs, ni porter atteinte à leurs droits et à leur dignité.

2. Préciser que l'employeur, qui a l'obligation d'évaluer les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, doit aussi prendre en compte la charge psychosociale du poste de travail.

Management

3. Former systématiquement les managers à la gestion d'équipe et leur donner un socle minimum de compétences en matière de santé et de sécurité au travail.

4. Revenir aux fondamentaux du management, en redonnant toute leur place aux comportements individuels, au détriment des procédures préétablies.

5. Renforcer les collectifs de travail, en intégrant une dimension collective dans l'évaluation des personnels, en ouvrant des espaces de concertation avec les travailleurs ou encore en mettant en place un dispositif d'intéressement.

6. Pour inciter les directions à oeuvrer pour le bien-être de leurs collaborateurs, faire dépendre une part de la rémunération variable des managers d'indicateurs sociaux et de santé.

7. Faire bénéficier les PME et TPE d'une attention particulière, notamment en mobilisant les partenaires sociaux au niveau des branches ou au niveau territorial.

Acteurs de la prévention des risques professionnels

8. Mieux faire connaître, notamment auprès des petites entreprises, l'action de l'INRS, des Carsat ou du réseau Anact/Aract.

9. Veiller à ce que la réforme annoncée des services de santé au travail contribue à revaloriser le métier de médecin du travail, à conforter leur indépendance, en s'orientant vers une gestion paritaire, et promeuve la pluridisciplinarité.

10. Dans le respect de la négociation en cours entre les partenaires sociaux en vue d'une réforme des institutions représentatives du personnel (IRP), rechercher les moyens de renforcer les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) : élection directe de leurs membres, délégations horaires plus importantes, meilleure formation des élus, création de CHSCT « centraux » dans les grandes entreprises.

Accompagnement des salariés en souffrance

11. Développer les dispositifs d'écoute qui permettent aux salariés de s'exprimer et de bénéficier, le cas échéant, d'un soutien psychologique.

12. Sensibiliser à la santé au travail les médecins de ville, vers qui les salariés se tournent souvent spontanément, afin qu'ils fassent plus facilement lien entre une pathologie et les conditions de travail.

Prise en charge par la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la sécurité sociale

13. Etudier la possibilité d'inscrire le stress post-traumatique dans les tableaux de maladies professionnelles et d'assouplir les critères de reconnaissance des maladies professionnelles dans le cadre de la procédure complémentaire.


* 3 Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques auprès du ministère du travail.

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