CHAPITRE III - COMMUNES NOUVELLES
Article 8 (art. L. 2113-1 à L. 2113-23 du code général des collectivités territoriales) Création d'une commune nouvelle
L'article 8 institue un dispositif renouvelé de fusion de communes.
Le consentement sénatorial à ce nouveau régime
En première lecture, sur la proposition de votre commission, le Sénat avait retenu ce dispositif « sans optimisme excessif », en l'assortissant de plusieurs garanties, complétées à l'initiative de nos collègues Pierre-Yves Collombat, Jean-René Lecerf, Hugues Portelli, Charles Guené, rapporteur pour avis de la commission des finances et de M. Michel Charasse :
- tout d'abord, il a étendu la consultation des électeurs à la demande émanant de l'ensemble des communes concernées et prévu, dans tous les cas, l'appréciation des résultats au niveau de chaque commune ;
- il a limité le pouvoir d'appréciation du préfet en exigeant, en cas de refus de création de la commune nouvelle, lorsque la demande résulte de l'accord unanime des communes, un motif impérieux d'intérêt général ;
- il a confié au conseil municipal de la commune nouvelle le soin de désigner, dans le mois de sa création, l'EPCI à fiscalité propre auquel elle se rattache en prévoyant, cependant, une clause de sauvegarde : le préfet, opposé au choix de la commune nouvelle, peut saisir la commission départementale de la coopération intercommunale d'un projet de rattachement à un autre établissement auquel appartenait une des communes fusionnées. La CDCI dispose alors de trois mois pour se prononcer à la majorité des 2/3 ; à défaut, son avis est réputé favorable à la proposition préfectorale. La commune nouvelle ne devient membre de l'établissement de son choix que si la CDCI l'a approuvé à la majorité des deux tiers. Dans le cas contraire, la commune nouvelle devient membre de l'EPCI désigné par le préfet.
Dans l'intervalle de ce nouveau rattachement, elle demeure membre de chacun des établissements auxquels les communes appartenaient dans la limite du territoire de celles-ci ;
- il a attribué les qualités d'officier d'état civil et d'officier de police judiciaire au maire délégué comme actuellement dans les communes associées ;
- il a prévu l'accord des conseils généraux et régionaux à la modification des limites départementales et régionales découlant de la création d'une commune nouvelle. En cas de désaccord, la modification sera opérée par la loi ;
- il a encadré la fixation du nom et du chef-lieu de la commune nouvelle par le préfet par une proposition conjointe de la majorité absolue des conseils municipaux des communes la composant.
Par ailleurs, en matière financière, le projet de loi proposait d'attribuer aux communes nouvelles une « dotation particulière » afin d'encourager la fusion. Cette dotation particulière aurait été égale à 5 % du montant de la dotation forfaitaire de la DGF perçue par la commune nouvelle l'année de sa création et aurait évolué ensuite comme le taux moyen de la DGF mise en répartition.
Cette dotation avait cependant été très critiquée : prélevée sur l'enveloppe globale attribuée aux communautés et communes, elle aurait pénalisé les autres collectivités. L'AMF avait ainsi observé que cet avantage créé au profit des communes membres ne se justifiait pas par rapport aux EPCI à fiscalité propre. C'est pourquoi, sur la proposition de Mme Jacqueline Gourault, le Sénat a supprimé la majoration de la dotation forfaitaire annuelle des communes nouvelles.
Toutefois, il avait instauré une garantie de dotation de solidarité rurale pour les communes nouvelles, en prévoyant qu'elles percevraient une dotation au moins égale à la somme des attributions perçues au titre de chacune des deux fractions de la dotation de solidarité rurale par les communes anciennes, l'année précédant la création de la commune nouvelle. Cette attribution évoluera selon un taux égal au taux d'évolution de la dotation de solidarité rurale.
Les assouplissements retenus par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a modifié sensiblement l'article 8.
1. Elle a tout d'abord assoupli les conditions de création d'une commune nouvelle :
- en limitant le pouvoir d'initier la création d'une commune nouvelle à la demande de toutes les communes, à celles d'un EPCI pour instituer la commune nouvelle en lieu et place de toutes ses communes membre ou au préfet ;
- en exigeant dans ces deux derniers cas -initiative de l'établissement ou du préfet-, un accord de l'ensemble des conseils municipaux à la création de la nouvelle collectivité ;
- en supprimant, par coordination, la consultation de la population ;
- en supprimant la motivation spéciale du refus par le préfet de donner suite à la demande des collectivités.
2. L'Assemblée nationale a amendé les conséquences de la création d'une commune nouvelle :
- en fixant un délai de deux mois aux régions et départements pour approuver la modification de leurs limites territoriales découlant de la création d'une commune nouvelle par fusion de communes situées dans des régions et/ou départements différents. Dans ce cas, le projet de création leur est notifié par le ministre chargé des collectivités territoriales ;
- en supprimant la procédure spécifique de détermination du nom et du chef-lieu ;
- en clarifiant les règles relatives à la composition transitoire du premier conseil municipal de la nouvelle collectivité jusqu'au prochain renouvellement général des conseils municipaux : l'arrêté préfectoral fixerait la composition du conseil en y intégrant tout ou partie des membres en exercice des anciens conseils municipaux et, dans tous les cas, le maire et les adjoints de chacune des anciennes communes.
3. Les députés ont précisé , dans le régime des communes déléguées , que le maire délégué est désigné par le conseil municipal de la commune nouvelle.
4. les députés n'ont pas modifié le régime financier des communes nouvelles.
La commission des lois a estimé que la dotation particulière, supprimée par le Sénat, était nécessaire pour créer un dispositif plus incitatif que celui de la loi Marcellin et l'a donc rétablie à l'initiative de son rapporteur. Toutefois, un amendement de M. Jacques Pélissard réintroduisant la suppression de la dotation particulière a été adopté en séance publique avec l'appui de M. Philippe Vigier, rapporteur pour avis de la commission des finances, contre l'avis du gouvernement et du rapporteur de la commission des lois.
Par ailleurs, la garantie de dotation de solidarité rurale introduite par le Sénat au profit des communes nouvelles a été maintenue.
L'assentiment de votre commission des lois au dispositif de l'Assemblée nationale
Même si les députés ont sensiblement modifié la structure du texte sénatorial, ils ont respecté l'axe principal de la Haute assemblée : l'adhésion volontaire des communes au principe de la fusion.
Votre commission a donc retenu le texte qui lui a été transmis.
La commission des lois a adopté l'article 8 sans modification .
Article 10 (art. L. 2334-1, L. 2334-4, L. 2334-13, L. 2334-33, L. 2334-40, L. 5211-30 et L. 5211-35 du code général des collectivités territoriales) Adaptation du code général des collectivités territoriales à la création des communes nouvelles
Cet article procède aux adaptations du code général des collectivités territoriales découlant de l'institution des communes nouvelles.
L'Assemblée nationale a adopté des mesures présentées comme des coordinations découlant, d'une part, de l'institution des communes nouvelles et, d'autre part, pour les communes fusionnées « Marcellin », du maintien par l'article 11 des règles les régissant.
Par ailleurs, elle a décidé d'aligner le régime de perception du FCTVA par les communes nouvelles sur celui dont bénéficient les communautés de communes et les communautés d'agglomération : les communes nouvelles bénéficieraient ainsi des attributions du FCTVA l'année même de réalisation des dépenses d'investissement, et non avec un décalage de deux ans entre la dépense d'équipement et le remboursement du FCTVA. Cette modification permet d'éviter une incongruité, dans le cas où la commune nouvelle est issue d'une communauté de commune ou d'une communauté d'agglomération non soumise au décalage de perception.
Les modifications adoptées par la commission des lois
Sur proposition de son rapporteur, la commission a procédé à une précision rédactionnelle et trois coordinations.
Elle a adopté l'article 10 ainsi modifié .
Article 11 Dispositions applicables aux communes fusionnées
Cet article précise l'articulation entre l'application de la loi Marcellin et le nouveau régime des communes nouvelles.
En première lecture , le Sénat a complété l'article 11 pour :
- offrir aux anciennes communes fusionnées ayant opté pour le régime d'association la faculté de décider de l'application du nouveau régime des communes déléguées à leurs communes associées, sur la proposition de notre collègue Patrice Gélard ;
- instaurer un mécanisme de retour à l'autonomie des communes associées à l'initiative du sénateur Jean-Pierre Sueur : la commune associée pourrait se détacher de la commune fusionnée et recouvrer son statut de collectivité locale de plein exercice ;
- simplifier les modalités de suppression des communes associées par l'adoption d'un amendement de notre collègue Virginie Klès.
L'Assemblée nationale a supprimé le dispositif de scission d'une commune associée au motif, d'une part, qu'il est contraire au principe directeur du projet de loi de remédier à l'émiettement communal et d'autre part, qu'il est inutile puisque les articles L. 2112-2 et suivants permettent déjà de procéder à des défusions.
La commission des lois a adopté l'article 11 sans modification .
Article 11 bis (art. L. 2143-1 du code général des collectivités territoriales) Seuil démographique de création facultative de conseils de quartier
Cet article résulte d'un amendement de notre collègue Gérard Longuet. Il abaisse de 20.000 à 10.000 habitants le seuil de création facultative de conseils de quartier.
L'Assemblée nationale a supprimé cette disposition à l'initiative de sa commission des lois : son rapporteur, M. Dominique Perben, a, en effet, exprimé ses doutes « sur l'intérêt pratique d'une subdivision en quartiers de communes comprenant moins de 20.000 habitants » 20 ( * ) .
La commission des lois a maintenu la suppression de cet article.
* 20 Cf. rapport 2516, tome 1, Assemblée nationale ...