III. LA NÉCESSITÉ D'ALLER PLUS LOIN
A. LES SOLUTIONS INSTITUTIONNELLES QUI ONT PU ÊTRE AVANCÉES CORRESPONDENT À DES SUJETS DE LONG TERME ET NE RÈGLENT PAS LE FOND DU PROBLÈME
1. Le projet de « fonds monétaire européen »
Certains hommes politiques et économistes 26 ( * ) ont pu envisager la mise en place d'un « fonds monétaire européen ».
Dans un article publié dans The Economist le 18 février 2010, les économistes Daniel Gros 27 ( * ) et Thomas Mayer 28 ( * ) préconisent la mise en place d'un tel fonds, indépendant du pouvoir politique - comme le FMI - et dont l'une des fonctions serait de permettre, le cas échéant, « une faillite souveraine ordonnée » (ce que ne permet pas le FMI). Avec une contribution des Etats de 1 % de leur excédent de dette et de déficit publics par rapport au seuil fixé par le traité de Maastricht, un tel fonds aurait accumulé au cours des dix dernières années environ 120 milliards d'euros, soit 1 % du PIB de l'UE.
La mise en place d'un tel fonds a été soutenue notamment par MM. Olli Rehn, commissaire aux affaires économiques et monétaires, Giorgio Napolitano, président de la République italienne, Giulio Tremonti, ministre des finances italien, Wolfgang Schäuble, ministre des finances allemand, et Guy Verhofstadt, président du groupe de l'Alliance des démocrates et des libéraux au Parlement européen et ancien premier ministre belge 29 ( * ) .
2. Le projet d' « agence européenne de la dette »
La mise en place d'une « agence européenne de la dette » (AED) suscite davantage d'interrogations.
Cette proposition a été faite M. Yves Leterme, Premier ministre belge démissionnaire. Selon une tribune 30 ( * ) publiée dans le journal Le Monde , « l'AED serait une institution de l'UE chargée d'émettre et de gérer la dette gouvernementale de la zone euro, sous l'autorité des ministres des finances de l'Eurogroupe et de la Banque centrale européenne (BCE). (...) Les nouvelles émissions bénéficieraient d'un taux d'intérêt uniforme. A mesure que l'ancienne dette évoluera et sera remplacée par de nouveaux titres, la dette du Gouvernement de la zone euro prendrait la forme d'une dette unifiée, ce qui sous-entend que chaque Etat membre garantirait de manière implicite la dette de tous les autres ». Comme l'AED ne prêterait et n'emprunterait qu'à hauteur du déficit approuvé par le Conseil, les Etats seraient réellement incités à se conformer à leurs programmes de stabilité 31 ( * ) .
Par ailleurs, selon M. Leterme, les taux d'intérêt de la zone euro s'en trouveraient réduits, y compris pour les « grands » Etats membres. On peut cependant douter de ce dernier point, en particulier si l'AED était compétente pour l'émission de l'ensemble de la dette publique 32 ( * ) .
* 26 Stéphane Cossé (ancien senior economist au Fonds monétaire international et maître de conférences à l'IEP de Paris), « Créons un Fonds monétaire européen ! », Le Monde, 11 février 2010.
* 27 Centre for European Policy Studies.
* 28 Deutsche Bank.
* 29 Cf. notamment Le Monde, 8 février 2010.
* 30 Yves Leterme, « Pour une agence européenne de la dette », « Le Monde », mars 2010.
* 31 « Si le pays en question devait ne pas respecter son engagement envers le pacte, il devrait assumer la lourde tâche de se tourner lui-même vers le marché financier, où l'attendraient des taux d'intérêt plus élevés du fait de son profil à risque plus élevé découlant de son non-respect du pacte. Cela donnerait lieu à une réelle pénalité pour non-respect du pacte ».
* 32 Les investisseurs institutionnels sont généralement soumis à des règles de diversification en matière d'obligation. Ainsi, selon l'Agence France Trésor, la suppression de la scission de la dette publique française entre dette de l'Etat et dette des organismes de sécurité sociale pourrait conduire à des taux d'intérêt plus élevés.