EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er - Constat des infractions par la commission de protection des droits de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet
La commission mixte paritaire a examiné un amendement présenté par M. Patrick Bloche, député, visant à supprimer les alinéas 3 à 5 de cet article qui concernent le recours aux ordonnances pénales pour le délit de contrefaçon commis au moyen d'un service de communication au public en ligne.
La commission mixte paritaire a rejeté l'amendement et adopté l'article 1 er dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 1er ter - Information des abonnés sur les sanctions encourues
La commission mixte paritaire a adopté l'article 1 er ter dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 1er quater - Effacement des données à caractère personnel relatives à l'abonné des fichiers de la Hadopi à l'issue de la période de suspension
La commission mixte paritaire a adopté l'article 1 er quater dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 1er quinquies - Finalités du traitement automatisé mis en oeuvre par la Hadopi
La commission mixte paritaire a adopté l'article 1 er quinquies dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 2 - Juge unique et ordonnances pénales en matière de délits de contrefaçon
La commission mixte paritaire a adopté l'article 2 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 3 - Compétence du juge en matière de suspension de l'accès à Internet
La commission mixte paritaire a examiné un premier amendement présenté par M. Patrick Bloche, député, tendant à prévoir qu'aucune décision de suspension ne pourra être prononcée si elle provoque une dégradation du service de téléphonie ou de télévision.
A l'issue de la présentation de son amendement par M. Patrick Bloche, député, M. Ivan Renar, sénateur, a jugé celui-ci pertinent, compte tenu notamment de la nécessité d'assurer l'égalité de tous les élèves dans l'accès à l'enseignement à distance, prévu en cas de pandémie de la grippe H1N1.
Mme Aurélie Filippetti, députée, a partagé ce point de vue et ajouté que l'ensemble des Français pourraient être concernés, d'autant plus que le Gouvernement les incite à consulter Internet pour s'informer sur cette pandémie.
M. Serge Lagauche, sénateur, a cependant fait valoir que la pandémie aura probablement touché à sa fin avant que le dispositif prévu soit mis en place...
M. Jean-Louis Gagnaire, député, a indiqué que dans les « zones blanches » , seuls Internet et le satellite permettaient d'accéder à la télévision.
M. Franck Riester, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, lui a rappelé qu'aucune suspension d'Internet ne pourra être décidée si elle entrave l'accès à la télévision ou au téléphone et qu'il appartiendrait au juge, en application de l'article 3 ter A, de prendre en compte les circonstances et la gravité de l'infraction ainsi que la personnalité de son auteur, notamment son activité professionnelle ou sociale, ainsi que sa situation socio-économique.
Répondant à M. David Assouline, sénateur, qui s'interrogeait sur l'application des sanctions dans les zones non dégroupées, M. Franck Riester, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a précisé que la suspension de l'accès à Internet dans ces zones sera possible puisque les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) sont tenus de réaliser les investissements nécessaires à l'adaptation des infrastructures. Par ailleurs, d'autres types de sanctions, telle que l'amende, s'appliquent.
M. David Assouline, sénateur, a regretté que les sommes investies dans les infrastructures ne soient pas consacrées au financement de la création.
M. Christian Paul, député, a partagé ce point de vue et regretté ces différences de traitement entre diverses zones du territoire.
M. Jacques Legendre, sénateur, président, a tenu à rappeler que la première cause de ces dépenses tenait au téléchargement illégal que l'on se doit de combattre.
M. Michel Thiollière, sénateur, rapporteur pour le Sénat, a déclaré partager les arguments développés par le rapporteur pour l'Assemblée nationale. Il a rappelé qu'il appartiendrait au juge d'apprécier les cas qui lui seront soumis.
La commission mixte paritaire a rejeté l'amendement.
Puis elle a examiné un deuxième amendement présenté par M. Patrick Bloche, député, tendant à prévoir que les abonnés dont l'accès à Internet aura été suspendu seraient dégagés de l'obligation de verser le prix de leur abonnement au fournisseur du service et pourront résilier sans frais leur abonnement.
M. Patrick Bloche, député, a rappelé que l'Assemblée nationale n'avait pas souhaité adopter cette « double peine » en première lecture. Il a estimé qu'il y aurait pourtant là une source d'enrichissement sans cause pour les FAI et indiqué que son groupe saisirait le Conseil constitutionnel notamment sur ce point.
M. Michel Thiollière, sénateur, rapporteur pour le Sénat, a relevé qu'il convenait plutôt de parler de « double peine » pour les auteurs et artistes, qui subissent les conséquences à la fois du piratage et de la crise.
Il a rappelé que si un tel amendement était adopté, les FAI qui ne sont pas responsables des fautes commises par leurs abonnés se retourneraient contre l'Etat. On arriverait alors au paradoxe suivant : les contribuables devraient payer en lieu et place des abonnés contrevenants, ce qui ne serait pas acceptable.
Mme Aurélie Filippetti et M. Jean-Louis Gagnaire, députés, ont relevé que le rapporteur pour l'Assemblée nationale avait initialement soutenu une autre position sur ce point.
M. David Assouline, sénateur, a regretté que les sommes correspondant aux abonnements suspendus ne viennent pas plutôt abonder un fonds pour la création.
M. Franck Riester, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a rappelé que la disposition ainsi incriminée avait été votée en première lecture par le Sénat, y compris par les sénateurs socialistes, à l'occasion de l'examen du texte dit « Hadopi I », puis votée par la commission mixte paritaire à l'unanimité des sénateurs. Par ailleurs, il a insisté sur la nécessité de maintenir le principe de l'individualisation des délits et des peines, ce qui excluait de faire ainsi porter la responsabilité sur les FAI plutôt que sur les abonnés concernés. Enfin, il a souligné qu'un contrat civil -celui liant l'abonné aux FAI- ne pouvait pas être mis en cause par une sanction pénale.
Puis après avoir rejeté l'amendement, la commission mixte paritaire a examiné un troisième amendement présenté par M. Patrick Bloche, député, tendant à faire passer de quinze jours à deux mois le délai accordé aux FAI pour mettre en oeuvre la suspension de l'accès à Internet, délai retenu par les deux assemblées à l'occasion du vote du texte dit « Hadopi I ».
M. Franck Riester, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a indiqué que, dans ce précédent texte, un tel délai s'avérait nécessaire dans la mesure où la procédure était administrative ; il fallait donc prévoir un délai de recours devant le juge. En revanche, tel n'est plus le cas dans le présent texte, le droit pénal prévoyant déjà que la décision de justice n'est exécutoire qu'à l'issue du délai de recours, la mise en oeuvre de la décision par le FAI intervenant seulement à cette issue.
La commission mixte paritaire a rejeté l'amendement et adopté l'article 3 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 3 bis - Sanction contraventionnelle en cas de négligence caractérisée
La commission mixte paritaire a examiné un premier amendement présenté par M. Patrick Bloche, député, tendant à prévoir qu'aucune sanction ne pourrait être prise à l'égard du titulaire de l'accès à Internet si l'infraction est le fait d'une personne ayant frauduleusement utilisé l'accès au service de communication du public en ligne.
M. Patrick Bloche, député, a rappelé qu'une telle clause d'exonération était prévue dans la loi « Hadopi I » avant la censure du Conseil constitutionnel.
Outre que l'abonné est responsable de son accès à Internet, M. Franck Riester, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a estimé qu'une telle clause n'était plus nécessaire, la négligence caractérisée ayant été clairement précisée.
M. Michel Thiollière, sénateur, rapporteur pour le Sénat, a relevé, en outre, que les circonstances étaient différentes, compte tenu de l'intervention du juge désormais prévue.
La commission mixte paritaire a rejeté l'amendement, puis elle a examiné un second amendement présenté par M. Patrick Bloche, député, tendant à exonérer les personnes morales de toute responsabilité pénale en cas d'infraction à la législation en matière de droit d'auteur commise à partir de leur adresse IP.
M. Patrick Bloche, député , a souhaité que les personnes morales (collectivités territoriales, universités, entreprises...) ne se voient pas imposer une obligation de surveillance de leur accès à Internet, les conséquences de l'application de la loi pour ce qui les concerne pouvant être fâcheuses.
M. Jean-Louis Gagnaire, député , a insisté sur les « effets dramatiques » du texte pour les entreprises et pour les collectivités locales, lesquelles pourraient être conduites à renoncer par prudence à développer des espaces numériques ouverts.
M. David Assouline, sénateur , a estimé que le texte ne serait pas applicable aux personnes morales, ce qui le discréditerait.
M. Jacques Legendre, sénateur, président , a souligné que la sécurisation des équipements se généralisera. Il a insisté sur le fait que tout législateur vote les lois qui lui semblent les plus pertinentes et dans l'idée qu'elles seront appliquées.
M. Franck Riester, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a relevé que, face à un défi technologique et de société, il convenait de concilier les droits en présence, sans se laisser « dicter la loi » par les technologies. Puis, il a rappelé que le juge pouvait prononcer des sanctions alternatives à la suspension de l'accès à Internet en cas d'usage professionnel de ce dernier. Enfin, il a insisté sur la nécessité de ne pas se laisser emporter par la démagogie ambiante, alors que la question de la sécurisation des accès à Internet est un sujet majeur, qui pose aussi des problèmes d'espionnage industriel et de protection de la vie privée.
Mme Aurélie Filippetti, députée, a fait remarquer que les dispositions du projet de loi ne devaient pas contribuer à accentuer la pression exercée par les entreprises pour renforcer un contrôle individualisé des salariés. Elle a précisé ainsi que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) avait déjà adressé des mises en garde sur d'éventuelles dérives dans ce domaine des entreprises envers leurs salariés. Elle a craint enfin que le dispositif adopté encourage l'immixtion des entreprises dans la vie privée des salariés.
M. Michel Thiollière, sénateur, rapporteur pour le Sénat , a rappelé qu'il revenait aux parlementaires de trouver des solutions aux problèmes posés par le développement des technologies. Arguant de la nécessité de faire confiance aux entreprises et à ses concitoyens, il s'est déclaré convaincu que la société française pouvait évoluer vers une réelle prise de conscience en faveur de la préservation de la diversité culturelle, à l'instar de ce qui s'est passé dans d'autres domaines, comme la sécurité routière et la santé publique.
Il a fait observer que les entreprises et les collectivités locales avaient mis en place des chartes des usages d'Internet, qui définissent les règles relatives à l'usage des technologies de l'information et de la communication en leur sein.
Il a précisé également que les dispositions du projet de loi donnent aux juges la faculté d'apprécier le caractère opportun des éventuelles sanctions, tout en rappelant l'importance pour l'abonné de sécuriser son accès à Internet.
Pour conclure, il a souhaité que se dessine pour l'ensemble des citoyens une société ouverte aux nouvelles technologies mais aussi respectueuse d'un certain nombre de droits fondamentaux.
M. Patrick Bloche, député, a exprimé sa crainte que les dispositions votées ne puissent être applicables ou ne sanctionnent des non-coupables. Il a souligné que la sanction pour négligence caractérisée ne s'accompagnant pas d'une obligation légale, pour tout abonné, de sécuriser son accès à Internet, la loi se révélerait peu compréhensible pour les Français et donc difficilement applicable.
La commission mixte paritaire a rejeté l'amendement, puis elle a adopté l'article 3 bis dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 3 ter A (nouveau) - Modalités d'application du principe de personnalisation et de proportionnalité des peines
M. Patrick Bloche, député, a présenté un amendement tendant à permettre d'exonérer de la peine complémentaire les abonnés qui auraient téléchargé illégalement des oeuvres ne faisant plus l'objet d'aucune exploitation sur un réseau de télécommunications électroniques depuis une durée manifestement conforme aux usages de la profession. Il a considéré que le juge devait prendre en compte dans le prononcé de la sanction l'offre légale disponible.
Mme Aurélie Filippetti, députée , a cité une déclaration du ministre de la culture et de la communication devant la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale, lors de l'examen des articles du projet de loi qui, s'exprimant sur les oeuvres « disparues », indiquait qu'« il est vrai que l'on est parfois bien content de pouvoir compter sur des enregistrements pirates de l'époque, ceux de la Callas, par exemple... ».
La commission mixte paritaire a rejeté l'amendement puis elle a adopté l'article 3 ter A dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 4 - Sanctions en cas de souscription d'un nouvel abonnement pendant la période de suspension
La commission mixte paritaire a adopté l'article 4 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 4 bis - Renumérotation du code de la propriété intellectuelle suite à la décision n° 2009-580 DC du Conseil constitutionnel
La commission mixte paritaire a adopté l'article 4 bis dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
*
* *
La commission mixte paritaire a ensuite adopté l'ensemble du texte ainsi élaboré et figurant ci-après.