CHAPITRE II - MODIFICATIONS DU CODE DE L'URBANISME
Article 4 (Article L. 111-6-2 [nouveau] du code de l'urbanisme) Inopposabilité des règles d'urbanisme relatives à l'aspect extérieur des bâtiments lorsque la construction utilise des énergies renouvelables
Commentaire : cet article vise à rendre les règles d'urbanisme relatives à l'aspect extérieur des bâtiments inopposables aux demandes d'installation de matériaux renouvelables ou de systèmes individuels de production d'énergie renouvelable, en-dehors des secteurs protégés.
I. Le droit en vigueur
Les permis de construire ou d'aménager, ainsi que les décisions prises sur une déclaration préalable, sont tenues de prendre en compte l'aspect extérieur des bâtiments.
L'article L. 123-1 du code de l'urbanisme dispose ainsi que le règlement d'un plan local d'urbanisme (PLU) « peut déterminer des règles concernant l'aspect extérieur des constructions, leurs dimensions et l'aménagement de leurs abords, afin de contribuer à la qualité architecturale et à l'insertion harmonieuse des constructions dans le milieu environnant » (4° de l'article L. 123-1) et ces normes, comme les autres dispositions contenues dans le règlement d'un PLU, sont opposables à toute personne publique ou privée, pour l'exécution de tous travaux ou constructions (article L. 123-5).
En l'absence de PLU ou de document en tenant lieu, s'applique l'article R. 111-21 du règlement national d'urbanisme, aux termes duquel : « le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ».
En l'état du droit, la prise en compte d'un objectif d'harmonie architecturale dans les décisions d'urbanisme peut donc motiver le refus d'autoriser l'installation de systèmes de production d'énergie renouvelables et de matériaux renouvelables (toitures végétalisées, façades en bois) et constituer un frein au développement des techniques de construction durables.
II. Le dispositif du projet de loi
Le premier alinéa de l'article 4 dispose qu'une décision d'urbanisme ne peut s'opposer à l'installation de systèmes solaires thermiques ou photovoltaïques ou de tout dispositif individuel de production d'énergie renouvelable, à l'utilisation en façade du bois ou de tout autre matériau renouvelable permettant d'éviter des émissions de gaz à effet de serre ni à la pose de toitures végétalisées ou retenant les eaux pluviales. La décision d'urbanisme peut toutefois comporter des prescriptions destinées à assurer la bonne intégration architecturale du projet dans le bâti existant et dans le milieu environnant.
Le deuxième alinéa exclut du champ d'application de la disposition précédente l'ensemble des zones de protection du patrimoine bâti ou non bâti, à savoir :
- les secteurs sauvegardés (régis par les dispositions des articles L. 313-1 et suivants du code de l'urbanisme) ;
- les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (soumises aux articles L. 642-1 et suivants du code du patrimoine) ;
- les périmètres de protection des immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques (L. 621-30-1 du code du patrimoine), et, a fortiori, les immeubles classés ou inscrits eux-mêmes, ainsi que les immeubles adossés aux immeubles classés ;
- les sites classés ou inscrits (en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l'environnement) ;
- le coeur des parcs nationaux (délimités en application de l'article L. 331-2 du même code) ;
- les immeubles protégés en vertu des dispositions du règlement d'un PLU prévues par le 7° de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme (autrement dit, les immeubles situés dans des secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique ou écologique).
Le troisième alinéa offre aux communes la faculté d'étendre le champ d'exclusion de la mesure au-delà des zones de protection précédentes, sur délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'EPCI compétent en matière de PLU, après avis conforme de l'architecte des bâtiments de France. Cette délibération doit être motivée par la protection du patrimoine bâti ou non bâti, des paysages ou des perspectives monumentales et urbaines. Par ailleurs, ce projet de périmètre est mis à la disposition du public en vue de recueillir ses observations pendant une durée d'un mois avant la réunion du conseil municipal ou de l'organe délibérant.
Le quatrième alinéa prévoit qu'à compter de la publication de la loi, toute règle nouvelle interdisant ou limitant l'installation des dispositifs énumérés au premier alinéa à l'intérieur d'un des périmètres visés aux alinéas trois ou quatre, fait l'objet d'une justification particulière.
Le dernier alinéa renvoie à un décret en Conseil d'État la définition des modalités selon lesquelles l'architecte des bâtiments de France rend son avis.
III. La position de votre commission
Votre commission s'associe pleinement à la démarche visant à concilier, d'un côté, la levée des freins urbanistiques à l'installation de dispositifs de production d'énergie renouvelable et, de l'autre, la préservation de l'harmonie du cadre architectural et paysager.
Elle a cependant jugé souhaitable d'apporter, sur proposition de votre rapporteur, deux amendements au dispositif prévu par l'article 4 du projet de loi.
En premier lieu, la nature des dispositifs de production d'énergie concernés a été précisée de manière à inclure tous les dispositifs de production d'énergie renouvelable à usage domestique , que ces dispositifs soient installés sur des maisons individuelles ou des immeubles collectifs, tout en s'assurant, a contrario , qu'étaient bien écartés les dispositifs (de type ferme photovoltaïque) n'ayant pas pour finalité directe une autoconsommation par des particuliers.
Par ailleurs, votre commission a assoupli la procédure permettant aux communes de délimiter des zones où les règles d'urbanisme relatives à l'aspect extérieur des bâtiments demeurent opposables : l'architecte des bâtiments de France n'intervient plus que par un avis simple devant être rendu dans un délai de deux mois. Votre commission a estimé qu'une procédure d'avis conforme ne se justifiait pas, puisque le rôle de l'architecte des bâtiments de France n'est pas, en l'espèce, de contrôler les communes, mais uniquement de les conseiller. Par mesure de coordination, la suppression de l'avis conforme entraîne la suppression du décret en conseil d'Etat prévu au dernier alinéa de l'article 4.
Enfin, votre commission a introduit un délai de six mois avant l'entrée en application de la règle d'inopposabilité des prescriptions relatives à l'aspect extérieur des bâtiments, de manière à laisser le temps aux communes qui le souhaitent d'élaborer des zones de protection supplémentaires.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |